Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 10 mars 2021, n° 19/03321

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch., 10 mars 2021, n° 19/03321
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 19/03321
Décision précédente : Tribunal de commerce de Toulouse, 2 juin 2019, N° 2018J727
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

10/03/2021

ARRÊT N° 143

N° RG 19/03321 – N° Portalis DBVI-V-B7D-NC7T

CT/PHD

Décision déférée du 03 Juin 2019 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2018J727

PEYRON

[…]

C/

SAS SOCIETE DE CANALISATIONS ATLANTIQUE MEDITERRANEE T RAVAUX PUBLICS SCAM TP

confirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e chambre

***

ARRÊT DU DIX MARS DEUX MILLE VINGT ET UN

***

APPELANTE

[…]

la […]

[…]

Représentée par Me Eric ARNAUD-OONINCX de la SELARL ERIC ARNAUD-OONINCX, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SAS SOCIETE DE CANALISATIONS ATLANTIQUE MEDITERRANEE T RAVAUX PUBLICS SCAM TP

[…]

[…]

Représentée par Me Sébastien BRUNET-ALAYRAC de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Octobre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant P. DELMOTTE, Conseiller S.TRUCHE, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

P. DELMOTTE, faisant fonction de président

S. TRUCHE, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

Greffier, lors des débats : C.OULIE

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par P. DELMOTTE, président, et par C.OULIE , greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

La […] (la société ATT)est spécialisée dans le secteur des activités des agences de travail temporaire.

L a S A S S O C I E T E D E C A N A L I S A T I O N S A T L A N T I Q U E M E D I T E R R A N E E TRAVAUX-PUBLICS(la société SCAM) exerce son activité dans le domaine de la construction de réseaux pour fluides.

Le 23 décembre 2005, M. X, salarié de la société ATT, mis à la disposition de la société SCAM , a été victime d’un accident de travail .

Le 18 janvier 2007, M. X a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne aux fins de voir reconnaître l’existence d’une faute inexcusable de son employeur. Les sociétés ATT et Scam ainsi que la caisse primaire d’assurance maladie(la CPAM) de la Dordogne étaient parties à cette instance.

La CPAM de la Dordogne ayant fait l’avance de sommes dans l’intérêt du salarié accidenté, a mis en demeure la société ATT de lui rembourser une somme de 63.184,63 euros.

Par jugement du 15 septembre 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale a reconnu l’existence d’une faute inexcusable de la société ATT, survenue par l’entremise de la société Scam et a condamné celle-ci à relever et garantir la société ATT de l’ensemble des conséquences pécuniaires ayant pour origine l’accident du travail dont a été victime M. X.

Par jugement du 11 mai 2012, le tribunal des affaires de la sécurité sociale a fixé à la somme de 10.750 € le montant des préjudice dont la CPAM devait faire l’avance pour le compte de l’employeur sauf son action récursoire contre la société SCAM et a condamné la société Scam, garante de la société ATT, à payer à M. X une somme de 15393, 98€.

Ces décisions ont été prononcées dans l’ignorance de la procédure collective dont avait fait l’objet la société SCAM en cours d’instance.

En effet, par jugement du 8 octobre 2010, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert le redressement judiciaire de la société SCAM ; un plan de redressement d’une durée de 9 ans a été arrêté au profit de cette société par jugement du 3 mai 2011.

Le 2 novembre 2016, la société ATT a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes de la société SCAM à concurrence d’un montant de 74.860,42 €.

Par jugement du 4 avril 2017, confirmé par arrêt de la cour de céans du 23 novembre 2017, le juge de l’exécution prés le tribunal de grande instance de Toulouse a dit que :

— la société a commis une faute en ne déclarant pas l’existence de la procédure collective en cours devant le tribunal des affaires de la Sécurité sociale

— les jugements rendus le 15 septembre 2011 et le 11 mai 2012 sont des titres exécutoires implicitement mais nécessairement ratifiés par la société débitrice après l’adoption de son plan

— par application des articles L 622-26 et L 631-15 du code de commerce, dans leur rédaction issue de l’ordonnance du 18 décembre 2008 applicables en la cause les créances litigieuses sont inopposables au débiteur pendant l’exécution du plan et le demeureront après cette exécution du plan si les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal de commerce ont été tenus.

Par acte d’huissier du 5 novembre 2018, la société ATT a assigné la société SCAM devant le tribunal de commerce de Toulouse aux fins d’obtenir la condamnation de cette dernière à payer lui verser la somme de 73.934,63 euros à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 3 juin 2019, le tribunal de commerce de Toulouse a débouté la société ATT de sa demande en paiement de la somme de 73 934,63 € et l’a condamnée au paiement la somme de 1 000 € au de titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 16 juillet 2019, la société ATT a relevé appel de ce jugement.

