CJCE, n° C-122/95, Arrêt de la Cour, République fédérale d'Allemagne contre Conseil de l'Union européenne, 10 mars 1998

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Chronologie de l’affaire

Commentaires3

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 10 mars 1998, Allemagne / Conseil, C-122/95
Numéro(s) : C-122/95
Arrêt de la Cour du 10 mars 1998. # République fédérale d'Allemagne contre Conseil de l'Union européenne. # Accord-cadre sur les bananes - GATT 1994 - Acte de conclusion. # Affaire C-122/95.
Date de dépôt : 10 avril 1995
Précédents jurisprudentiels : 22 Par arrêt du 5 octobre 1994, Allemagne/Conseil ( C-280/93, Rec. p. I-4973
Cour du 10 mars 1998. - République fédérale d'Allemagne contre Conseil de l' Union européenne. - Accord-cadre sur les bananes - GATT 1994 - Acte de conclusion. - Affaire C-122/95
Solution : Recours en annulation : obtention, Recours en annulation : rejet sur le fond
Identifiant CELEX : 61995CJ0122
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1998:94
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

|

61995J0122

Arrêt de la Cour du 10 mars 1998. – République fédérale d’Allemagne contre Conseil de l’Union européenne. – Accord-cadre sur les bananes – GATT 1994 – Acte de conclusion. – Affaire C-122/95.


Recueil de jurisprudence 1998 page I-00973


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


1 Recours en annulation – Délais – Point de départ – Date de prise de connaissance de l’acte – Caractère subsidiaire – Décision du Conseil portant approbation, au nom de la Communauté, d’un accord international – Date de publication

(Traité CE, art. 173, al. 5)

2 Recours en annulation – Actes susceptibles de recours – Décision du Conseil portant approbation, au nom de la Communauté, d’un accord international

(Traité CE, art. 173)

3 Recours en annulation – Actes susceptibles de recours – Décision 94/800 relative à la conclusion des accords du cycle de l’Uruguay – Recours tendant à l’annulation de la décision dans une mesure limitée – Recevabilité

(Traité CE, art. 173; règlement du Conseil n_ 3290/94; décision du Conseil 94/800)

4 Accords internationaux – Organisation mondiale du commerce – GATT de 1994 – Accord-cadre entre la Communauté et certains pays tiers sur les bananes – Décision 94/800 – Répartition du contingent tarifaire en contingents nationaux – Discrimination – Absence – Droit de propriété – Droits acquis – Libre exercice des activités professionnelles – Principe de proportionnalité – Violation – Absence – Instauration d’un régime de certificats d’exportation frappant les seuls opérateurs des catégories A et C – Violation du principe de non-discrimination

(Traité CE, art. 40, § 3; accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994; règlement du Conseil n_ 404/93; décision du Conseil 94/800)

Sommaire


1 Il découle du libellé de l’article 173, cinquième alinéa, du traité, relatif au délai du recours en annulation, que le critère de la date de prise de connaissance de l’acte en tant que point de départ du délai présente un caractère subsidiaire par rapport à ceux de la publication ou de la notification de l’acte.

Dès lors qu’il est de pratique constante que les actes du Conseil portant conclusion d’accords internationaux liant la Communauté sont publiés au Journal officiel des Communautés européennes, un État membre qui agit en annulation d’une décision portant approbation au nom de la Communauté d’un tel accord, et qui a, certes, eu connaissance de cette décision dès son adoption, peut légitimement escompter que la décision fera l’objet d’une publication au Journal officiel. Dans la mesure où, au demeurant, cette publication a effectivement eu lieu moins de deux mois après l’adoption de la décision, c’est la date de la publication qui fait courir le délai de recours, même si le texte publié figure sous la rubrique «Actes dont la publication n’est pas une condition de leur applicabilité».

