Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 10 décembre 2014, n° 14/00425

  • Magasin·
  • Licenciement·
  • Salarié·
  • Poste·
  • Sociétés·
  • Reclassement·
  • Critère·
  • Employeur·
  • Ouverture·
  • Prime

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 15e ch., 10 déc. 2014, n° 14/00425
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/00425
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Rambouillet, 23 septembre 2012, N° 12/00077
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 10 DECEMBRE 2014

R.G. N° 14/00425

AFFAIRE :

SAS LES NOUVELLES JARDINERIES

C/

[W] [V]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 24 Septembre 2012 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° RG : 12/00077

Copies exécutoires délivrées à :

la SCP AZOULAI ET ASSOCIES

Me Mohamed CHERIF

Copies certifiées conformes délivrées à :

SAS LES NOUVELLES JARDINERIES

[W] [V]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SAS LES NOUVELLES JARDINERIES

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Jean-michel AZOULAI de la SCP AZOULAI ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0007 substituée par Me Stéphanie POGNONEC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2142

APPELANTE

****************

Monsieur [W] [V]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Mohamed CHERIF, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Octobre 2014, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Michèle COLIN, Président,

Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller,

Madame Bérénice HUMBOURG, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte BEUREL,

EXPOSE DU LITIGE

La société SAS Les Nouvelles Jardineries a pour activité le commerce de produits et articles de jardinerie dans le secteur du hard discount ; elle exerce sous l’enseigne Garden Price.

Elle a engagé M. [W] [V] par contrat à durée indéterminée du 20 juillet 2005 à effet du 1er septembre 2005, en qualité de Responsable Point de Vente, statut cadre, coefficient 260 de la convention collective des jardineries, graineteries.

A compter du 1er septembre 2006, M. [V] a été promu au poste de directeur groupe.

Son salaire brut mensuel était en dernier lieu de 3 907 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 janvier 2012, M. [V] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement économique fixé au 12 janvier suivant.

Le 1er février 2012 il a signé le contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé par l’employeur lors de l’entretien préalable.

La société Les Nouvelles Jardineries employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.

Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, M. [V] a saisi le conseil des prud’hommes de Rambouillet le 1er mars 2012 afin d’obtenir, selon le dernier état de sa demande, la condamnation de la société Les Nouvelles Jardineries à lui payer les sommes suivantes :

* 75 840 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, subsidiairement pour non respect des critères d’ordre du licenciement,

* 14 221 euros à titre de dommages et intérêts en raison des circonstances vexatoires de la rupture,

* 5 000 euros à titre de prime d’ouverture de magasin,

* 4 379 euros en remboursement des congés payés pris par obligation hors période,

* 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Les Nouvelles Jardineries a conclu au débouté et à la condamnation de M. [V] à lui payer 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 septembre 2012 le conseil des prud’hommes de Rambouillet a :

— dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— fixé la moyenne des salaires à 3 907 euros,

— condamné la société à payer au salarié les sommes suivantes :

* 39 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

* 5 000 euros à titre de prime pour l’ouverture du magasin de [Localité 5],

* 1 500 euros à titre d’indemnisation des congés payés pris par obligation,

* 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il a débouté le salarié du surplus de ses demandes et débouté la société Les Nouvelles Jardineries de sa demande reconventionnelle.

Pour se déterminer ainsi, le conseil a considéré que la société Les Nouvelles Jardineries n’avait produit avant la signature du contrat de sécurisation professionnelle aucun document écrit

indiquant la réalité des difficultés économiques et que seul un courrier du 22 décembre 2011 fait état d’une baisse substantielle du chiffre d’affaires depuis cinq mois, sans autre information.

La société Les Nouvelles Jardineries a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par jugement du tribunal de commerce de Versailles du 8 octobre 2013 elle a été placée en procédure de sauvegarde.

Par jugement du 15 octobre 2014 le tribunal de commerce a ordonné la cession totale de la société Les

Nouvelles Jardineries à la société Cote Nature Développement et a maintenu la SCP Laureau Jeannerot, prise en la personne de Maître [F] [N], dans sa fonction d’administrateur judiciaire.

