Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 mai 2022, 20-11.695, Inédit

  • Lettre d’intention·
  • Sociétés·
  • Convention réglementée·
  • Conseil d'administration·
  • Code de commerce·
  • Action·
  • Nullité·
  • Prescription·
  • Honoraires·
  • Commissaire aux comptes

Chronologie de l’affaire

Commentaires2

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Jean-françois Barbièri · Bulletin Joly Sociétés · 1er septembre 2022

Jean-françois Hamelin · L'ESSENTIEL Droit des contrats · 1er juillet 2022
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
Cass. com., 25 mai 2022, n° 20-11.695
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-11.695
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 23 octobre 2019, N° 18/06677
Textes appliqués :
Article L. 225-42, alinéa 2, du code de commerce.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 30 mai 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000045904563
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:CO00337
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 25 mai 2022

Cassation partielle

M. MOLLARD, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 337 F-D

Pourvoi n° A 20-11.695

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 MAI 2022

La société Inova, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 20-11.695 contre l’arrêt rendu le 24 octobre 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 2, chambre 2), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. [S] [L], domicilié [Adresse 1],

2°/ à la société Sokar, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée société Streiff,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Inova, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [L], de la SCP Gaschignard, avocat de la société Sokar, anciennement dénommé société Streiff, après débats en l’audience publique du 29 mars 2022 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 24 octobre 2019), le 29 décembre 2009, le président du conseil d’administration de la société Inova a adressé à M. [L], directeur général, une lettre relative, notamment, à la prise en charge de ses honoraires d’avocat en cas de litige du fait d’actes accomplis dans le cadre de ses fonctions.

2. Les 6 et 24 décembre 2014, la société Inova a assigné M. [L] et la société d’avocats Streiff, devenue société Sokar, aux fins d’obtenir leur condamnation in solidum à lui rembourser tous les paiements effectués pour la défense de M. [L] dans le cadre d’une procédure pénale le mettant en cause.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Inova fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable son action en nullité de la lettre d’intention et de rejeter sa demande en paiement formée contre M. [L] et la société Streiff, alors « que la prescription triennale de l’action en nullité des conventions réglementées ne s’applique pas lorsque leur annulation est demandée pour violation des lois ou principes régissant la nullité des contrats ; qu’au cas d’espèce, la cour d’appel a elle-même constaté que la société Inova sollicitait l’annulation de la lettre du 29 décembre 2009 du fait de l’illicéité de sa cause ; qu’en affirmant néanmoins que l’action en nullité de cette lettre était soumise au délai de prescription triennal de l’article L. 225-42 du code de commerce, applicable aux conventions réglementées visées par l’article L. 225-38 du code de commerce, la cour d’appel a violé ces textes, ensemble l’article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. M. [L] et la société Sokar contestent la recevabilité du moyen, soutenant que celui-ci est nouveau et mélangé de fait et de droit.

6. Cependant, la société Inova a soutenu, dans ses conclusions d’appel, que l’engagement résultant de la lettre du 29 décembre 2009 était nul car fondé sur une cause illicite. Elle a par ailleurs fait valoir que la prescription quinquennale de droit commun était applicable à son action.

7. Le moyen, qui n’est pas nouveau, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l’article L. 225-42, alinéa 2, du code de commerce :

8. Selon ce texte, l’action en annulation d’une convention réglementée conclue sans autorisation préalable du conseil d’administration se prescrit par trois ans à compter de la date de la convention.

9. La prescription triennale de l’action en nullité fondée sur l’inobservation des dispositions applicables aux conventions réglementées ne s’applique pas lorsque leur annulation est demandée pour violation des lois ou principes régissant la nullité des contrats.

10. Pour déclarer irrecevable comme prescrite l’action de la société Inova tendant à l’annulation de la lettre du 29 décembre 2009, l’arrêt, après avoir rappelé les termes de l’article L. 225-42 du code de commerce, retient que la prescription de cette action a été acquise le 30 décembre 2012.

