Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 25 janvier 2022, n° 20/04957

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 1, 25 janv. 2022, n° 20/04957
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/04957
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 25 JANVIER 2022

(n° 020/2022, 9 pages)


Numéro d’inscription au répertoire général : 20/04957 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBUTS


Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Février 2020 -Tribunal Judiciare de Paris – RG n° 18/09934 – 3ème chambre – 2ème section -

APPELANTS

M. Z X


Né le […] à […]


De nationalité française


Photographe

[…]

[…]


Représenté par Me Maylis POUZADOUX, avocat au barreau de PARIS, toque PN 500

S.A.R.L. S.W.S,


Société au capital de 8 000 euros


Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 134 561 619


Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[…]

[…]


Représentée par Me Maylis POUZADOUX, avocat au barreau de PARIS, toque PN 500

INTIMEES

S.A.S. B GROUP,


Société au capital de 34 519 100 euros


Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d’ANGERS sous le numéro 339 899 940
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[…]


Saint Macaire en Mauge

[…]


R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N – G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477


Assistée de Me Vanessa BOUCHARA plaidant pour la SARL CABINET BOUCHARA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque C 594

S.A.S.U. I.CODE,


Société au capital de 300 000 euros


Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d’ANGERS sous le numéro 487 648 891


Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[…]


Saint Macaire en Mauge

[…]


R e p r é s e n t é e s p a r M e M a t t h i e u B O C C O N – G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477


Assistée de Me Vanessa BOUCHARA plaidant pour la SARL CABINET BOUCHARA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque C 594

COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, et Mme Françoise BARUTEL, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.


Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente

Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

Mme Déborah BOHÉE, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRÊT :


Contradictoire• • par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

• signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***


Vu le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 7 février 2020';


Vu l’appel interjeté à l’encontre dudit jugement le 10 mars 2020 par M. Z X et la société SWS';


Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 22 juillet 2021 par M. Z X et la société SWS, appelants';


Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 6 septembre 2021 par les sociétés B Group et I.Code, intimées';


Vu l’ordonnance de clôture du 2 novembre 2021;

SUR CE, LA COUR,


Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.


Il sera simplement rappelé que M. Z X se présente comme un photographe de mode renommé. La société SWS, dont il est le gérant, a pour activité le conseil en communication et l’image photographique numérique et vidéo.


La société B Group a une activité de création et de vente de vêtements prêt-à-porter en France notamment sous la marque B.


La société I.Code a une activité de commercialisation de vêtements prêt-à-porter en France sous la marque I.Code.


Depuis le début des années 2000, M. X indique avoir réalisé, pour les sociétés B Group et I.Code, les photographies des catalogues et campagnes des marques B Women, B Men, B C et I.Code.


Fin 2014, les sociétés B Group et I.Code l’ont informé qu’elles n’entendaient plus lui confier la réalisation de nouvelles photographies. La société B Group, agissant tant en son nom et pour son compte qu’au nom et pour le compte des sociétés B Women, B Men, B C et I.Code, ont alors conclu avec la société SWS, les 27 mai et 2 juin 2015, un 'contrat de cession de droits sur les photographies réalisées au cours des années précédentes et protocole d’accord’ qui organise la fin des relations des parties et la cession des droits respectivement jusqu’au 30 juin 2016 et 31 janvier 2016, ainsi qu’un droit pour les sociétés B Group et I.Code de reproduire les photographies à des fins d’archives pour la durée des droits d’auteur.


La société SWS expose avoir constaté que les société B Group et I.Code auraient néanmoins continué à exploiter un grand nombre de photographies après les dates d’échéance contractuellement prévues (le 31 janvier 2016 pour les photographies des campagnes de la marque I.Code et le 30 juin 2016 pour les photographies des campagnes des marques B Women, B Men et B C), et continueraient toujours de le faire à ce jour.
Elle a fait effectuer plusieurs constats d’huissier les 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016, 11 janvier 2017, 10 juillet 2017 et 26 mars 2018, et, par courriers des 5 décembre 2016, 21 décembre 2016 et 20 janvier 2017 a mis en demeure la société B Group laquelle a indiqué que les photographies litigieuses étaient stockées à titre d’archives en respect du protocole d’accord.


Par acte du 27 juin 2017, la société SWS et M. X ont fait assigner les sociétés B Group et I.Code devant le tribunal de grande instance de Rennes sur le fondement de la contrefaçon de droit d’auteur, lequel s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris selon ordonnance du 31 mai 2018.

