Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 24 juin 2021, n° 18/11450

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 7, 24 juin 2021, n° 18/11450
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/11450
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 16 juillet 2018, N° F17/07091
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 24 JUIN 2021

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/11450 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6RKM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juillet 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F17/07091

APPELANT

Monsieur V W X

[…]

[…]

Représenté par Me Luca DE MARIA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

INTIMEE

Société M N GMBH Société de Droit Etranger agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domicliés en cette qualité à son siège social.

[…]

[…]

Représentée par Me V-claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Mai 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame K L, Présidente de chambre

Madame Marie-K DELTORT, Présidente de chambre

Madame Bérengère DOLBEAU, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame K L, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

—  CONTRADICTOIRE,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame K L, Présidente de chambre, et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :

Selon un contrat de travail à durée indéterminée du 3 mars 2006, M. V W X a été engagé en qualité de directeur d’étude senior par la société M N.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective Syntec.

M. X a été convoqué par courrier du 16 octobre 2014 à un entretien préalable fixé le 24 octobre 2014, assorti d’une mise à pied conservatoire, en vue d’un éventuel licenciement lequel lui a été notifié par courrier du 5 novembre 2014.

Par courrier du 5 janvier 2015, M. X a contesté le bien fondé de son licenciement.

C’est dans ce contexte qu’il a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 16 mars 2015 aux fins d’obtenir la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire .

Par décision en date du 14 avril 2017, le conseil de prud’hommes a ordonné la radiation de l’affaire pour défaut de diligence des parties.

L’affaire a été rétablie à la demande de M. X le 14 août 2017.

Par un jugement en date du 17 juillet 2018, le conseil de prud’hommes a :

— débouté M. X de l’ensemble de ses demandes;

— débouté la société M N de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamné M. X au dépens.

Le 10 octobre 2018, M. X a interjeté appel de ce jugement.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon ses écritures transmises par la voie électronique le 7 avril 2021, M. X demande à la cour d’infirmer le jugement et de nouveau de :

— dire que son licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse;

— déclarer nulle et de nul effet la convention de forfait jours ;

En conséquence,

— condamner la société M N à lui payer les sommes suivantes :

—  225.000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

—  70.000 euros au titre du bonus MBO 2014 et la somme brute de 7.000 euros au titre des congés payés y afférents,

—  14.000 euros au titre des SBO 2012 et 2013 et 1.400 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

—  15.000 euros au titre du SBO 2014 et 1.500 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

—  18.485 euros et 1.848,50 euros au titre des congés payés y afférents au titre de la restitution des retenues sur salaire sur les années 2010, 2011 et 2012

—  125.490 euros au titre des accords FLIP 2012,2013 et 12.500 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

—  1.466.205,00 euros au titre des heures supplémentaires effectuées sur la période de 2010 à 2014 et 146.620,50 euros au titre des congés payés y afférents

—  145.987,20 euros au titre du travail dissimulé ;

— condamner la société M N à lui payer la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

— fixer la moyenne mensuelle brute de ses salaires à la somme de 24.331,20 euros.

Selon des conclusions notifiées par voie électronique le 9 avril 2021, la société M N conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de débouter M. X de l’intégralité de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par voie électronique.

L’instruction a été déclarée close le 14 avril 2021.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la convention de forfait en jours

Pour conclure à la nullité de la convention de forfait en jours, M. X invoque l’absence de conformité aux exigences légales des dispositions de la convention collective Syntec sur la base de laquelle a été conclue la convention de forfait en jours insérée dans son contrat de travail.

L’employeur réplique que M. X ne s’est jamais plaint d’une difficulté concernant sa charge de travail ; que la convention de forfait a été librement négociée ; que sa rémunération a été fixée au regard de l’investissement qu’il pouvait consacrer dans le cadre du forfait jours ; que M. X a accepté celui-ci au regard de l’autonomie et de la rémunération qui lui étaient proposées ; que la cour de cassation impose uniquement aux juridictions de contrôler que l’employeur est bien contraint de veiller à la surcharge de travail et d’y remédier.

Le contrat de travail du 17 février 2006 prévoit en son article 3 une durée de travail fixée à un forfait annuel de 218 jours compte tenu de l’autonomie, de la liberté et de l’indépendance dont dispose

M. X dans l’organisation et la gestion de son temps de travail et se réfère à la convention collective Syntec.

L’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail pris en application de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 n’est pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et donc à assurer la protection et la sécurité du salariéce dont il se déduit que la convention de forfait en jours insérée dans le contrat de travail du 3 mars 2006 de M. X est nulle.

