Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 19 mai 2021, n° 17/03322

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 19 mai 2021, n° 17/03322
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 17/03322
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Versailles, 28 mai 2017, N° F14/00052
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 MAI 2021

N° RG 17/03322

N° Portalis DBV3-V-B7B-RVGW

AFFAIRE :

Y X

C/

Société BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 mai 2017 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de VERSAILLES

Section : E

N° RG : F14/00052

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jérôme WALTER

Me Catherine CIZERON

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur Y X

né le […] à […]

de nationalité française

[…]

[…]

Représentant : Me Jérôme WALTER, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0206

APPELANT

****************

Société BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE

N° SIRET : 549 800 373

[…]

[…]

Représentant : Me Catherine CIZERON de la SELARL CABINET DE L’ORANGERIE, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.404 et Me Anne FICHOT de la SCP PIGOT SEGOND – ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: G0628

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 mars 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

Par jugement du 29 mai 2017, le conseil de prud’hommes de Versailles (section encadrement) a :

— condamné la société Banque Populaire Val de France à verser M. Y X la somme de 2 euros au titre de non-respect de la clause de non concurrence,

— débouté M. X du surplus de ses demandes,

— débouté la société Banque Populaire Val de France de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Banque Populaire Val de France aux éventuels dépens d’instance.

Par déclaration adressée au greffe le 3 juillet 2017, M. Y a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 25 octobre 2018.

Par dernières conclusions remises au greffe le 4 avril 2018, M. Y X demande à la cour de':

— le recevoir en son appel et le dire bien fondé,

— annuler et réformer la décision entreprise,

en conséquence,

statuant à nouveau,

— dire que le licenciement pour faute intervenu le 7 janvier 2013 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamner la société Banque Populaire Val de France à lui verser la somme de 180 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse dont il a fait l’objet,

— dire nulle la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat de travail le liant à la société Banque Populaire Val de France, en tant qu’elle ne comporte aucune contrepartie financière,

— condamner la société Banque Populaire Val de France à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts résultant de la nullité de ladite clause,

— dire que lesdites sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2014, date de saisine du conseil de céans,

— ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil,

— condamner la société Banque Populaire Val de France à lui verser la somme de 6 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Banque Populaire Val de France aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe le 3 juillet 2017, la société Banque Populaire Val de France demande à la cour de':

— la recevoir en sa constitution d’intimée,

— la recevoir en ses écritures et la dire bien fondée,

— confirmer la décision de première instance en ce qu’elle a jugé le licenciement reposant sur une faute caractérisée par un motif réel et sérieux,

en conséquence,

— débouter M. X de sa demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

subsidiairement,

— dire que M. X ne démontre pas son préjudice à ce titre et limiter son indemnisation à 6 mois de salaire conformément aux dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, dans sa version applicable à la date du licenciement,

— infirmer la décision en ce qu’elle a jugé la clause de non-concurrence nulle,

subsidiairement,

— dire que M. X ne rapporte pas la preuve du préjudice lié à l’existence d’une clause de non-concurrence et à sa nullité,

— débouter M. X de sa demande de dommages-intérêts au titre de la nullité de la clause de non-concurrence,

— débouter M. X de l’intégralité de ses demandes,

— condamner M. X à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X aux entiers dépens.

LA COUR,

Sur la procédure,

La société Banque Populaire Val de France, dans le corps de ses conclusions, soumet à la cour une demande relative à l’obligation de la postulation devant la cour d’appel en matière prud’homale et sur l’éventuelle irrecevabilité de l’appel de M. X.

Dès lors que dans le cadre de la représentation obligatoire devant la cour d’appel, la postulation n’est pas obligatoire en matière prud’homale, l’appel de M. X est recevable.

Au fond,

M. Y X a été engagé par la Banque Populaire Rive Ouest de Paris, en qualité de chargé de clientèle professionnelle, par lettre d’engagement du 27 septembre 1999.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des banques.

En dernier lieu, M. X exerçait, depuis le 21 décembre 2005, au sein du siège les fonctions de chargé d’études et percevait une rémunération brute mensuelle de 2 557,87 euros.

Par lettre du 27 novembre 2012, M. X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 18 décembre 2012.

