CAA de NANTES, 5ème chambre, 26 janvier 2021, 20NT01408, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 5e ch., 26 janv. 2021, n° 20NT01408
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 20NT01408
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif d'Orléans, 28 janvier 2020, N° 1901268
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043074038

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G… E… et M. C… H… ont demandé au tribunal administratif d’Orléans d’annuler l’arrêté du 27 février 2019 par lequel le maire de Chartres a délivré à la SCI Kamser un permis de construire trois maisons individuelles à usage d’habitation.

Par un jugement no 1901268 du 29 janvier 2020, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 avril et 27 novembre 2020, M. G… E…, Mme L… B… épouse J… et M. D… J…, représentés par Me A…, demandent à la cour :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) d’annuler l’arrêté du 27 février 2019 par lequel le maire de Chartres a délivré à la SCI Kamser un permis de construire trois maisons individuelles à usage d’habitation ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chartres la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

 – leur requête est recevable dès lors que M. E… était demandeur en première instance et que M. et Mme J… ont acquis la propriété de M. E… ;

 – le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu’il n’a pas répondu au moyen tiré du non-respect des règles du plan local d’urbanisme relatives aux places de stationnement ;

 – le permis de construire contesté a été délivré par fraude, le pétitionnaire ayant fourni des informations erronées quant à la propriété du mur de clôture du côté de la parcelle cadastrée section CV no 62 et du poulailler implanté sur la parcelle cadastrée section CV no 91, qu’il entend démolir ;

 – le permis de construire a été délivré sans qu’il ait été justifié du dépôt d’une demande d’autorisation auprès de la direction départementale des territoires en application des articles

L. 214-1 et R. 214-1 du code de l’environnement pour les terrains situés en zone inondable ;

 – le permis méconnaît les dispositions de l’article UBG 7.1 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres relatif à l’implantation des constructions ;

 – ce permis méconnaît le plan de prévention des risques d’inondation en ce qui concerne les clôtures et le plancher le plus bas des constructions ;

 – il méconnaît l’article 11-13 du règlement du plan local d’urbanisme en ce qui concerne les clôtures ;

 – il méconnaît l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme dès lors que la création d’un vide sanitaire et le remplacement des murs par des grillages présentent des risques pour la salubrité publique ;

 – il méconnaît l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme et l’article UBG 3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres, faute de prévoir un accès suffisant pour les véhicules de secours et de lutte contre les incendies ;

 – le dossier de permis de construire est incomplet, en méconnaissance des articles R. 431-7 à R. 431-9 du code de l’urbanisme ;

 – le permis de construire méconnaît l’article 11.15 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres relatif à la gestion des déchets ;

 – il méconnaît l’article UBG 13 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres relatif aux places de stationnement ;

 – il méconnaît l’article R. 111-18-4 du code de la construction et de l’habitation ainsi que l’article 2 de l’arrêté du 24 décembre 2015 relatif à l’accessibilité aux personnes handicapées des bâtiments d’habitation collectifs et des maisons individuelles lors de leur construction.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 novembre et 14 décembre 2020, la commune de Chartres, représentée par la SCP Lonqueue, Sagalovitsch, Eglie-Richters et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de M. E… et autres une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. E… et autres ne sont pas fondés et que, en tout état de cause, plusieurs des vices invoqués sont susceptibles de faire l’objet d’une mesure de régularisation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de la construction et de l’habitation ;

— le code de l’environnement ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – l’arrêté du 24 décembre 2015 relatif à l’accessibilité aux personnes handicapées des bâtiments d’habitation collectifs et des maisons individuelles lors de leur construction ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. I…,

 – les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

 – et les observations de Me K…, substituant Me A…, représentant M. E… et autres, et de Me M…, représentant la commune de Chartres.