M. X est donc bien fondé à prétendre à l’indemnisation d’heures supplémentaires effectuées mais non payées selon le régime probatoire fixé en la matière.

Sur les heures supplémentaires

Sur la prescription

La société M N invoque la prescription des demandes pour la période antérieure au 16 mars 2012.

L’article L. 3245-1 du code du travail dispose que l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l’exercer, que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

L’article 21-V de la loi du 14 juin 2013 précise que les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s’appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Il ajoute que lorsqu’une action a été introduite avant la promulgation de la présente loi, l’action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne.

L’action en question a été introduite par M. X le 16 mars 2015, soit postérieurement à la promulgation de la loi du 14 juin 2013. Les dispositions de l’article L’article 21-V de la loi du 14 juin 2013 sont applicables dans la mesure où si l’action n’a pas été engagée antérieurement à la loi du 14 juin 2013, la prescription de cette action était en cours à la date de promulgation de la présente loi. La durée totale ne peut pas excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit cinq ans. En conséquence, M. X pouvait formuler des demandes à compter du 16 mars 2010.

Ses prétentions sont donc prescrites sur la période antérieure au 16 mars 2010.

Sur le bien fondé

M. X réclame la somme de 1.466.205€ au titre des heures supplémentaires réalisées sur la période 2010 à 2014.

Par application de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter à l’appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies, afin notamment de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle du nombre des heures de travail effectuées d’y répondre utilement en fournissant ses propres éléments.

En l’espèce, M. X produit notamment aux débats :

— la liste des 42.000 mails envoyés sur la période 2010/2014,

— la liste des appels passés et reçus entre le 21 septembre 2012 et le 25 octobre 2014,

— la liste des sms reçus du 2 octobre 2011 au 16 octobre 2014.

— un décompte sur la période comprise entre le mois janvier 2010 et le 6 octobre 2014 laissant apparaître pour chaque semaine le nombre d’heures travaillées et de nombreuses heures supplémentaires réalisées.

Le salarié présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement.

En premier lieu, au vu des développements précédents et des règles de preuve applicables, l’employeur soutient, de façon inopérante, que le salarié ne rapporte pas la preuve de 'la réalité de ses prétendues heures de travail', qu’il ne justifie pas que la société lui aurait demandé d’accomplir des heures supplémentaires et de la nécessité de les accomplir et que M. X disposait d’une très large autonomie dans l’organisation de son emploi du temps.

En second lieu, force est de constater que si l’employeur critique à juste titre certains des éléments avancés par le salarié, et leur caractère probatoire, en particulier la liste de 42.000 mails envoyés sur la période 2010/2014 à laquelle n’est jointe aucun des mails correspondants, il ne produit aucun élément de nature à établir les horaires qui, selon lui, auraient été réellement exécutés par M. X, ni ne justifie de quelle manière il mesurait le temps de travail de ce dernier.

Il produit toutefois les agendas outllook établis par M. X. Ceux-ci révèlent l’absence systématique de correspondance entre le temps de travail journalier comptabilisé dans le décompte précité et le temps de travail journalier figurant sur son agenda, ce qui vient tempérer l’amplitude de travail alléguée puisqu’il ressort de ces documents que son amplitude horaire journalière était variable, que s’il a pu accomplir des heures supplémentaires, certaines semaines étaient d’une durée de travail inférieure à la durée légale.

Il résulte de l’ensemble des éléments soumis à la cour par les parties que M. X a bien exécuté sur la période non prescrite des heures supplémentaires, mais dans une proportion bien moindre, toutefois, que ce qu’il indique. La créance en résultant s’élève à la somme totale de 25.450 euros bruts, outre 2.545 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Sur le travail dissimulé

M. X réclame la somme de 145.987€ 20 au titre du travail dissimulé.

Il ressort de l’article L.8221-5 du Code du Travail que la dissimulation d’emploi salarié est constituée lorsque l’employeur n’a pas effectué intentionnellement l’une au moins des formalités suivantes : la remise d’un bulletin de salaire à chacun de ses salariés, l’accomplissement de la déclaration nominative préalable à l’embauche ou la mention sur le bulletin de paie d’un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Toutefois, le seul fait de ne pas avoir déclaré l’intégralité des heures supplémentaires réalisées ne suffit pas, en soi, à établir le caractère intentionnel d’une dissimulation d’emploi salarié.

En l’espèce, rien ne permet d’établir que l’employeur a effectivement cherché à dissimuler des heures supplémentaires dont l’obligation au paiement ne résulte que de la nullité de la convention de forfait, étant au surplus relevé que le salarié n’a jamais réclamé le paiement desdites heures.