Maître [F] [N] es qualité est intervenu volontairement à l’instance d’appel.

Il demande à la cour de juger le licenciement justifié, de débouter le salarié de l’ensemble de ses demandes et de le condamner à rembourser à la société Les Nouvelles Jardineries les sommes de 39 000 euros, 5 000 euros et 1500 euros qu’il a perçues en exécution du jugement du conseil des prud’hommes au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la prime d’ouverture de magasin et de l’indemnisation des congés payés pris par obligation.

A titre reconventionnel, il sollicite la condamnation du salarié à payer à la société Les Nouvelles Jardineries la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il expose :

— avoir rempli son obligation d’information sur le motif économique du licenciement avant la signature du CSP et en veut pour preuve la correspondance qui a été échangée entre les parties à ce sujet ;

— rapporter la preuve par des documents comptables et le rapport de l’administrateur judiciaire de la réalité du motif économique du licenciement de M. [V] : pertes constantes de 2008 à 2011 malgré la hausse du chiffre d’affaires nécessitant de réorganiser la société par la fermeture de deux magasins en 2011 et la création d’un nouvel établissement à [Localité 5] ;

— avoir exécuté son obligation de reclassement en proposant à M. [V] un poste de responsable de magasin, poste qu’il occupait au moment de son embauche;

— n’avoir pas eu à établir de critère d’ordre des licenciements, s’agissant d’un licenciement individuel.

M. [V] réitère ses demandes de première instance sous le bénéfice de l’exécution provisoire, portant à 4 500 euros sa demande de dommages et intérêts au titre des congés payés pris par obligation.

Il expose :

— n’avoir pas reçu d’information précise sur le motif économique de son licenciement , seul un courrier du 22 décembre 2011 donnant quelques indications : une baisse substantielle du chiffre d’affaires pendant cinq mois ;

— que la baisse du chiffre d’affaires, si elle est réelle, est un motif insuffisant pour caractériser des difficultés économiques réelles et sérieuses, d’autant que la société a bénéficié d’une avance en compte courant de ses actionnaires de un million d’euros ; que la société a en réalité cherché à réaliser des économies en le licenciant ; que si elle a fermé deux magasins en 2011 elle en a ouvert trois et elle doit en créer de nouveaux en 2012, tout cela étant prévu par le business plan qui prévoyait que la rentabilité serait atteinte une fois un certain nombre de magasins ouverts ; que le motif économique devant s’apprécier au jour du licenciement, la sauvegarde judiciaire qui a été prononcée le 8 octobre 2013 ne peut caractériser le motif économique ;

— que la société employeur n’a pas rempli loyalement son obligation de reclassement en lui proposant un poste qu’elle savait ne pouvoir être accepté, ce poste le rétrogradant dans ses fonctions d’origine avec un salaire moindre que son salaire d’embauche et impliquant des contraintes qu’il ne pouvait accepter (travail le week-end incompatible avec sa vie de famille et avec le suivi de sa formation au Cnam) ;

— que les critères d’ordre n’ont pas été respectés en ce qu’il existait dans la société trois autres postes de responsable administratif, de responsable achats et de responsable VAD et Commercial, mais aucun critère n’a été établi pour choisir de supprimer son poste plutôt que les autres, les délégués du personnel n’ayant pas été consultés à cette fin puisque l’employeur n’en a jamais mis en place malgré un effectif de plus de onze salariés.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l’exposé des moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues oralement à l’audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

En application de l’article L.1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l’entreprise ou à une cessation d’activité.

L’énonciation du motif économique du licenciement

Lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’un contrat de sécurisation professionnelle, l’employeur doit en énoncer le motif économique par un document écrit remis ou adressé au salarié au plus tard au moment de son acceptation.

En l’espèce, par lettre du 17 novembre 2011 remise en main propre contre décharge par laquelle la société employeur propose à M. [V] un reclassement, la société expose : Suite à la réorganisation à laquelle nous envisageons de procéder, notamment liée à des motifs économiques résultant de la fermeture de nos établissements d'[Localité 3] et d'[Localité 4], nous sommes conduits à envisager la suppression de votre poste de directeur de groupe.

