Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 4 février 2021, n° 19/04944

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 4 févr. 2021, n° 19/04944
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/04944
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 16 mai 2019, N° 2016F00141
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 39H

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 FEVRIER 2021

N° RG 19/04944 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TKAS

AFFAIRE :

SAS VERT MARINE

C/

S.A.R.L. EQUALIA intervenant tant en son nom que venant aux droits de la société HERA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 17 Mai 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2016F00141

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Monique TARDY

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SAS VERT MARINE

N° SIRET : 384 .42 5.4 76

[…]

[…]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1962136 – Représentant : Me Frédéric DEREUX de l’AARPI GOWLING WLG (France) AARPI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0127

APPELANTE

****************

S.A.R.L. EQUALIA intervenant tant en son nom que venant aux droits de la société HERA

N° SIRET : 490 .21 9.9 12

[…]

[…]

Représentant : Me Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 – N° du dossier 004330 – Représentant : Me Bertrand BIETTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0571 du cabinet FIDAL par Me BOUSQUET catherine

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Novembre 2020 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François THOMAS, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Monsieur Bruno NUT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

La société Vert Marine exploite et gère des centres nautiques et patinoires dans le cadre de délégations de

service public avec des collectivités locales.

La société Equalia exerce la même activité d’exploitation de centres nautiques et de bases de loisirs, et a créé

pour l’exploitation d’Aquari’ham la société Hera.

De mars 2006 à fin 2011, la société Vert Marine exploitait le centre Aquari’ham pour la communauté de

communes du Pays Hamois.

Le 15 avril 2011, la communauté de communes a lancé un appel d’offres pour l’exploitation du centre à partir

de 2012, remporté par les sociétés Equalia et Hera.

Le 26 décembre 2011, un contrat de délégation de service public pour l’exploitation du centre aquatique, pour

la période du 1er janvier 2012 au 31 août 2016, a été signé entre la société Equalia et la Communauté de

communes du Pays Hamois.

Le 7 octobre 2014 un avenant a complété le contrat initial, pour augmenter la contribution financière de la

collectivité publique, afin de faire face à des charges salariales supplémentaires.

La société Vert Marine reproche aux sociétés Equalia et Hera d’avoir présenté une offre se fondant sur

l’ancienne convention collective, moins contraignante que la nouvelle réglementation sociale, leur permettant

de présenter une offre plus attractive financièrement et d’avoir ainsi remporté le marché, puis d’avoir obtenu

une révision du contrat par un avenant de 2014, afin de pallier les surcoûts salariaux par une augmentation de

la compensation financière publique.

Elle dénonce, de la part du nouveau titulaire du marché, des actes de concurrence déloyale, son comportement

ayant faussé l’égalité des chances entre les concurrents à l’appel d’offres.

Par acte extrajudiciaire du 9 février 2015, la société Vert marine a assigné les sociétés Equalia et Hera devant

le tribunal de commerce de Rouen aux fins de voir condamner ces deux sociétés in solidum à payer la somme

de 350 000 euros à titre de dommages et intérêts pour acte de concurrence déloyale.

Par jugement du 20 novembre 2015, le tribunal de commerce de Rouen s’est déclaré incompétent et a renvoyé

l’affaire devant le tribunal de commerce de Nanterre.

La société HERA, filiale d’EQUALIA, a fait l’objet le 20 novembre 2017 d’une dissolution par transmission

universelle de son patrimoine à la société EQUALIA.

Par jugement du 17 mai 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a :

— débouté la société Vert Marine de ses demandes au titre de la concurrence déloyale à l’encontre des sociétés

Equalia et Hera,

— condamné la société Vert Marine à payer à la société Hera la somme de 28 529,60 € TTC au titre de la

facture n°6 émise le 31 janvier 2012,

— débouté les sociétés Equalia et Hera de leurs demandes au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile,

— condamné la société Vert Marine à payer la somme de 5 000 € à chacune des sociétés Equalia et Hera, au

titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Vert Marine aux dépens.