Il a été licencié par lettre du 4 janvier 2013 pour faute dans les termes suivants :

«

(')

Le 15 novembre dernier, nous avons eu le regret de constater que vous étiez manifestement dans un état d’ébriété avancé, alors que vous vous trouviez sur votre lieu de travail, et à tel point qu’un taxi a dû être appelé pour vous raccompagner chez vous. Vous étiez notamment dans un état de somnolence avancé qui ne vous permettait pas de travailler et n’arriviez plus à vous déplacer par vous-même.

Cet incident n’est pas isolé, puisque le 31 mai 2011, vous avez fait l’objet d’une mise en garde pour des faits similaires datant du 11 mai. Alors que vous étiez sur votre lieu de travail, vous aviez dû vous faire raccompagner chez vous par un taxi, votre état d’ébriété vous empêchant d’effectuer correctement votre travail. Vous étiez alors revenu l’après-midi en vous excusant de votre retard, ne vous souvenant plus des événements du matin. La Banque avait donc de nouveau sollicité un taxi pour votre retour.

Cette mise en garde précisait par ailleurs que ne s’agissant pas d’un acte isolé, ces faits étaient passibles de remettre en cause la poursuite de votre contrat de travail.

C’est donc avec regret que nous avons appris l’incident du 15 novembre dernier.

Nous vous rappelons que notre Règlement Intérieur interdit l’introduction d’alcool en vue de sa consommation dans l’entreprise ainsi que la présence de tout collaborateur sous l’emprise de l’alcool dans son enceinte.

Nous attirons également votre attention sur le fait qu’une telle situation perturbe nécessairement le bon fonctionnement de votre service.

Dans ces circonstances, nous vous avons adressé une convocation à un entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement au sein de laquelle nous vous avons invité, en cas d’impossibilité pour vous de vous y rendre, à nous présenter vos observations écrites ou à vous faire représenter par la personne de votre choix. Nous vous y indiquions par ailleurs les raisons d’une telle convocation.

A titre d’observation écrite, vous vous êtes contenté de nous indiquer qu’en raison de votre hospitalisation, vous ne pourriez être présent à cet entretien fixé le 18 décembre 2012, ce que nous avons pu constater.

Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute. Vous cesserez de faire partie de nos effectifs à l’issue d’un préavis de trois mois qui débutera le lendemain de la date de première présentation de cette lettre. Nous entendons toutefois vous dispenser de l’exécution de ce préavis qui vous sera néanmoins payé.

Vous recevrez prochainement votre solde de tout compte, votre attestation Pôle Emploi et votre certificat de travail.

Nous vous demandons de remettre tout matériel ou document appartenant à la Banque et dont vous seriez encore en possession.

Si vous êtes soumis à une clause de non-concurrence, nous vous informons que nous entendons expressément y renoncer. »

Le 14 janvier 2014, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Versailles aux fins de contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.

M. X expose qu’en réalité ses fonctions de chargé d’études étaient des fonctions d’analyste financier, qu’il a intégré ce poste en décembre 2005 et a dû faire face à une surcharge de travail importante liée à la fusion de la Banque Populaire Rive Ouest de Paris avec la Banque Populaire de Tours, devenues la Banque Populaire Val de France.

Il précise qu’il a donné toute satisfaction mais a rencontré des difficultés d’ordre personnel, liées à une séparation, qui l’ont amené à être placé plusieurs fois en arrêt de travail en raison d’un état dépressif, puis à bénéficier d’un mi-temps thérapeutique.

La société Banque Populaire Val de France conteste que M. X ait eu une fonction d’analyste financier et affirme que la fusion invoquée est en réalité intervenue en 2002 soit avant son arrivée dans son nouveau service.

Elle ajoute que M. X rencontrait des problèmes d’alcoolisme récurrents, qu’il lui était arrivé à plusieurs reprises de se présenter en état d’ébriété dans son service et qu’il avait bénéficié d’un suivi spécifique du médecin du travail et du soutien de sa supérieure hiérarchique.

Sur la rupture':

M. X fait valoir que les faits du 11 mai 2011, qui ont été sanctionnés par une mise en garde, ne peuvent à nouveau être sanctionnés et sont largement prescrits.