Une note en délibéré présentée pour M. E… et M. et Mme J… a été enregistrée le 19 janvier 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 février 2019, le maire de Chartres a délivré à la SCI Kamser un permis de construire trois maisons individuelles à usage d’habitation sur deux parcelles cadastrées à la section CV sous les nos 92 et 94. M. E… et M. H…, voisins immédiats du projet, ont demandé au tribunal administratif d’Orléans d’annuler cet arrêté. Cette demande a été rejetée par un jugement du 29 janvier 2020. M. E… et M. et Mme J…, qui ont acquis le 20 septembre 2019 la maison de M. E…, relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce qu’ils soutiennent, les requérants n’ont pas soulevé en première instance le moyen tiré du non-respect des règles du plan local d’urbanisme relatives aux places de stationnement. Dès lors, le jugement attaqué n’a pas omis de répondre à ce moyen, qui n’était pas d’ordre public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la commune de Chartres en première instance :

3. Aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme : « Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l’aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation (…) ». Il résulte de ces dispositions qu’il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que la maison d’habitation de M. E…, acquise le 20 septembre 2019 par M. et Mme J…, est limitrophe du terrain d’assiette du projet de construction contesté, lequel est situé en zone inondable, compte tenu de la proximité de l’Eure, en contrebas du terrain. Les requérants soutiennent notamment que le projet litigieux, incluant la création d’un vide sanitaire ajouré sous les trois constructions et le remplacement des murs séparatifs par des grillages, présente des risques sanitaires et un risque de déversement sur leur terrain des eaux de l’Eure, en période de crues. Les risques ainsi évoqués sont susceptibles d’affecter les conditions de jouissance de leur bien par M. E… et M. et Mme J…. Ces derniers justifient, dès lors, d’un intérêt leur donnant qualité pour agir.

En ce qui concerne les conclusions à fin d’annulation de l’arrêté du 27 février 2019 :

S’agissant des moyens tirés de la fraude et de ce que le pétitionnaire n’avait pas qualité pour déposer la demande de permis de construire :

5. D’une part, aux termes de l’article R. 431-5 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : « (…). La demande comporte également l’attestation du ou des demandeurs qu’ils remplissent les conditions définies à l’article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ». Aux termes de l’article R. 423-1 du même code : " Les demandes de permis de construire, (…) sont adressées par pli recommandé avec demande d’avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; b) Soit, en cas d’indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire (…) ". Il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l’attestation prévue à l’article R. 431-5 du code de l’urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées à l’article R. 423-1 du même code pour déposer une demande de permis de construire doit être regardé, dans tous les cas, comme ayant qualité pour présenter cette demande.

6. D’autre part, les dispositions de l’article 653 du code civil établissent une présomption légale de copropriété des murs séparatifs de propriété.

7. Il résulte des dispositions rappelées au point 5, notamment du b) de l’article R. 423-1, qu’une demande de permis de construire concernant un mur séparatif de propriété peut, alors même que les travaux en cause pourraient être contestés par les autres propriétaires devant le juge judiciaire sur le fondement des articles 653 et suivants du code civil, être présentée par un seul co-indivisaire.

8. Si M. E… et autres soutiennent que le mur séparant leur parcelle, cadastrée section CV no 62, de la parcelle d’assiette de la construction projetée, cadastrée section CV no 92, serait entièrement édifié sur la première parcelle, dans le prolongement de la maison des époux J…, ils ne l’établissent pas par les photographies versées au dossier et ne produisent aucune décision de l’autorité judiciaire confirmant leurs prétentions. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le pétitionnaire, en attestant avoir qualité pour présenter le permis de construire contesté, aurait délibérément fourni des informations erronées quant à la copropriété présumée, en vertu de l’article 653 du code civil, du mur séparatif en cause, de nature à fausser l’appréciation de l’autorité compétente. Enfin, contrairement à ce que soutiennent M. E… et autres, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le projet autorisé porterait sur la démolition d’un poulailler situé sur la parcelle voisine cadastrée section CV no 91, le poulailler prévu sur la parcelle cadastrée section CV no 92 étant seul concerné par cette démolition. Dès lors, les moyens tirés de ce que le pétitionnaire n’avait pas qualité pour déposer la demande de permis de construire prévoyant la démolition du mur mitoyen et de ce que ce permis de construire aurait été obtenu par fraude doivent être écartés.

