Cour d'appel de Pau, 31 mars 2014, n° 14/01221

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Me Laurent Gimalac · consultation.avocat.fr · 12 septembre 2018

La cause paraissait entendue : nul ne dispose d'un droit de propriété sur sa vue et sur le paysage environnant. La cour d'appel de Montpellier vient de le rappeler en 2014 avec une motivation cinglante qui ne laisse guère d'illusion aux propriétaires malchanceux : «La restriction partielle de la vue sur la mer et de l'ensoleillement résultant de la terrasse de M. L ne constitue pas pour M. C, son voisin, un préjudice indemnisable. En effet, outre que nul ne dispose d'un droit à la vue sur l'environnement, cette gêne ne constitue pas un trouble anormal de voisinage dans ce milieu très …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 31 mars 2014, n° 14/01221
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 14/01221

Sur les parties

Texte intégral

XXX

Numéro 14/1221

COUR D’APPEL DE PAU

1re Chambre

ARRÊT DU 31/03/2014

Dossier : 13/00306

Nature affaire :

Autres demandes relatives à la propriété ou à la possession d’un immeuble ou relevant de la compétence du juge de l’expropriation

Affaire :

X D

C/

K-L Y

G H épouse Y

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 31 mars 2014, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 03 février 2014, devant :

Monsieur Z, magistrat chargé du rapport,

assisté de Monsieur CASTILLON, greffier, présent à l’appel des causes,

Monsieur Z, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame PONS, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Monsieur Z, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur X D

né le XXX à XXX

de nationalité française

XXX

XXX

représenté et assisté de Maître Paule PICART-PARRAS, avocat au barreau de TARBES

INTIMES :

Monsieur K-L Y

né le XXX à XXX

de nationalité française

XXX

XXX

Madame G H épouse Y

née le XXX à XXX

de nationalité fançaise

XXX

XXX

représentés et assistés de Maître Frédéric BERNAL, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 12 DECEMBRE 2012

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU

Faits et procédure :

M. et Mme Y sont propriétaires d’une maison d’habitation avec piscine à Bruges (64). Ils sont voisins de l’immeuble propriété de M. X A qui a fait rénover sa maison et construire une extension de 7 m de longueur en bordure de leur terrain et parallèlement à leur maison.

M. et Mme Y considèrent que cette construction a eu pour conséquence de diminuer considérablement l’ensoleillement de leur immeuble, de leur piscine et de supprimer totalement la vue dont ils bénéficiaient sur les Pyrénées et que, malgré diverses démarches amiables, ils n’ont pu obtenir réparation de ce trouble anormal de voisinage.

Par acte d’huissier en date du 18 octobre 2011, M. et Mme Y ont fait assigner M. X A devant le tribunal de grande instance de Pau afin de faire constater que la construction qu’il a réalisée sur cette parcelle leur occasionne un trouble anormal de voisinage, pour obtenir sa condamnation à leur payer 20 000 € à titre de dommages-intérêts et sa condamnation à fermer deux fenêtres réalisées sur la façade nord de son immeuble sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du jugement.

Par jugement en date du 12 décembre 2012, le tribunal de grande instance de Pau a constaté que la construction de l’extension de l’habitation de M. X A était constitutive pour M. et Mme Y d’un trouble anormal de voisinage, a fixé leur préjudice à la somme de 12 000 € a condamné M. X A à leur verser cette somme, a débouté M. et Mme Y de l’intégralité de leurs demandes relatives aux deux fenêtres réalisées sur la façade nord de son immeuble par M. A, a débouté M. A de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et déclaré irrecevable sa demande reconventionnelle concernant l’arrachage de thuyas et d’arbres.

Suivant déclaration reçue le 25 janvier 2013 au greffe de la Cour, M. X A a relevé appel de cette décision.

Moyens et prétentions des parties :

Dans ses dernières conclusions en date du 25 avril 2013, M. A demande à la Cour de réformer la décision déférée, de dire que M. et Mme Y ne subissent aucun trouble anormal de voisinage en raison de l’extension de son immeuble, de confirmer le jugement concernant les vues droites qu’il a créées en application des dispositions des articles 616 et suivants du code civil. Il réclame 5 000 € pour ses frais irrépétibles

Dans leur dernières conclusions en date du 19 juin 2013, M. et Mme Y demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a constaté que la construction de l’extension d’habitation de M. A était constitutif pour eux d’un trouble anormal de voisinage, de réformer ce jugement qui a limité leur préjudice à la somme de 12 000 €, de fixer ce préjudice à la somme de 20 000 € et de condamner M. A à leur verser cette somme à titre de dommages-intérêts, de réformer cette décision qui les a déboutés de l’intégralité de leurs demandes relatives aux deux fenêtres réalisées sur la façade nord de l’immeuble de M. A, de le condamner à fermer ces deux fenêtres sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir, constater que M. A ne forme plus appel en ce qui concerne sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et sa demande d’arrachage de plantation, de le condamner à leur payer 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est en date du 6 janvier 2014.

