Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 20 octobre 2021, n° 19/05935

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 9e ch sécurité soc., 20 oct. 2021, n° 19/05935
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 19/05935
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nantes, 25 juillet 2019
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

9e Ch Sécurité Sociale

ARRET N°

N° RG 19/05935 – N° Portalis DBVL-V-B7D-QCSP

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA MAYENNE

C/

M. G Y

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2021

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur I J, lors des débats, et Madame K L, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 29 Juin 2021

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 20 Octobre 2021 par mise à disposition au greffe, comme indiqué à l’issue des débats,

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 26 Juillet 2019

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal de Grande Instance de NANTES

****

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA MAYENNE :

[…]

[…]

non comparante, non représentée dispensée de comparution

INTIMÉ :

Monsieur G Y

La baudronnière

[…]

représenté par M. M N Délégué syndical en vertu d’ un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 16 juin 2014, la société Imaye Graphic a rédigé une déclaration pour un accident dont a été victime son salarié, M. G Y, le 12 juin 2014 dans les circonstances ainsi rapportées : En descendant du marche pied, la victime s’est blessée au talon.

Le certificat médical initial du 16 juin 2014 établi par le docteur X mentionne : trauma talon gauche après chute en arrière et réapparition de cervicalgies avec paresthésie gauche.

Le 18 août 2014, la caisse primaire d’assurance maladie de la Mayenne (la caisse) a notifié à M. Y la prise en charge de l’accident du 12 juin 2014 au titre des risques professionnels.

Le docteur X dans un certificat médical 26 juin 2014 a fait état d’une nouvelle lésion, à savoir des névralgies cervico-brachiales gauches.

La caisse a pris en charge celle-ci au titre de l’accident du travail par décision du 27 août 2014.

Le même médecin dans un nouveau certificat médical du 23 janvier 2015 mentionne suite aponévretomie pied gauche + Thrombose veineuse et a donc fait état d’une nouvelle lésion, prise en charge au titre de l’accident par décision du 16 février 2015.

Le 5 octobre 2016 l’état de santé de M. Y a été considéré comme consolidé par le médecin-conseil de la caisse au 17 octobre 2016, sans que subsistent des séquelles indemnisables.

Conformément à l’article L 141-1 du code de la sécurité sociale, l’expert, le docteur Z a conclu le 5 décembre 2016 à la consolidation au 17 octobre 2016.

M. Y a formé un recours en contestation de cette décision devant la commission de recours amiable de la caisse le 16 décembre 2016, qui par décision du 2 mai 2017 a rejeté la demande de l’assuré et a maintenu la décision initiale de la caisse.

Le docteur X dans un certificat médical du 8 décembre 2016 a fait état d’une rechute justifiant un refus de prise en charge par la caisse au titre de la législation professionnelle par lettre du 3 janvier 2017.

Enfin, par lettre du 10 mai 2017, la caisse a informé M. Y de l’attribution d’un taux d’incapacité permanente fixé à 0%.

Par lettre du 22 juin 2017, M. Y a saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité du tribunal de grande instance de Nantes, devenu pôle social, en contestation de cette décision de la caisse.

Par jugement avant dire droit, le pôle social a ordonné une expertise rhumatologique confiée au docteur A afin de déterminer si l’accident de travail était responsable de l’aggravation constatée de l’état de santé.

Par jugement du 26 juillet 2019 rendu après cette expertise, le pôle social a :

— déclaré recevable en la forme le recours de M. Y ;

— infirmé la décision de la caisse ;

— dit que les séquelles présentées par M. Y à la suite de son accident du travail du 12 juin 2016 n’ont pas été correctement évaluées et justifient l’attribution d’un taux d’incapacité permanente partielle de 10% auquel il convient d’ajouter le taux de déclassement professionnel de 3%, soit un taux d’IPP de 13% toutes causes confondues ;

— condamné la caisse aux dépens de l’instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée le 2 septembre 2019, la caisse a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à une date qui ne peut être déterminée en l’état des pièces du dossier.

La caisse a été dispensée de comparaître à l’audience avec l’accord de l’autre partie.

