CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 19 avril 2016, 13MA03019, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 8e ch. - formation à 3, 19 avr. 2016, n° 13MA03019
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 13MA03019
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 28 avril 2013, N° 0903446
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032446741

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D… C… épouse B… a demandé au tribunal administratif de Marseille, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser le rappel de ses salaires jusqu’à la date de son licenciement et la somme de 90 000 euros en réparation de divers préjudices subis ;

2°) subsidiairement, de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser le rappel des allocations pour perte d’emploi depuis le départ de Mme A…, à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en la renvoyant devant l’établissement public pour liquidation, ainsi que la somme de 90 000 euros en réparation des divers préjudices subis ;

3°) très subsidiairement, de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation, d’une part, de la perte de chance de percevoir l’allocation pour perte d’emploi et de pouvoir cotiser en vue de sa retraite et, d’autre part, des troubles qu’elle a subis dans ses conditions d’existence, ainsi que la somme de 90 000 euros en réparation de divers préjudices ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Edouard Toulouse la somme de 3 588 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement n° 0903446 du 29 avril 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 juillet 2013 et 11 septembre 2015, Mme C… représentée par Me E…, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal, d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement du tribunal administratif de Marseille ;

3°) d’annuler la décision implicite rejetant sa réclamation préalable réceptionnée le 12 février 2009 ;

4°) de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser ;

— à titre principal, le rappel de ses salaires jusqu’à la date de son licenciement ;


- à titre subsidiaire, le rappel des allocations pour perte d’emploi qui lui étaient dues au titre de la fin de placement de Mme A… et qu’il appartient à l’établissement de liquider et de payer sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en la renvoyant devant l’établissement pour liquidation ;

 – à titre très subsidiaire, si une fin de non-recevoir devait lui être opposée, de condamner ledit centre hospitalier à lui verser :

- des indemnités représentant la somme globale de 130 000 euros en réparation de la perte de chance de percevoir cette allocation et de pouvoir cotiser en vue de sa retraite ainsi qu’au titre des troubles subis dans les conditions d’existence durant la période litigieuse ; de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d’existence ; de son préjudice matériel ; du préjudice subi du fait de l’incompétence négative dont sont entachés les documents contractuels et les dispositions réglementaires régissant son sort ; des préjudices subis du fait du licenciement disciplinaire abusif ;

- outre une somme équivalente à l’indemnité de licenciement que le centre hospitalier Edouard Toulouse aurait dû lui verser s’il l’avait licenciée pour un motif non inhérent à sa personne (à tout le moins la perte de chance d’obtenir une telle indemnité) ;

5°) d’assortir l’ensemble de ces sommes des intérêts au taux légal et ce, à compter du 12 septembre 2009 ;

6°) de mettre à la charge du centre hospitalier Edouard Toulouse la somme de

5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

 – le jugement est irrégulier, entaché d’omissions de statuer ;

 – il n’y a pas non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d’annulation de la décision implicite refusant de procéder à son licenciement du fait de l’intervention d’un licenciement disciplinaire ;

 – l’ensemble de ses conclusions sont recevables ;

 – la décision de licenciement « disciplinaire » du 6 janvier 2010 est entachée d’inexactitude matérielle des faits et de détournement de pouvoir  ;

 – cette décision est illégale et fautive et lui a causé un préjudice moral, des troubles dans les conditions d’existence, un préjudice financier et l’a, en outre, privée de son indemnité de licenciement ;

 – la responsabilité du centre hospitalier est engagée pour faute en l’absence d’indemnisation lors de sa perte d’activité alors que son contrat de travail n’était pas rompu ;

 – les stipulations de l’article 7-2 du règlement intérieur n’étaient pas applicables, seules l’étaient celles de l’article 4 de son contrat de travail ;

 – en tout état de cause, elle devait se voir appliquer les dispositions de l’article L. 5424-1 et suivants du code du travail ;

 – elle devra être indemnisée de l’ensemble de ses préjudices ;