S’agissant du moyen tiré du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire :

9. Aux termes de l’article R. 431-7 du code de l’urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l’intérieur de la commune ; / b) Le projet architectural défini par l’article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12. « . L’article R. 431-8 du même code dispose que : » Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L’état initial du terrain et de ses abords indiquant, s’il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l’insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L’aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L’implantation, l’organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L’organisation et l’aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. « . L’article R. 431-9 du même code dispose que : » Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / (…) "

10. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l’ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l’urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n’est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

11. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire incluait des plans et une « notice paysagère » qui comportaient des informations suffisantes, s’agissant en particulier de l’état initial du terrain et des places de stationnement, de nature à permettre au service instructeur d’apprécier l’intégration des constructions dans leur environnement. Par ailleurs, si la notice paysagère du dossier de permis de construire indique que « les clôtures existantes le long des mitoyens sont conservées ou restaurées selon nécessité, ou reconstruites », les plans du même dossier font apparaître que les clôtures édifiées en limite de propriété, notamment dans la partie orientale du terrain d’assiette située en zone d’expansion des crues de l’Eure, seront constituées de grillages rigides présentant une hauteur maximale de 1,80 mètre. Ces documents ont ainsi permis au service instructeur d’apprécier le respect des dispositions relatives aux clôtures prescrites par la réglementation applicable.

S’agissant des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres :

12. En premier lieu, aux termes de l’article UBG 3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres : " 3.1 – Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un accès aménagé sur fonds voisin. / 3.2 – Les caractéristiques et la configuration de ces voies doivent (…) Permettre la circulation et l’utilisation des moyens de secours et des engins de lutte contre l’incendie ; / (…) ".

13. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d’assiette du projet aura directement accès à la rue du Bourgneuf, laquelle permet aisément la circulation et l’utilisation des moyens de secours et des engins de lutte contre l’incendie. Les requérants ne peuvent utilement soutenir que le passage permettant d’accéder aux maisons projetées, aménagé sur la parcelle cadastrée section CV no 94, méconnaît les dispositions citées au point précédent, lesquelles n’ont pas pour objet de régir les caractéristiques et la configuration des voies internes au projet de construction. En tout état de cause, ce passage, d’une largeur de 5 mètres et d’une longueur inférieure à 20 mètres, permettra la circulation et l’utilisation des moyens de secours et des engins de lutte contre l’incendie, sans qu’une aire de retournement pour ces engins soit requise eu égard à la configuration des lieux. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article UBG 3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres doit être écarté.

14. En deuxième lieu, l’article UB 7.1, relatif à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, du règlement du plan local d’urbanisme de la commune de Chartres dispose que : " (…) Les constructions peuvent s’implanter : / – sur une des limites séparatives ; / – sur les 2 limites séparatives ; / – en retrait des limites séparatives, de 6 m au minimum en UBGa ; / (…). « Il en résulte que l’implantation des constructions peut être faite sur une ou deux limites séparatives ou en retrait d’au moins 6 mètres en zone UBGa. Selon l’article UB 7.2 du même règlement : » Les constructions annexes peuvent s’implanter sur une ou plusieurs limites séparatives ou en retrait de 1 m minimum par rapport aux limites séparatives ".

