Cour de cassation, Chambre civile 2, 5 octobre 2017, 16-23.811, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 5 oct. 2017, n° 16-23.811
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-23.811
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Toulouse, 26 juin 2016
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000035748962
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2017:C201311
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 2

JL

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 5 octobre 2017

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 1311 F-D

Pourvoi n° N 16-23.811

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société La Serre, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 27 juin 2016 par la cour d’appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société SMF Kart, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

2°/ à la société La Plano, société civile immobilière, dont le siège est […] ,

3°/ à l’association Karting club pays d’Olmes Mirepoix (KPCOM), dont le siège est […] ,

4°/ à M. Bernard X…, domicilié […] ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 6 septembre 2017, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Y…, conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société La Serre, de la SCP Richard, avocat de la société SMF Kart, de la SCI La Plano, de l’association Karting club pays d’Olmes Mirepoix et de M. X…, l’avis de M. Z…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 27 juin 2016), que la société La Serre exploite un terrain de camping situé à proximité d’un circuit de karting exploité depuis 1990 par la société SMF Kart, sur des terrains appartenant à la SCI La Plano, sur lesquels l’association Karting club pays d’Olmes Mirepoix organise des manifestations et M. X… gère un magasin ; que des modifications ont été réalisées en 2001 sur le circuit ; que se plaignant des nuisances sonores générées par le circuit de karting, la société La Serre les a assignés pour obtenir la mise en place de protections antibruit et l’indemnisation de son préjudice ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société La Serre fait grief à l’arrêt de la déclarer irrecevable en son action fondée sur les troubles anormaux de voisinage, et, en conséquence, de la débouter de l’intégralité de ses demandes, alors, selon le moyen, que le point de départ de l’action en responsabilité extracontractuelle est la manifestation du dommage ou son aggravation ; qu’en matière de trouble anormal de voisinage, toute modification de la situation susceptible de modifier le trouble apporté aux voisins et d’aggraver le trouble anormal du voisinage ouvre une action nouvelle et qu’il appartient alors au juge du fond de vérifier si la situation nouvelle crée un trouble anormal de voisinage, peu important la situation antérieure ; qu’il résulte de l’arrêt lui-même qu’une profonde modification du circuit s’est produite en 2001, dont les effets potentiellement nuisibles n’ont été réduits que par des réglementations et des améliorations en 2009 et 2013 ; qu’en déclarant prescrite l’action engagée en 2009, à la suite des modifications de 2001, dans le délai de prescription décennal alors applicable, au motif inopérant que preuve n’était pas rapportée que le bruit eût été plus nuisible après 2002 qu’avant, la cour d’appel a violé les articles 2270-1 ancien et 544 du code civil ;

Mais attendu, qu’ayant relevé que les évolutions du circuit de karting intervenues en 2001 s’étaient accompagnées d’améliorations techniques, le nouveau tracé du circuit étant équipé d’un nouveau revêtement, et d’un durcissement de la réglementation en matière de bruit, et souverainement estimé qu’il n’était pas démontré que le bruit généré par le circuit ne se serait aggravé au point d’entraîner des nuisances sonores pour le voisinage qu’à partir de 2002, la cour d’appel a exactement déduit de l’absence de preuve d’une aggravation du dommage consécutive aux modifications du circuit, que l’action exercée par la société La Serre par acte du 4 juillet 2012 sur le fondement des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage était atteinte par l’ancienne prescription décennale de l’article 2270-1 du code civil ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Attendu que la société La Serre fait le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, que les juges ne sauraient méconnaître les termes du litige tels que fixés par les parties dans leurs écritures ; qu’en se contentant de statuer sur la demande de la société La Serre au titre de son trouble anormal de jouissance indépendante de celle de la notion de faute, sans se prononcer, comme elle y était invitée, sur sa demande au titre de l’article 1382 du code civil, en réparation de la faute résultant du non-respect par les exploitants de l’activité préjudiciable de karting de l’arrêté modificatif du 25 mai 2009 et du code de la santé publique, la cour d’appel, qui a méconnu l’objet du litige, a violé l’article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d’appel n’ayant pas statué dans son dispositif sur la demande formée sur le fondement de l’article 1382 du code civil, le moyen, sous couvert d’un grief de méconnaissance de l’objet du litige, critique une omission de statuer, laquelle peut être réparée par la procédure prévue par l’article 463 du code de procédure civile ;

D’où il suit que le moyen n’est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société La Serre aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société SMF Kart, la SCI La Plano, l’association Karting club pays d’Olmes Mirepoix et M. X… la somme globale de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société La Serre

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR déclaré la société La Serre irrecevable en son action fondée sur les troubles anormaux de voisinage, ET D’AVOIR, en conséquence, débouté celle-ci de l’intégralité de ses demandes,

