Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 17 décembre 2020, n° 20/01321

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 6e ch., 17 déc. 2020, n° 20/01321
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/01321
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Pontoise, 9 mars 2020, N° 19/02569
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE

VERSAILLES

Code nac : 82E

6e chambre

ARRET N°479

CONTRADICTOIRE

DU 17 DÉCEMBRE 2020

N° RG 20/01321 -

N° Portalis DBV3-V-B7E-T5MC

AFFAIRE :

COMITE SOCIAL ÉCONOMIQUE D’ÉTABLISSEMENT CONFORAMA venant aux droits du Comité d’entreprise de l’établissement de Garges Les Gonesse de la société CONFORAMA FRANCE

SYNDICAT DU COMMERCE DU VAL D’OISE – UD FORCE OUVRIERE

C/

SA CONFORAMA FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Mars 2020 par le TJ de PONTOISE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 19/02569

Copies exécutoire et certifiées conformes délivrées à:

Me Oriane DONTOT

Me Anne-Laure WIART

Le: 18 décembre 2020

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX-SEPT DÉCEMBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, fixé au 10 décembre 2020 puis prorogé au 17 décembre 2020, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

COMITE SOCIAL ÉCONOMIQUE D’ÉTABLISSEMENT CONFORAMA venant aux droits du Comité d’entreprise de l’établissement de Garges Les Gonesse de la société CONFORAMA FRANCE

[…]

[…]

[…]

[…]

Représenté par : Me Abdellah BESSAA, plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1772, substitué par Me Floriane PERON, avocate au barreau de VERSAILLES; et Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, constituée, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617

SYNDICAT DU COMMERCE DU VAL D’OISE – UD FORCE OUVRIERE

[…]

[…]

Représenté par : Me Abdellah BESSAA, plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1772, substitué par Me Floriane PERON, avocate au barreau de VERSAILLES; et Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, constituée, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617

APPELANTES

****************

SA CONFORAMA FRANCE

N° SIRET : 414 819 4 09

[…]

Lognes

[…]

Représentée par : Me Sophie Anais PAPAFILIPPOU, plaidante, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : L305; et Me Anne-Laure WIART, constituée, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 437.

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Octobre 2020, devant la cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Madame Elodie BOUCHET-BERT

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTION DES PARTIES

La société Conforama France a pour objet la vente de biens d’équipements de la maison. Elle regroupe plusieurs magasins dans toute la France.

Le magasin de Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise) était doté d’un comité d’établissement et d’un comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Suite à la mise en place du comité social et économique (CSE), les salariés du magasin sont désormais représentés par le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO).

La convention collective nationale applicable dans l’entreprise est celle du négoce de l’ameublement du 31 mai 1995.

Un accord d’entreprise en date du 15 janvier 1989 est également applicable au sein de la société. Cet accord a fait l’objet d’un avenant en date du 14 novembre 1991 à effet du 1er janvier 1992.

Par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Pontoise en date du 24 avril 2019, le comité d’entreprise de l’établissement Conforama de Garges-lès-Gonesse et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière ont été autorisés à assigner à jour fixe la société Conforama France s’agissant d’un litige concernant la possibilité pour les salariés de travailler annuellement cinq jours fériés avec une majoration de leur rémunération.

Le 25 avril 2019, ils ont fait citer la société Conforama France devant le tribunal de grande instance de Pontoise.

Par jugement du 10 mars 2020, le tribunal judiciaire de Pontoise a :

— débouté le comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière de leur demande visant à ordonner à la société Conforama France, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, d’avoir à assurer les jours fériés travaillés la majoration de salaire de l’article 33 c de la convention collective et des articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise, de telle sorte qu’un salarié à la commission reçoive par jour férié, d’une part l’équivalent de 1/22 de son salaire et, d’autre part complémentairement, la majoration correspondant à 1,5 fois 1/22,

— débouté le comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière de leur demande visant à ordonner à la société Conforama France, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, d’avoir à respecter les articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise et l’article 33 de la convention collective s’agissant des souhaits des salariés en leur garantissant de travailler cinq jours fériés,

— dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France et du syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière visant à interdire, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à la société Conforama France d’ouvrir son magasin de Garges-lès-Gonesse sis […] à Garges-lès-Gonesse (95140) le […], le […], le […], le 15 août 2019, le 1er novembre 2019 et le 11 novembre 2019,

— condamné in solidum le comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière à payer à la société Conforama France la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné in solidum le comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière aux dépens.