15. Il est constant que le terrain d’assiette du projet contesté relève de la zone UBGa. Il ressort des pièces du dossier que la société pétitionnaire a fait le choix d’implanter les constructions sur les deux limites séparatives du terrain d’assiette, ainsi que l’y l’autorisent les dispositions précitées de l’article UB 7.1. Par ailleurs, si M. E… et autres soutiennent que la place de stationnement prévue à proximité de la parcelle cadastrée section CV no 91 est située à moins d’un mètre des limites séparatives, une telle place de stationnement ne peut être qualifiée d’annexe au sens des dispositions du plan local d’urbanisme de Chartres. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article UB 7 du règlement de ce plan local d’urbanisme ne peut qu’être écarté.

16. En troisième lieu, l’article UBG 11.13 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres dispose que : « Le long de la rue du Bourgneuf, les clôtures sur rue devront être constituées, au moins en partie, d’un élément végétalisé ». Si les requérants soutiennent que le projet ne prévoit aucun élément végétalisé au niveau du portail d’accès du projet, situé rue du Bourgneuf, un tel portail, eu égard à l’objet de la règle fixée par l’article UBG 11.13, n’entre pas dans son champ d’application. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

17. En quatrième lieu, l’article UBG 11.15, relatif à la « gestion du stockage des déchets », du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres, dispose que : « Les constructions nouvelles doivent obligatoirement prévoir des systèmes de stockage des différentes catégories de déchets collectés sur la commune, des objets encombrants et des déchets verts. »

18. En l’espèce, la circonstance que la notice architecturale et les plans annexés au dossier de permis de construire ne fassent pas figurer l’emplacement prévu pour le stockage des déchets n’est pas de nature à établir que le projet méconnaîtrait les dispositions précitées, dès lors que le projet comporte un garage par maison d’habitation et que la commune fait valoir en défense que ces garages pourront parfaitement intégrer un système propre de stockage des déchets.

19. En cinquième lieu, aux termes de l’article UBG 13.3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres, relatif aux obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d’espaces libres, d’aires de jeux et de loisirs, et de plantations : « Les aires de stationnement doivent faire l’objet d’un traitement paysager de qualité, et être plantées à raison d’un arbre au moins pour 4 emplacements. Les parcs de stationnement et leurs voies d’accès, situés à proximité des limites parcellaires, doivent en être séparés par des haies diversifiées à feuillage persistant suffisamment dense pour former un écran ».

20. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit la création de quatre places de stationnement localisées à l’ouest des maisons d’habitation. Ces quatre places de stationnement, qui ne constituent pas un parc de stationnement, doivent être qualifiées d’aire de stationnement au sens des dispositions précitées de l’article UBG 13.3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres. Or, le permis de construire contesté, qui prévoit la plantation de deux ensembles de buissons sur cette aire de stationnement, n’y prévoit la plantation d’aucun arbre. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être accueilli.

S’agissant des moyens tirés de la méconnaissance du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres, liés aux inondations de l’Eure :

21. En premier lieu, le plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres, liés aux inondations de l’Eure, approuvé par un arrêté du préfet d’Eure-et-Loir du 25 septembre 2001, prévoit au B de son II, applicable à la zone urbanisée inondable, que « toutes constructions, travaux ou ouvrages nouveaux non définis au »A« sont interdits ». Le A de ce II autorise les bâtiments nouveaux à condition, notamment, que « leur plancher le plus bas soit établi à une cote supérieure ou égale à la cote de référence », c’est-à-dire la cote de la crue centennale majorée de 20 centimètres, exprimée en mètre dans le système de nivellement général de la France de 1969 (NGF). Les seules exceptions prévues par ce plan à la condition de hauteur du plancher le plus bas des bâtiments nouveaux en zone urbanisée inondable sont relatives aux abris pour animaux et abris de jardin. Enfin, la note de présentation du plan de prévention des risques naturels prévisibles indique que, dans la zone urbanisée inondable, « une évolution normale de l’urbanisation actuelle y sera possible, par le renouvellement des constructions actuelles ou l’implantation des bâtiments nouveaux. Toutefois, il conviendra de s’assurer que lors de ces travaux, toutes les dispositions seront prises pour réduire la vulnérabilité des constructions face aux crues. »