La demande d’indemnité pour travail dissimulé sera donc rejetée. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur les retenues sur salaire

M. X soutient que la société M N a opéré sur ses bulletins de salaire les mois de juillet 2010, juillet 2011 et juillet 2012 des retenues injustifiées d’un montant respectif de 14.455€ bruts, 1600€ bruts et 2430€ bruts, soit une somme totale de 18.485€.

L’employeur invoque d’une part la prescription des demandes portant sur des éléments de salaire antérieurs au 16 mars 2012 et d’autre part fait valoir que les demandes ne sont pas fondées.

Au regard des développements qui précèdent, l’employeur ne peut valablement invoquer la prescription des demandes portant sur des éléments de salaires antérieurs au 16 mars 2012, la prescription étant acquise pour les demandes antérieures au 16 mars 2010.

Sur la retenue de 14.455€ du mois de juillet 2010, l’employeur sur lequel repose la charge de la preuve du paiement du salaire, se contente d’invoquer une erreur sur le bulletin de paie du mois de juillet 2010 produit par le salarié, sur lequel apparaît une retenue de ce montant au titre d’une 'régularisation COR 2009", en produisant un bulletin de salaire du même mois sur lequel cette somme apparaît en crédit, sans produire des éléments comptables justifiant de l’erreur invoquée et du versement de cette somme au salarié alors qu’il ressort de l’extrait du compte bancaire de ce dernier qu’il a perçu en juillet 2010, la somme de 27.101.44€ correspondant à sa rémunération mensuelle après déduction de la retenue précitée. La demande en paiement doit donc être accueillie à hauteur du montant réclamé.

Sur la retenue de 1600€ en juillet 2011, le salarié produit son bulletin de salaire du mois de juillet 2011 sur lequel apparaît une retenue de ce montant au titre du 'bonus Cor'. L’employeur ne justifiant pas du bien fondé de cette retenue, la demande doit être accueillie à hauteur du montant réclamé.

S’agissant de la retenue de 2430€ figurant sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2012, l’employeur ne produisant aucune pièce démontrant que cette somme correspondrait à un trop perçu de M. X, doit être condamné au remboursement de cette somme.

Au total, l’employeur doit être condamné au paiement de la somme de 18.485€ bruts au titre des retenues injustifiées, outre les congés payés y afférents.

Sur le bonus MBO 2014

M. X réclame à son employeur la somme de 70.000€ au titre du paiement du bonus MBO 2014, faisant valoir qu’il a dépassé en 2014 ses objectifs annuels ; qu’aucune évaluation n’a été effectuée contrairement aux années précédentes ; que nonobstant son licenciement notifié le 5 novembre 2014, il est bien fondé à réclamer le bonus contractuellement prévu pour lequel il a perçu des avances d’un montant de 25.000€, calculé sur la base du bonus 2013 d’un montant de 93.000€.

L’employeur réplique qu’il s’agit d’un bonus discrétionnaire ; que le salarié n’a pas rempli les critères liés au 'people développement’ de sorte que sa demande doit être rejetée.

Le contrat de travail prévoyait en son article 4 'rémunération' que M. X percevra une rémunération annuelle de 135.000€ bruts et qu’il pourra également bénéficier d’un bonus lié aux résultats de l’entreprise et à sa contribution individuelle ; que ce bonus est fixé de 0 à 40% de sa rémunération annuelle de base et que les critères relatifs à ce bonus feront l’objet d’un avenant au contrat.

Le dernier avenant au contrat de travail en date du 2 janvier 2012 précise que M. X pourra « 6.2 .. bénéficier d’un Bonus discrétionnaire pouvant aller de 0 à 300% d’un montant de base de EUR 60.000 (soixante mille Euros) lié aux résultats de l’Entreprise et à sa contribution individuelle et calculé selon les critères définis en annexe. Ce Bonus sera versé au plus tard à l’issue de l’assemblée générale des Partners qui se tient en Juillet de l’année N+1…..

6.5 Pendant l’Année de Travail considérée pour l’acquisition du droit au paiement des Bonus et le calcul de leurs montants, la Succursale Française vous accorde une avance sur Bonus (ci-après l'« Avance sur Bonus »), d’un montant annuel de EUR 25.000 bruts (vingt-cinq mille Euros) payable en 12 versements mensuels égaux à la fin de mois (« Avances Mensuelles sur Bonus »), concomitamment au paiement de votre salaire de base mensuel précité.