Le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière ont interjeté appel de la décision le 3 juillet 2020.

Par conclusions adressées par voie électronique le 19 août 2020, ils demandent à la cour de :

— les juger recevables et bien fondés en leur appel,

— infirmer le jugement entrepris,

— réformer le jugement attaqué et statuant à nouveau,

— ordonner à la société Conforama France, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, d’avoir à respecter les articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise et l’article 33 de la convention collective s’agissant des souhaits des salariés en leur garantissant de travailler cinq jours fériés,

— ordonner à la société Conforama France, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, d’assurer les jours fériés travaillés la majoration de salaire de l’article 33 c de la convention collective et des articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise, de telle sorte qu’un salarié à la commission reçoive par jour férié, d’une part l’équivalent de 1/22 de son salaire et, d’autre part complémentairement, la majoration correspondant à 1,5 fois 1/22,

— à défaut, interdire, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à la société Conforama France d’ouvrir son magasin de Garges-lès-Gonesse sis […] à Garges-lès-Gonesse (95140) tous les jours fériés travaillés,

— condamner la société Conforama France à verser au comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), au titre de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité de 3 600 euros,

— condamner la société Conforama France à verser au syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité de 3 600 euros,

— condamner la société Conforama France aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Dontot, JRF avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions adressées par voie électronique le 22 juillet 2020, la société Conforama France demande à la cour de :

— confirmer le jugement entrepris,

— constater que la société Conforama France respecte les dispositions conventionnelles applicables concernant la rémunération des jours fériés,

— constater que la société Conforama France respecte les dispositions conventionnelles applicables concernant la garantie de cinq jours fériés chômés, outre le 1er mai,

— constater que la société Conforama France est de parfaite bonne foi,

— débouter les demandeurs de l’ensemble de leurs demandes,

— les condamner solidairement au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— les condamner aux entiers dépens.

Par ordonnance rendue le 7 octobre 2020, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 27 octobre 2020.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Sur la rémunération des jours fériés

Le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière prétendent que la société Conforama France ne fait pas application de l’article 33 c de la convention collective et des dispositions des articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise du 15 janvier 1989, qu’ainsi la société Conforama France ne respecte pas la rémunération majorée des jours fériés malgré l’arrêt prononcé le 6 juin 2013 par la cour d’appel de Versailles, aux termes duquel les vendeurs gueltés ont droit les jours fériés à une rémunération majorée égale, a minima, à 1/22, la majoration de cette rémunération étant également due quand le jour férié tombe un jour de repos.

Ils exposent que les vendeurs du magasin de Garges-lès-Gonesse sont effectivement rémunérés à la commission ou au rendement puisqu’ils perçoivent, outre un salaire de base fixe mensuel de 76,23 euros ou 4,58 euros, soit un taux horaire 'ridicule et quasiment inexistant' de 0,50 centimes d’euros, voire 0,030 centimes d’euros, une rémunération variable constituée de commissions sur les ventes réalisées, dites gueltes.

Ils font valoir que dans ce contexte, il est primordial que l’article 33 c de la convention collective et les articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise organisant la majoration des salaires soient respectés afin que les vendeurs soient assurés de recevoir les jours fériés un salaire au moins égal à une fois et demi leur rémunération sur la base moyenne des douze derniers mois ; que si la société Conforama France a appliqué ces dispositions jusqu’à la fin de l’année 2012, elle a ensuite cessé de verser aux vendeurs la majoration de 100 %, tandis que les autres catégories du personnel ont continué de percevoir la majoration de leur salaire les jours fériés ; que de plus, lorsqu’un jour férié coïncide avec un jour de repos hebdomadaire, les vendeurs ne sont même plus payés au titre de la rémunération majorée des jours fériés au contraire des salariés mensualisés ; que pour déterminer le taux horaire de base pour les jours fériés, la société Conforama France ne prend pas pour assiette de calcul le montant réellement perçu mensuellement par les salariés gueltés, voire leur salaire minimum garanti, mais seulement leur salaire mensuel fixe, ce qui aboutit à ce qu’ils soient payés sur une base amoindrie alors que le salaire pour ces journées de travail devrait être majoré et doublé ; que le taux horaire de base pour les jours fériés devrait être calculé, a minima, en prenant pour assiette le salaire conventionnel garanti ; que la société Conforama France commet sciemment une grave irrégularité et une discrimination injustifiée, qui touche une trentaine de salariés non cadres sur un effectif global de 60 salariés (52 non cadres et 13 cadres).