 – le centre hospitalier a commis une faute en ne procédant pas à son licenciement dans l’intérêt du service alors que son emploi ne se justifiait plus depuis trente mois ;

 – l’article L. 444-1 du code de l’action sociale et des familles est inconventionnel ;

 – nonobstant les allocations de chômage et les indemnités de licenciement auxquelles elle a droit, elle devra être indemnisée ;

 – l’attitude de son employeur est vexatoire, dilatoire et dolosive, proche du harcèlement moral et engage sa responsabilité ; elle a subi un préjudice moral ;

 – les dispositions de l’arrêté du 1er octobre 1990 ne peuvent être considérées comme réglant de manière pleine et entière la situation des accueillants familiaux thérapeutiques et, la responsabilité du centre hospitalier est engagée sans faute pour rupture d’égalité devant les charges publiques du fait de son abstention irrégulière ;

 – le centre hospitalier a commis une incompétence négative en se refusant à édicter une réglementation appropriée aux accueillants familiaux thérapeutiques.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2014, le centre hospitalier Edouard Toulouse, représenté par la société d’avocats Taj, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme C… épouse B… à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – les conclusions à fin d’annulation de la décision refusant de licencier Mme C… sont irrecevables, faute d’intérêt à agir ;

 – il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision implicite refusant de la licencier dès lors que son licenciement est intervenu le 6 janvier 2010 ;

 – les conclusions indemnitaires de Mme C… épouseB…, relatives à la décision la licenciant, sont nouvelles en appel et, dès lors, irrecevables ;

 – sa requête n’est pas fondée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

 – le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du

16 décembre 1966 ;

 – la directive n° 2000/78/CE du Conseil des communautés européennes du 27 novembre 2000 ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

 – le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

 – l’arrêté du 1er octobre 1990 relatif à l’organisation et au fonctionnement des services d’accueil familial thérapeutique ;

 – le code de l’action sociale et des familles ;

 – le code du travail ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Baux,

 – les conclusions de M. Angeniol, rapporteur public,

 – et les observations de Me E…, représentant Mme C… épouseB….

1. Considérant que Mme C… épouse B… a, par contrat à durée indéterminée en date du 4 juin 2003, été recrutée par le centre hospitalier Edouard Toulouse, en qualité d’accueillant familial thérapeutique ; que, le 11 juillet 2003, une convention tripartite était signée pour l’accueil d’une patiente qui restera sous garde jusqu’au 19 juillet 2006, date à compter de laquelle Mme C… ne bénéficiera plus d’aucun placement ; qu’à la suite de différents courriers échangés sollicitant la régularisation de sa situation, Mme C… a saisi le conseil des Prud’hommes d’Arles afin, notamment, qu’il fût procédé à son licenciement ; que par ordonnance en date du 31 mai 2007, celui-ci s’est déclaré incompétent pour statuer sur cette demande ; que, le 22 juillet 2008, le centre hospitalier Edouard Toulouse l’a avertie qu’aucun patient ne lui étant confié, il envisageait de mettre fin à son contrat ; que le 12 février 2009, l’intéressée a présenté une demande préalable aux fins d’obtenir le paiement des allocations pour perte d’emploi qui lui étaient dues depuis le placement de sa dernière patiente ainsi que la réparation de l’ensemble des préjudices matériel et moral ainsi que des troubles dans les conditions d’existence qu’elle estimait avoir subis du fait de l’attitude du centre hospitalier ; que, par une requête enregistrée au tribunal administratif de Marseille, le 5 juin 2009, l’intéressée a sollicité l’indemnisation du préjudice né du comportement de son employeur l’ayant maintenue dans les liens d’un contrat à durée indéterminée, sans lui fournir de patient ni l’indemniser de sa situation de « chômage partiel total » ; que, le 16 juin 2010, le centre hospitalier a notifié à Mme C… une décision prononçant son licenciement pour « violations réitérées de (ses) obligations contractuelles » : que, pour faire suite à cette décision, le 16 mars suivant, l’intéressée a saisi le centre hospitalier d’une nouvelle réclamation préalable modifiant ses prétentions indemnitaires ; que par jugement en date du 29 avril 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête ; que Mme C… relève appel de ce jugement ;