Par jugement dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a':


Dit que les pièces n°11, 12, 13, 18, 43 et 44 produits par M. Z X et la société SWS sont dénuées de toute force probante';


Dit que M. Z X et la société SWS ne rapportent par conséquent aucune preuve des actes de contrefaçon de droit d’auteur qu’ils opposent aux sociétés B Group et I.Code';


Débouté M. Z X et la société SWS de l’intégralité de leurs demandes de ce chef';


Condamné M. Z X et la société SWS ensemble à verser à la société B Group et à la société I.Code chacune la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile';


Condamné M. Z X et la société SWS aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.


Pour justifier des faits allégués de nature à caractériser, à titre principal, des actes de contrefaçon, et à titre subsidiaire des violations de nature contractuelle, M. X et la société SWS ont versé au débat des procès-verbaux de constat d’huissier de justice, déjà produits en 1ère instance, un nouveau procès-verbal de constat sur internet, un rapport d’expertise technique amiable et des attestations réitérées devant huissier de justice.

Sur la force probante des constats d’huissier des 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016, 11 janvier 2017, 10 juillet 2017 et 26 mars 2018


Les appelants font valoir que l’huissier de justice a clairement décrit l’ensemble des actes préparatoires auxquels il a procédé avant toutes constatations ; que si la synchronisation de l’heure et de la date de l’ordinateur n’a pas été faite cela ne permet pas de suspecter la fiabilité des constatations laquelle n’est pas davantage remise en cause par l’absence de mention de la date et de l’heure sur les captures d’écran, l’huissier de justice ayant indiqué avoir effectué les actes préparatoires avant toute constatation ; que les démarches effectuées par l’huissier de justice et son cheminement résultent de la description qu’il a faite, des captures d’écran et des photographies.


Ils ajoutent que lors du constat du 1er août 2016, après avoir lancé une recherche intitulée B sur Google Image, l’huissier a cliqué sur l’une des images, puis sur l’adresse du site internet où elle se trouvait et a continué à naviguer d’image en image au moyen de la fonction 'images similaires’ ; que lors du constat du 17 octobre 2016, après avoir lancé une recherche intitulée B sur Google, l’huissier a navigué sur le site B.com où il a effectué des captures d’écran avant de procéder à des constatations sur le téléphone portable de M. X à partir du site B.com, puis dans la sous-rubrique 'news', puis sur Google Image à partir des mots-clé 'B lingerie’ et 'B solaire et lunettes’ où il a navigué d’image en image ; que lors du constat du 24 novembre 2016, il a navigué sur le site B.com et effectué diverses captures d’écran avant de lancer une recherche sur Google Image à partir du mot clé 'vitrine boutique B’ ; que lors du constat du 11 janvier 2017 , après avoir lancé une recherche 'news by B’ sur Google, l’huissier a navigué sur le site B.com avant de lancer une recherche sur Google Images à partir du mot clé 'news by I.Code', de cliquer sur certaines images pour connaître le site internet sur lequel elles se trouvaient et procéder à des captures d’écran ; que lors du constat du 10 juillet 2017 effectué sur le portable de M. X, l’huissier de justice a procédé à ses constatations à partir d’un email envoyé par B à M. X permettant d’accéder au 'Pinterest d’B' et au site B.com, comme lors du constat du 26 mars 2018, ces constatations correspondant à l’existant à la date du constat sans qu’elles puissent être altérées par l’historique personnel du téléphone portable de M. X, de sorte que rien ne permet de remettre en cause la fiabilité des constatations opérées.


Les sociétés B Group et I.Code font valoir que l’huissier instrumentaire se doit de respecter un protocole technique préalable à ses constations permettant d’établir avec certitude que les pages consultées étaient effectivement en ligne au moment où le constat a été dressé ; qu’en l’espèce, l’huissier de justice a omis de réaliser des démarches et de renseigner des informations essentielles relatives aux travaux préparatoires entrepris, mais également au cheminement de ses constatations et aux constatations en elles-mêmes ; qu’ainsi la date et l’heure de l’ordinateur n’ont pas été synchronisées avant de procéder aux constatations, de sorte qu’il est impossible de vérifier qu’elles ont bien eu lieu à la date et heure indiquées en première page du procès-verbal de constat ; que le cheminement suivi par l’huissier ne saurait se déduire des seules captures d’écran ; que les étapes du protocole technique opéré sur le téléphone de M. X afin de garantir l’absence notamment de mémoires caches et autres éléments de nature à influer sur les résultats des recherches ne sont pas détaillés ; que les captures d’écran réalisées ne contiennent aucune date ; que lors du constat du 11 janvier 2017, l’huissier a changé de navigateur internet en pleine procédure, sans indiquer les raisons de ce changement ni les diligences techniques entreprises ; que le jugement qui a dénié toute force probante aux constats versés au débat pour établir les faits allégués doit donc être confirmé.