S’agissant des faits du 15 novembre 2012, il conteste catégoriquement avoir été en état d’ébriété mais admet avoir été particulièrement fatigué ce jour là. Il précise que le traitement médicamenteux lourd qu’il prenait pouvait provoquer des effets secondaires comme de la somnolence et qu’il a été hospitalisé le jour même.

Il soutient que la preuve des faits allégués n’est pas apportée en l’absence de test d’alcoolémie.

La société Banque Populaire Val de France rétorque que la lettre de licenciement ne fait que rappeler la sanction antérieure, que M. X n’a d’ailleurs pas contestée.

Elle ajoute que les fonctions exercées par M. X ne justifiaient pas le recours à un test d’alcoolémie, que son problème d’alcoolisme faisait l’objet d’un suivi médical spécifique et que son état d’ébriété a été constaté par ses collègues.

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Au cours de l’échange de mails intervenus le 15 novembre 2012 entre Mme Z, supérieure hiérarchique de M. X et le DRH, M. A, Mme Z a informé le DRH que M. X avait été mis dans taxi à 10 h pour un retour chez lui, M. A a indiqué que cette mesure avait été prise car il était très alcoolisé.

Mme Z, dans un mail du 1er février 2013, a attesté que M. X était arrivé le matin du 15 novembre 2012 en état d’ébriété, et que, comme il avait du mal à tenir debout, elle n’avait pas eu d’autre choix que de le faire conduire chez lui par un taxi qui, un peu plus tard avait appelé pour confirmer l’arrivée à bon port de son client.

Dans son attestation du 4 décembre 2015, Mme Z ne revient pas sur les faits du 15 novembre 2012 mais relate qu’elle a soutenu M. X pendant des années en faisant notamment appel à l’assistante sociale et au médecin du travail et qu’à de nombreuses reprises il s’était présenté dans un état alcoolisé, son haleine et ses difficultés de motricité le démontrant, et qu’elle avait alors dû faire appel à un taxi pour le raccompagner chez lui.

Mme B, une collègue, a confirmé que M. X était arrivé plusieurs fois en état d’ébriété au travail et que Mme Z avait été contrainte de le faire raccompagner en taxi.

M. X n’établit pas que, comme il le prétend, le traitement qui lui était administré pouvait provoquer une somnolence, et par conséquence l’apparence d’un état d’ébriété.

La circonstance qu’il ait été placé en arrêt de travail le jour même des faits et hospitalisé du 10 décembre 2012 au 11 février 2013 est sans incidence sur la réalité des faits qui lui sont reprochés.

Finalement, étant précisé que l’emploi occupé par M. X ne rendait pas possible la réalisation d’un alcootest, l’échange spontané de mails entre Mme Z et le DRH du 15 novembre 2012 suffit à démontrer la réalité de l’état d’ébriété reproché.

Sans sanctionner à nouveau ce fait, la société Banque Populaire Val de France est bien fondée à se prévaloir, au soutien de la sanction, de la mise en garde qui avait été notifiée à M. X le 31 mai 2011 pour des faits similaires.

Au regard de la répétitivité des faits reprochés, alors qu’il bénéficiait d’un suivi médical attentif, le licenciement de M. X était justifié par une cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et a débouté M. X de sa demande d’indemnité à ce titre.

Sur la clause de non-concurrence':

Faute d’être assortie d’une compensation financière, la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail de M. X est nulle.

M. X, qui soutient que cette clause l’a empêché de répondre favorablement à diverses offres d’emplois proposés par des concurrents directs, ne communique aucune pièce relative à ces offres.

Il convient donc, infirmant le jugement, de dire qu’il n’a subi aucun préjudice et de le débouter de sa demande de ce chef.

Sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

M. X qui succombe, doit supporter la charge des dépens et ne saurait bénéficier de l’article 700 du code de procédure civile ; toutefois, pour des raisons d’équité, il n’y a pas lieu de faire application à son encontre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE l’appel recevable,

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE M. X de sa demande de dommages et intérêts résultant de la clause de non-concurrence nulle,

CONFIRME pour le surplus le jugement,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. X aux entiers dépens.

- prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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La greffière La présidente

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