Sur l’exception de non-lieu à statuer :

2. Considérant que la circonstance que le centre hospitalier a prononcé expressément le licenciement de l’intéressée ne saurait, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, priver d’objet l’appel formé par Mme C… contre le rejet de ses conclusions indemnitaires et fondé notamment sur l’illégalité fautive entachant cette décision de licenciement et sur la faute commise par le centre hospitalier pour ne lui avoir confié aucun patient pendant plusieurs années tout en refusant de la licencier dans des conditions régulières ; que l’exception de non-lieu à statuer opposée par le centre hospitalier Edouard Toulouse doit, dès lors et en tout état de cause, être rejetée ;

Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :

3. Considérant que Mme C… a, dès le 22 mars 2010, saisi le tribunal administratif de conclusions tendant à l’indemnisation des différents préjudices résultant de l’illégalité de la décision prononçant son licenciement, le 6 janvier 2010 ; qu’elle avait, au préalable, saisi le centre hospitalier Edouard Toulouse d’une réclamation préalable, en application des dispositions de l’article R. 421-1 du code de justice administrative, liant ainsi le contentieux ; que la circonstance que lesdites conclusions aient été présentées postérieurement à l’introduction de la requête introductive d’instance, n’était pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à leur recevabilité ; qu’à supposer même qu’elles n’aient pas présenté de lien suffisant avec les conclusions contenues dans ladite requête, le tribunal administratif n’aurait pu régulièrement les rejeter comme irrecevables que si la requérante avait été, par lui, invitée à régulariser cette situation en présentant une requête distincte et s’était abstenue de donner suite à cette invitation dans le délai imparti par le tribunal pour ce faire ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que Mme C… ait été invitée à procéder à cette régularisation ; que dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier tirée de ce que lesdites conclusions seraient nouvelles en cause d’appel et dès lors irrecevables, ne peut qu’être rejetée ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne le rappel de salaires :

4. Considérant que Mme C… demande la condamnation du centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser les rappels de traitement qu’elle estime lui être dus jusqu’à la date de son licenciement, en application des dispositions de l’article L. 444-5 du code de l’action sociale et des familles ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation » ; qu’en vertu des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens./ Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer 1'usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. » ;

6. Considérant, par ailleurs, qu’aux termes de l’article L. 444-1 du code de l’action sociale et des familles : « (…) Le présent chapitre n’est pas applicable aux accueillants familiaux mentionnés à l’article L. 443-10 ayant passé un contrat avec un établissement ou service de soins pour accueillir des malades mentaux en accueil familial thérapeutique. » ; qu’aux termes de l’article L. 444-5 du même code : « (…) L’employeur qui ne peut pas confier à un accueillant familial le nombre de personnes prévues contractuellement, pendant une durée de quatre mois consécutifs, est tenu soit de recommencer à verser la totalité du salaire à l’issue de cette période, soit de procéder au licenciement économique de l’accueillant familial, motivé par cette absence de personne à confier, ou à la modification d’un élément essentiel du contrat de travail. » ;