Par ses écritures parvenues au greffe le 10 août 2020, la caisse demande à la cour de :

Infirmer le jugement ;

Dire et juger que le taux d’incapacité permanente partielle présentée par M. Y à la date de consolidation du 17 octobre 2016 de son accident du travail survenu le 12 juin 2014 a été correctement évalué à 0%.

Au soutien de ses prétentions, la caisse fait principalement valoir :

> S’agissant du taux médical : que d’une part , le docteur A note dans son rapport d’expertise une importante boiterie mais difficilement expliquée en l’absence de pathologie objectivée, ce avec quoi le médecin conseil s’accorde, que par ailleurs le taux d’incapacité permanente retenu par le docteur A ne peut s’appliquer puisque M. Y a été victime d’un accident du travail et que ne peut être appliquée au cas d’espèce l’annexe II de l’article R. 434-3 relatif au barème d’invalidité concernant les maladies professionnelles.

> S’agissant du taux professionnel : qu’il ne peut en être attribué à M. Y dès lors qu’il doit être considéré comme consolidé sans séquelles indemnisables et le médecin conseil et l’expert concluent tous deux à une absence de séquelles indemnisables du fait de l’absence de pathologie objectivée et au regard du code de la sécurité sociale en matière d’accident du travail.

Par ses écritures parvenues au greffe le 27 mai 2021auxquelles s’est référé son représentant à l’audience, la FNATH, association des accidentés de la vie, M. Y demande à la cour de :

Déclarer recevable mais mal fondé la caisse en son recours ;

À titre principal,

Dire qu’il existe des séquelles indemnisables en rapport avec l’accident du travail du 12 juin 2014 de M. Y justifiant l’octroi d’un taux d’IPP ;

Ordonner une consultation médicale ou une expertise médicale confiée à un médecin spécialiste, conformément à l’article R. 142-16 du code de la sécurité sociale, avec pour mission de :

— prendre connaissance de l’entier dossier médical de M. Y ;

— décrire les lésions dont il souffre ;

— fixer le taux d’incapacité permanente partielle consécutif à son accident du travail du 12 juin 2014, par référence au barème médical indicatif.

Dire qu’il existe une nette réduction de l’aptitude de la victime à exercer une activité professionnelle justifiant l’octroi d’un coefficient professionnel ;

Fixer son taux d’incapacité permanente partielle compte tenu des conséquences de l’accident du travail du 12 juin 2014 d’un point de vue médical et professionnel ;

À titre subsidiaire,

Confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a attribué un taux d’incapacité permanente partielle de 13% à M. Y ;

En tout état de cause,

Condamner la caisse à une somme de 342,80 euros au titre du droit de l’article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.

Condamner la caisse aux entiers dépens.

À l’appui de ses prétentions, M. Y fait principalement valoir que :

> S’agissant de l’indemnisation des conséquences médicales de l’accident : le barème est indicatif,

— il a subi après l’accident deux nouvelles lésions avec des soins importants et une opération,

— son état antérieur en raison d’un accident du travail du 17 novembre 2008 dans les suites duquel un traumatisme du rachis cervical a été indemnisé par la caisse avec un taux d’IPP de 20%, et qui était consolidé le 22 juin 2009, a été aggravé par l’accident du 12 juin 2014, si bien que l’ensemble des séquelles doivent être indemnisées tel que le prévoit le barème indicatif d’invalidité des accidents du travail au titre de 3. Infirmités antérieures.

— il en est de même de l’état antérieur au niveau du pied, dès lors que son pied creux stade 2 et l’aponévrose plantaire , asymptomatiques n’ont jamais suscité de soins ou traitement avant l’accident du 12 juin 2014;

— il ne s’agit pas d’états antérieurs non indemnisables et en outre le médecin conseil aurait dû tenir compte de la plus grande incapacité de M. Y du fait de l’atteinte aux pieds et de l’aggravation des cervicalgies dans le cadre de l’accident et la cour peut se reporter au barème indicatif qui prévoit des dispositions pour le rachis et le membre inférieur, ainsi qu’à l’avis du podologue dans une correspondance du 15 avril 2020 et au rapport d’expertise du docteur B.

