Cour d'appel de Toulouse, 18 mai 2015, n° 14/01844

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 18 mai 2015, n° 14/01844
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 14/01844
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 26 décembre 2012, N° 11/03981

Sur les parties

Texte intégral

.

18/05/2015

ARRÊT N° 289

N° RG: 14/01844

XXX

Décision déférée du 27 Décembre 2012 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 11/03981

M. Y

Z X

B C X

C/

DRFP DE MIDI-PYRENEES ET DU DEPARTEMENT DE LA HAUT

Etablissement Public DIRECTEUR REGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES DE MIDI PYRENEES ET DU DEPARTEMENT DE LA HAUTE GARONNE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX HUIT MAI DEUX MILLE QUINZE

***

APPELANTS

Monsieur Z X

XXX

XXX

Représenté par Me Francis NIDECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame B C X

XXX

XXX

Représentée par Me Francis NIDECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

DRFP DE MIDI-PYRENEES ET DU DEPARTEMENT DE LA HAUT

XXX

XXX

Représenté par Me Marc JUSTICE ESPENAN de la SCP MERCIE-FRANCES-JUSTICE ESPENAN, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Janvier 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. BRUNET président, et Mme MOULIS, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

B. BRUNET, président

M. MOULIS, conseiller

P. CRABOL, conseiller

Greffier, lors des débats : J. BARBANCE- DURAND

ARRÊT :

— Contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par M. MOULIS, conseiller en remplacement du président empêché, et par J. BARBANCE- DURAND, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Z X et B-C X ont un patrimoine constitué de nombreux biens immobiliers et d’un portefeuille de valeurs mobilières. Ils sont redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune.

En 2008, la brigade départementale de fiscalité immobilière de la Haute Garonne a effectué un contrôle sur pièces des déclarations ISF de 2005 à 2008. Ayant constaté que 11 immeubles sur les 17 appartenant au couple avaient été sous-évalués, elle leur a adressé le 10/12/2008 une proposition de rectification.

Le même jour elle leur adressait une proposition de rectification au titre de l’année 2007 pour le compte de liquidités (100780 €) non déclaré.

Les insuffisances de valeurs et omissions relevées sont de :

—  1768660 € pour 2005

—  1833620 € pour 2006

—  2126350 € pour 2007

—  2023539 € pour 2008.

Les rappels de droits qui en découlent et les pénalités applicables se décomposent ainsi :

—  74578 € au titre des droits supplémentaires

—  7403 € au titre des intérêts de retard

—  29831 € au titre des majorations de 40%.

Les droits devenus exigibles ont été mis en recouvrement par les services des impôts des entreprises de Toulouse centre .

Z X et B-C X ont sollicité le 13/11/2010 la remise gracieuse de la somme de 37234 € correspondant à la totalité des intérêts de retard et à la majoration de 40 %.

Par lettre du 23/02/2010 le service des impôts des entreprises a rejeté la demande .

Z X et B-C X ont alors saisi le conciliateur fiscal départemental qui, après avoir relevé qu’au 28/12/2010 la totalité des droits et des intérêts de retard avait été acquittée, leur a proposé une transaction se traduisant par l’abaissement de la majoration de 40% à 20 % soit une minoration totale de 14916 € en contrepartie de leur désistement de toute réclamation ou instance concernant cette imposition.

Par réclamation du 23/03/2011, le conseil des époux X a contesté le bien-fondé de l’application de la majoration de 40% pour manquement délibéré.

Cette contestation a été rejetée le 9/10/2011.

Suivant acte d’huissier en date du 30/11 /2011, Z X et B-C X ont fait citer le directeur régional des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne devant le tribunal de grande instance de Toulouse pour voir annuler la décision de 9/10/2011 et voir ordonner le dégrèvement total de la majoration de 40% mise à leur charge .

Le tribunal de grande instance, par décision du 27/12/2012 estimant que l’administration était fondée à invoquer la mauvaise foi des époux Z X, a :

— débouté ces derniers de leur contestation

— validé les avis de mise en recouvrement litigieux pour leur entier montant et pour les intérêts qui peuvent être dus depuis leur émission

— condamné les époux Z X aux entiers dépens.