Par déclaration du 5 juillet 2019, la société Vert Marine a interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 16 novembre 2020, la société Vert Marine demande à la cour de :

— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Vert Marine de ses demandes au titre de la

concurrence déloyale à l’encontre des sociétés Equalia et Hera ;

— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Vert Marine à payer à la société Hera la

somme de 28.529,60€TTC au titre de la facture n°6 émise le 31 janvier 2012 ;

— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Vert Marine à payer la somme de 5.000€ à

chacune des sociétés Equalia et Hera au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Vert Marine aux dépens ;

Statuant à nouveau,

— Constater que les sociétés Equalia et Hera ont commis un acte de concurrence déloyale en présentant une

offre ne respectant pas les prescriptions réglementaires ;

— Constater que la société Equalia ne justifie pas de l’existence de l’obligation de Vert Marine qu’elle invoque

au soutien de sa demande de condamnation au titre des produits constatés d’avance ;

— Constater que la société Vert Marine n’a commis aucun abus en interjetant appel à l’encontre du jugement

entrepris;

En conséquence,

— Condamner la société Equalia intervenant tant es nom que venant aux droits de la société Hera à payer à la

société Vert Marine la somme de 125.500 euros à titre de dommages et intérêts ;

— Rejeter l’ensemble des demandes formées par la société Equalia intervenant tant es nom que venant aux

droits de la société Hera ;

— Rejeter son appel incident tendant à la condamnation de Vert Marine au paiement de la somme de 10.000€ à

titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

— Condamner la société Equalia intervenant tant es nom que venant aux droits de la société Hera à payer à la

société Vert Marine la somme de 7.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de

l’instance devant le tribunal de commerce de Nanterre ;

— Condamner la société Equalia intervenant tant es nom que venant aux droits de la société Hera aux entiers

dépens d’appel et de première instance.

Par dernières conclusions notifiées le 16 novembre 2020, la société Equalia intervenant tant en son nom

que venant aux droits de la société Hera demande à la cour de :

— Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions notamment en ce qu’il a :

o Jugé que la société Equalia tant en son nom que venant aux droits de la société Hera, n’a commis aucune

faute pouvant constituer un acte de concurrence déloyale à l’origine d’un préjudice subi par la société Vert

Marine,

o Débouté la société Vert Marine de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

o Condamné la société Vert Marine à verser à la société Equalia la somme de 28.529,60 € au titre des produits

constatés d’avance,

Et y ajoutant, de:

— Dire et juger que la somme de 28.529,60 € emporte intérêts au taux de refinancement semestriel de la

Banque Centrale Européenne (BCE), majoré de 10 points, à compter du lendemain de la date d’exigibilité de

la facture n°6 de la société Equalia (soit le 1er février 2012), outre capitalisation annuelle desdits intérêts à

compter du 1er janvier 2014,

— Condamner la société Vert Marine à verser à la société Equalia la somme de 10.000 € au titre de l’article 559

du code de procédure civile,

— Prononcer l’amende qu’il plaira à la Cour de fixer au visa de l’article 32-1 du code de procédure civile,

— Condamner la société Vert Marine à verser à la société Equalia une somme de 10.000 € au titre de l’article

700 du code de procédure civile,

— Condamner la société Vert Marine au paiement des entiers dépens, qui seront recouvrés par Maître Monique

Tardy, avocat au barreau de Versailles, en vertu de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2020.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux

écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la concurrence déloyale

Le jugement a retenu que pour répondre à l’appel d’offres, les candidats disposaient d’un cahier des charges

présentant la situation du personnel fournie par le délégataire sortant, mais que le tableau fourni par celui-ci

était peu détaillé, peu précis, visant la convention collective du sport sans préciser la date d’application et ne

faisant pas mention d’un accord d’entreprise, le jugement notant qu’un litige prud’homal était en cours. Il

relève que l’avenant liant le délégataire et la communauté de communes précise que les conditions

d’informations préalables des candidats à la délégation de service public ne lui permettaient pas d’appréhender

l’ampleur des charges du personnel en poste sur le site, de sorte qu’Equalia n’a pas commis de faute en fondant

son offre sur la base des informations fournies par le cahier des charges. Il précise qu’il n’est pas justifié

qu’Equalia disposait d’informations sciemment ignorées pour présenter une offre sous-estimée, et obtenir le

marché. Aussi a-t-il considéré que la faute d’Equalia n’était pas établie.

Après avoir indiqué que la faute de la concurrence déloyale peut être non intentionnelle, la société Vert

Marine affirme qu’il revient au seul adjudicataire de donner une information appropriée aux candidats à un

appel d’offres, lesquels sont sensés connaître la convention collective applicable. Elle reproche à la société

Equalia de ne pas avoir respecté dans son offre les stipulations de la convention collective nationale du sport,

ce qu’elle a reconnu, alors qu’elle ne pouvait ignorer cette convention collective. Elle affirme que la société

Equalia ne peut prendre argument du caractère inexact des informations communiquées par la communauté de

communes quant à la convention collective applicable, qu’elle ne pouvait ignorer. Elle se défend d’avoir

transmis à la communauté de communes des informations incomplètes, qui ne peuvent expliquer

l’augmentation de la rémunération de la société Equalia découlant de l’avenant. Elle déduit la faute de

concurrence déloyale du non-respect par la société Equalia des dispositions obligatoires, qui perturbe le

marché en la plaçant dans une position anormalement favorable par rapport aux autres candidats à l’appel

d’offres.