> S’agissant de l’indemnisation des conséquences professionnelles de l’accident:

— en vertu du barème, il est de jurisprudence constante d’accorder un coefficient professionnel lorsque l’aptitude de la victime à exercer une activité professionnelle se trouve réduite en raison des conséquences des séquelles de l’accident ;

— il n’a jamais pu reprendre son travail de bobinier receveur après la consolidation de son accident ;

— il a été déclaré inapte définitif et licencié pour inaptitude et impossible reclassement après des restrictions à son emploi le 7 mars 2017;

— il n’a repris qu’une petite activité d’exploitant dans le domaine du bricolage depuis le 1er février 2020, avec des revenus inférieurs et subit donc un préjudice professionnel et une incidence professionnelle à caractère définitif, peu important qu’il ait refusé la proposition de reclassement proposé par son employeur, ce d’autant qu’il n’est pas établi que ces postes étaient conformes aux préconisations du médecin du travail et la cour devra lui attribuer en sus un taux professionnel de 10%.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le taux d’incapacité permanente partielle indemnisant le préjudice médical

L’article L. 434-2 alinéa 1er du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur depuis le 23 décembre 2015 applicable à l’espèce dispose que :

Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.

(…)

L’article R.434-32 du code de la sécurité sociale dispose notamment que :

Au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l’existence d’une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d’invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d’incapacité permanente d’une part en matière d’accidents du travail et d’autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d’invalidité en matière d’accidents du travail.

L’appréciation du taux d’incapacité permanente partielle relève de l’appréciation souveraine des juges du fond .

Le barème d’invalidité visé à l’article L 434-2 du code de la sécurité sociale n’étant qu’indicatif, le fait qu’une lésion n’y soit pas inscrite n’est pas à lui seul de nature à exclure l’existence d’une incapacité permanente laquelle doit être appréciée en considération des critères énumérés à l’article L 434-2 du code de la sécurité sociale (Soc., 16 novembre 1988, pourvoi n° 86-16.226).

Pour M. Y, la caisse a retenu le 10 mai 2017 un taux d’IPP de 0% en l’absence de séquelles objectives indemnisables au vu des conclusions du rapport médical d’évaluation du taux d’IPP daté du 3 mai 2017 établi par le médecin conseil.

Celui-ci conclut de la façon suivante :

Traumatisme d’énergie faible (chute 1 m) de la plante du pied gauche sur l’état antérieur à type de pied creux ayant entraîné une aponévrosite du faisceau interne traité par désinsertion aponévrotomie le 28/11/14 et dont les suites ont été longues et purement fonctionnelles (plaintes à type de douleur de la plante du pied empêchant un posé normal) n’entraînant pas de nouvel avis chirurgical ni de nouvelles imageries et contrastant avec l’eutrophicité du mollet.

En ce qui concerne les cervicalgies et la névralgie cervico-brachiale, il y a une IPP de 20 % au titre d’un AT antérieur.

Le pôle social mentionne dans son jugement que le docteur C, médecin consultant désigné qui a examiné l’assuré émettait l’avis suivant:

La déficience séquellaire pourrait justifier d’un taux d’au moins 15% mais, compte tenu de l’état antérieur, il sera compris entre 8 et 10 %. Travaillait avant et licencié pour inaptitude après : en lien avec l’accident du travail.

Le médecin expert, le docteur D qui a examiné M. Y le 8 novembre 2018 relève après consultation des pièces médicales :

ANTECEDENTS

-Accident du travail du 09. 06. 2008, traumatisme du rachis cervical, consolidation le 22. 06. 09 (IPP 20 %).

-Accident du travail du 24. 01. 2011, cervicalgies post-traumatiques.

- Névralgie cervico brachiale gauche, consolidation sans séquelles le 08. 11. 11.

DOLEANCES

Persistance de tatalgies gauches, de rythme mixte, avec boiterie, à la marche, limitée à 15 mn, algies du mollet gauche.

Lombalgies récentes paramédianes gauches.

Soins en cours : prise de Dafalgan codéiné, semelles orthopédiques, kinésithérapie.

EXAMEN

Il s’agit d’un homme de 48 ans, de 77 kg pour 1.70 mètre.

Boiterie gauche avec esquive de l’appui, sur le talon.

Pas d’appui monopodal gauche effectué, ni d’accroupissement.

Empreintes podoscopiques symétriques, en faveur d’un pied creux bilatéral, du 3e degré.