Le montant de l’Avance sur Bonus sera compensé avec le montant des Bonus qui vous seront effectivement dus en application des règles qui précèdent. Si la Succursale Française constate, en cours d’année, que le montant total des Bonus auxquels vous aurez effectivement droit n’atteindra vraisemblablement pas le montant de EUR 25.000 bruts, la Succursale Française sera en droit de réduire le montant des Avances Mensuelles sur Bonus ou de supprimer leur versement. Si, après établissement des comptes annuels, le montant total des Bonus auquel vous avez effectivement droit se révèle être inférieur au montant de l’Avance sur Bonus qui vous a été versée pendant l’Année de Travail considérée, vous serez tenu de rembourser la somme excédentaire. Cependant, cette réduction, suppression ou demande de remboursement sera soumise à une décision exceptionnelle applicable à tous les Partners du Groupe au niveau mondial et ne pourra en aucun cas être mise en application uniquement dans la succursale française. Elle devra en outre vous être notifiée avec un délai d’anticipation raisonnable ».

Cet avenant prévoit donc une rémunération variable appelée 'bonus discrétionnaire' fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur, à savoir les résultats de l’entreprise et la contribution annuelle du salarié.

Il est établi que des objectifs annuels ont été fixés chaque année à M. X ; que sur cette base ainsi que celle des résultats de l’entreprise, M. X a perçu chaque année depuis la conclusion du contrat un bonus ; qu’en 2013 celui-ci s’élevait à la somme de 92.400€ ; qu’en 2014, aucun objectif ne lui a été fixé par l’employeur ; que M. X a perçu néanmoins des avances sur bonus à hauteur d’un montant de 25.000€.

Dans ces circonstances, pour s’opposer à la demande, l’employeur ne peut valablement prétendre que les critères liés au 'people developpement’ n’ont pas été remplis par M. X ou qu’il ne 'craint pas d’affirmer qu’il a dépassé les objectifs annuels qui lui ont été fixés', sans produire le document fixant les objectifs de M. X pour l’année 2014 ou des éléments concernant les résultats de l’entreprise pouvant justifier une réduction de son bonus 2014 à la somme de 25.000€.

Il y a donc lieu de lui allouer la somme de 67.400€ correspondant à la différence entre le bonus 2013 d’un montant de 92.400€ et les 25.000€ d’avances déjà perçues, outre les congés payés y afférents.

Sur les bonus SBO

M. X réclame la somme de 29.000€ au titre des bonus SBO 2012, 2013 et 2014 faisant valoir qu’il n’a perçu qu’une partie du bonus SBO en 2012 et 2013 fixé aux sommes de 12.000€ et de 15.000€ et qu’il n’a perçu aucun bonus en 2014 fixé à la somme de 15.000€.

L’employeur réplique que M. X a été rempli de ses droits, qu’il a perçu les sommes de 9000€ au titre du bonus 2012 et de 15.000€ au titre du bonus 2013 ; qu’il n’est pas fondé à réclamer un bonus pour l’année 2014 qui devait lui être réglé postérieurement à sa sortie des effectifs.

L’avenant au contrat de travail du 2 janvier 2012 prévoit que M. X pourra ' également bénéficier de Super Bonus (SBO) de rétention payables sur 3 ans à raison d’un tiers par année en juillet à l’issue de l’assemblée générale des Partners sous condition de présence dans la société, de ne pas être démissionnaire et de maintien de la performance minimum demandée à votre niveau de séniorité selon les critères définis en annexe (cf. 6.1). Le déclenchement de ce bonus est lié à l’atteinte d’un niveau de profitabilité cumulé minimum (avant impôts et transfer pricing) par les bureaux de Paris, Bruxelles et Casablanca. Tout profit au-delà de ce niveau minimum alimentera une enveloppe de bonus qui sera distribuée à l’ensemble des Partners. En fonction de cette enveloppe, vous pourrez bénéficier d’un premier SBO d’un montant maximum de EUR 50.000 (cinquante mille Euros). Après distribution de ce premier SBO à l’ensemble des Partners et si l’enveloppe le permet, un deuxième SBO d’un montant maximum de EUR 50.000 (cinquante mille Euros) pourra être attribué en cas de surperformance »

Sur l’année 2012

En l’espèce il est établi que par courrier du 25 juin 2013 l’employeur a informé le salarié que suite aux résultats positifs de l’entreprise, il était en mesure de lui confirmer un bonus de rétention (SBO) d’un montant de 12.000€ versé un tiers en juillet 2013, un tiers en juillet 2014 et un tiers en juillet 2015, sous réserve de sa présence dans l’entreprise, de ne pas être démissionnaire et du maintien du minimum de performance requis à son niveau de séniorité ; qu’il a perçu au total la somme de 6000€ au titre des deux premiers tiers versés en juillet 2013 et juillet 2014.