Ils demandent qu’il soit fait injonction à la société Conforama France de garantir aux salariés payés à la commission, travaillant un jour férié, de percevoir d’une part l’équivalent de 1/22 de leur salaire et, d’autre part complémentairement, la majoration de salaire correspondant à 1,5 fois 1/22.

La société Conforama France fait valoir en réplique, s’agissant de la rémunération des jours fériés, qu’il y a lieu de s’en tenir à la lettre des accords ; qu’elle a toujours fait application des dispositions de l’accord d’entreprise, plus favorables que celles de l’accord de branche ; que les modalités de paiement des jours fériés n’ont aucunement changé depuis 2011 ; que tous les salariés travaillant un jour férié bénéficient d’une majoration de 100 %, calculée selon des modalités adaptées au système de rémunération ; qu’il n’existe aucune inégalité de traitement.

Sur ce, il apparaît que tant la convention collective du négoce de l’ameublement que l’accord d’entreprise applicables au sein de la société Conforama comprennent des dispositions relatives à la rémunération des jours fériés.

Selon l’article 33 c de la convention collective relatif au travail de nuit, des jours fériés, et au travail exceptionnel du dimanche :

« La fête du travail du 1er mai est obligatoirement chômée et payée.

Trois jours fériés légaux parmi ceux ci-après énumérés :

- jour de l’An (1er janvier),

- lundi de Pâques,

- fête de la Victoire (8 mai),

- Ascension,

- lundi de Pentecôte,

- fête nationale (14 juillet),

- Assomption (15 août),

- Toussaint (1er novembre),

- anniversaire de l’Armistice (11 novembre),

- Noël (25 décembre),

seront chômés et payés. Dans les établissements de plus de 20 salariés, un jour férié supplémentaire est chômé. Dans les établissements de plus de 30 salariés, deux jours fériés supplémentaires sont chômés. Avant le 1er février de l’année, les jours fériés chômés (3, 4 ou 5) seront déterminés par l’employeur après consultation des représentants du personnel.

Le travail les autres jours fériés donnera lieu à une majoration de 50 % du salaire horaire effectif réel gagné dans le mois hors travaux exceptionnels.

Pour les salariés rémunérés à la commission ou au rendement, ils devront être assurés de recevoir, ce jour-là, un salaire au moins égal à une fois et demi la rémunération ramenée sur une base horaire moyenne des 12 derniers mois de travail hors travaux exceptionnels. »

Il se déduit de ces dispositions que les salariés de l’établissement de Garges-lès-Gonesse, qui compte plus de 30 salariés, doivent pouvoir bénéficier de cinq jours fériés chômés et payés, outre le 1er mai, et que le salarié qui travaille un des cinq autres jours fériés doit percevoir une majoration de salaire de 50 %.

Les articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise du 15 janvier 1989, modifié par avenant du 14 novembre 1991, sont ainsi rédigés :

« JOURS FÉRIÉS :

Article 19 :

Les jours fériés légaux (1er janvier – Lundi de Pâques – 1er mai – 8 mai – Ascension – Lundi de Pentecôte – 14 Juillet – Assomption – Toussaint – 11 novembre – Noël) qui coïncident avec un jour normalement travaillé et qui seraient chômés n’entraineraient pour les salariés, aucune réduction de la rémunération.