7. Considérant que le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que le législateur ou l’autorité investie du pouvoir réglementaire règlent de façon différente des situations différentes ni à ce qu’ils dérogent à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un comme dans l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la norme qui l’établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu’en l’espèce, le principe d’égalité ne saurait faire obstacle à ce que le législateur prévoie des modalités différentes d’exécution du contrat de travail de l’accueillant familial, dès lors que la différence de traitement qui en résulte est en rapport direct avec l’objet de la loi et n’est pas disproportionnée ; qu’eu égard au caractère spécifique de leur activité, la situation des accueillants familiaux thérapeutiques employés par des établissements publics de santé mentale est essentiellement régie par les dispositions de l’article L. 443-10 du code de l’action sociale et des familles ; que l’objet de ce texte est ainsi de créer des obligations différentes à l’égard des personnes morales de droit public ou de droit privé, selon qu’il s’agit d’un simple établissement hospitalier ou d’un établissement de santé mentale ; que, compte tenu de la nature des fonctions des contractants ainsi que de celle du travail de l’accueillant familial thérapeutique qui a pour objet de maintenir la stabilité de l’état de santé du patient, constituant ainsi une étape essentielle dans sa prise en charge, les dispositions législatives contestées de l’article L. 444-1 dudit code ne sont pas entachées d’une discrimination illégale au regard des stipulations combinées de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits l’homme et des libertés fondamentales, de l’article 1er de son premier protocole additionnel ainsi que des dispositions de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ; qu’ainsi, l’appelante ne sauraient utilement invoquer la méconnaissance des dispositions susmentionnées de l’article L. 444-1 du code de l’action sociale et des familles au soutien de ses conclusions tendant au versement de ses rappels de traitement ;

En ce qui concerne le rappel des allocations pour perte d’emploi :

8. Considérant que Mme C… sollicite, en application des stipulations de l’article 4 de son contrat de travail, le versement d’allocations pour perte d’emploi, qui lui seraient dues depuis le 19 juillet 2006, date de départ de son dernier patient, pour la durée de 182 jours, ainsi que l’indemnisation des différents préjudices qu’elle estime avoir subis en l’absence de toute rémunération ;

9. Considérant qu’aux termes de l’article L. 443-10 du code de l’action sociale et des familles : " Sans préjudice des dispositions relatives à l’accueil thérapeutique, les personnes agréées mentionnées à l’article L. 441-1 peuvent accueillir des malades mentaux en accueil familial thérapeutique organisé sous la responsabilité d’un établissement ou d’un service de soins. Les obligations incombant au président du conseil général en vertu de l’article L. 441-1 peuvent être assumées par l’établissement ou le service de soins. Les obligations incombant au président du conseil général en vertu de l’article L. 441-2 sont assumées par l’établissement ou le service de soins. Les accueillants familiaux thérapeutiques employés par cet établissement ou service sont des agents non titulaires de cet établissement ou service. Pour chaque personne accueillie, l’établissement ou service de soins passe avec l’accueillant familial un contrat écrit. En contrepartie des prestations fournies, l’établissement ou service de soins attribue : 1° Une rémunération journalière de service rendu majorée, le cas échéant, pour sujétion particulière ; cette rémunération ne peut être inférieure au minimum fixé en application de l’article L. 442-1 pour la rémunération mentionnée au 1° de cet article et obéit au même régime fiscal que celui des salaires ; 2° Une indemnité représentative des frais d’entretien courant de la personne accueillie ; 3° Un loyer pour la ou les pièces réservées au malade ; 4° Une indemnité correspondant aux prestations de soutien offertes au patient, dont le montant minimum est fixé par le représentant de l’Etat dans le département et qui est modulé selon les prestations demandées à la famille d’accueil. » ;

10. Considérant qu’aux termes de l’article 9 de l’arrêté du 1er octobre 1990 susvisé :

« (…) Les personnes recrutées pour prendre en charge des malades adultes doivent bénéficier à tout le moins de la rémunération et des indemnités prévues dans chaque département en application de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1989 susvisée. Le règlement intérieur du service d’accueil familial mentionné à l’article 14 du présent arrêté précise le statut, la rémunération et les indemnités dont ces personnes bénéficient. » ; qu’aux termes de l’article 16 du même texte : " Le règlement intérieur doit indiquer : (…) ; 2. Les conditions d’accueil dans les familles : (…)

- les limitations relatives au cumul d’emplois. 3. Les obligations des unités d’accueil mentionnées à l’article 11 du présent arrêté. 4. Les conditions d’indemnisation ou de rémunération des unités d’accueil et les possibilités d’indemnisation qui leur sont offertes en cas d’absence momentanée d’un malade. (…) » ;