La société Equalia se défend de toute faute intentionnelle, relevant que le cahier des charges comprenait un

tableau des personnes à reprendre, daté du 31 mars 2011, énonçant que la convention collective applicable

était celle du sport, et que c’est au vu de ce seul document qu’elle a chiffré le coût de la masse salariale, de

sorte que la société Vert Marine est mal venue à lui en faire grief. Elle ajoute que l’appelante a fait un choix de

gestion en augmentant ses charges du personnel, soutient avoir correctement appliqué la convention nationale

du sport, et qu’il revenait à la société Vert Marine de contester la procédure de mise en concurrence devant les

juridictions administratives compétentes. Elle relève avoir repris les salariés, dans le respect du code du

travail, et qu’elle ne peut avoir faussé le jeu de la concurrence en présentant une offre plus avantageuse. Elle

reproche à la société Vert Marine de ne pas avoir fourni les entiers documents sur le calcul des salaires, la

mauvaise application par la société Vert Marine de la convention collective ayant provoqué l’avenant de 2014,

qui n’a pas été déclaré irrégulier. Elle affirme qu’aucune distorsion de concurrence n’est prouvée, et que

l’application de différentes conventions ne peut expliquer les différences de charges financières du personnel

retenues par les projets respectifs. Elle relève que la société Vert Marine lui a caché l’existence d’un

contentieux avec le personnel, et qu’elle ne soufre en tout état de cause d’aucun préjudice.

***

L’article 1382 du code civil alors applicable prévoit que

'tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par le fait duquel il est arrivé à

le réparer'.

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce. L’action en

concurrence déloyale suppose seulement l’existence d’une faute, sans requérir un élément intentionnel.

Le non-respect de la réglementation en vigueur peut avoir pour conséquence de perturber le marché en plaçant

son auteur dans une situation anormalement favorable par rapport à ses concurrents respectant ladite

réglementation.

En l’espèce, la société Vert Marine conteste le fait, pour la société Equalia, d’avoir dans le cadre de l’appel à

candidatures publié le 15 avril 2011 par la communauté de communes du pays hamois, présenté une offre qui

ne respecterait pas les prescriptions réglementaires applicables, soit les dispositions de la convention

collective nationale du sport, puis d’avoir obtenu de cette communauté de communes un avenant au contrat de

délégation du service public lui attribuant une compensation financière afin de supporter l’augmentation des

charges salariales en relation avec l’application de la convention collective du sport.

La société Vert Marine ne conteste pas ne pas avoir introduit de recours devant le juge administratif pour

contester la régularité et les conditions d’attribution du marché en cause, ni que le contrat de 2011 d’attribution

de la délégation de service public à la société Equalia et son avenant de 2014 n’ont pas fait l’objet d’un relevé

d’irrégularité de la part de l’autorité préfectorale.

Si le cahier des charges émis par la communauté de communes du pays hamois au vu duquel le marché a été

attribué n’a pas été communiqué en son intégralité, la société Equalia produit un tableau dressé le 31 mars

2011 émanant de la société Vert Marine (délégataire sortant) listant le personnel à reprendre et le montant des

charges correspondantes, dont il n’est pas contesté qu’il faisait partie du cahier des charges, visant

expressément la convention collective du sport comme applicable. Du reste, la société Equalia ne pouvait

ignorer la convention collective applicable à la date de présentation de son offre.

Pour autant ce tableau, comme le jugement l’a relevé, est peu détaillé et ne fait état d’aucun accord

d’entreprise, alors qu’il résulte des pièces produites qu’un tel accord avait été conclu le 20 décembre 2010 entre

la société Vert Marine et le syndicat CGT, accord entré en vigueur au 1er janvier 2011 ; la société Vert

Marine justifie l’avoir adressé à la communauté de communes par courrier du 22 septembre 2011, soit

postérieurement au lancement de la procédure de délégation de service public par la communauté de

communes.

La société Vert Marine, qui n’établit pas que la société Equalia était informée de son existence et a pu en tenir

compte lorsqu’elle a présenté son offre, ne peut expliquer cette absence de communication à la communauté

de communes en soutenant n’avoir pas eu l’obligation de lui communiquer d’autres éléments que ceux que

cette communauté lui avait demandé. La société Equalia ne pouvait connaître l’existence d’un accord

d’entreprise révélée par la société Vert Marine à la communauté de communes après présentation de son offre,

et la société Vert Marine est sur ce point responsable de l’absence de prise en compte de cet accord par la

société Equalia dans son offre.