En dehors du 1er Mai, les jours fériés qui seront chômés, seront déterminés par le directeur de l’établissement, après consultation du Comité d’Etablissement ou à défaut des délégués du personnel au plus tard pour fin février. Un affichage sera fait comportant le mode de rémunération des salariés commissionnés.

Article 20 :

En cas de travail un jour férié, les salariés bénéficient en plus de leur salaire habituel mensuel, du paiement des heures effectuées ledit jour férié, au taux normal de l’heure. En cas d’heures supplémentaires, celles-ci bénéficieront d’une majoration de 100 %. Cette majoration se substitue et ne s’ajoute pas aux augmentations éventuelles pour heures supplémentaires prévues à l’article 18.

Issu d’un commun accord entre la Direction et le salarié, au lieu du paiement défini ci-dessus, le salarié pourra bénéficier d’une journée de repos qui devra être prise dans les deux mois suivant le jour férié. Au-delà de ce délai, si la journée de repos n’a pas été prise, le paiement ci-dessus sera effectué. »

Il résulte ainsi de l’accord d’entreprise que le salarié qui travaille un jour férié bénéficie soit d’une majoration de 100 %, soit d’un jour de repos.

Après avoir rappelé que les dispositions conventionnelles doivent s’articuler selon le principe de faveur et que le caractère plus favorable d’une disposition conventionnelle s’apprécie globalement au niveau de l’ensemble des salariés, le tribunal en a exactement déduit que c’est ici l’accord d’entreprise qui offre les dispositions les plus favorables aux salariés de l’établissement de Garges-lès-Gonesse. L’accord d’entreprise accorde en effet aux salariés travaillant un jour férié une majoration de 100 % ou un jour de repos.

Il ne saurait cependant être fait une application cumulative des dispositions conventionnelles ainsi rappelées, comme le revendiquent les appelants en sollicitant à la fois, au titre de la rémunération des jours fériés, une somme équivalant à 1/22 du salaire et une majoration de salaire de 1,5 x 1/22.

La cour observe ensuite qu’il existe plusieurs systèmes de rémunération au sein de l’entreprise :

— un système pour les salariés ne réalisant pas de vente, qui sont payés selon un salaire fixe : le travail un jour férié entraîne pour eux une majoration de 100 % du salaire ;

— un système pour les vendeurs, qui sont essentiellement rémunérés en fonction des ventes qu’ils réalisent puisque leur rémunération se décompose en un fixe, assez bas, et une rémunération à la guelte.

S’agissant de ces derniers, il résulte des explications de la société Conforama France confortées tant par les bulletins de paie qu’elle produit et qui sont parfaitement lisibles contrairement à ce que prétendent les appelants, que par les bulletins de paie produits par ces derniers, que le travail un jour férié est rémunéré de la façon suivante : paiement du salaire de base et des gueltes du mois passé, auxquels s’ajoutent d’une part, une majoration de 100 % des heures travaillées le jour férié (taux horaire x nombre d’heures) et d’autre part, un taux de compensation correspondant à la moyenne de la rémunération perçue par le vendeur au titre de l’année précédente et intégrant donc les gueltes, y compris celles réalisées les jours fériés travaillés, ramenée au taux horaire (taux de compensation x nombre d’heures travaillées le jour férié).

Ceci contredit les allégations des appelants selon lesquelles la rémunération des jours fériés ne donnerait lieu qu’à la majoration du fixe.

Il apparaît en outre que le 'taux normal de l’heure’ auquel se réfère l’article 20 susvisé de l’accord d’entreprise est bien le taux horaire du salaire fixe de chaque vendeur, et non comme le soutiennent les appelants celui du salaire conventionnel garanti. La seule obligation pour l’employeur au regard du salaire conventionnel garanti est en effet de verser ce salaire minimum au vendeur dont les gueltes sur les ventes réalisées, même augmentées du salaire de base/fixe, n’atteindraient pas au cours d’un mois ce minimum.

Les premiers juges ont donc justement retenu que le système mis en place par la société Conforama France respecte les conditions fixées par l’accord d’entreprise et que les jours fériés sont bien rémunérés avec une majoration de 100 %, laquelle intègre tant le fixe que le variable des vendeurs.

