Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 22 décembre 2017, n° 16/03324

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 2, 22 déc. 2017, n° 16/03324
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 16/03324
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Montauban, 26 mai 2016, N° 15/00066
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

22/12/2017

ARRÊT N°17/909

N° RG : 16/03324

APB/BC

Décision déférée du 27 Mai 2016 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTAUBAN 15/00066

X Y

SAS HMY FRANCE (venant aux droits de la Sté. HERMES METAL)

C/

Z A

[…]

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 2 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT DEUX DECEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT

***

APPELANTE

SAS HMY FRANCE (venant aux droits de la Sté. HERMES METAL)

[…]

[…]

représentée par Me Christian BROCHARD de la SCP JOSEPH AGUERA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par Me COLY, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ

Monsieur Z A

[…]

[…]

représenté par Me Magali LAUBIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Novembre 2017, en audience publique, devant E F, présidente et Alexandra PIERRE-BLANCHARD, conseillère, toutes deux chargées d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

E F, présidente

Alexandra PIERRE-BLANCHARD, conseillère

Sonia DEL ARCO SALCEDO, conseillère

Greffière, lors des débats : B C

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

— signé par E F, présidente, et par B C, greffière de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. Z A a été embauché suivant contrat à durée indéterminée du 25 mars 1991 par la société Dejico, filiale du groupe HMY, en qualité de dessinateur.

Par la suite, il a été successivement chargé d’affaires puis, en 2007, responsable d’affaires, statut cadre.

Le contrat de travail de M. Z A a été transféré le 1er avril 2011 à la société Hermès-Métal, laquelle a été absorbée par la SAS HMY France.

L’activité de la société est la fabrication et la distribution de mobilier de magasins.

La convention collective applicable à l’entreprise est celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. Z A percevait 40 613 € par an pour un temps complet travaillé sur 218 jours conformément à une convention de forfait.

Par courrier du 10 novembre 2014, M. Z A a été convoqué à un entretien préalable fixé le 19 novembre 2014.

Il a été licencié pour faute simple par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 décembre 2014.

Le 18 février 2015, M. Z A a saisi le conseil de prud’hommes de Montauban de la contestation de son licenciement.

Par jugement du 27 mai 2016, le conseil de prud’hommes de Montauban a :

— dit et jugé que le licenciement de M. Z A est dépourvu de cause réelle et sérieuse, – condamné la société HMY à payer à M. Z A les sommes suivantes :

-50 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-302,04 € au titre du complément d’indemnité de licenciement,

-500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné à la société HMY de remettre à M. Z A les documents sociaux rectifiés en considération de la décision,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— débouté M. Z A du surplus de ses autres demandes,

— débouté la société HMY de l’ensemble de ses demandes,

— condamné la société aux dépens de l’instance.

La société HMY a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

Par conclusions visées au greffe le 16 octobre 2016, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence, la société HMY demande à la cour de :

— réformer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la demande de M. Z A s’agissant de l’irrégularité de procédure,

et, statuant à nouveau :

— dire et juger que le licenciement de M. Z A repose sur une cause réelle et sérieuse,

— dire et juger que le salarié a été rempli de l’intégralité de ses droits au titre de l’indemnité de licenciement,

en tout état de cause,

— débouter M. Z A de l’intégralité de ses demandes,

— le condamner aux entiers dépens ainsi qu’à 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 6 novembre 2017, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence, M. Z A demande à la cour de confirmer le jugement entrepris excepté :

— sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

et condamner la société HMY à lui payer la somme de 200000 € à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail,

— en ce qu’il a déclaré que l’irrégularité de procédure n’était pas imputable à l’employeur,

et de condamner la société HMY à payer à M. Z A 3 703 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

— condamner la société HMY à verser à M. Z A 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— statuer ce que de droit sur les dépens.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

L’article L.1235-1 du Code du travail dispose qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L’article L.1332-4 du code du travail dispose quant à lui qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article L.1232-6 du Code du travail que la lettre de licenciement fixe les termes du litige.

En l’espèce, il est fait grief au salarié dans la lettre du 18 décembre 2014 d’avoir commis une erreur sur la couleur de gondoles commandées par un supermarché, erreur qui aurait été constatée par l’employeur le 7 novembre 2014 à la suite d’une réclamation du client.

Il est visé une erreur dans la prise de commande ayant généré une erreur de production, de livraison et d’installation, avec pour conséquences une nouvelle livraison gratuite pour 15 000 €, des coûts supplémentaires de transport, de démontage du matériel non conforme et d’implantation du nouveau matériel, et l’insatisfaction du principal client.

La lettre de licenciement fait aussi état d’un rappel à l’ordre du 6 février 2013 pour des faits similaires.

Il est donc clair que l’employeur s’est positionné sur le terrain disciplinaire pour licencier son salarié.

M. Z A invoque la prescription des faits commis le 16 avril 2014 qui serait acquise au jour de l’engagement de la procédure de licenciement le 10 novembre 2014, dans la mesure où l’employeur ne prouve pas en avoir eu connaissance de manière différée le 7 novembre 2014.

La SAS HMY France produit aux débats le tableau d’enregistrement des commandes établi le 16 avril 2014, mentionnant la couleur blanche au lieu de la couleur brune pour les gondoles commandées par le client.

Il s’agit du document initial établi par M. Z A à partir duquel le chargé d’affaires et l’agent du bureau d’études doivent traiter la commande avant la mise en fabrication.

La SAS HMY France n’explique pas dans quelle mesure l’erreur prétendument commise par M. Z A le 16 avril 2014, et figurant sur les documents internes de l’entreprise utilisés par plusieurs services, n’aurait pas été décelée avant le 7 novembre 2014 alors même qu’elle soutient que l’erreur devait être évitée puisque le produit commandé par ce client était toujours de la même couleur brune.