En l’espèce, il est constant qu’en application de l’accord de cession de droits conclu les 27 mai et 2 juin 2015, les photographies litigieuses, qui sont en grand nombre compte tenu de la collaboration entre les parties depuis le début des années 2000, pouvaient être licitement exploitées jusqu’au 31 janvier 2016 pour les photographies des campagnes de la marque I.Code et jusqu’au 30 juin 2016 pour les photographies des campagnes des marques B WoMen, B Men et B C, et peuvent continuer à être reproduites à des fins d’archives notamment sur internet pendant la durée des droits d’auteur.


Pour démontrer une utilisation illicite postérieurement à ces accords, les appelants ont versé au débat six procès-verbaux de constat sur internet en date des 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016, 11 janvier 2017, 10 juillet 2017 et 26 mars 2018.


La cour rappelle que la valeur probante d’un constat d’huissier sur internet suppose le respect d’un protocole permettant de garantir la fiabilité et la force probante des constatations effectuées ; qu’ainsi l’huissier de justice doit décrire le matériel, mentionner l’adresse IP de l’ordinateur ayant servi aux opérations de constat, s’assurer d’une connexion directe entre l’ordinateur et le site visité, vider la mémoire cache du navigateur préalablement aux constatations, supprimer l’ensemble des fichiers temporaires stockés sur l’ordinateur ainsi que les cookies et l’historique de navigation, et ce afin de garantir que les contenus internet constatés par l’huissier de justice sont bien présents, sous la forme et dans l’environnement tels que figurant dans le procès-verbal de constat, au moment où ce dernier a été dressé.


En l’espèce, ainsi que l’a relevé à juste titre le tribunal pour les constats opérés les 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016 et 11 janvier 2017, l’huissier de justice n’a pas procédé à la description du matériel employé ni n’a décrit dans le corps du procès-verbal les diligences opérées relativement au serveur proxy, à la purge, à l’historique du navigateur internet, de sorte qu’il n’est pas établi que ces vérifications techniques ont été effectuées avant de procéder aux constats. En outre, les constats des 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016, 11 janvier 2017, 10 juillet 2017 et 26 mars 2018 effectués pour tout ou partie sur un support mobile ont été réalisés sur le téléphone portable personnel de M. X, et ce sans précision notamment sur les modalités exactes de connexion au réseau internet mobile, ni sur la détermination de l’adresse IP, ni sur l’adresse email à partir de laquelle ils ont été établis s’agissant des constats des 10 juillet 2017 et 26 mars 2018.


Le tribunal a également pertinemment relevé que dans le corps de ces six procès-verbaux n’est mentionné aucun élément précis d’horodatage que ce soit l’heure de démarrage, l’heure de fin des opérations de constat ou l’heure à laquelle les captures d’écran ont été réalisées, et que les captures d’écran, figurant dans une annexe non horodatée, ne comportent aucun titre ni mention, de sorte qu’en l’absence de tous ces éléments il n’est pas possible de suivre le cheminement de l’huissier de justice s’agissant par exemple des pages web visitées et des opérations réalisées entre chaque capture d’écran, l’huissier de justice se bornant à mentionner sur chacun des procès-verbaux 'sur instructions de mon mandant j’ai navigué et capturé les informations jugées nécessaires à la présente cause, sur le (sol) site (sol) faisant l’objet des captures'.


Enfin l’expert informatique amiable sollicité par les appelants indique dans son rapport : ' Lacunes importantes – Concernant les descriptions techniques des configurations : L’absence de détails sur les architectures et composants des réseaux de l’étude (Proxy, Pare-feux …) ne permet pas de tracer la circulation de l’information issue d’internet, depuis la source jusqu’au poste de constat. (…) Concernant les purges préalables aux constats : Certains éléments ne sont pas purgés sur le poste de l’étude (historique de téléchargement …) et sur le téléphone mobile (sur lequel uniquement la purge de l’historique de navigation est démontrée). Des informations préalablement stockées sur les équipements de constat sont susceptibles d’apparaître (…) – Lacunes conséquentes – Concernant la synchronisation des équipements de constat : cette synchronisation n’est pas mentionnée. L’absence de synchronisation avec un temps de référence ouvre une brèche de contestation sur la véracité de l’ordonnancement technique des opérations conduites.'