L’avenant à la convention de délégation de service public pour l’exploitation du centre aquatique de Ham,

rédigé par la communauté de communes du pays hamois, mentionne du reste 'il apparaît que les conditions

d’informations préalables des candidats à la délégation de service public et du candidat retenu finalement, en

cours de procédure de mise en concurrence, ne lui ont pas permis de cerner l’ampleur des charges du

personnel…'.

La société Equalia ne pouvait ainsi, du fait de l’absence de communication exhaustive par la société Vert

Marine, disposer de toutes les informations nécessaires aux prévisions des montants des salaires pour

répondre à l’offre en étant pleinement éclairée.

La société Equalia s’est engagée, dans le cadre de son offre, à reprendre l’intégralité du personnel en poste, tel

qu’il figurait au tableau communiqué par la société Vert Marine qui était joint à l’appel d’offres, conformément

à l’article 1224 du code du travail, et aucune pièce n’est produite contestant l’effectivité de cette reprise.

La société Vert Marine relève que, s’agissant des deux emplois supplémentaires prévus par la société Equalia,

soit un agent de clientèle et un animateur sportif, l’intimée les classe respectivement dans les groupes 1 et 2 de

la convention collective nationale du sport, alors qu’ils relèveraient au minimum des groupes 2 et 3, ce qui

induit selon cette convention un salaire plus élevé, mais procède par affirmation sans établir par des pièces

qu’un agent de clientèle ne peut relever du groupe 1 et un animateur sportif du groupe 2 comme la société

Equalia le soutient.

A cet égard, il n’apparaît pas surprenant que la société Equalia ait qualifié, dans sa réponse à l’appel d’offre,

donc avant l’attribution de la délégation de service public et avant toute exécution de celle-ci, son chiffrage de

'prévisionnel'.

Il ressort par ailleurs des rapports d’analyse des deux offres qu’alors que la société Equalia prévoyait d’avoir

recours à du personnel saisonnier, la société Vert Marine l’excluait, et expliquait l’augmentation de sa masse

salariale par l’augmentation des taux horaires des salariés et de leurs volumes horaires, ce qui relève de ses

choix de gestion et non de l’application de la convention collective du sport.

Même en considérant que la société Equalia aurait utilisé dans son offre la convention collective ELAC alors

qu’elle aurait dû appliquer la convention collective du sport, la société Vert Marine indique elle-même dans

ses conclusions que 'l’écart de coût entre la convention collective ELAC et la convention collective nationale

du sport représente en moyenne un peu plus de 5% du montant de la masse salariale du personnel affecté à

l’exécution de la mission de service public déléguée' ; or, le 'rapport sur les motifs du choix du candidat et

l’économie générale du contrat’ de la communauté de communes du pays hamois mentionne que la masse

salariale de l’offre Equalia était de 381.164 euros et celle de Vert Marine de 476.654 euros, soit 25% plus

élevée, ce que ne peut expliquer l’application de la convention collective ELAC plutôt que la convention

collective nationale du sport. Ce rapport fait apparaître que l’offre d’un autre candidat, Comsports, présentait

une masse salariale moins disante (363.676 euros), offre qui n’a pas été retenue, ce qui révèle que le choix de

l’offre soutenue par la société Equalia ne s’est pas fait au vu du seul montant des masses salariales

respectivement envisagées.

En effet, les critères annoncés dans le règlement de la consultation par la communauté de communes étaient

les moyens humains et techniques affectés à l’exécution du contrat, la qualité et le dynamisme du service

proposé, les conditions économiques et financières, et le niveau des engagements juridiques, de sorte que la

masse salariale ne constitue qu’un sous-critère.

La cour observe en outre que dans le rapport précité, s’agissant des moyens humains, les offres des sociétés

Comsports et Equalia ont été jugées satisfaisantes, alors que s’agissant de la société Vert Marine il est noté :

'l’organigramme et la carte des emplois communiqué par le candidat semble être divergent au regard des

effectifs annoncés.

La proposition du candidat prévoit une réduction d’effectif (MNS). A contrario, il prévoit un renfort pour

l’entretien.

Le candidat intègre la représentation syndicale à sa masse salariale.

La rémunération moyenne des agents apparaît élevée.

En ce sens, la proposition du candidat n’apparaît pas suffisamment explicite avec des points qui demeurent en

suspend. L’offre est jugée peu satisfaisante'.