Au regard des dispositions contractuelles qui subordonnent le versement de ce bonus à la présence du salarié dans l’entreprise, ce dernier n’est pas fondé à réclamer le dernier tiers qui devait être versé en juillet 2015 puisqu’il ne faisait plus partie des effectifs de l’entreprise depuis le 5 février 2015, date de la fin du préavis.

Toutefois compte tenu de l’engagement unilatéral de l’employeur formalisé dans son courrier du 25 juin 2013 portant sur un bonus de 12.000€, ce dernier reste devoir à M. X au titre du solde restant dû sur les deux tiers des années 2013 et 2014 une somme de 2000€, outre les congés payés y afférents, sans qu’il puisse valablement prétendre à une erreur de chiffre non démontrée.

Sur l’année 2013

Il est établi que par courrier du 2 juin 2014 l’employeur a informé M. X que suite aux résultats positifs de l’année 2013, son bonus de rétention (SBO) d’un montant de 15.000€ sera versé conformément au contrat de travail, de la façon suivantes, soit un tiers en juillet 2014, un tiers en juillet 2015 et le dernier tiers en juillet 2016, sous réserve de sa présence dans l’entreprise, de ne pas être démissionnaire et du maintien du minimum de performance requis à son niveau de séniorité ; qu’il a perçu en juillet 2014 la somme de 5000€ au titre du 1er tiers du SBO 2013.

Au regard des dispositions contractuelles qui subordonnent le versement de ce bonus à la présence du salarié dans l’entreprise, ce dernier n’est pas fondé à réclamer les deux autres tiers de juillet 2015 et juillet 2016 puisqu’il ne faisait plus partie des effectifs de l’entreprise depuis le 5 février 2015, date de la fin du préavis.

Sur l’année 2014

Cette demande au titre du réglement du SBO 2014 n’apparaît pas fondée au regard de la condition de présence posée par la contrat de travail et des modalités de réglement de ce bonus, à savoir le versement du premier tiers en juillet 2015. Celle-ci doit en conséquence être rejetée.

Sur le bonus FLIP (french long term incentive plan)

M. X réclame un bonus de rétention FLIP d’un montant de 125.490€ au titre de l’exercice 2012/2013 sur le fondement d’un accord.

L’employeur réplique que ce bonus a été supprimé en 2012.

Il est établi que M. X a perçu de 2008 à 2011 sur le fondement d’une accord collectif visant à rémunérer la performance pérenne des bureaux de Paris et Bruxelles, d’une durée de 4 ans non produit aux débats, un bonus dit de rétention FLIP d’un montant de 52.000€ pour l’année 2008, de 68.900€ pour l’année 2009, de 100.720€ pour l’année 2010 ; qu’un nouvel accord a été négocié le 12 décembre 2009 pour la période 2010/2013 ; que M. X a été informé de l’existence de ce renouvellement par courrier du 9 juillet 2010.

Il est également établi qu’un nouveau système de rémunération a été mis en place en 2011 se substituant au système de rémunération existant ; que l’avenant au contrat de travail du 2 janvier 2012 ne fait pas état de ce bonus FLIP.

Dans ces circonstances M. X ne peut sérieusement soutenir que la suppression du bonus FLIP devait recueillir son accord alors qu’en signant l’avenant précité, il a accepté la suppression de cet élément de sa rémunération.

Il doit en conséquence être débouté de cette demande.

Sur la rupture du contrat

Aux termes de l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

La lettre de rupture est ainsi rédigée :

« ...Comme vous le savez parfaitement nous avons rencontré des difficultés pour le moins inhabituelles avec vous ces derniers mois.

Pour l’essentiel, certains des collaborateurs en notre sein étaient venus à se plaindre du comportement que vous aviez à leur égard, à tel point que nous avons dû nous résoudre à organiser plusieurs rendez-vous avec vous pour vous faire de ce qu’ils considéraient comme inacceptable de votre part.

Au cours d’une réunion du 6 mars 2014, nous vous avons notamment instamment demandé de modifier radicalement votre comportement et de respecter les valeurs qui sont les nôtres comme les règles élémentaires que se doit de respecter toute personne dans un cadre professionnel.

Sur votre engagement nous avions renoncé à initier une mesure disciplinaire à votre encontre.

Il n’est pas non plus inutile de rappeler que nous avions décidé d’être très attentifs avec vous puisqu’au-delà de nos nombreux échanges faisant suite à cette ultime mise en garde, nous avions décidé de tout mettre en 'uvre, avec vous, pour que cette situation ne se reproduise plus : un coaching vous était assuré par le cabinet O PARTNERS et nous avons dû changer votre assistante de l’époque en vous allouant une nouvelle au mois de mars dernier en la personne de

Mademoiselle G-AB AC.