Il ressort de l’ensemble de ces éléments que c’est à juste titre que le tribunal a retenu que ces procès-verbaux ne présentent aucune garantie, en particulier relativement à la source exacte des contenus constatés sur internet et à leur date de publication, ces points étant essentiels en l’espèce puisqu’en application du contrat de cession de droits conclu entre les parties les photographies incriminées pouvaient être licitement exploitées par les sociétés B et I.Code notamment sur leurs sites internet jusqu’au 31 janvier 2016 pour certaines et jusqu’au 30 juin 2016 pour d’autres, et peuvent continuer à l’être à des fins d’archives. Il convient dès lors de dire que les procès-verbaux de constat des 1er août 2016, 17 octobre 2016, 24 novembre 2016, 11 janvier 2017, 10 juillet 2017 et 26 mars 2018 sont dénués de toute force probante pour établir les faits de contrefaçon, ou à titre subsidiaire de violations de nature contractuelle, allégués. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé de ce chef.

Sur la force probante du constat d’huissier du 26 février 2020


Les appelants font valoir qu’ils ont fait réaliser un nouveau constat le 26 février 2020 respectant les critères dégagés par le jugement de première instance, lequel permet de démontrer que les intimées continuent d’utiliser les photographies litigieuses et même d’autres photographies réalisées par M. X qu’elles n’utilisaient pas jusqu’à présent.


Ils produisent un rapport technique établi par un expert près la cour d’appel de Rennes (pièce n°59), et prétendent que ce rapport conclut à la validité des constatations matérielles effectuées et détaillées dans le procès-verbal du 26 février 2020.


Les intimées font observer que ce constat n’apporte pas non plus les garanties nécessaires à sa fiabilité, dans la mesure où l’huissier se contente d’affirmer que le navigateur utilisé est « Google Chrome (version 80.0.3987.122) » sans qu’aucune capture d’écran ne permette de vérifier cette information, ne développe pas le cheminement utilisé pour aboutir à la fenêtre vierge de son navigateur, ni n’indique la date et l’heure des constatations ; que concernant les constatations réalisées à partir du site Google Images, l’huissier s’est contenté d’isoler les images résultant de ses recherches en les rognant, sans mention de la date ni de l’heure de la capture, et n’a pas pris le soin de cliquer sur le lien source de chaque image de manière à obtenir le titre complet de celle-ci, de s’assurer qu’elle est toujours accessible sur le site dont elle est issue, ou encore d’avoir les détails du site d’origine ; que la lecture du rapport d’expertise amiable démontre que le procès-verbal du 26 février 2020 est entaché des mêmes irrégularités que les précédents.


En l’espèce, la cour constate que l’huissier de justice indique que le navigateur utilisé est « Google Chrome (version 80.0.3987.122) » sans le justifier par une capture d’écran, ne développe pas le cheminement utilisé pour aboutir à la fenêtre vierge de son navigateur et ne précise pas, par exemple, avoir cliqué sur l’icône de l’application Google Chrome pour ouvrir une page internet, de sorte que la totalité des captures d’écran étant tronquée (bas supprimé), il est impossible de savoir de quel navigateur sont issues lesdites captures et donc de s’assurer qu’il s’agit bien du navigateur sur lequel les opérations préalables ont été réalisées.


De même si l’huissier de justice affirme avoir préalablement vérifié que la date et l’heure retenues par l’horloge du système d’exploitation sont bien la date du jour des constatations, aucune des captures d’écran annexées au procès-verbal de constat ne fait apparaître la date ni l’heure desdites captures.


Ces éléments de nature à anéantir la force probante dudit constat relativement à la source exacte des contenus constatés sur internet et à leur date de publication, points essentiels en l’espèce pour établir les faits allégués, sont également relevés par l’expert technique amiable lequel, relativement au constat réalisé sur internet le 26 février 2020, mentionne ' Lacunes importantes – Concernant les descriptions techniques des configurations : L’absence de détails sur l’architecture technique et les composants des réseaux de l’étude (Proxy, Pare-feux …) ne permet pas de tracer la circulation de l’information issue d’internet, depuis la source jusqu’au poste de constat. Une description précise aurait permis de lever tout doute quant aux traitements faits par les composants réseaux sur les flux entre le poste de constat et internet (rétention, filtrage …). Lacunes conséquentes – Concernant l’horodatage des captures d’écran – L’horodatage des captures de chaque écran n’est pas fourni car ces captures ne mentionnent pas la date et l’heure du poste de travail sur lequel elles sont capturées.' La conclusion de rapport technique amiable, lequel relève notamment que 'la présence d’une image sur Google Image ne garantit pas que ladite image est toujours en ligne. La preuve technique de présence d’une image sur un des sites concernés n’est pas apportée par la seule présence de l’image sur Google Image même si l’url dudit site y est mentionnée’ est la suivante : 'Les lacunes indiquées et qualifiées dans le présent rapport permettent de mesurer les impacts sur la validité technique des constats transmis. Certaines des informations constatées se voient fragilisées du fait de l’existence de lacunes portant sur les descriptifs et les réalisations des opérations préparatoires ainsi que sur les captures et les restitutions des informations collectées.'