11. Considérant qu’aux termes de l’article L. 5424-1 du code du travail : " Ont droit à une allocation d’assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 :

1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ; 2° Les agents non titulaires des collectivités territoriales et les agents non statutaires des établissements publics administratifs autres que ceux de l’Etat et ceux mentionnés au 4° ainsi que les agents non statutaires des groupements d’intérêt public ; (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 5422-1 du même code : « Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs involontairement privés d’emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure. (…) » ;

12. Considérant qu’aux termes des stipulations de l’article 4 du contrat conclu, le 4 juin 2003 entre Mme C… et le centre hospitalier Edouard Toulouse : « Dans le cas où le contractant se verrait retirer à titre définitif le patient ou suite au décès de ce dernier, si la période d’essai a été accomplie (3 mois) et s’il n’accueille pas d’autres patients du centre hospitalier Edouard Toulouse ou d’un autre établissement, il peut prétendre au paiement d’une allocation pour perte d 'emploi » ;

13. Considérant qu’agréée par le président du conseil général du département des Bouches-du-Rhône, le 23 mai 2003, pour recevoir un patient à son domicile, Mme C… était engagée, par contrat à durée indéterminée en date du 4 juin 2003, par le centre hospitalier Edouard Toulouse, sur le fondement des dispositions de l’article 9 de la loi du 9 janvier 1986 ; que, conformément à la convention tripartite conclue dès le 11 juillet suivant, elle recevait Mme A… à son domicile ; que cette patiente restera sous la garde de Mme C… jusqu’au 19 juillet 2006 ; que, toutefois, à compter du départ de cette dernière, plus aucun patient ne lui sera confié ; qu’il résulte de l’instruction que Mme C… s’est, à de nombreuses reprises, inquiétée de cette situation ; qu’ainsi, par lettres en date des 20 novembre 2006 et 18 avril 2007, le directeur adjoint du centre hospitalier lui précisera que son contrat de travail n’avait pas vocation à être rompu et qu’il ne s’agissait que de contraintes budgétaires empêchant que lui fussent confiés de nouveaux malades ; que, cependant, par courrier du 18 mai 2008, le centre hospitalier l’invitait à signer un avenant à son contrat, lui précisant par courrier du 22 juillet suivant, que, dès réception dudit avenant, il serait procédé à son licenciement ; que le 6 août 2008, le directeur de l’agence régionale d’hospitalisation l’informait de ce que le centre hospitalier allait procéder à son licenciement afin de la faire bénéficier des allocations pour perte d’emploi ; que ce n’est, enfin, qu’en réponse à l’introduction de sa requête devant le tribunal administratif de Marseille, que le centre hospitalier Edouard Toulouse faisait connaître à l’intéressée sa volonté de la licencier pour « violations réitérées de (ses) obligations contractuelles » ;

14. Considérant qu’en vertu des dispositions des articles L. 5422-1 et L. 5422-2 du code du travail, applicables aux agents publics des établissements publics hospitaliers en vertu de l’article L. 5424-1 du même code, un agent public a droit, dans les conditions qu’elles définissent, au versement de l’allocation d’assurance qu’elles prévoient, dès lors qu’il doit être regardé comme ayant été involontairement privé d’emploi ; qu’ainsi, s’il ne résulte ni des dispositions législatives et réglementaires susmentionnées ni des stipulations du contrat de travail conclu le 4 juin 2003, que le centre hospitalier était tenu de proposer à Mme C… l’accueil de patients, il découle toutefois des dispositions combinées des articles L. 5424-1 et L. 5422-1 du code du travail ainsi que des stipulations de l’article 4 dudit contrat, que l’intéressée, involontairement privée d’emploi après le départ, le 19 juillet 2006, de sa dernière patiente, devait bénéficier de l’allocation pour perte d’emploi qui est l’allocation d’assurance prévue par les dispositions susmentionnées de l’article L. 5422-1 du code du travail ; que, si le centre hospitalier Edouard Toulouse soutient, d’une part, que Mme C… aurait refusé le placement de deux patients en manifestant son souhait de n’accueillir que des patients du sexe féminin, sans préciser, au demeurant, qu’il n’aurait pas disposé de patientes lui permettant de satisfaire cette demande, d’autre part, que sa situation serait semblable à celle de tous les accueillants familiaux thérapeutiques, l’ensemble de ces circonstances est sans influence sur l’obligation qui incombait ainsi au centre hospitalier ;