Alors que nous comptions sur le respect de vos engagements, nous avons été particulièrement surpris que de nouvelles déviances nous soient signalées.

De façon plus spécifique, plusieurs personnes ont eu à se plaindre de votre attitude à leur encontre parmi lesquelles votre responsable hiérarchique, M. P H '.ainsi que vos pairs, notamment Mme G R.

Ces plaintes viennent s’ajouter à celles déjà émises en mars dernier par votre ancienne assistante, qui n’a plus souhaité collaborer avec vous, ainsi que celles d’une chargée de recherches.

A l’évidence, malgré nos efforts vous n’avez pas jugé utile de tenir compte de notre mise en garde.

Alors même que votre performance quantitative semble progresser, après plusieurs années difficiles, votre comportement est en totale contradiction avec les valeurs et les principes élémentaires que doit respecter tout collaborateur au sein d’une entreprise.

Pire encore, vous avez récemment franchi un cap inacceptable dans le comportement adopté allant gravement à l’encontre des intérêts du cabinet.

On note entre autres :

. de nombreuses tentatives d’intrusion chez le client sans concertation avec les équipes en charge…

. des envois de données modifiées..

.des taux de contrat cadre modifiés sans la validation préalable du responsable de la gestion du compte lagardère…

. une proposition de mise à disposition de toute une équipe auprès d’un client et pour plusieurs mois à titre gracieux sans la validation de votre responsable hiérarchique en contradiction avec nos pratiques habituelles et conduisant à une nette dépréciation de nos équipes…

Votre manque de collaboration manifeste et volontaire vis-à-vis des équipes et de vos pairs ne peut que nuire dans des relations professionnelles où la richesse est collective et les efforts, comme les succès, doivent être partagés.

Vous passez votre temps à dissimuler des informations, sans évoquer les informations que vous vous permettez d’envoyer modifiées.

En dépit de notre patience et des moyens mis en 'uvre, la poursuite de notre relation contractuelle s’avère compromise et de votre seul fait.

Il n’est plus possible d’avoir une collaboration loyale, sereine, fondement de notre succès. (..) »

La lettre de rupture vise donc :

- plusieurs rendez vous et une réunion du 6 mars 2014 organisés suite à des plaintes de certains des collaborateurs sur son

comportement et un coaching assuré par le cabinet O Partners pour éviter que la situation ne se reproduise,

— des plaintes de plusieurs personnes concernant son attitude parmi lesquelles son responsable hiérarchique, M. Y ainsi que ses pairs, notamment Mme G R venant s’ajouter à celles déjà émises en mars dernier par son ancienne assistante, qui n’a plus souhaité collaborer avec lui, ainsi que celle d’une chargée de recherches.

— un comportement allant à l’encontre des intérêts de l’entreprise se manifestant par un manque de collaboration manifeste vis à vis des équipes et de ses pairs et une dissimulation des informations.

Aucun élément n’est communiqué par l’employeur concernant :

— les mises en garde adressées à M. X sur son attitude à l’égard de certains collaborateurs,

— les rendez vous et la réunion du 6 mars 2014 au cours desquels il lui aurait été demandé de modifier son comportement.

— le coaching organisé à son bénéfice pour éviter ' que la situation ne se reproduise'. La pièce n° 36, à savoir la facture de TalismanPartners en date du 17 juin 2014 porte sur une prestation d’accompagnement en renforcement de la dimension politique et ne permet donc de tirer aucune conséquence sur la réalité d’un coaching concernant les prétendus problèmes relationnels du salarié.

S’agissant des plaintes de plusieurs personnes, aucune réclamation d’une chargée de recherche n’est produite aux débats. Si la société M N justifie par la production d’échanges de mails du mois d’octobre 2013 et du mois de février 2014 entre M. Y et Mme Z, assistante, que celle-ci s’est plainte à M. Y notamment des accusations portées par M. X à son encontre concernant un manque de loyauté, il ressort également d’un courrier électronique de celle-ci adressée à M. X et à M. Y le 16 février 2014 que Mme Z s’est plainte plus globalement de sa 'situation extrêmement compliquée' étant placée sous l’autorité hiérarchique de plusieurs partners dont M. Y et M. X, soulignant ' quoi que je fasse je commets une erreur selon l’un ou l’autre de mes supérieurs hiérarchique.' La plainte de Mme Z du mois de mars 2014 visée par la lettre de rupture concernant M. X n’est pas produite aux débats, ni aucune attestation de cette dernière en ce sens.