Il ressort de l’ensemble de ces éléments que le procès-verbal de constat établi le 26 février 2020 ne présente pas de garantie suffisante de fiabilité relativement à la source exacte des contenus constatés sur internet et à leur date de publication, ces points étant essentiels en l’espèce pour établir les faits allégués postérieurement au contrat de cession de droits conclu entre les parties. Il convient dès lors de dire que le procès-verbal de constat du 26 février 2020 est dénué de toute force probante.

Sur la force probante des attestations et des procès-verbaux de constat des 6 et 13 novembre 2020

M. X et la société SWS soutiennent que les trois attestations produites, réitérées devant huissier de justice, démontrent des utilisations illicites des photographies litigieuses dans les boutiques B.


Les sociétés B Group et I.Code font valoir que les attestations ne sont pas conformes au formalisme prescrit par l’article 202 du code de procédure civile ; que Mme Y comme M. et Mme D entretiennent des liens d’amitié avec M. X ; que les déclarations sont vagues et évasives et qu’aucune photographie n’est jointe aux attestations de M. et Mme D, tandis que la photographie annexée à l’attestation de Mme Y ne permet pas d’établir qu’elle a effectivement été prise dans une boutique à enseigne B ; que les réitérations effectuées devant un huissier de justice à la demande de l’avocat sont tout aussi suspectes et non probantes.


En l’espèce, il est n’est pas contesté que les attestations versées au débat ont été rédigées par des amis ou des connaissances de M. X sans que cette mention soit portée sur lesdites attestations.


En outre, les attestations de Mme E D et M. F D relatent que le 14 mars 2020 au centre commercial de Nice Etoile dans la boutique B, ces derniers ont constaté 'sur un des murs à l’intérieur de la boutique une très grande photographie représentant des jeunes mannequins portant des vêtements de la collection B’ sans que cette photographie soit annexée auxdites attestations, de sorte qu’elles sont dénuées de toute force probante. Si ces attestations ont été réitérées devant huissier de justice selon procès-verbal de constat du 6 novembre 2020, la photographie d’une boutique B qui a été jointe audit constat n’est pas datée, la une du journal sur la photographie étant illisible, outre, en tout état de cause qu’aucun élément ne permet d’établir qu’il s’agit d’une photographie de M. X, de sorte que le procès-verbal de constat du 6 novembre 2020 n’est pas davantage probant pour justifier des faits allégués.


Enfin l’attestation de Mme Y relate que le 10 mars 2020 elle a 'remarqué une photographie de Z X affichée sur le mur d’une boutique B’ à Rennes, sans que la photographie montre l’enseigne B, ni qu’il soit démontré que M. X est le titulaire de droits sur ladite photographie, l’attestation suivante de Mme Y du 10 novembre 2020 réitérée devant l’huissier de justice par procès-verbal du 13 novembre 2020 selon laquelle lorsqu’elle est retournée dans cette boutique le 28 octobre 2020 'la photographie représentant un groupe d’enfants avait été repeinte en blanc’ n’étant pas davantage probante.


Il s’ensuit que les attestations produites par M. X et la société SWS ainsi que les procès-verbaux d’huissier de justice des 6 et 13 novembre 2020 sont dénués de force probante pour établir les faits de contrefaçon, ou à titre subsidiaire de violation de nature contractuelle, allégués.

M. X et la société SWS seront donc déboutés de toutes leurs demandes qu’elle soient principales sur le fondement de la contrefaçon, ou subsidiaire sur le fondement de la responsabilité contractuelle. Le jugement entrepris sera confirmé et complété de ce chef.

PAR CES MOTIFS,


LA COUR,


Confirme le jugement en toutes ses dispositions,


Y ajoutant,


Déboute M. X et la société SWS de leurs demandes subsidiaires sur le fondement de la responsabilité contractuelle ;


Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;


Condamne M. X et la société SWS in solidum aux dépens d’appel et, vu l’article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à ce titre aux sociétés B Group et I.Code une somme globale de 5 000 euros.


LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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