En fondant la suppression du poste sur une réorganisation de la société liée à des motifs économiques tenant à la fermeture de deux magasins, la société employeur énonce suffisamment la cause économique du licenciement et ses conséquences sur l’emploi du salarié.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a considéré que l’employeur n’avait pas suffisamment énoncé le motif économique du licenciement, pour en conclure que cette mesure était dépourvue de cause réelle et sérieuse.

La réalité du motif économique

Dans une lettre du 19 décembre 2011dans laquelle elle répond aux contestations du salarié sur le motif économique de son licenciement, la société explicite les difficultés économiques de l’entreprise en faisant état de la baisse substantielle du chiffre d’affaires depuis cinq mois, de la situation de la trésorerie nécessitant de trouver de l’argent frais très rapidement afin de pouvoir poursuivre l’exploitation, de projets de réorganisation visant à rectifier comptablement les frais de siège afin de réaliser des économies dans les meilleurs délais ; la nécessité pour les employés du siège de redéfinir leurs missions pour participer à des tâches plus opérationnelles en magasin ; la tenue de réunions avec M. [V] pour étudier toutes les solutions d’organisation permettant d’augmenter sa part de travail opérationnel en magasin, son refus des propositions faites par l’employeur.

Elle produit par ailleurs ses bilans comptables qui font ressortir des pertes constantes pour les années 2008 à 2011 en dépit d’une augmentation du chiffre d’affaires :

2008 : CA de 3 599 K euros ; perte de 1 155 K euros

2009 : CA de 4 622 K euros ; perte de 925 K euros

2010 : CA de 5 754 K euros ; perte de 773 KE

2011 : CA de 7 094 K euros ; perte de 1 248 K euros.

Il apparaît ainsi qu’en dépit de la progression de son activité la conduisant à fermer et à rouvrir d’autres magasins selon leur rentabilité, la société rencontrait d’importantes difficultés de trésorerie qui l’on amenée à réduire les coûts de fonctionnement de son siège auquel était rattaché le poste de directeur groupe de M. [V], et, comme le fait observer le salarié, à faire effectuer un apport en compte courant par ses actionnaires.

Il résulte du rapport sur la situation économique de la société qui a été établi par l’administrateur judiciaire de la société avant l’ouverture de la procédure de sauvegarde le 8 octobre 2013, que ces mesures étaient nécessaires mais n’ont pas suffi à assainir la situation financière de la société.

L’administrateur expose en effet, lorsqu’il retrace l’historique des difficultés de la société, que si l’activité s’est développée régulièrement, l’entreprise voyant son chiffre d’affaires augmenter de 25 % jusqu’en 2011, si elle a procédé à des ajustements en ouvrant et en fermant des magasins à des emplacements non stratégiques, 6 magasins étant ainsi ouverts en région parisienne au moment de l’ouverture de la procédure de sauvegarde, elle a vu néanmoins son chiffre d’affaires diminuer de près de 13 % entre 2011 et 2012.

Il précise que la société a dû faire face à de gros problèmes de trésorerie qui ont mis un terme provisoire à son développement et qu’une restructuration a été engagée afin de réduire ses charges et notamment les coûts du siège.

Il ajoute qu’en dépit des efforts consentis, l’augmentation du chiffre d’affaires et les mesures de restructuration engagées, la société n’a pas été en mesure d’atteindre son prévisionnel d’activité et elle a rencontré de nouvelles difficultés de trésorerie à l’automne 2013.

Il est ainsi établi que le licenciement de M. [V] s’inscrivait bien dans la nécessité de diminuer les coûts de fonctionnement du siège de la société afin d’endiguer ses difficultés de trésorerie constituant un obstacle à sa croissance, que l’apport de fonds effectué par les actionnaires n’a pas suffi à assainir sa trésorerie puisque celle-ci était toujours en difficulté après le licenciement de M. [V], et que les mesures de fermeture et d’ouverture de nouveaux magasins constituaient elles aussi des mesures de sauvegarde de la situation financière de la société, qui sont restées vaines.