11. En statuant ainsi, alors que la société Innova invoquait, au soutien de sa demande d’annulation de la lettre du 29 décembre 2009, l’illicéité de sa cause, la cour d’appel a violé, par fausse application, le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que confirmant le jugement, il rejette les fins de non-recevoir formulées par la société Streiff tirées de l’autorité de la chose jugée, du défaut de qualité et des dispositions des articles 111 et suivants du code de procédure civile, et en ce qu’il rejette la demande en paiement de dommages-intérêts pour réticence dolosive formée par M. [L], l’arrêt rendu le 24 octobre 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [L] et la société Sokar, aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [L] et la société Sokar et les condamne à payer à la société Inova la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Inova.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré irrecevable l’action en nullité de la lettre d’intention pour se heurter à la prescription de l’article L. 225-42 du code de commerce et d’avoir débouté la société Inova de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur [L] et de la société Streiff à lui restituer la somme de 248.097,20 € outre intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Considérant que l’argumentation de l’appelante relative à la cause illicite suppose qu’il soit statué d’abord sur la recevabilité de son action en nullité ; Considérant que la lettre du 29 décembre 2009, adressé à M. [L] pris en sa qualité de directeur et signée par M. [C] [T], président du conseil d’administration de la société Inova France SA est ainsi rédigée : « En tant que collaborateur au sein de Inova France (la Société), vous avez la responsabilité d’exercer les missions résultant de votre contrat de travail ainsi que les fonctions qui vous sont dévolues au titre de vos délégations dans l’intérêt de la société. Dans ce cadre, nous vous confirmons qu’en cas de litiges du fait de vos actes dont l’origine se situe pendant notre collaboration, et après le 01.01.2003 : * vous êtes libre du choix des cabinets d’avocats qui sont amenés à vous assister ; * les honoraires d’avocats sont, et seront, pris en charge par la Société ; étant entendu que la Société ou le Groupe pourra choisir à sa convenance d’autres cabinets d’avocats pour la défense de ses propres intérêts ; * toutes condamnations pécuniaires y inclus les condamnations prononcées dans le cadre de l’action civile d’une instance pénale, seront prises en charge par la Société. * Ces engagements perdureront jusqu’au terme de toute éventuelle action qu’elle que soit votre situation à l’égard de la Société." Considérant qu’en application de l’article 2322 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, la lettre d’intention est l’engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l’exécution de son obligation envers son créancier ; Qu’il ressort des termes de la lettre susvisée que la société Inova n’a pas entendu se substituer à M. [L] dans le paiement de ses honoraires d’avocat ; qu’en revanche, elle s’est engagée à prendre en charge lesdits honoraires et a mentionné la liberté du choix du cabinet d’avocats qui était laissée à M. [L] ; Qu’il s’agit d’une lettre d’intention au sens des dispositions précitées et non d’une garantie autonome ; Que par ailleurs, la lettre entraîne une charge financière sans contrepartie de sorte que s’appliquent les dispositions de l’article L. 225-38 du code de commerce relatives aux conventions réglementées, comme l’ont retenu, à bon droit, les premiers juges ; Qu’aux termes de l’article L. 225-42 du code de commerce, les conventions visées à l’article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d’administration peuvent être annulées si elles ont conséquences dommageables pour la société. L’action en nullité se prescrit par trois ans à compter de la date de la convention. Toutefois, si la convention a été dissimulée, le point de départ du délai de prescription est reporté au jour où elle a été révélée ; Que, la prescription de l’action en nullité de la lettre du 29 décembre 2009 a été acquise le 30 décembre 2012 ; Qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré la société Inova irrecevable en sa demande de nullité » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU’ « En l’espèce, la lettre du 29 décembre 2009 signée par M. [C] [T], président du conseil d’administration de la société Inova est rédigée à l’intention de M. [L] à dans les termes suivants : « Monsieur le Directeur, En tant que collaborateur au sein de Inova France (la Société) vous avez la responsabilité d’exercer les missions résultant de votre contrat de travail ainsi que les fonctions qui vous sont dévolues au titre de vos délégations dans l’intérêt de la société. Dans ce cadre, nous vous confirmons qu’en cas de litiges du fait de vos actes dont l’origine se situe pendant notre collaboration et après le 01.01.2003 : *vous êtes libre du choix des cabinets d’avocats qui sont amenés à vous assister *les honoraires d’avocats sont e seront pris en charge par la Société ; étant entendu que la Société ou le Groupe pourra choisir à sa convenance d’autres Cabinets d’avocats pour la défense de ses propres intérêts *toutes condamnations pécuniaires y inclus les condamnations prononcées dans le cadre de l’action civile d’une instance pénale, seront prises en charge par la Société et ce, quelque soit la nature de ces litiges Ces engagements perdureront jusqu’au terme de toute éventuelle action qu’elle que soit votre situation à l’égard de la Société. Par ailleurs, vous bénéficiez et bénéficierez de toute assurance responsabilité civile de la Société et du Groupe dans les conditions des polices souscrites.». Par cette lettre, la société Inova s’est engagée à prendre en charge les honoraires d’avocat éventuellement nécessaires pour la défense des intérêts de M. [L]. Le choix de l’avocat laissé à M. [L] ne crée pas à la charge de celui-ci l’obligation de faire l’avance des honoraires dus puisque l’engagement de la société Inova est formulé sans aucune condition et en toute connaissance de cause quant au choix d’un avocat par M. [L], le cabinet Streiff ayant déjà sollicité le paiement d’une facture antérieurement à la lettre d’intention. De la rédaction de cette lettre d’intention, il ressort que la société Inova n’a pas entendu se substituer à M. [L] dans le paiement des honoraires, en cas de carence mais a bien souscrit une obligation de résultat de paiement des honoraires. Cet engagement ne peut s’analyser en un cautionnement ni en une garantie autonome. Il constitue en revanche une lettre d’intention au sens des dispositions de l’article 2322 du code civil. Cette lettre d’intention relève du régime juridique des conventions réglementées organisé par l’article L. 225-38 du code de commerce dès lors qu’elle entraine une charge financière sans contrepartie pour la société en cas de recours par M [L] à un avocat. Aux termes de l’article L. 225-42 du code de commerce, les conventions visées à l’article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d’administration peuvent être annulées si elles ont conséquences dommageable pour la société. L’action en nullité se prescrit par trois ans à compter de la date de la convention. Toutefois si la convention a été dissimulée, le point de départ du délai de prescription est reporté au jour où elle a été révélée. L’action en nullité de la lettre d’intention dont il n’est pas soutenue qu’elle a fait l’objet d’une quelconque dissimulation, a été engagée par actes des 6 et 24 décembre 2014. Cette lettre d’intention étant du 29 décembre 2009, l’action était donc prescrite au moment de l’introduction de la demande depuis le 28 décembre 2012. La société Inova est donc déclarée irrecevable en sa demande de nullité de la lettre d’intention du 29 décembre 2009 pour se heurter à la prescription triennale de l’article L. 225-42 du code de commerce » ;