22. Il ressort des pièces du dossier que la cote de référence est, s’agissant des terrains d’assiette du projet litigieux, de 123,61 mètres NGF et que les constructions projetées prendront place sur les parties des terrains classées en zone urbanisée inondable. Si le plancher le plus bas du rez-de-chaussée des parties habitables des maisons d’habitation projetées est prévu à une hauteur de 123,61 mètres NGF, le plancher le plus bas des garages et celliers, qualifiés à tort par les requérants de « petite maison à droite », est prévu à une hauteur de 122,34 mètres NGF. Contrairement à ce que soutient la commune de Chartres, qui ne peut utilement invoquer les dispositions des articles L. 111-14 et R. 111-22 du code de l’urbanisme relatives à la surface de plancher de la construction, les garages et celliers ne sont pas au nombre des constructions dont le plancher le plus bas peut, par exception, être établi à une cote inférieure à la cote de référence en vertu des dispositions précitées du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres. Par suite, le permis de construire contesté, en tant qu’il autorise la construction des garages et celliers à une cote inférieure à la cote de référence, méconnaît les dispositions précitées du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres.

23. En second lieu, le plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres, liés aux inondations de l’Eure, autorise en zone d’expansion des crues la reconstruction après démolition des clôtures qui « n’entravent pas l’écoulement des eaux », ainsi que l’édification de nouvelles clôtures à condition « qu’elles soient constituées de piquets ou poteaux espacés d’au moins 3 mètres, sans saillie de fondation et de 5 fils maximum ». Ce plan autorise, en zone urbanisée inondable, la reconstruction après démolition ou l’édification de nouvelles clôtures à condition « qu’elles n’entravent pas l’écoulement des eaux ».

24. Il ressort des pièces du dossier que les terrains d’assiette du projet litigieux sont situés, dans leur partie occidentale, en zone urbanisée inondable et, en dans leur partie orientale, en zone d’expansion des crues. Si la « notice paysagère » du dossier de permis de construire indique que « les clôtures existantes le long des mitoyens sont conservées ou restaurées selon nécessité, ou reconstruites », les plans du même dossier font apparaître, ainsi qu’il a été dit au point 11, que les clôtures en limite de propriété, notamment dans la partie orientale du terrain d’assiette, seront constituées de grillages rigides présentant une hauteur maximale de 1,80 mètre. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques des clôtures prévues méconnaîtraient les prescriptions précitées du plan de prévention du risque inondation de Chartres.

S’agissant du moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme :

25. Aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations. »

26. D’une part, il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux prévoit, en raison du risque d’inondation, la création d’un vide sanitaire sous le rez-de-chaussée des maisons d’habitation. La « notice paysagère » et les plans versés au dossier de permis de construire font apparaître que des ouvertures seront réalisées en partie basse, au niveau du terrain naturel, afin de permettre l’écoulement des eaux de part et d’autre des maisons et d’éviter ainsi la stagnation des eaux éventuelles. Par ailleurs, si M. E… et autres soutiennent que le remplacement des murs séparatifs par des grillages « va engendrer des déversements vers les propriétés voisines », cette modification est, comme il a été dit au point 24 du présent arrêt, conforme au plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres, liés aux inondations de l’Eure, en ce que ces grillages n’entraveront pas l’écoulement des eaux.

27. D’autre part, ainsi qu’il a été dit au point 13 du présent arrêt, le terrain d’assiette du projet sera desservi par des voies dont les caractéristiques et la configuration permettront la circulation et l’utilisation des moyens de secours et des engins de lutte contre l’incendie, sans qu’une aire de retournement pour ces engins soit requise eu égard à la configuration des lieux. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les services de lutte contre l’incendie n’auraient pas accès à l’entrée des habitations en raison de l’implantation des places de stationnement ou de l’espace vert situé derrière les habitations. Enfin, une borne incendie se trouve à 125 mètres des terrains d’assiette du projet.

28. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire contesté serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en raison des risques d’atteinte pour la salubrité et la sécurité publiques doit être écarté.

S’agissant du moyen tiré de ce que le permis de construire a été délivré sans qu’il ait été justifié du dépôt d’une demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau :

29. Les requérants reprennent, sans fournir d’éléments supplémentaires, leur moyen de première instance tiré de ce que le permis de construire a été délivré sans qu’il ait été justifié du dépôt, auprès de la direction départementale des territoires, d’une demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau, en application de l’article R. 214-1 du code de l’environnement. Il y a lieu d’écarter ce moyen par adoption des motifs figurant aux points 5 à 8 du jugement attaqué.

S’agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l’article R. 111-18-4 du code de la construction et de l’habitation et de l’article 2 de l’arrêté du 24 décembre 2015 :

30. Aux termes de l’article L. 111-7 du code de la construction et de l’habitation, alors en vigueur : « Les dispositions architecturales, les aménagements et équipements intérieurs et extérieurs des locaux d’habitation, qu’ils soient la propriété de personnes privées ou publiques, des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des lieux de travail doivent être tels que ces locaux et installations soient accessibles à tous, et notamment aux personnes handicapées, quel que soit le type de handicap, notamment physique, sensoriel, cognitif, mental ou psychique, dans les cas et selon les conditions déterminés aux articles L. 111-7-1 à L. 111-7-11. Ces dispositions ne sont pas obligatoires pour les propriétaires construisant ou améliorant un logement pour leur propre usage ». Les articles L. 111-7-1, L. 111-7-2 et L. 111-7-3 du même code définissent les règles générales d’accessibilité applicables respectivement aux bâtiments ou parties de bâtiments nouveaux, aux bâtiments ou parties de bâtiments d’habitation existants et aux établissements recevant du public situés dans un cadre bâti existant. Aux termes de l’article L. 111-7-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : « Un décret en Conseil d’Etat définit les conditions dans lesquelles, à l’issue de l’achèvement des travaux prévus aux articles L. 111-7-1, L. 111-7-2 et L. 111-7-3 et soumis à permis de construire, le maître d’ouvrage doit fournir à l’autorité qui a délivré ce permis un document attestant de la prise en compte des règles concernant l’accessibilité. Cette attestation est établie par un contrôleur technique visé à l’article L. 111-23 ou par une personne physique ou morale satisfaisant à des critères de compétence et d’indépendance déterminés par ce même décret. Ces dispositions ne s’appliquent pas pour les propriétaires construisant ou améliorant leur logement pour leur propre usage ». Aux termes de l’article L. 111-8 du même code : « Les travaux qui conduisent à la création, l’aménagement ou la modification d’un établissement recevant du public ne peuvent être exécutés qu’après autorisation délivrée par l’autorité administrative qui vérifie leur conformité aux règles prévues aux articles L. 111-7, L. 123-1 et L. 123-2. Lorsque ces travaux sont soumis à permis de construire, celui-ci tient lieu de cette autorisation dès lors que sa délivrance a fait l’objet d’un accord de l’autorité administrative compétente mentionnée à l’alinéa précédent. Toutefois, lorsque l’aménagement intérieur d’un établissement recevant du public ou d’une partie de celui-ci n’est pas connu lors du dépôt d’une demande de permis de construire, le permis de construire indique qu’une autorisation complémentaire au titre de l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation devra être demandée et obtenue en ce qui concerne l’aménagement intérieur du bâtiment ou de la partie de bâtiment concernée avant son ouverture au public ».

31. Il résulte de ces dispositions qu’à l’exception des travaux qui conduisent à la création, l’aménagement ou la modification d’un établissement recevant du public, qui sont soumis au régime d’autorisation préalable prévu par l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation, les travaux prévus aux articles L. 111-7 et suivants du même code ne font pas l’objet d’une autorisation préalable, notamment à l’occasion de la délivrance du permis de construire.