La réalité du motif économique est par conséquent établie.

L’obligation de reclassement

Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient; le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente; à défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure; les offres de réclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

En l’espèce, il n’est pas prétendu que la société Les Nouvelles Jardinerie fasse partie d’un groupe, et celle-ci justifie par la production de son registre du personnel qu’il n’existait pas de poste de reclassement disponible équivalant pour M. [V], ce que le salarié ne conteste d’ailleurs pas, reprochant en revanche à son employeur de ne pas avoir été loyal dans sa proposition de le reclasser dans un poste de responsable de magasin aboutissant à le déclasser dans un poste qu’il occupait à son embauche, avec un salaire moindre.

La société a cependant satisfait à son obligation de reclassement en lui offrant un poste de catégorie inférieure ainsi qu’il résulte des dispositions légales précédemment rappelées, et cette proposition n’apparaît pas déloyale en ce qu’elle s’inscrit dans le cadre de la réorganisation qui fondait la mesure de licenciement, à savoir la nécessité pour les employés du siège de redéfinir leurs missions pour participer à des tâches plus opérationnelles en magasin.

M. [V] est donc mal fondé à soutenir que l’obligation de reclassement n’ a pas été respectée.

Le licenciement économique étant justifié, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il l’a dit sans cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a alloué au salarié une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l’ordre des licenciements

M. [V] reproche à son employeur de l’avoir licencié parmi les autres salariés du siège occupant des postes équivalents, sans avoir préalablement établi de critères d’ordre des licenciements ; il indique qu’en sus de son poste, il existait un poste de responsable administratif, un poste de responsable achats et un poste de responsable VAD et Commercial ; il produit l’organigramme de la société au 30 juin 2011 qui atteste de la réalité de ces trois postes aux côtés du sien.

La société Les Nouvelles Jarndineries soutient, à tort, qu’l n’y a pas lieu d’établir des critères d’ordre dans un licenciement économique individuel, l’article L 1233-7 du code du travail disposant le contraire : Lorsque l’employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique , il prend en compte, dans le choix du salarié concerné, les critères prévus a l’article L 1235-5 (texte relatif à la fixation des critères d’ordre des licenciements en matière de licenciement collectif).

La société n’a effectivement établi aucun critère et ne s’explique nullement sur le choix du poste de M. [V] parmi les autres postes existants.

Si le non respect des critères d’ordre ne rend pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié est néanmoins fondé à solliciter la réparation du préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi, préjudice qui sera réparé, au vu des éléments de la cause, par l’allocation d’une somme de 23 000 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire

Au soutien de cette demande, M. [V] fait valoir qu’on lui a annoncé la suppression de son poste brutalement le 15 septembre 2011, sans aucun concertation préalable alors qu’en sa qualité de directeur de groupe il participait au comité de management de la société ; que par la suite l’employeur n’a eu de cesse de l’humilier en le discréditant totalement auprès des salariés; qu’il n’était même plus mis en copie des décisions prises pour les magasins, et une réunion d’organisation a été fixée le 10 janvier 2012 sans qu’il ait été convoqué ni mis en destinataire du message ; que ces humiliations successives ont fini par le mettre en arrêt de travail.

Le seul fait, justifié par le salarié , de ne pas avoir été convié ni informé d’une réunion de travail le 29 décembre 2011 alors que sa procédure de licenciement était en cours ne caractérise pas des conditions de rupture vexatoires.

Qaunt à l’annonce de la suppression de son poste le 15 septembre 2011, elle est formellement contestée par l’employeur dans une lettre du 19 décembre 2011 et le salarié ne l’établit par aucun élément. L’employeur reconnaît en revanche avoir discuté avec M. [V] de la nécessité de redéfinir les missions des salariés du siège pour participer à des tâches plus opérationnelles en magasin et avoir organisé plusieurs réunions avec M. [V] pour lui faire part de ses propositions de nouvelle organisation.

Ces circonstances et l’annonce d’une possible suppression de son poste le 15 septembre 2011 avant l’engagement de la procédure de licenciement par la proposition d’un reclassement le 17 novembre 2011 ne caractérisent pas une rupture brutale.