ALORS, D’UNE PART, QUE la prescription triennale de l’action en nullité des conventions réglementées ne s’applique pas lorsque leur annulation est demandée pour violation des lois ou principes régissant la nullité des contrats ; qu’au cas d’espèce, la Cour d’appel a elle-même constaté que la société Inova sollicitait l’annulation de la lettre du 29 décembre 2009 du fait de l’illicéité de sa cause ; qu’en affirmant néanmoins que l’action en nullité de cette lettre était soumise au délai de prescription triennal de l’article L. 225-42 du Code de commerce, applicable aux conventions réglementées visées par l’article L. 225-38 du Code de commerce, la Cour d’appel a violé ces textes, ensemble l’article 2224 du Code civil ;

ALORS, D’AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la lettre d’intention par laquelle une entreprise s’engage à prendre en charge les frais de défense de son directeur général s’analyse en une garantie prohibée par l’article L. 225-43 du Code de commerce, et dont l’annulation relève de la prescription quinquennale ; qu’en affirmant, pour juger prescrite comme engagée après l’expiration de la prescription triennale de l’article L. 225-42 l’action de la société Inova visant à l’annulation de la lettre d’intention fournie à Monsieur [L] garantissant la prise en charge de ses frais d’avocat, que cette lettre relevait du régime des conventions réglementées régies par l’article L. 225-38 du Code de commerce et non de celui des garanties, la Cour d’appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l’article 1104 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société Inova de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur [L] et de la société Streiff à lui restituer la somme de 248.097,20 € outre intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Considérant que la lettre du 29 décembre 2009 relève du régime des conventions réglementées ainsi qu’il a été dit ; Que le procès-verbal des délibérations du conseil d’administration du 23 mars 2010 de la société Inova France mentionne l’autorisation donnée à l’unanimité à la société de consentir à la prise en charge des frais de défense de M. [L] par la société Inova France SA concernant les procédures engagées à l’encontre de la société ou à l’encontre de M. [L], celle-ci intervenant dans le cadre de ses activités et de ses fonctions au sein de la société Inova France SA, et ce, dans les limites et conditions du courrier présenté au conseil d’administration, ainsi que l’autorisation donnée à M. [C] [T] en sa qualité de président du conseil d’administration de la société Inova France SA de signer le courrier ; Que le conseil d’administration a donc autorisé, et non opéré une régularisation a posteriori, la société à consentir à la prise en charge des frais d’avocat dans les conditions de la lettre du 29 décembre 2009 ; Que le rapport spécial du commissaire aux comptes sur les conventions réglementées relatif à l’exercice clos le 31 décembre 2010 indique que la convention de prise en charge des frais de la défense de M. [L], approuvée par le conseil d’administration le 23 mars 2010, est soumise à l’approbation de l’assemblée générale ; Que le procès-verbal des décisions délibérations de l’assemblée générale du 6 avril 2011 fait ressortir que l’assemblée, après avoir entendu la lecture du rapport spécial du commissaire aux comptes sur les conventions réglementées de l’article L. 225-38 et suivants du code de commerce, prend acte de ce rapport et approuve les conventions et leurs effets ; que par ailleurs, M. [L] est nommé président de la société transformée en SAS ; Que la société Inova a honoré son engagement, régulièrement autorisé par le conseil d’administration et validé dans les conditions ci-dessus rappelées, jusqu’au mois d’avril 2013 ; Que la société Inova invoque vainement les dispositions de l’article R. 225-28 du code de commerce relatives aux cautions, avals ou garanties au nom de la société de sorte que son argumentation quant à l’absence de limitation dans le montant et dans le temps de l’obligation souscrite est inopérante ; Qu’il s’ensuit que la lettre du 29 décembre 2009 est opposable à la société Inova ; que le jugement sera confirmé de ce chef » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU’ « En application des dispositions des articles L. 225-38 et suivants du code de commerce, s’agissant d’une société anonyme, toute convention intervenant directement entre la société et notamment son directeur général, l’un de ses directeurs généraux délégués ou l’un de ses administrateurs, doit être soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration ; le président du conseil d’administration donne avis aux commissaires aux comptes de toutes les conventions autorisées et soumet celles-ci à l’approbation de l’assemblée générale ; les commissaires aux comptes présentent, sur ces conventions, un rapport spécial à l’assemblée qui statue sur ce rapport ; les conventions approuvées par l’assemblée produisent leurs effets à l’égard des tiers. En l’espèce, d’une part le conseil d’administration de la société Inova a, le 23 mars 2010, à l’unanimité, donné à la société Inova l’autorisation de consentir dans les conditions de la lettre d’intention du 29 décembre 2009 à la prise en charge des frais de défense de M. [L] et autorisé M. [C] [T], en sa qualité de président du conseil d’administration à la signer, d’autre part, le rapport spécial du commissaire aux comptes sur les conventions réglementées relatif à l’exercice clos le 31 décembre 2010 mentionne que la convention de prise en charge des frais de la défense de M. [L] approuvée par le conseil d’administration le 23 mars 2010 est soumise à l’approbation de l’assemblée générale. Le procès-verbal des décisions et délibérations de l’assemblée générale du 6 avril 2010 nommant M. [L] en qualité de président de la société dont elle approuve la transformation de SA en SAS a approuvé le rapport de gestion du conseil d’administration et les rapports des commissaires aux comptes et pris acte de ce rapport sur les conventions réglementées, les conventions et leurs effets. Contrairement à ce que soutient la société Inova, le formalisme de la convention réglementée que constitue la lettre d’intention du 29 décembre 2009 tel que prévu aux articles L. 225-38 et suivants a bien été respecté puisque l’engagement de la société Inova résulte de la délibération du conseil d’administration du 23 mars 2010 prise au vu du projet de lettre datée du 29 décembre 2009, dans les limites et conditions de ce projet de lettre. Aucun motif d’inopposabilité de la lettre à la société Inova ne peut être retenu pour ce motif. Ne constituant pas ni un cautionnement ni une garantie autonome, la lettre d’intention n’est pas soumise à l’obligation de fixer une limite dans le montant et la durée de l’obligation souscrite. Pour ces deux motifs avancés par la société Inova, cette lettre lui est opposable. Aux termes de la lettre d’intention litigieuse, la société Inova s’est engagée à prendre en charge les frais de la défense de M. [L] « Dans ce cadre, nous vous confirmons qu’en cas de litiges du fait de vos actes dont l’origine se situe pendant notre collaboration et après le 01.01.2003». Cette lettre a vocation à s’appliquer au bénéfice de M. [L] qui bien qu’inculpé pour des faits d’abus de biens sociaux, dès lors que ceux-ci s’inscrivent dans un contexte infractionnel beaucoup plus large pour lequel les frais d’avocat ont été engagés sans distinction, faits dont M. [L] a eu à répondre en tant que dirigeant et justifiant la mise en examen de la société Inova et son renvoi devant le tribunal correctionnel pour des faits de faux en écritures, de faits de participation à une organisation criminelle, de faits de corruption active, de blanchiment, des faits d’escroquerie, d’infractions relatives aux enchères publiques. En conséquence, la lettre d’intention telle que rédigée est opposable à la société Inova qui doit l’exécuter de bonne foi. En conséquence, la société Inova n’est donc pas fondée en sa demande en paiement de la somme de 193 917,20 euros au titre des honoraires, avec intérêts et capitalisation et sous astreinte » ;

