CAA de MARSEILLE, 9ème chambre - formation à 3, 23 mars 2018, 17MA03311, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 9e ch. - formation à 3, 23 mars 2018, n° 17MA03311
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 17MA03311
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Sur renvoi de : Conseil d'État, 18 juillet 2017, N° 403805
Identifiant Légifrance : CETATEXT000036746810

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J… C… a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet de Vaucluse a approuvé une carte communale sur le territoire de la commune de Suzette.

Par un jugement n° 1301352 du 19 septembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14MA04666 du 21 juillet 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel de M. C…, annulé ce jugement et l’arrêté du 25 mars 2013.

Par une décision n° 403805 du 19 juillet 2017, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, sur pourvoi présenté par le ministre du logement et de l’habitat durable, a annulé cet arrêt et a renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Marseille.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 24 novembre 2014, le 10 novembre 2015 et le 26 mars 2016, M. C…, représenté par Me K…, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement en date du 19 septembre 2014 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d’annuler l’arrêté précité ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 035 euros au titre des frais de première instance en application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative, et la somme de 4 000 euros en application du même article L. 761-1 au titre des frais d’appel.

Il soutient que :

 – il n’est pas établi que des affiches visibles et lisibles depuis la voie publique auraient été apposées sur les lieux du projet de carte communale ;

 – ce vice de procédure a privé les administrés de leur droit à l’information et à la participation consubstantielle à l’organisation d’une enquête publique ;

 – l’avis d’enquête n’indique pas les jours et heures où le public pouvait consulter le dossier d’enquête et présenter ses observations sur le registre ouvert à cet effet ;

 – les modalités restreintes de consultation n’ont pas permis la participation de la plus grande partie de la population ;

 – le commissaire enquêteur n’a pas examiné l’ensemble des observations recueillies au cours de l’enquête et n’a pas donné son avis personnel et circonstancié sur l’observation défavorable dont il était saisi ;

 – les dispositions des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales n’ont pas été respectées dans le cadre de l’approbation de la délibération du 9 février 2009 prescrivant l’élaboration de la carte communale ainsi que celle du 13 février 2013 l’approuvant ;

 – les convocations pour les séances des 21 mai et 4 juin 2012 ne permettent pas non plus de justifier du respect de ces dispositions ;

 – la délibération du 9 février 2009 n’ayant pas de caractère exécutoire à défaut du respect des formalités de transmission au contrôle de légalité et de publication ou d’affichage, l’article L. 600-1 du code de l’urbanisme ne saurait s’appliquer ;

 – le projet de carte communale destiné à être soumis à enquête publique n’a pas été préalablement approuvé par le conseil municipal ;

 – les dispositions de l’article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ont été méconnues ;

 – le compte rendu de la séance du conseil municipal tenue le 4 juin 2012 ne comporte que cinq signatures sur les dix conseillers mentionnés comme étant présents, n’est revêtu d’aucun cachet de la préfecture justifiant qu’il aurait été transmis au contrôle de légalité, ni aucune mention justifiant qu’il aurait été régulièrement affiché ;

 – à la lecture des pièces du dossier il n’est pas possible de s’assurer que l’autorité compétente en matière d’environnement dont la commune de Suzette a décidé de recueillir l’avis aurait été consultée dans des conditions régulières ;

 – la délibération 13 février 2013 est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne le classement en zone non constructible de la carte communale des parcelles lui appartenant situées quartier Granges Neuves ;

 – les écritures présentées pour le compte de l’Etat sont irrecevables en l’absence de justification pour leurs auteurs d’une délégation de compétence régulière du ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité pour signer les mémoires ainsi produits.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 novembre 2015 et le 18 janvier 2016, le ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C… ne sont pas fondés.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2018, le ministre de la cohésion des territoires demande à la Cour de rejeter la requête de M. C….