15. Considérant, enfin que si l’intimé fait valoir qu’il aurait versé à Mme C… les indemnités prévues en application des stipulations de l’article 7.2 du règlement intérieur de l’accueil familial thérapeutique pour adulte du centre hospitalier Edouard Toulouse, qui prévoient qu’ « en cas d’absence momentanée d’un patient et à condition que celui-ci ne soit pas remplacé dans la chambre mise à sa disposition, l’établissement continuera à verser une partie des indemnités à la famille d’accueil. (…) », cette circonstance demeure sans influence sur les conclusions présentées par l’appelante, les indemnités ainsi prévues ayant pour seul objet de pallier l’absence momentanée d’un patient, pour cause d’hospitalisation ou de départ en congés, et non d’indemniser l’absence de placement de tout patient, durant plusieurs années ;

16. Considérant qu’ainsi, il résulte de l’instruction que le centre hospitalier Edouard Toulouse a manqué à ses obligations législatives et contractuelles ; que, par suite, Mme C… est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et à demander la condamnation du centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser les allocations d’assurance pour perte d’emploi auxquelles elle a droit à compter du 20 juillet 2006, date à laquelle il a été mis fin au placement de Mme A…, sa dernière patiente, pour une période de 182 jours ; qu’il y a lieu de renvoyer l’intéressée devant le centre hospitalier Edouard Toulouse pour qu’il soit procédé à la liquidation de ses droits ainsi définis ;

17. Considérant que Mme C… demande à être indemnisée des préjudices matériel et moral ainsi que des troubles dans ses conditions d’existence résultant des pertes de traitement effectivement subies du fait du refus du centre hospitalier de l’indemniser en l’absence de placement de tout patient durant plus de trois années, dès lors qu’ainsi qu’il a été dit au point 14, il n’établit ni même n’allègue qu’il était dans l’impossibilité de le faire ; qu’il résulte des points 10 à 12, que ce refus est entaché d’une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l’établissement hospitalier envers l’intéressée ; que, par suite, Mme C… est en droit d’obtenir la condamnation du centre hospitalier Edouard Toulouse à réparer les préjudices directs et certains résultant pour elle de cette décision illégale ;

18. Considérant que Mme C… réclame les sommes de 40 000 euros au titre de son préjudice matériel, 10 000 euros au titre de troubles dans ses conditions d’existence et, enfin, 5 000 euros au titre de son préjudice moral ; qu’elle a droit à une indemnité d’un montant correspondant aux rémunérations qu’elle aurait dû percevoir entre la date de fin de placement de son dernier patient, le 20 juillet 2006, et la date de son licenciement, le 16 janvier 2010, déduction devant être faite des allocations pour perte d’emploi qu’elle aurait dû percevoir, au cours de cette période et qui lui seront versées durant 182 jours ; qu’il résulte de l’instruction et qu’il n’est pas contesté, que le salaire mensuel de Mme C… était, avant son licenciement, et après réévaluation résultant de l’application du décret n° 2004-1541 du 30 décembre 2004 fixant les montants minimum et maximum des rémunérations et indemnités visées aux 1°, 2° et 3° de l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles, de 1 172 euros ; que l’appelante est, dès lors, fondée à demander réparation de son préjudice économique en l’absence de toute proposition de placement d’un patient à compter de la date d’expiration de ces 182 jours jusqu’au 16 janvier 2010, soit pour une durée de trente-quatre mois ; qu’ainsi, la somme de 39 000 euros, qui n’est pas supérieure à ce qu’elle aurait dû percevoir si elle était demeurée en fonction, pourra lui être attribuée ; qu’enfin, Mme C… justifie d’un préjudice moral et de troubles dans ses conditions d’existence dont il sera fait une juste appréciation en fixant le montant de sa réparation à la somme totale de 5 000 euros ;