32. Dès lors que les travaux autorisés par l’arrêté contesté ne conduisent pas à la création d’un établissement recevant du public, la méconnaissance alléguée des dispositions de l’article R. 111-18-4 du code de la construction et de l’habitation et de l’article 2 de l’arrêté du

24 décembre 2015 susvisé est sans incidence sur la légalité du permis de construire contesté.

En ce qui concerne les conséquences des vices constatés :

33. Aux termes de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction désormais applicable : « Sans préjudice de la mise en oeuvre de l’article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice n’affectant qu’une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l’autorisation pourra en demander la régularisation, même après l’achèvement des travaux. (…) »

34. Comme il a été dit aux points 20 et 22 du présent arrêt, l’arrêté du 27 février 2019 du maire de Chartres méconnaît, d’une part, les dispositions de l’article UBG 13.3 du règlement du plan local d’urbanisme de Chartres en tant que le permis de construire contesté ne prévoit la plantation d’aucun arbre sur l’aire de stationnement, et, d’autre part, les dispositions du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Chartres en tant qu’il autorise la construction des garages et celliers dont le plancher s’établit à une cote inférieure à la cote de référence. Rien ne fait obstacle à ce que le maire de Chartres délivre un permis de régularisation à la SCI Kamser pour permettre la régularisation de ces vices. Il y a lieu en conséquence d’annuler l’arrêté du 27 février 2019 du maire de Chartres en tant seulement qu’il ne prévoit la plantation d’aucun arbre sur l’aire de stationnement et qu’il autorise la construction des garages et des celliers avec un plancher établi à une cote inférieure à la cote de référence de 123,61 mètres NGF.

35. Il résulte de tout ce qui précède que M. E… et autres sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté leur demande d’annulation de l’arrêté du 27 février 2019 du maire de Chartres en tant qu’il ne prévoit la plantation d’aucun arbre sur l’aire de stationnement et qu’il autorise la construction des garages et des celliers avec un plancher établi à une cote inférieure à la cote de référence de 123,61 mètres NGF. En revanche, M. E… et autres ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par ce même jugement, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté le surplus des conclusions de leur demande d’annulation.

Sur les frais liés au litige :

36. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E… et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Chartres demande au titre des frais exposés par elle à l’occasion du litige soumis au juge.

37. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Chartres la somme globale de 1 500 euros à verser à M. E… et autres au titre des frais liés à l’instance.

DÉCIDE :

Article 1er : L’arrêté du 27 février 2019 par lequel le maire de Chartres a délivré à la SCI Kamser un permis de construire trois maisons individuelles à usage d’habitation est annulé en tant qu’il ne prévoit la plantation d’aucun arbre sur l’aire de stationnement et qu’il autorise la construction des garages et des celliers avec un plancher établi à une cote inférieure à la cote de référence de 123,61 mètres NGF.

Article 2 : Le jugement du 29 janvier 2020 du tribunal administratif d’Orléans est annulé en tant qu’il a rejeté, dans cette mesure, les conclusions de la demande de M. E… et autres.

Article 3 : La commune de Chartres versera à M. E… et autres une somme globale de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. E… et autres est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Chartres tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. G… E…, Mme L… B… épouse J… et M. D… J… et à la commune de Chartres.

Copie en sera adressé pour information au Procureur de la République du tribunal judiciaire de Chartres et au préfet d’Eure-et-Loir.

Délibéré après l’audience du 8 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

— Mme F…, présidente,

 – M. Frank, premier conseiller,

 – M. I…, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 janvier 2021.


Le rapporteur,

F.-X. I… Le président,

C. F…


Le greffier,

C. Popsé

La République mande et ordonne au préfet d’Eure-et-Loir en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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No 20NT01408

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CAA de NANTES, 5ème chambre, 26 janvier 2021, 20NT01408, Inédit au recueil Lebon