S’agissant 'des plaintes de son supérieur hiérarchique M. Y', c’est à juste titre que M. X conteste tout lien de subordination à l’égard de ce dernier. Il est en effet établi que le contrat de travail signé par le 'managing partner', M. A, précisait que M. X rendra compte de son activité professionnelle directement auprès du 'managing partner' de la succursale française et du comité exécutif de l’entreprise ; que ce poste a été occupé successivement par M. A, signataire du contrat initial et d’un avenant du 7 juillet 2008 puis par M. B, signataire de l’avenant du 2 janvier 2012 précité. Dans une attestation du 10 octobre 2018, M. C, associé de l’entreprise de janvier 2004 à juillet 2012 témoigne que le 'managing partner' a toujours été le responsable hiérarchique de l’ensemble des associés du bureau et en particulier de M. X lequel depuis sa nomination en qualité d’associé en juillet 2008, a été successivement sous l’autorité hiérarchique de M. A, de M. D et de M. B. Dans un courrier électronique en date du 7 juillet 2008, la directrice des ressources humaines de l’entreprise a écrit à M. X en ces termes : ' ton avenant Partner est signé par S A. Tu peux passer les prendre demain chez moi. Tous les partners étant sous la seule et unique responsabilité de S il te propose un point une fois par moi pour débuter'. M. X justifie en outre que ses évaluations 2011, 2012 et 2013 ont été effectuées par M. B. Il résulte par ailleurs de ce qui précède que M. X partageait avec M. Y et deux autres partners, dont Mme E, la même assistante, Mme Z, laquelle répondait aux instructions de 4 supérieurs hiérarchiques. Enfin, il y a lieu de relever qu’aucune plainte de M. Y à l’employeur n’est produite aux débats mais uniquement des échanges de mails qui traduisent une mésentente entre ces deux salariés.

S’agissant du comportement de M. X 'allant à l’encontre des intérêts de l’entreprise' se

manifestant par un manque de collaboration manifeste vis à vis des équipes et de ses pairs et une dissimulation des informations, l’employeur produit notamment :

— un échange de mail du 1er octobre 2014 ayant pour objet 'consultation lagardère Active' dont il résulte que M. X a transmis une fiche, non communiquée aux débats, à ses partners, que suite à cette transmission M. Y, sans mettre en copie M. X, a interrogé Mme F et M. LO en ces termes ' c’est quoi cette version de l’étude google avec signataires changés ' Autre chose de bougé par rapport à version nominale'.

— un échange de mail du 7 octobre 2014 entre M. X et M. Y ayant pour objet 'suprise du jour’ :

. A 6h23, M. X demande à M. Y des explications sur deux sujets ' 1° j’apprends ce jour le pipe P1 et j’en suis très surpris. 2° un certain nombre de rendez vous sont organisés chez SFR et AB où G est invitée systématiquement et pas moi (FR, NR, RP notamment). Je croyais qu’on devait se dire quand on est intéressé par les Rvs des autres. S’il y a une autre logique dis moi.

. A 21h19, M. H lui répond : ' avec plaisir quand tu veux … Pas de changement sur les règles des rendez vous : transparence et extension .. Bien si tu l’appliques aussi pour les rendez vous dont tu as l’initiative.

Pas sur de comprendre ta surprise sur le reste .. J’attends aussi ta réponse sa demande d’explication suite à sa version de l’étude google dont tu as changé à ma grande surprise les signataires'

. A 23h43, M. X répond 'pseudo accusations, j’y vois peut être à tort des rangaines dilutives diversives '.

— une attestation de M H ainsi rédigée « il a refusé de rendre compte de ses déplacements à l’étranger, décidés sans en parler au préalable à l’équipe et aux personnes concernées à la surprise parfois de clients eux-mêmes (Oredoo, Zain) et dans certains cas en contradiction avec les règles que j’avais moi-même défini, en particulier lorsque j’ai demandé à V-W de ne pas se rendre en Arabie Saoudite, du fait de la présence d’un autre partner (XI VK) sur place »

— une attestation de Mme E aux termes de laquelle le témoin déclare : ' M. H a toujours été mon responsable hiérarchique ainsi que celui de M. X.. M. X comme moi même avons toujours rapporté à M. H … à compter de 2013 Mr X a commencé à s’isoler, ne communiquant plus sur ses RDV (chose commune dans notre métier), contactant des clients sans en informer les autres partners, formulant des offres commerciales très engageantes sans en référer à sa hiérarchie rendant la collaboration très compliquée et l’impact client très négatif »

— les mails du 10 septembre et 9 octobre 2014 précités.

— une attestation de Mme H, directrice finance et contrôle de gestion, qui témoigne que M. H était le responsable hiérarchique de M. X.