En ce qui concerne le licenciement disciplinaire abusif :

19. Considérant que, faute d’avoir confié des patients à Mme C… depuis le 20 juillet 2006, le centre hospitalier devait faire droit à la demande de l’intéressée formulée à plusieurs reprises depuis le 1er septembre 2006, tendant à la résiliation de son contrat ; qu’il s’y est refusé expressément avant de prononcer finalement le licenciement de l’intéressée à titre disciplinaire le 16 janvier 2010, au seul motif que Mme C… aurait refusé un patient en août 2008, ce qui n’est établi que par une unique attestation peu circonstanciée d’un médecin psychiatre en date du 25 mai 2009 ; qu’il résulte ainsi de l’instruction que la décision de licenciement litigieuse a été prononcée pour faire échec à l’ensemble des obligations qui découlaient des dispositions législatives et réglementaires susmentionnées ainsi que des stipulations tant du règlement intérieur régissant l’accueil familial thérapeutique pour adultes dudit centre hospitalier que du contrat de travail de l’intéressée, ce qui caractérise un détournement de procédure constitutif d’une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier Edouard Toulouse ;

20. Considérant que la faute ainsi commise a notamment privé Mme C… des garanties attachées au licenciement régulier que le centre hospitalier aurait dû prononcer dès lors qu’il n’avait aucun patient à lui confier ; que celle-ci est donc fondée à demander réparation de la perte de chance de percevoir l’indemnité de licenciement dont elle aurait bénéficié dans ce cas en application des dispositions des articles 47 et suivants du décret du 6 février 1991 susvisé, et dont le montant pourra être évalué à la somme de 4 000 euros ; que cette faute a également occasionné à l’intéressée un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en l’évaluant à la somme de 1 500 euros ;

21. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer ni sur la régularité du jugement ni sur la responsabilité pour harcèlement moral ou rupture d’égalité devant les charges publiques invoquée par la requérante, qu’il y a lieu de renvoyer Mme C… devant le centre hospitalier Edouard Toulouse afin qu’il soit procédé à la liquidation de ses droits relatifs à l’allocation d’assurance pour perte d’emploi, pour une période de 182 jours non contestée, à compter du 20 juillet 2006 et, de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à verser à l’appelante la somme totale de 49 500 euros, tous intérêts confondus, en réparation des préjudices de toutes natures causés par les illégalités fautives par lui commises ; que le jugement attaqué, qui à tort, a rejeté l’intégralité de la demande indemnitaire de Mme C… doit donc être annulé ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C…, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le centre hospitalier Edouard Toulouse demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du centre hospitalier Edouard Toulouse la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme C… et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 avril 2013 est annulé.

Article 2 : Mme C… est renvoyée devant le centre hospitalier Edouard Toulouse afin qu’il soit procédé à la liquidation de ses droits relatifs à l’allocation d’assurance pour perte d’emploi, pour une période de 182 jours.

Article 3 : Le centre hospitalier Edouard Toulouse est condamné à verser à Mme C… la somme totale de 49 500 euros (quarante neuf mille cinq cents euros).

Article 4 : Le centre hospitalier Edouard Toulouse versera à Mme C… la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D… C… épouse B… et au centre hospitalier Edouard Toulouse.

Délibéré après l’audience du 29 mars 2016, où siégeaient :

— M. Gonzales, président,

 – Mme Baux, premier conseiller,

 – Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 avril 2016.

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N° 13MA03019

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CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 19 avril 2016, 13MA03019, Inédit au recueil Lebon