SUR QUOI

M. A a obtenu le 16 décembre 2008 un permis de construire concernant l’extension de sa maison sise 3 quartier du Verger à XXX

Le 8 octobre 2009 il a obtenu un permis modificatif pour « rehausse de la maçonnerie ».

La surface hors d''uvre nette est de 40 m² ; la hauteur du bâtiment est de 6,65 m.

Il convient de préciser que la parcelle 55 des époux Y a une contenance de 440 m², que les parcelles 53 et 54 de M. A font 1 960 m² et que l’extension de la construction A a été effectuée à faible distance de la limite divisoire des deux fonds, dans le prolongement de l’immeuble existant, sur 7 m de long.

Il résulte par ailleurs du procès-verbal de constat établi le 19 novembre 2009 par Me Soulas, huissier de justice, que la maison d’habitation Y présente une façade principale qui est orientée au sud face aux Pyrénées, que devant cette façade se trouve une terrasse d’une largeur de 12 m, clôturée au sud par une haie vive, une piscine se trouve dans l’angle sud-ouest, que les pannes faîtières qui délimitent la hauteur de l’ensemble immobilier A (qui était en cours de construction) masquent la vue droite sur les Pyrénées.

Des photographies prises le même jour illustrent cet état des lieux.

Par ailleurs, M. A a lui-même fait procéder à un constat d’huissier le 29 mai 2012 dont il résulte que la hauteur de la haie vive dont il s’agit est de 3,30 m.

Il est donc établi que la construction nouvelle effectuée par M. A masque la vue dont bénéficiaient M. et Mme Y sur les Pyrénées, mais il est également établi par les documents versés aux débats que cette construction par sa longueur obstrue pratiquement la totalité du terrain Y ce qui n’était pas le cas auparavant et que par sa hauteur de 6,65 m et son implantation à proximité de la ligne divisoire des fonds, elle prive considérablement le terrain Y d’un ensoleillement supérieur, en toutes saisons, l’ensoleillement n’étant auparavant limité que par la présence d’une haie vive dont la hauteur de 3,30 m n’a rien de commun avec la hauteur de 6,65 m, soit le double, consécutive à l’extension de l’immeuble A.

Il est constant en droit que les permis de construire ne sont accordés que sous réserve du respect du droit des tiers.

Par ailleurs, en droit, il résulte de la restriction au droit de propriété résultant des dispositions de l’article 544 du code civil, qu’il est interdit de causer à autrui un trouble anormal de voisinage.

Ces dispositions légales permettent la mise en 'uvre d’un régime de responsabilité civile indépendant des autres régimes de responsabilité et étranger à toute notion de faute.

En l’espèce, il est établi que la construction d’une maison de 6,65 m de haut et de 7 m de long à proximité de la limite de propriété a occasionné à M. et Mme Y, en réduisant très sensiblement l’ensoleillement dont ils bénéficiaient auparavant, une nuisance excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

En ce qui concerne l’ouverture de vues sur la propriété Y :

Les seules pièces versées aux débats sur ce point sont les plans annexés au permis de construire et le constat de Me Pujos, huissier de Justice, en date du 29 mai 2012 qui établit la présence dans le garage de deux ouvertures sur la façade nord du garage, c’est-à-dire effectivement en direction de la propriété Y et que ces ouvertures sont fermées par des pavés de verre opaque, qu’elles permettent dans la journée d’éclairer le garage et n’offrent aucune vue claire sur la propriété voisine, qu’il s’agit de panneaux de pavés de verre scellés dans le mur, de panneaux fixes ne pouvant en aucun cas être actionnés.

Par conséquent, et comme l’a indiqué le premier juge, M. et Mme Y ne rapportent pas la preuve qui leur incombe que de telles ouvertures, obstruées par des pavés de verre opaque ne laissant filtrer que la lumière, constituent des vues ou fenêtres prohibées par les dispositions des articles 677 et 678 du code civil.

En ce qui concerne le montant du préjudice, il est constant en droit que les juridictions doivent apprécier les modalités propres à faire cesser le trouble anormal de voisinage, qu’en l’espèce les consorts Y ne demandent pas à la démolition de l’immeuble ou la réduction de sa hauteur mais l’octroi de la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts ; cette demande justifiée dans son principe n’est pas excessive dans son montant, eu égard à l’importance du trouble de voisinage et surtout de son caractère définitif, M. et Mme Y justifiant par production d’une attestation d’agent immobilier de la perte de valeur de leurs fonds du fait de la nouvelle construction.

Le jugement déféré sera donc infirmé sur le quantum de l’indemnisation.

M. A qui succombe doit les entiers dépens et la somme de 2 000 € à M. et Mme Y en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 12 décembre 2012 par le tribunal de grande instance de Pau en ce qu’il a alloué à M. et Mme Y la somme de 12 000 € (douze mille euros),

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Condamne M. A X à payer à M. et Mme Y la somme de 20 000 € (vingt mille euros),

Confirme le jugement déféré sur le surplus,

Condamne en outre M. A à payer à M. et Mme Y la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le condamne aux entiers dépens avec autorisation de recouvrement pour Me Bernal, avocat, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sandra VICENTE Françoise PONS

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