M. [V] sera par conséquent débouté de sa demande de dommages et intérêts et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement d’une prime pour l’ouverture du magasin de [Localité 5]

M. [V] expose qu’il percevait une prime de 5 000 euros à chaque ouverture de magasin, qu’il n’en a pas perçu à l’ouverture du magasin de [Localité 5] à la fin du mois d’octobre 2011.

Le conseil de prud’hommes a fait droit à cette demande, se fondant sur une courriel de M. [K] en date du 14 mars 2011 aux termes duquel il est indiqué au salarié qu’une prime de 10 000 euros lui est versée pour l’ouverture de deux magasins, M. [K] ajoutant qu’il espère avoir à lui verser le plus vite possible la prime du troisième magasin.

La société employeur sollicite l’infirmation du jugement sur ce point, arguant qu’en ce qui concerne l’exercice 2011/2012 aucune disposition n’a été prévue et que le magasin de [Localité 5] n’a été ouvert qu’au mois d’octobre 2011, soit postérieurement au dernier avenant signé.

Mais ni le contrat de travail ni ses avenants ne stipulent le versement d’une prime à l’ouverture d’un magasin, de sorte que l’employeur est mal fondé à se retrancher derrière l’absence de dispositions contractuelles pour l’exercice 2011/2012 pour conclure que la prime n’est pas due pour cet exercice.

Le mail du 14 mars 2011 auquel se réfère le conseil de prud’hommes contient effectivement un engagement unilatéral de l’employeur de verser une prime de 5 000 euros par ouverture de magasin en confirmant au salarié le versement d’une prime de 10 000 euros pour deux magasins, et en évoquant le paiement d’une prime de même nature pour l’ouverture du troisième magasin.

Or, il est n’est pas contesté que ce troisième magasin est bien celui de [Localité 5] et qu’il a été effectivement ouvert en octobre 2011comme le soutient le salarié , si bien que celui-ci est fondé à demander le paiement d’une somme de 5 000 euros pour l’ouverture de ce magasin en exécution de l’engagement unilatéral de l’employeur.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a alloué cette somme à M. [V].

Sur la demande de dommages et intérêts relative aux congés payés

Il est constant que M. [V] s’est vu imposer par lettre du 17 novembre 2011 de prendre les congés payés auxquels il avait droit du 5 au 31 décembre 2011, sans que le délai de prévenance de deux mois prévu par l’article D 3141-5 du code du travail ait été respecté.

Le conseil de prud’hommes a fait une juste appréciation du préjudice qui en est résulté pour le salarié en lui allouant une indemnité de 1500 euros ; le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Les indemnités allouées au salarié feront l’objet d’une fixation à la procédure collective à laquelle se trouve désormais soumise la société Les Nouvelles Jardineries.

En conséquence de l’exécution provisoire conférée au jugement entrepris et de son infirmation partielle, il y a lieu de condamner M. [V] à rembourser à la société Les Nouvelles Jardineries la somme de 16 000 euros correspondant à la différence entre la somme de 39 000 euros allouée à tort par le conseil au titre de l’indemnité sans cause réelle et sérieuse et l’indemnité de 23 000 euros allouée par la cour en réparation du préjudice résultant du défaut d’établissement des critères d’ordre des licenciements.

Chaque partie succombant partiellement en appel, elles conserveront la charge de leurs frais irrépétibles et dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant, par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Rambouillet du 24 septembre 2012 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Dit justifié le licenciement économique de M. [W] [V] ;

Déboute en conséquence M. [V] de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Fixe à 23 000 euros la créance indemnitaire de M. [V] au passif de la procédure collective de la société Les Nouvelles Jardineries au titre du défaut d’établissement des critères d’ordre des licenciements ;

Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Condamne M. [V] à rembourser à la société Les Nouvelles Jardineries la somme de 16 000 euros en conséquence de l’exécution provisoire du jugement de première instance ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d’appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, et signé par Mme Michèle Colin, président, et par Mme Brigitte Beurel, greffier.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 10 décembre 2014, n° 14/00425