AUX MOTIFS QUE le droit reconnu au propriétaire par l’article 544 du Code civil de jouir de son bien de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par les lois ou les règlements, trouve sa limite dans l’obligation qu’il a de ne causer à la propriété d’autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage ; il appartient à celui qui se prétend victime d’un trouble anormal du voisinage d’en rapporter la preuve ; la réparation et/ou la cessation du trouble peuvent être demandées tant au propriétaire de l’immeuble dont émane le trouble qu’au locataire de cet immeuble à condition que son occupation ou son activité soit à l’origine du trouble ; l’absence de faute et/ou l’infraction aux règles en vigueur, notamment en matière d’urbanisme, n’exclut pas l’existence d’un tel trouble, sauf à rappeler qu’en vertu de l’article L.112-16 du Code de la construction de l’habitation, les dommages causés aux occupants d’un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales ou aéronautiques n’entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé postérieurement à l’existence des activités les occasionnant dès lors que ces activités s’exercent en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur et qu’elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions ; que par ailleurs, si l’action en réparation et/ou cessation d’un trouble anormal de voisinage est soumise, depuis la loi 2008-851 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, à la prescription quinquennal de droit commun édictée par l’article 2224 du Code civil, courant à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, les parties s’accordent à considérer qu’elle relevait antérieurement de la prescription décennale applicable aux actions en responsabilité civile extracontractuelle en vertu de l’ancien article 2270-1 alinéa 1 du même Code, courant à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; en l’espèce, l’activité d’achat, location, vente de kartings et de location de piste de la SARL SMF Kart, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse le 26 septembre 1990, a débuté sur le site le 28 juillet 1990 et l’association KCPOM est agréée pour la pratique du karting sous le numéro 09 S 254 depuis le 27 septembre 1991 ; certes, le site, qui comportait initialement une piste permanente d’une longueur de 1000m sur une largeur de 7m et devait s’insérer dans un centre de loisirs selon le projet présenté par M. Marc A… au préfet le 15 mai 1989, a connu des évolutions, telles celles décrites au constat d’huissier dressé à la requête de la SARL La Serre le 11 décembre 2007 qui, reproduisant les informations des sites Internet KCPOM et SMF KART, présente l’année 2001 comme une « année charnière », au cours de laquelle l’ancienne piste, critiquée par les pilotes pour son manque de zones de dépassement, a été « entièrement remodelée pour donner naissance à un nouveau tracé de 1402 x 8,5 mètres, avec un nouveau revêtement » et le circuit « agrandi de 500 mètres » a été homologué le 10 mai 2001 pour 4 ans par la Fédération Française du Sport Automobile, et précise que « le nombre de visiteurs est en pleine évolution » ; toutefois, ces évolutions se sont accompagnées d’améliorations techniques et d’un durcissement de la réglementation en matière de bruit dont témoignent les prescriptions des arrêtés préfectoraux des 12 et 25 mai 2009 et 7 mai 2013 relatifs à l’homologation du circuit, qui limitent désormais à 15 le nombre de karts tournant simultanément sur la piste lors des activités et épreuves de loisirs, essais, entraînements et démonstrations autorisés de 9 heures à 22 heures et le bruit de chaque engin à 96 dBA, au lieu de 103 antérieurement, lors des compétitions inscrites aux calendriers officiels, essais ou entraînements voire type courses club liés à ces compétitions autorisés de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures ; en l’état, il n’est pas démontré que le bruit généré par le circuit ne se serait aggravé au point d’entraîner des nuisances sonores pour le voisinage qu’à partir de 2002 ; l’action de la société La Serre fondée sur les troubles anormaux du voisinage apparaît donc atteinte par l’ancienne prescription décennale de l’article 2270-1 du Code civil, qui était acquise dès avant la promulgation de la loi 2008-851 du 17 juin 2008 et l’assignation en référé expertise du 11 août 2009 ; comme telle, elle ne peut qu’être déclarée irrecevable et le jugement dont appel sera infirmé ;

ALORS, D’UNE PART, QUE le point de départ de l’action en responsabilité extracontractuelle est la manifestation du dommage ou son aggravation ; qu’en matière de trouble anormal de voisinage, toute modification de la situation susceptible de modifier le trouble apporté aux voisins et d’aggraver le trouble anormal du voisinage ouvre une action nouvelle et qu’il appartient alors au juge du fond de vérifier si la situation nouvelle crée un trouble anormal de voisinage, peu important la situation antérieure ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué lui-même qu’une profonde modification du circuit s’est produite en 2001, dont les effets potentiellement nuisibles n’ont été réduits que par des réglementations et des améliorations en 2009 et 2013 ; qu’en déclarant prescrite l’action engagée en 2009, à la suite des modifications de 2001, dans le délai de prescription décennal alors applicable, au motif inopérant que preuve n’était pas rapportée que le bruit eût été plus nuisible après 2002 qu’avant, la Cour d’appel a violé les articles 2270-1 ancien et 544 du Code civil ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE les juges ne sauraient méconnaître les termes du litige tels que fixés par les parties dans leurs écritures ; qu’en se contentant de statuer sur la demande de la SARL La Serre au titre de son trouble anormal de jouissance indépendante de la notion de faute, sans se prononcer, comme elle y était invitée (conclusions p.16 et 17), sur sa demande au titre de l’article 1382 du Code civil, en réparation de la faute résultant du non-respect par les exploitants de l’activité préjudiciable de karting de l’arrêté modificatif du 25 mai 2009 et du Code de la santé publique, la Cour d’appel, qui a méconnu l’objet du litige, a violé l’article 4 du Code de procédure civile.

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