Il s’en suit que la société Vert Marine n’a pas fourni une information exacte et complète à la communauté de

communes permettant à celle-ci de renseigner complètement les candidats sur les situations salariales du

personnel qu’ils devaient reprendre, fait état de différences entre les offres respectives sur la charge salariale

relevant essentiellement de ses choix de gestion et qui ne peuvent être expliquées par l’application de

conventions collectives différentes, et n’établit pas que le comportement de la société Vert Marine a provoqué

un préjudice dont elle dit avoir souffert.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Vert Marine de sa demande.

Sur la demande reconventionnelle

Le jugement a retenu que la société Vert Marine ne contestait pas avoir encaissé des recettes pour des

prestations qu’elle n’a pas réalisées, contestant seulement le principe du reversement.

Il a ensuite considéré que la somme en cause n’avait pas été réglée par la société Vert Marine, alors qu’elle

correspond à une facture émise par la société Equalia.

La société Vert Marine soutient que cette demande repose sur une déclaration unilatérale du président de la

communauté de communes selon lequel elle serait tenue à reverser à la société Equalia les produits constatés

d’avance, mais que l’existence d’une telle obligation n’est pas prouvée. Elle sollicite subsidiairement la

déduction de la TVA.

La société Equalia affirme que la société Vert Marine a reçu des produits constatés d’avance correspondant à

des prestations qu’elle a fournies en tant que nouveau délégataire, et que la société Vert Marine n’avait pas

contesté lui devoir. Elle ajoute que le montant ne peut être réduit de la TVA, à laquelle elle est assujettie. Elle

sollicite subsidiairement la condamnation de la société Vert Marine au paiement de ces sommes, au titre de

l’enrichissement sans cause.

***

Par courrier du 18 février 2014, la société Vert Marine a reconnu être redevable à la société Equalia de la

somme de '28.529,60 euros TTC au titre des produits constatés d’avance de Ham'.

Cette reconnaissance est au surplus confirmée par le rapport du président de la communauté de communes du

pays hamois de 2011 sur la délégation de service public d’exploitation du centre aquatique, qui indique

notamment 'au 31 décembre 2011, le délégataire VERT MARINE a été tenu de constater et de donner au

nouveau délégataire EQUALIA les recettes 'perçues d’avance’ des abonnements courant de septembre 2011 à

septembre 2012. Ces produits constatés d’avance, défalqués des recettes de l’an 2011, l’ont été à hauteur de

21636 euros'.

Si la société Vert Marine a envisagé d’effectuer une compensation avec des sommes que lui aurait dues la

société Equalia, elle n’établit pas qu’une telle compensation est intervenue.

La société Vert Marine a été relancée par la société Equalia, par courrier du 6 novembre 2012, pour le

paiement de la facture en cause, et elle ne justifie pas avoir répondu, ou expliqué qu’elle y avait procédé.

Aussi, la société Vert Marine ayant reconnu le principe de cette créance et n’ayant pas établi son paiement ou

sa compensation, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée au paiement de cette facture,

assujettie à la TVA.

Il sera fait droit à la demande présentée tendant à voir cette condamnation assortie d’intérêts, comme indiqué

au dispositif.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu’il n’a pas fait droit à la demande présentée au titre de l’article 32-1 du code

de procédure civile. L’exercice abusif du droit d’agir n’étant pas établi, la demande présentée sur le fondement

de l’article 559 du code de procédure civile ne sera pas non plus reçue.

Les condamnations prononcées en 1re instance sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

et aux dépens seront confirmés.

La société Vert Marine succombant au principal, elle sera condamnée au paiement des dépens d’appel, ainsi

qu’au versement d’une somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles engagés par la société Equalia

devant la cour d’appel.

PAR CES MOTIFS

statuant par décision contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Dit que la condamnation au paiement de la somme de 28.529,60 € emporte intérêts au taux de refinancement

semestriel de la Banque Centrale Européenne (BCE), majoré de 10 points, à compter du lendemain de la date

d’exigibilité de la facture n°6 de la société Equalia soit le 1er février 2012, outre capitalisation annuelle desdits

intérêts à compter du 1er janvier 2014,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne la société Vert Marine à verser à la société Equalia une somme de 4.000 € au titre de l’article 700

du code de procédure civile,

Condamne la société Vert Marine au paiement des entiers dépens, qui seront recouvrés par Maître Monique

Tardy, avocat au barreau de Versailles, en vertu de l’article 699 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été

préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure

civile.

signé par Monsieur François THOMAS, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de

la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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