Il s’en remet à ses précédentes écritures produites dans l’instance n° 14MA04666.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 29 janvier 2018, M. A… J. Dovolis, en sa qualité d’exécuteur testamentaire, M. F… C… et M. G… C…, en leur qualité d’héritiers, représentés par Me I… K…, informent la cour qu’à la suite du décès de M. J… C…, ils entendent reprendre l’instance et demandent, dans le dernier état de leurs écritures, à la Cour :

1°) d’annuler le jugement du 19 septembre 2014 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d’annuler l’arrêté du 25 mars 2013 du préfet de Vaucluse ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat, d’une part, la somme de 4 000 euros au titre des frais de première instance sur le fondement de l’article L. 761-1 et de 35 euros de contribution à l’aide juridique sur le fondement de l’article R. 761-1 du code de justice administrative, et d’autre part, la somme de 4 000 euros de frais exposés en appel au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

 – l’illégalité de la délibération du 13 février 2013 du conseil municipal approuvant la carte communale, reconnue par arrêt définitif n° 14MA04617 du 21 juillet 2016 de la Cour, entraîne par voie de conséquence l’illégalité de l’arrêté en litige du préfet instituant cette carte ;

 – l’affichage de l’avis d’enquête publique méconnaît le III de l’article R. 123-11 du code de l’environnement, qui est applicable à une carte communale ;

 – ce vice de procédure a privé les administrés de leur droit à l’information et à la participation du public ;

 – les modalités de consultation du dossier d’enquête prévues par l’arrêté prescrivant l’ouverture de l’enquête méconnaissent le 4° de l’article R. 123-9 du code de l’environnement ;

 – le commissaire enquêteur n’a pas donné son avis personnel et circonstancié sur l’observation défavorable dont il était saisi, en méconnaissance de l’article R. 123-19 du code de l’environnement ;

 – la commune n’établit pas que les conseillers municipaux ont été convoqués conformément aux articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales à la séance du 13 février 2013 au cours de laquelle la carte communale a été adoptée ;

 – le projet de carte communale n’a pas été transmis ou mis à la disposition des conseillers municipaux préalablement à la séance du 13 février 2013 en méconnaissance de l’article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;

 – le classement de leurs parcelles en zone NC non constructible est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par une lettre du 1er mars 2018, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de relever d’office, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, un non lieu à statuer sur la requête au regard de l’arrêt définitif du 21 juillet 2016 de la cour annulant la délibération du 13 février 2013 du conseil municipal de la commune de Suzette.

Une réponse à ce moyen d’ordre public a été enregistrée le 8 mars 2018 pour M. J. Dovolis et autres et le 9 mars 2018 pour le ministre de la cohésion des territoires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’environnement ;

 – le code général des collectivités territoriales ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Carassic,

 – les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

 – et les observations de Me K… représentant les ayants droits de M. C….

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 9 février 2009, le conseil municipal de la commune de Suzette a prescrit l’élaboration d’une carte communale. Cette carte a été approuvée par une délibération du conseil municipal du 13 février 2013, puis par l’arrêté en litige du préfet de Vaucluse du 25 mars 2013. M. C…, propriétaire de deux parcelles cadastrées section B n° 195 et n° 197 situées sur le territoire de la commune, a demandé l’annulation de cet arrêté du préfet du 25 mars 2013. Par jugement du 19 septembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Saisie par M. C…, la cour, par arrêt n° 14MA04666 du 21 juillet 2016, a annulé ce jugement et l’arrêté en litige. Sur pourvoi présenté par le ministre du logement et de l’habitat durable, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, par décision n° 403805 du 19 juillet 2017, a annulé l’arrêt du 21 juillet 2016 de la cour, au motif que la Cour avait commis une erreur de droit en jugeant que le défaut de caractère exécutoire de la délibération du conseil municipal prescrivant l’élaboration d’une carte communale, qui est un acte préparatoire n’exigeant pas de publication particulière, était de nature à entacher d’illégalité la délibération ultérieure approuvant cette carte et a renvoyé l’affaire devant la Cour. A la suite du décès de M. J… C…, M. A… J. Dovolis, en sa qualité d’exécuteur testamentaire et MM. F… C… et G… C…, en leur qualité d’héritiers, ont indiqué à la Cour qu’ils entendaient reprendre l’instance.