Absence de syndrome rachidien lombaire (distance doigt sol nulle).

Aspect normal du pied gauche, sans trouble thermique ou de la coloration cutanée.

Douleurs sous talonnières gauches à la palpation et à l’étirement passif.

Absence de limitation articulaire de la cheville et des articulations du pied.

Testing tendino musculaire correcte.

Absence d’amyotrophies locaux régionales, de signes de radiculalgie.

DISCUSSION:

M. Y G, a été victime d’un accident de travail le 12. 06. 2014.

Il s’agit d’un traumatisme du talon gauche, aboutissant à une aponévrotomie sur aponévrosite plantaire gauche, en date du 28. 11. 14.

L’évolution se complique d’une thrombophlébite.

Il n’y a pas de signe en faveur d’une éventuelle algodystrophie sur les deux scintigraphies osseuses effectuées (25. 04. 16 et 30. 06. 17).

Le 17. 10. 16 a été fixée la consolidation sans séquelles indemnisables, consolidation confirmée par expertise du 05. 12. 16.

On note une importante boiterie mais difficilement expliquée en l’absence de pathologie objectivée.

Il existe un pied creux bilatéral symétrique.

Il n’y a pas de syndrome rachidien ni de signe de radiculalgie.

Il n’y a pas de limitation articulaire du pied de la cheville, à gauche, ni d’algodystrophies locaux régionales.

On constate donc l’absence de séquelle indemnisable, en référence au code de la sécurité sociale, en matière d’accidents du travail, cependant, sans suivre les indications du barème, on peut estimer que les séquelles sont l’équivalent d’une tendinopathie chronicisée post-traumatique, pouvant justifier un taux d’IPP de 10 % à l’instar de maladie professionnelle.

Conclusion :

(…)

- Les séquelles évoquées par le médecin du travail, Dr E, motivant une inaptitude au travail, sont la conséquence de l’accident de travail du 12 juin 2014.

IPP : 10 %

M. Y produit un rapport d’examen réalisé par le docteur F, chirurgien orthopédique qui après son examen conclut que :

M. Y a été victime d’un accident du travail en date du 17/06/2014 (erreur matérielle, l’accident étant du 12 juin 2014) à l’origine d’une contusion plantaire du pied droit sur un morphotype de pied creux.

Ce pied creux bilatéral de stade II était initialement asymptomatique et il est devenu douloureux depuis l’accident du 12/06/2017 (erreur matérielle alors qu’il s’agit de l’accident précité du 12/06/2014.) et reste symptomatique malgré une prise en charge chirurgicale, le traitement médicamenteux, une série de séances de kinésithérapie et un suivi avec un podologue.

Il est à noter une limitation de la mobilité articulaire de la cheville droite par rapport au côté opposé.

Par ailleurs le pied gauche demeure asymptomatique bien qu’il soit au même stade évolutif de pied creux ce qui corrobore la causalité de l’accident du 17/06/2021 (erreur matérielle là encore).

Le taux d’IPP du pied droit lié à l’accident du travail du 12/06/2014 est fixé à 13% dont 10% en raison des séquelles de raideur articulaire tibio-astragalienne, de boiterie et de douleurs résiduelles et 3% au titre socio-professionnel.

Il y a lieu de préciser que nonobstant le fait que le barème d’invalidité des accidents du travail ne prévoit pas les lésions en cause, il dispose notamment :

> au chapitre préliminaire I – PRINCIPES GENERAUX.

(…)

L’estimation de l’état général n’inclut pas les infirmités antérieures – qu’elles résultent d’accident ou de maladie - ; il en sera tenu compte lors de la fixation du taux médical.

> au chapitre II – MODE DE CALCUL DU TAUX MEDICAL.