ALORS, D’UNE PART, QUE la lettre d’intention par laquelle une entreprise s’engage à prendre en charge les frais de défense de son directeur général s’analyse en une garantie devant être limitée dans le temps et le montant ; qu’en affirmant, pour dire la lettre d’intention fournie à Monsieur [L] garantissant la prise en charge de ses frais d’avocat opposable à la société Inova, que cette société invoquait vainement les dispositions de l’article R. 225-28 du Code de commerce relatives aux avals, cautions ou garanties consentis au nom de la société et imposant une telle limitation, la Cour d’appel a violé ce texte, ensemble les articles L. 225-38 et L. 226-43 du Code de commerce ;

ALORS, D’AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU’en vertu de l’article L. 225-40-1 du Code de commerce, les conventions conclues et autorisées au cours d’exercices antérieurs dont l’exécution a été poursuivie au cours du dernier exercice sont examinées chaque année par le conseil d’administration ; qu’au cas d’espèce, la société Inova faisait valoir que la lettre d’intention fournie à Monsieur [L] garantissant la prise en charge de ses frais d’avocat n’avait pas été renouvelée annuellement (Cf. conclusions d’appel, p. 29) ; qu’en déclarant cette lettre opposable à la société Inova sans répondre à ce moyen, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 mai 2022, 20-11.695, Inédit