Z X et B-C X ont relevé appel le 9/04/2014

L’ordonnance de clôture est en date du 6/01 /2015.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de leurs conclusions du 6/11/2014 les époux X demandent à la cour de :

— réformer le jugement

— accorder la décharge des majorations pour manquement délibéré d’un montant de 29831 €

— condamner la direction régionale des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne à leur payer la somme de 2500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils estiment que l’administration n’apporte pas la preuve qui lui incombe que les sous-estimations commises par eux l’auraient été de mauvaise foi.

Ils soutiennent :

— qu’ils ont tenté par tous les moyens d’obtenir les éléments objectifs de détermination des surfaces réelles de leurs immeubles afin d’établir une valorisation objective et que la recherche d’informations de leur part a été constante

— que la circonstance selon laquelle les sous-évaluations se sont répétées sur la période contrôlée de 4 années ne démontre en rien le manquement délibéré qui leur est imputé puisque la valeur établie à l’origine a été reprise par eux tous les ans.

Le directeur régional des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne réplique dans ses conclusions du 4/08/2014 qu’il convient de confirmer le jugement et de condamner les époux X à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

Il considère que les éléments constitutifs du manquement délibéré sont réunis .

Il estime que leur argumentation selon laquelle ils n’ont pas été en mesure d’obtenir des informations objectives sur la valeur de leurs biens n’est pas pertinente .

Il affirme que par contre le fait que les sous-évaluations sont très importantes, qu’elles portent sur la majeure partie du patrimoine taxable et qu’elles se sont répétées sur les 4 exercices contrôlés démontre le caractère intentionnel du manquement .

Il rappelle que lors d’une précédente procédure les époux X avaient fait l’objet d’un redressement portant sur trois immeubles, qu’ils avaient contesté la validité de la procédure de rectification et que suite à des irrégularités de procédure l’administration avait prononcé la décharge des impositions supplémentaires. Il indique que cependant cette décision ne permettait pas de considérer que l’administration validait les évaluations initiales des époux X.

Il en conclut que ceux-ci ne pouvaient ignorer les insuffisances de valeur vénale.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est constant que le litige ne porte que sur les majorations de 40 % réclamées aux époux X, les droits supplémentaires mis à leur charge et les intérêts de retard n’étant pas contestés .

L’article 1729 du code général des impôts dans sa version applicable à l’espèce dispose que : 'Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de :

—  40 % en cas de manquement délibéré

—  80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ou de dissimulation d’une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d’application des dispositions de l’article 792 bis’ .

Concrètement, deux conditions doivent obligatoirement être réunies pour autoriser le service vérificateur à caractériser l’infraction et justifier cette majoration de 40% très spécifique :

— le manquement (élément matériel) consiste en une inexactitude ou une omission de déclaration, ce qui n’est nullement contesté en l’espèce

— ce manquement doit être délibéré (élément intentionnel), c’est-à-dire traduire une volonté de se soustraire au paiement des taxes et (ou) impôts dus.

Dans la mesure où les omissions ou inexactitudes que peut commettre le contribuable dans ses déclarations sont présumées involontaires, la majoration de 40% visée à l’article 1729 du C.G.I. n’est susceptible d’être appliquée que si le directeur régional des finances publiques de Midi-Pyrénées et du département de la Haute-Garonne établit le caractère délibéré de ces négligences.

En effet, en application des dispositions de l’article L. 195 A. du Livre des procédures fiscales, la charge de la preuve du 'manquement délibéré’ incombe au fisc.

La direction régionale des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne est donc obligée de démontrer à l’aide de tous éléments d’information probants et objectifs, que le contribuable ne pouvait pas ignorer les insuffisances, inexactitudes ou omissions révélées par le contrôle de ses déclarations et que les faits reprochés ont été commis sciemment, en toute connaissance de cause.

La brigade de fiscalité immobilière a constaté une sous-évaluation portant sur 11 immeubles et après acceptation par les époux Z X des valeurs retenues par l’administration pour trois immeubles, la procédure de réévaluation ne porte plus finalement que sur 8 immeubles.