(…)

3. Infirmités antérieures.

L’estimation médicale de l’incapacité doit faire la part de ce qui revient à l’état antérieur, et de ce qui revient à l’accident. Les séquelles rattachables à ce dernier sont seules en principe indemnisables. Mais il peut se produire des actions réciproques qui doivent faire l’objet d’une estimation particulière.

a. Il peut arriver qu’un état pathologique antérieur absolument muet soit révélé à l’occasion de l’accident de travail ou de la maladie professionnelle mais qu’il ne soit pas aggravé par les séquelles. Il n’y a aucune raison d’en tenir compte dans l’estimation du taux d’incapacité.

b. L’accident ou la maladie professionnelle peut révéler un état pathologique antérieur et l’aggraver. Il convient alors d’indemniser totalement l’aggravation résultant du traumatisme.

c. Un état pathologique antérieur connu avant l’accident se trouve aggravé par celui-ci. Etant donné que cet état était connu, il est possible d’en faire l’estimation. L’aggravation indemnisable résultant de l’accident ou de la maladie professionnelle sera évaluée en fonction des séquelles présentées qui peuvent être beaucoup plus importantes que celles survenant chez un sujet sain. Un équilibre physiologique précaire, compatible avec une activité donnée, peut se trouver détruit par l’accident ou la maladie professionnelle.

Dans certains cas où la lésion atteint le membre ou l’organe, homologue au membre ou à l’organe lésé ou détruit antérieurement, l’incapacité est en général supérieure à celle d’un sujet ayant un membre ou un organe opposé sain, sans état antérieur. A l’extrême, il peut y avoir perte totale de la capacité de travail de l’intéressé : c’est le cas, par exemple, du borgne qui perd son deuxième oeil, et du manchot qui sera privé du bras restant.

Afin d’évaluer équitablement l’incapacité permanente dont reste atteinte la victime présentant un état pathologique antérieur, le médecin devra se poser trois questions :

1° L’accident a-t-il été sans influence sur l’état antérieur '

2° Les conséquences de l’accident sont-elles plus graves du fait de l’état antérieur '

3° L’accident a-t-il aggravé l’état antérieur '

Il y a lieu de retenir en l’espèce que M. Y présentait en effet un état antérieur qui a été aggravé par l’accident survenu le 12 juin 2014 .

Ainsi il convient de relever :

> au niveau des cervicales : un état antérieur en raison de l’accident du travail qu’il avait subi le 17 novembre 2008 indemnisé comme traumatisme du rachis cervical par la caisse qui a donné lieu à la fixation d’une IPP de 20%.

La consolidation a été fixée le 22 juin 2009, soit plus de 5 ans avant l’accident du travail intervenu le 12 juin 2014 et le médecin conseil dans son rapport médical d’évaluation du taux d’incapacité ne fait état d’aucun suivi ou soins postérieurs à la consolidation et ne mentionne aucun élément qui justifierait d’exclure l’aggravation au niveau des cervicales, rappel fait que

la caisse a pris en charge la lésion névralgies cervico-brachiale gauche figurant au certificat médical du 26 juin 2014, par décision du 27 août 2014.

>

au niveau du pied : un état antérieur de pied creux , sans mention de soins ou traitement antérieur à

l’accident, évoqué notamment par l’expert et par le docteur B et dans les conclusions du rapport médical d’évaluation du taux d’IPP du 3 mai 2017, confirmé par observations médicales du médecin conseil datées du 23 juillet 2020 qui relève ainsi :

(…) Il existe un état antérieur à l’accident caractérisé par un pied creux stade 2.

De plus, le lendemain du traumatisme les radiographies du 17/06/14 du pied droit montrait une :

« Ébauche de calcification de l’aponévrose plantaire. (') »

Cette calcification de l’aponévrose plantaire constitue également un état antérieur.

L’aponévrosite plantaire opérée le 28/11/2014 est donc survenue sur un pied creux et une calcification de l’aponévrose antérieure à la chute du 11/06/2014.

Il y a lieu de relever que dans le rapport médical d’évaluation du taux d’incapacité permanente du 3 mai 2017, le médecin conseil ne mentionnait aucun soin ou traitement antérieurement à l’accident de travail du 12 juin 2014 de ce pied creux évoquant (…) chute sur les 2 pieds (hauteur de 90 cm) responsable d’une douleur aiguë du talon gauche ayant décompensé un probable état antérieur muet d’aponévrosite plantaire.

Il apparaît ainsi que l’accident du travail survenu le 12 juin 2014 a aggravé l’état antérieur existant de M. Y , qu’il s’agisse de l’état antérieur des cervicales ou du pied, comme l’indique à raison celui-ci. La caisse apparaît mal fondée à se retrancher derrière une absence de pathologie objective et une boiterie non expliquée.