Au regard des développements qui précèdent, la cour relève que les attestations de Mme E, de Mme H ou de M. H sont en contradiction avec les pièces précitées qui établissent l’absence de lien hiérarchique entre ce dernier et M. X. Par ailleurs, les faits rapportés par ces témoins ne sont corroborés par aucune pièce. Il s’ensuit que ces témoignages ne sont pas de nature à emporter la conviction de la cour.

En outre, aucune pièce, qu’il s’agisse des mails précités ou des échanges électroniques du 10 septembre 2014 sur les tarifs lagardère ( pièce 42) ou du 23 septembre 2014 sur le rendez vous

Lagardère (pièce n° 43) n’établit la réalité de nombreuses tentatives d’intrusion chez le client sans concertation avec les équipes en charge ou de l’envoi par M. X de données ou de taux de contrat cadre modifiés sans validation.

La pièce n°51 intitulée ' l’aventure numérique pour la France' qui correspond à la première page d’un rapport, n’a aucune valeur probante sur ces points.

L’employeur produit également un échange électronique du 10 septembre et 9 octobre 2014 dont il résulte que M. X a proposé à un client, M. HA, l’expertise de la société M N dans le domaine de la restructuration d’entreprise et a indiqué être prêt à investir auprès du numéricable en mobilisant dès aujourd’hui une équipe, le tout à titre gracieux ; que M. H et Mme E lui ont reproché d’avoir formulé cette proposition sans les avoir informés de celle-ci et d’avoir proposé des missions gracieuses sans en avoir parlé 'au patron'.

Toutefois, comme le relève justement M X, il ne s’agissait que d’un « pitch commercial pour une prise de rendez-vous » et non d’une proposition commerciale ou d’un contrat. En outre, du fait de l’absence de lien de subordination à l’égard de M. H, il ne peut être reproché au salarié de ne pas avoir au préalable obtenu la validation de ce dernier. M. X justifie par ailleurs avoir contacté ce client en concertation avec trois autres associés de l’entreprise, en particulier M. I, lequel a, par courrier électronique du 10 septembre 2014, insisté sur l’urgence de rencontrer M. HA. M. NK dans son attestation précitée précise que les associés (senior ou non senior) sont entièrement autonomes et en mesure d’engager la firme en rentrant en contact avec différents clients, en rédigeant et transmettant des demandes de rendez vous et propositions commerciales, y compris en proposant des travaux 'pro bono' c’est à dire non facturés. Ce témoignage est confirmé par un courrier électronique de M. J, ancien associé, qui précise qu’il était courant de proposer au client de démarrer avec une équipe à titre gracieux ' pour rentrer chez le client’ et 'que chez U N tout le monde le faisait'.

Aucune pièce n’établit donc la réalité d’un manque de collaboration de M. X vis à vis des équipes et de ses pairs ou d’une dissimulation d’informations.

L’employeur ne rapportant la preuve d’aucun des griefs visés par la lettre de licenciement, celui-ci est sans cause réelle et sérieuse.

En considération de ces éléments, de son ancienneté (8 ans) dans son emploi, de son âge ( il est né en …), de son salaire mensuel brut lors de son licenciement de 24.331€20, il y a lieu en application de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige et compte tenu du préjudice subi, de lui allouer une somme 146.000€ à titre de dommages et intérêts, le salarié ne produisant pas d’éléments à hauteur de l’indemnisation de 225.000€ demandée devant la cour.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, mis à disposition par le greffe,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a débouté M. X de sa demande au titre du travail dissimulé ;

L’INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau ;

CONSTATE la nullité de la convention de forfait jours ;

DÉCLARE prescrites les demandes de rappel de salaire antérieures au 16 mars 2010 ;

CONDAMNE la société M N à payer à M. X les sommes de

—  25.450€ bruts au titre des heures supplémentaires,

—  2545€ bruts au titre des congés payés y afférents,

—  18.485€ bruts au titre des retenues,

—  1848.50€ bruts au titre des congés payés y afférents,

—  67.400€ bruts au titre du bonus MBO 2014,

—  6.740€ bruts au titre des congés payés y afférents,

—  2000€ bruts au titre du bonus SBO 2012,

—  200€ bruts au titre des congés payés y afférents ;

DÉBOUTE M. X de ses demandes au titre du bonus SBO 2013, du bonus SBO 2014 et du bonus FLIP ;

DIT le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la société M N à payer à M. X la somme de 146.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

DIT que les sommes de nature salariale produisent intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et les sommes de nature indemnitaire à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE la société M N à payer à M. X la somme de 2500€ en application de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure;

CONDAMNE la société M N aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 24 juin 2021, n° 18/11450