Pour ces 8 immeubles les insuffisances de valeur constatées sont de :

—  1.768.660 € pour 2005

—  1.833.620 € pour 2006

—  2.025.570 € pour 2007

—  2.023.539 € pour 2008.

Il convient d’y ajouter l’omission d’un compte bancaire de 100.780 € en 2007.

L’administration s’est référée pour parvenir à ces estimations à des éléments de comparaison (vente de biens immobiliers similaires à la même époque, dans le même quartier).

C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a estimé que la motivation de l’administration était détaillée, cohérente et qu’elle reposait sur des éléments sérieux .

Les époux X contestent tout d’abord les évaluations faites par l’administration au motif que les fiches de calcul servant de base aux impôts directs locaux, protégés par le secret professionnel , ne leur ont pas été communiquées par le centre des impôts fonciers de Toulouse qui leur a opposé une décision de rejet.

Cette décision a été confirmée par le tribunal administratif.

Cependant, et ainsi que l’a relevé le tribunal, les valeurs cadastrales ne reflètent aucunement la valeur du marché. En effet, les informations détenues par le service du cadastre n’ont aucune utilité quant à la détermination de la valeur vénale des immeubles.

Selon une réponse du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie publiée dans le JO sénat du 20/04/2006 produite aux débats par l’administration la détermination de la valeur des biens appartient aux contribuables sous leur propre responsabilité, ceux-ci pouvant s’adresser aux professionnels de l’immobilier, s’informer par le biais des publications sur l’état du marché de l’immobilier ainsi que par la consultation des sites internet spécialisés pour connaître la valeur de leurs biens immobiliers.

Or les époux X ne font pas état des démarches effectuées pour connaître la valeur de leurs biens et le seul fait pour eux d’invoquer l’impossibilité matérielle d’obtenir du service du cadastre les données permettant de déterminer la superficie exacte des immeubles ne saurait expliquer leur impossibilité à évaluer justement leurs biens alors que la surface n’est qu’un élément, parmi d’autres, d’évaluation d’un immeuble et qu’ils disposaient de tous autres moyens suffisants pour se renseigner sur le marché immobilier.

Dès lors, non seulement ils ne remettent pas utilement en cause l’évaluation faite par l’administration mais en outre ils ne justifient pas la leur en produisant des éléments de calcul, de référence ou des estimations immobilières faites par des professionnels.

Il convient en outre de relever divers autres éléments qui permettent de retenir le fait que c’est de façon délibérée qu’ils ont sous-estimé leurs biens.

Tout d’abord, propriétaires de 17 immeubles en tout, leur méconnaissance, invoquée, du marché immobilier toulousain est difficilement crédible.

Par ailleurs, la sous-évaluation des immeubles est très importante puisqu’ils ont été déclarés pour un tiers de leur valeur réelle ; elle a été répétée sur plusieurs années et elle porte sur 8 immeubles.

En outre, une précédente procédure provoquée par un contrôle portant sur la valeur déclarée de trois immeubles recueillis dans la succession de la mère de Z X, décédée le 14/08/1998, avait donné lieu à la saisine de la commission départementale de conciliation qui avait notamment, pour un des immeubles litigieux, situé XXX, fixé sa valeur à 167600 € .

Le fait que cette 1re procédure ait ensuite été entachée d’irrégularités ne permet pas d’écarter l’évaluation faite par la commission .

Or, faisant fi de cet avis, les époux X ont évalué cet immeuble en 2005 à la somme de 123000 € .

Enfin ils ne s’expliquent pas sur l’omission de compte bancaire en 2007 .

L’ensemble de ces éléments démontrent que c’est de façon intentionnelle que les époux X ont sous-évalué huit de leurs immeubles et il y a lieu de considérer que la direction régionale des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne rapporte la preuve de leur manquement délibéré .

La décision du tribunal sera dès lors confirmée en son entier.

Les époux X qui succombent supporteront les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme en son entier la décision entreprise

Y ajoutant

Condamne Z X et B-C X à payer à la direction régionale des finances publiques de Midi Pyrénées et du département de la Haute Garonne la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés devant la cour.

Condamne Z X et B-C X aux dépens d’appel dont distraction au profit de Maître Marc Justice Espenan, avocat en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Toulouse, 18 mai 2015, n° 14/01844