La cour relève comme le tribunal que ce système est appliqué de façon constante depuis 2011, seul le taux de compensation étant amené à varier en fonction de la rémunération perçue par chaque vendeur au titre de l’année précédente, ce que les attestations produites par les appelants ne permettent pas de contredire utilement.

Le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a considéré qu’aucune inégalité de traitement ne pouvait être caractérisée dès lors que la même règle conventionnelle était appliquée à l’ensemble des salariés, seules les modalités de calcul différant pour tenir compte du système de rémunération propre à chaque catégorie, vendeurs et non vendeurs.

Sur le nombre de jours fériés chômés

Le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière font ici valoir qu’au regard des dispositions de l’article 33 c de la convention collective, le nombre total de jours fériés chômés au sein du magasin de Garges-lès-Gonesse, qui compte plus de 30 salariés, est de six ; que par référence aux onze jours fériés légaux, il reste cinq jours fériés non chômés qui doivent normalement pouvoir être travaillés avec le bénéfice de la majoration de la rémunération ; que cependant le directeur du magasin de Garges-lès-Gonesse ne respecte plus, depuis 2013, le quota des jours fériés travaillés et veut en réduire le nombre, contrairement aux souhaits exprimés par les salariés vendeurs, qui aspirent ainsi à augmenter leur rémunération et leur pouvoir d’achat ; qu’il choisit de faire travailler les jours fériés des salariés sous contrat à durée déterminée et/ou à temps partiel, voire de demander aux chefs de rayon, cadres, d’accomplir des tâches de vente contractuellement réservées aux vendeurs ; que courant mai 2019 et alors que le tribunal était déjà saisi, le directeur du magasin a poussé 'la malice et la mauvaise foi’ jusqu’à présenter à ses salariés un document préétabli stipulant qu’ils demandent à renoncer à leur 'obligation d’avoir au minimum cinq jours fériés chômés et payés’ hors repos hebdomadaire et repos dominical, en plus du 1er mai.

Ils demandent en conséquence que, sous astreinte, il soit fait injonction à la société Conforama de permettre à ses salariés, dans les conditions des articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise et de l’article 33 de la convention collective, de travailler cinq jours fériés rémunérés, et à défaut de respect de cette injonction, qu’il lui soit interdit d’ouvrir son magasin de Garges-lès-Gonesse tous les jours fériés travaillés.

La société Conforama France fait valoir en réplique qu’elle garantit bien à ses salariés cinq jours fériés par an, outre le 1er mai, et ce conformément aux dispositions conventionnelles ; qu’elle a convoqué les membres du comité d’établissement à une réunion fixée le 17 janvier 2019, afin de les informer et consulter sur les jours fériés chômés pour l’année 2019, qu’un planning des jours fériés a été transmis, qu’elle a ainsi parfaitement respecté son obligation conventionnelle de procéder à une information/consultation avant fin février, que cependant les élus ont estimé ne pas être suffisamment informés, ce qui a donné lieu à de nouvelles réunions des membres du comité d’établissement le 29 janvier 2019 puis le 19 février 2019, à l’issue desquelles les élus ont persisté, en toute mauvaise foi, à soutenir que la société Conforama France ne respecterait pas ses obligations conventionnelles.

L’article L. 3133-1 du code du travail liste les jours fériés, au nombre de onze, et l’article L. 3133-3-1 renvoie au champ de la négociation collective le soin de définir les jours fériés chômés. A défaut d’accord, l’employeur fixe les jours fériés chômés (article L. 3133-3-2).

En application des dispositions de l’article 33 c de la convention collective applicable, précédemment énoncées, les salariés de l’établissement de Garges-lès-Gonesse, qui compte plus de 30 salariés, doivent pouvoir bénéficier de cinq jours fériés chômés, outre le 1er mai, soit au total six jours.

L’article 19 de l’accord d’entreprise prévoit qu’ « En dehors du 1er Mai, les jours fériés qui seront chômés, seront déterminés par le directeur de l’établissement, après consultation du Comité d’Etablissement ou à défaut des délégués du personnel au plus tard pour fin février. Un affichage sera fait comportant le mode de rémunération des salariés commissionnés. »

Il ne se déduit aucunement de ces dispositions que la société Conforama France doit garantir à ses salariés de pouvoir travailler cinq jours fériés par an, afin de bénéficier de la majoration de la rémunération prévue à ce titre.