Sur la recevabilité des mémoires en défense du ministre :

2. Aux termes d’un arrêté du 29 janvier 2015, qui présente un caractère réglementaire et a été publié le 1er février 2015 au Journal officiel de la République française, M. D… B…, adjoint au sous-directeur des affaires juridiques de l’environnement et de l’urbanisme au ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et M. E… H…, adjoint au chef du bureau des affaires juridiques de l’urbanisme, ont reçu délégation à l’effet de signer, au nom de la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, dans la limite des attributions de la sous-direction des affaires juridiques, tous actes, arrêtés et décisions. Ils étaient dès lors habilités à signer les mémoires, présentés au nom de l’Etat, enregistrés dans la présente instance le 23 novembre 2015 et le 18 janvier 2016.

Sur le moyen tiré de l’annulation par voie de conséquence de l’arrêté du préfet :

3. Aux termes du troisième alinéa de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable au litige : « (…) A l’issue de l’enquête publique, la carte communale, éventuellement modifiée pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d’enquête, est approuvée par le conseil municipal ou par délibération de l’établissement public de coopération intercommunale compétent. Elle est alors transmise par le maire ou par le président de l’établissement public de coopération intercommunale au préfet. Celui-ci dispose d’un délai de deux mois pour l’approuver. A l’expiration de ce délai, le préfet est réputé avoir approuvé la carte. La carte approuvée est tenue à disposition du public. ». L’adoption de la carte communale est ainsi subordonnée à une double approbation du conseil municipal et du préfet du département compétent.

4. En raison des effets qui s’y attachent, l’annulation pour excès de pouvoir d’un acte administratif, qu’il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l’annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n’auraient pu légalement être prises en l’absence de l’acte annulé ou qui sont en l’espèce intervenues en raison de l’acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l’acte annulé et de celles dont l’acte annulé constitue la base légale. Il incombe au juge de l’excès de pouvoir, lorsqu’il est saisi de conclusions recevables dirigées contre de telles décisions consécutives, de prononcer leur annulation par voie de conséquence, le cas échéant en relevant d’office un tel moyen qui découle de l’autorité absolue de chose jugée qui s’attache à l’annulation du premier acte.

5. Par arrêt n° 14MA04617 du 21 juillet 2016, la Cour a annulé la délibération du conseil municipal de la commune de Suzette du 13 février 2013 approuvant la carte communale. La commune de Suzette ne s’étant pas pourvue en cassation, cet arrêt est devenu irrévocable et est ainsi revêtu de l’autorité absolue de la chose jugée. L’annulation de cet acte réglementaire emporte l’annulation par voie de conséquence de l’arrêté en litige du 25 mars 2013 par lequel le préfet de Vaucluse a approuvé une carte communale sur le territoire de la commune de Suzette, qui n’aurait pas pu être légalement pris en l’absence de cette délibération. Par suite, les requérants sont fondés, pour ce motif, à demander l’annulation de cet arrêté.

6. Pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, aucun autre moyen n’apparaît, en l’état de l’instruction, de nature à justifier également l’annulation de l’arrêté en litige.

7. Il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. C… et à demander l’annulation du jugement attaqué et de l’arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet de Vaucluse a approuvé une carte communale sur le territoire de la commune de Suzette.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 500 euros à verser à chacun des trois appelants au titre des frais de première instance et d’appel qu’ils ont exposés et non compris dans les dépens.


D É C I D E :


Article 1er : Le jugement du 19 septembre 2014 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : L’arrêté du 25 mars 2013 du préfet de Vaucluse est annulé.

Article 3 : L’Etat versera, pour chacun d’entre eux, la somme de 500 euros à M. A… J. Dovolis, à M. F… C… et à M. G… C… sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… J. Dovolis, à M. F… C…, à M. G… C… et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie pour information sera adressée au préfet de Vaucluse et à la commune de Suzette.

Délibéré après l’audience du 13 mars 2018, où siégeaient :

— Mme Buccafurri, présidente,

 – M. Portail, président assesseur,

 – Mme Carassic, première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 mars 2018.

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N° 17MA03311

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