Vu les conclusions du 8 octobre 2019 de la société ATT demandant à la cour

— d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré

— de condamner la société SCAM à lui payer la somme de EUR 73.934,63 à titre de juste dommages et intérêts ainsi que celle de 15 000€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Vu les conclusions du 2 janvier 2020 de la société SCAM demandant à la cour

Au principal,

— de confirmer intégralement le jugement déféré

— de dire qu’elle n’a commis aucune faute et de débouter par voie

de conséquence la Société ATT de l’ensemble de ses

demandes,

Subsidiairement,

— de dire , comme a pu le faire la Cour aux termes de sa décision du 23 Novembre 2017, que la société ATTn’a subi aucun préjudice et de débouter par voie de conséquence la société ATT de l’ensemble de ses demandes,

En tout état de cause,

— de condamner la société ATT à lui payer la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

La clôture de l’instruction a été prononcée le 6 avril 2020.

L’affaire initialement fixée à l’audience du 20 avril 2020 a été renvoyée à l’audience du 19 octobre 2020, en raison de la crise sanitaire, la procédure sans audience n’ayant pas été acceptée par les parties.

MOTIFS

Il résulte des articles L. 622-21-, L. 622-26 et R. 622-24 du code de commerce qu’à compter de la publication du jugement d’ouverture de la procédure collective, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception des salariés, et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans le délai de deux mois, sous réserve d’une demande de relevé de forclusion demandée dans un délai de six mois.

La créance dont est titulaire la société ATT constitue une créance de somme d’argent constituée par le remboursement des sommes qu’elle a payées à la CPAM et dont le fait générateur, résidant dans la faute inexcusable commise par l’entreprise utilisatrice à l’origine de l’accident du travail du 23 décembre 2005, est née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective ; comme telle, cette créance devait être déclarée, même à titre prévisionnel, à la procédure collective .

Il convient de relever que la procédure de redressement judiciaire de la société SCAM a été ouverte plus de trois ans après l’introduction de l’instance par le salarié devant le tribunal des affaires de sécurité sociale et avant même que ce salarié ne formule des demandes chiffrées par conclusions du 10 mars 2011 ; même si la société Scam a fait preuve de négligence en ne signalant pas au tribunal des affaires de sécurité sociale l’ouverture de sa procédure collective, il appartenait à la société ATT d’être vigilante quant à la situation juridique de son adversaire et de déclarer sa créance éventuelle à la procédure collective de la société SCAM dans le délai légal de déclaration ; à cet égard, le jugement d’ouverture a fait l’objet d’une publication au BODACC le 22 octobre 2010' de sorte que la société ATT était en mesure de connaître la situation juridique de la société SCAM et d’effectuer sa déclaration de créance en temps utile; comme le fait remarquer la société Scam; eût-elle été informée, il n’est même par certain que la société l’ATT y aurait procédé puisque, dans l’instance ayant donné lieu à l’arrêt du 23 novembre 2017, la société ATT adoptait une position contraire en soutenant de manière erronée que «'l’obligation de déclaration de créance ne concerne que les créances de sommes d’argent, ce qui n’a jamais été le cas en l’espèce puisque l’action n’avait d’autre fonction que de reconnaître la faute inexcusable de l’employeur, la traduction financière n’étant connue qu’après.'»

En tout état de cause, la société ATT ne peut éluder sa propre défaillance dans l’obligation de déclarer les créances pour tenter de contourner la règle de l’arrêt des poursuites individuelles et la discipline collective inhérente à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, s’imposant aux créanciers antérieurs, en recherchant la responsabilité délictuelle de la société Scam à l’effet d’obtenir des dommages et intérêts équivalant en réalité à la créance non déclarée et, comme telle, inopposable à la procédure collective ; d’une part, en effet, en ne déclarant pas sa créance, la société ATT a directement contribué à son propre dommage ; d’autre part, la fraude, invoquée par la société ATT au soutien de sa demande en paiement de dommages et intérêts ,n’équivaut pas à une simple faute. Consistant à utiliser à dessein une règle de droit pour en contourner une autre, la fraude réside dans un acte réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre le consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indû ou commis avec l’intention d’échapper à l’application d’une loi impérative ou prohibitive ; en l’espèce, le seul fait pour la société Scam de n’avoir pas porté

à la connaissance du tribunal des affaires de sécurité sociale l’existence de sa procédure collective ou de ne pas avoir fait part au mandataire judiciaire de l’instance en cours constitue une négligence qui n’a pas dégénéré en acte frauduleux et ne permet pas au créancier qui n’a pas déclaré sa créance d’agir en réparation, sur le fondement de l’article 1240 du code civil , du préjudice lié à l’inopposabilité de la créance à la procédure collective.

Il en résulte que le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions';

Condamne la société AXE TRAVAIL TEMPORAIRE aux entiers dépens,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société AXE TRAVAIL TEMPORAIRE, la condamne à payer à la société SCAM TP la somme de 1500 euros.

Le Greffier Le Président

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