La cour constate en outre, au vu des pièces versées aux débats, que la procédure d’information et de consultation du comité d’établissement a été régulièrement menée au cours des mois de janvier et février 2019, conformément aux termes de l’article 19 susvisé de l’accord d’entreprise.

Ainsi, c’est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont débouté le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO) et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière de leur demande visant à ordonner à la société Conforama France, sous astreinte, d’avoir à respecter les articles 19 et 20 de l’accord d’entreprise et l’article 33 de la convention collective s’agissant des souhaits des salariés en leur garantissant de travailler cinq jours fériés.

La cour confirmera pareillement le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les appelants de leur demande subsidiaire visant à interdire à la société Conforama France d’ouvrir son magasin de Garges-lès-Gonesse tous les jours fériés travaillés, qui n’est pas autrement explicitée en cause d’appel.

Sur le manque de loyauté de la société Conforama France

Le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière reprochent à la société Conforama France un manque de loyauté tout au long du processus d’information/consultation, en ce qu’elle a rédigé unilatéralement l’ordre du jour de la réunion du 29 janvier 2019, en ce qu’elle n’a pas donné d’informations suffisantes et loyales quant à son refus de prendre en considération les souhaits des salariés de travailler cinq jours fériés et quant au montant des rémunérations versées les jours fériés travaillés.

Ils prétendent que l’inspection du travail a interpellé la société Conforama France par son courrier du 27 février 2018, notamment au sujet des jours fériés, sans pour autant que la situation soit normalisée.

La société Conforama France fait observer que les appelants sont dans l’incapacité d’apporter le moindre élément démontrant sa mauvaise foi.

Tel qu’énoncé par l’article 19 de l’accord d’entreprise, le comité d’établissement doit obligatoirement être consulté chaque année avant d’arrêter la liste des jours chômés et, à supposer démontré le fait que la Direction ait arrêté unilatéralement l’ordre du jour de la réunion du 29 janvier 2019, ce qui n’est au demeurant pas le cas puisque la cour observe que cet ordre du jour est signé à la fois du président du comité d’établissement par ailleurs directeur du magasin et du secrétaire de ce comité, cela n’aurait pas empêché les élus de donner leur avis, ce qu’ils ont fait puisque trois réunions ont dû être organisées pour traiter ce sujet, sans pour autant qu’un accord soit trouvé.

La société Conforama France justifie qu’à l’occasion de ces réunions, elle a communiqué les plannings prévisionnels de tous les salariés ainsi qu’un rappel des modalités de rémunération des jours fériés ; qu’en outre elle a répondu point par point à la résolution du comité d’entreprise du 29 janvier 2019 lors de la réunion extraordinaire du 19 février 2019.

Il sera enfin observé que par courrier du 27 février 2018, l’inspection du travail s’est limitée à solliciter de la société Conforama France des précisions sur les modalités de calcul des taux concernant notamment les jours fériés, sans qu’il puisse s’en déduire que cette société n’aurait pas respecté les dispositions conventionnelles applicables.

Le moyen tiré d’un manque de loyauté de la société Conforama France sera en conséquence écarté.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière supporteront in solidum les dépens en application des dispositions de l’article'696 du code de procédure civile.

Ils seront en outre condamnés in solidum à payer à la société Conforama France une indemnité sur le fondement de l’article'700 du code de procédure civile, que l’équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, qui sont donc confirmés, et 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Pontoise ;

Y ajoutant,

CONDAMNE in solidum le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière à verser à la société Conforama France la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière de leur demande de ce chef ;

CONDAMNE in solidum le comité social et économique d’établissement Conforama Paris-Nord (CSE E PNO), venant aux droits du comité d’entreprise de l’établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, et le syndicat du commerce du Val-d’Oise UD Force Ouvrière aux dépens ;

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Isabelle Vendryes, présidente, et par Madame Elodie Bouchet-Bert, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 17 décembre 2020, n° 20/01321