Elle ne produit d’ailleurs aucun élément relatif à la réclamation du client alléguée en date du 7 novembre 2014, alors qu’elle invoque un décalage du point de départ de la prescription de près de sept mois et que la charge de la preuve lui en incombe.

Au demeurant, la cour observe que la SAS HMY France produit un précédent rappel à l’ordre adressé au salarié, faisant état d’un entretien du 22 janvier 2013 lui reprochant également une erreur de commande commise le 21 novembre 2012. Pour ce précédent, la SAS HMY France a bien été en mesure de découvrir le fait fautif moins de deux mois avant engagement de la procédure disciplinaire, à l’issue de laquelle finalement aucune sanction n’a été prise.

Dès lors, la cour constate que les faits fautifs allégués par M. Z A sont prescrits ; il n’y a donc pas lieu d’examiner les moyens de contestation au fond. Le jugement entrepris sera confirmé par substitution de motifs en ce qu’il a jugé le licenciement de M. Z A sans cause réelle et sérieuse.

Sur la procédure de licenciement :

M. Z A avait acquis 24 ans d’ancienneté au jour du licenciement ; l’entreprise employait à cette date plus de 10 salariés.

Pour débouter le salarié de sa demande indemnitaire, les premiers juges ont considéré que l’irrégularité de procédure liée au non-respect du délai de convocation à l’entretien préalable ne résultait pas du fait de l’employeur.

Or, M. Z A ne peut pas prétendre au paiement d’une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement dès lors que cette indemnité prévue par l’article L.1235-2 du code du travail ne peut pas se cumuler avec l’indemnité sanctionnant l’absence de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera donc confirmé par substitution de motifs en ce qu’il a rejeté la demande de M. Z A au titre de l’irrégularité de la procédure de licenciement.

Sur les demandes indemnitaires :

Sur le complément d’indemnité de licenciement :

Les parties sont contraires sur le mode de calcul de l’indemnité conventionnelle de licenciement, en particulier sur le salaire de référence à prendre en compte, M. Z A prenant en compte la moyenne des trois derniers mois de salaire précédant la notification du licenciement, la SAS HMY France prenant en compte les trois derniers mois de salaire incluant la période de préavis.

Le conseil de prud’hommes de Montauban a retenu le calcul proposé par le salarié.

Il résulte des dispositions de l’article 29 de la convention collective 'ingénieurs et cadres de la métallurgie’ applicable en l’espèce, que :

'L’indemnité de licenciement est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels, dont l’ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois précédant la notification du licenciement. Toutefois, si, à la date de fin du préavis, exécuté ou non, l’ancienneté de l’ingénieur ou cadre est inférieure à 8 années, l’indemnité de licenciement pourra être calculée sur la moyenne des 3 derniers mois si cette formule est plus avantageuse pour l’intéressé ; dans ce cas, toute prime ou gratification à périodicité supérieure au mois, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.'

M. Z A avait acquis 24 années d’ancienneté à la date du licenciement.

Le salaire de référence à prendre en compte était donc en l’espèce la moyenne des 12 derniers mois précédant la notification du licenciement, incluant avantages et gratifications contractuels, et non la moyenne des trois derniers mois ainsi que l’ont fait les parties et les premiers juges.

Cette moyenne des douze derniers mois de salaires se calcule sur les derniers mois de salaires antérieurs à la date de notification du licenciement, et s’élève en l’espèce à 3319,82 €.

Le montant de l’indemnité conventionnelle se calcule comme suit :

' pour la tranche de 1 à 7 ans d’ancienneté : 1/5 de mois par année d’ancienneté ;

' pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 de mois par année d’ancienneté ;

soit en l’espèce (7 x 1/5) + (17 x 3/5) = 11,6 mois soit une indemnité de 38509,91 €.

M. Z A a donc été intégralement rempli de ses droits en percevant la somme de 39041,21 €.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a alloué à M. Z A un complément d’indemnité de licenciement.

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse:

M. Z A, âgé de 46 ans lors du licenciement, sollicite la somme de 200 000 € soit 60 mois de salaire à titre de dommages-intérêts.

Il justifie être resté sans emploi durant 19 mois puis avoir retrouvé un emploi en contrat à durée déterminée donc précaire, et moins bien rémunéré.

Compte tenu de ces éléments et de l’importante ancienneté du salarié, le jugement sera réformé sur le quantum des dommages-intérêts et il sera alloué à M. Z A la somme de 80 000 € sur le fondement de l’article L.1235-3 du code du travail.

Sur le surplus des demandes :

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a alloué à M. Z A la somme de 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et en ce qu’il a condamné la SAS HMY aux dépens.

Par ailleurs l’équité et la situation économique des parties commandent d’allouer à M. Z A la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

La SAS HMY France, partie succombant à l’instance, est condamnée aux dépens ; sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile est rejetée.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris par substitution de motifs, en ce qu’il a :

— rejeté la demande pour procédure de licenciement irrégulière,

— jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SAS HMY France à payer à M. Z A la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, et aux dépens de première instance,

l’infirme pour le surplus, et statuant à nouveau :

Déboute M. Z A de sa demande de complément d’indemnité conventionnelle de licenciement,

Condamne la SAS HMY France à payer à M. Z A la somme de 80 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l’article L.1235-3 du code du travail,

Ordonne à la SAS HMY France de remettre à M. Z A les documents sociaux conformes au présent arrêt,

y ajoutant,

Condamne la SAS HMY France à payer à M. Z A la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SAS HMY France aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par E F, présidente, et par B C, greffière

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

B C E F

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