Il résulte de la combinaison des articles 10, 143 et 146 du code de procédure civile que les juges du

fond apprécient souverainement l’opportunité d’ordonner les mesures d’instruction demandées. Le fait de laisser ainsi au juge une simple faculté d’ordonner une mesure d’instruction demandée par une partie, sans qu’il ne soit contraint d’y donner une suite favorable, ne constitue pas en soi une violation des principes du procès équitable, tels qu’issus de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ou du principe du contradictoire.

La consultation médicale ou expertises

Il y a donc lieu de confirmer le taux médical de 10% retenu par le tribunal, lequel apparaît justifié, peu important la référence faite par l’expert à la notion de tendinopathie pour justifier son évaluation. En outre M. Y sollicite dans ses motifs un taux de 20%, tout en demandant dans son dispositif une consultation médicale ou une expertise, lesquelles n’apparaissaissent pas nécessaires, et subsidiairement la confirmation du taux d’IPP à 13 % au total . Enfin le docteur B ne fait état d’aucune proposition d’un taux différent de celui retenu par le pôle social.

Sur le taux professionnel

Il importe peu que l’article L 434-2 du code de la sécurité sociale ne distingue pas entre le taux médical et le taux professionnel.

L’annexe I à l’article R 434-32 du code de la sécurité sociale relatif au barème d’invalidité à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle indique notamment au titre des principes généraux que l’incapacité permanente est déterminée d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle.

(…)

Aptitudes et qualification professionnelles. La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s’agit là des facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.

Lorsqu’un accident du travail ou une maladie professionnelle paraît avoir des répercussions particulières sur la pratique du métier, et, à plus forte raison, lorsque l’assuré ne paraît pas en mesure de reprendre son activité professionnelle antérieure, le médecin conseil peut demander, en accord avec l’intéressé, des renseignements complémentaires au médecin du travail. La possibilité pour l’assuré de continuer à occuper son poste de travail – au besoin en se réadaptant
- ou au contraire, l’obligation d’un changement d’emploi ou de profession et les facultés que peut avoir la victime de se reclasser ou de réapprendre un métier, devront être précisées en particulier du fait de dispositions de la réglementation, comme celles concernant l’aptitude médicale aux divers permis de conduire.

Le taux d’incapacité permanente a vocation à permettre de compenser en partie une perte de salaire liée aux conséquences de la maladie.

La caisse motive le rejet de la demande formée par M. Y par l’absence de séquelles indemnisables, lesquelles ont cependant été retenues supra.

Il y a lieu de retenir que le médecin du travail à la suite de la visite de reprise du 7 mars 2017 a déclaré M. Y inapte au poste de bobinier receveur qu’il occupait avant l’accident du 12 juin 2014 en relevant que :

L’état de santé actuel résultant de l’AT du 12/06/2014 rend Mr Y G inapte à son poste de bobinier receveur et à toutes activités avec :

- station debout prolongée

- déplacement avec dénivelés

- manutention lourdes

- contraintes cervicales.

M. Y a fait l’objet d’une mesure de licenciement le 6 avril 2017 en raison de son inaptitude, de l’impossibilité de le reclasser et de son refus du reclassement proposé aux postes, d’une part de cariste bobines et d’autre part de massicotier, soit pour un travail différent de celui qu’il occupait. Il a depuis repris une activité d’exploitant individuel de petit bricolage entretien intérieur extérieur et est inscrit depuis le 23 janvier 2020 au répertoire des métiers avec un début d’activité mentionné au 1er février 2020.

Il indique des revenus inférieurs à ceux qu’il percevait dans le cadre de son activité professionnelle antérieure mais ne produit aucun élément permettant une de comparaison.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le taux de reclassement professionnel au taux retenu par le premier juge, lequel apparaît justifié.

Sur les dépens

S’agissant des dépens, l’article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s’ensuit que l’article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu’à la date du 31 décembre 2018 et qu’à partir du 1er janvier 2019 s’appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la caisse qui succombe à l’instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Rejette la demande de consultation médicale ou d’expertise médicale,

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de la Mayenne aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 20 octobre 2021, n° 19/05935