2 La faculté pour un État membre d’introduire un recours en annulation contre une décision du Conseil portant conclusion d’un accord international, ainsi que la possibilité dont il dispose de solliciter, à cette occasion, des mesures provisoires par une demande de référé, n’est pas mise en cause par la circonstance que ledit accord a été conclu sans réserve par la Communauté et qu’il lie, tant sur le plan du droit communautaire que sur celui du droit international, les institutions et les États membres.

3 Ne fait pas obstacle à la recevabilité d’un recours en annulation dirigé contre la décision 94/800 relative à la conclusion au nom de la Communauté des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay, en tant que le Conseil y a approuvé la conclusion de l’accord-cadre sur les bananes avec certains pays tiers, la circonstance que cet accord-cadre ne constitue qu’un élément de l’ensemble desdits accords.

D’une part, en effet, il n’apparaît pas que l’annulation de la décision en cause, dans la seule mesure où elle porte conclusion de l’accord-cadre, a pour effet de rendre inopérants d’autres concessions et engagements réciproques consentis dans le cadre des négociations du cycle de l’Uruguay. D’autre part, dans le secteur de l’agriculture, la mise en oeuvre interne desdits accords, par le biais du règlement n_ 3290/94, s’est faite au moyen d’adaptations apportées de façon séparée aux différentes réglementations communautaires portant organisation commune des marchés agricoles, de sorte qu’une éventuelle annulation de la décision, dans la mesure prémentionnée, ne serait pas de nature à affecter les adaptations apportées à des secteurs autres que celui de la banane.

4 Le régime mis en place par l’accord-cadre sur les bananes conclu entre la Communauté et certains pays tiers, intégré à une annexe du GATT de 1994 constituant, à son tour, une annexe de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce, accord qui a été approuvé au nom de la Communauté par la décision 94/800, prévoit, au point 2 de l’accord-cadre, que le contingent tarifaire pour les importations des bananes pays tiers et des bananes non traditionnelles ACP est divisé en quotes-parts spécifiques allouées à différents pays ou groupes de pays tiers en réservant un pourcentage donné aux États contractants de l’accord-cadre et, à son point 6, que seuls les opérateurs des catégories A et C, à l’exclusion de la catégorie B (comprenant les opérateurs ayant commercialisé des bananes communautaires et/ou traditionnelles ACP), sont obligés de se procurer des certificats d’exportation auprès des autorités compétentes des États contractants aux fins de l’importation de bananes en provenance de ces pays.

S’agissant de la répartition du contingent tarifaire en contingents nationaux, qui favorise certains pays tiers et limite ainsi les possibilités, pour les opérateurs des catégories A et C, d’importer des bananes originaires d’autres pays tiers, celle-ci ne viole pas le principe général de non-discrimination.

En effet, il n’existe pas en droit communautaire de principe général obligeant la Communauté, dans ses relations extérieures, à consentir à tous égards un traitement égal aux différents pays tiers et, si une différence de traitement entre pays tiers n’est pas contraire au droit communautaire, on ne saurait non plus considérer comme contraire à ce droit une différence de traitement entre opérateurs économiques communautaires qui ne serait qu’une conséquence automatique des différents traitements accordés aux pays tiers avec lesquels ces opérateurs ont noué des relations commerciales. Or, les restrictions aux possibilités d’importation que l’instauration des contingents nationaux est susceptible d’entraîner dans le chef des opérateurs économiques des catégories A et C sont la conséquence automatique des différents traitements accordés aux pays tiers, selon qu’ils sont ou non parties contractantes à l’accord-cadre et selon l’importance du contingent qui leur a été attribué dans cet accord.

La répartition en contingents nationaux n’est pas non plus constitutive d’une violation des droits fondamentaux ou des principes généraux du droit.

En ce qui concerne, en effet, le droit de propriété, aucun opérateur ne peut revendiquer un tel droit sur une part de marché qu’il détenait à un moment antérieur à l’adoption du régime en cause ni faire valoir un droit acquis ou une confiance légitime dans le maintien de la situation telle qu’elle existait avant celle-ci. En ce qui concerne les restrictions à la faculté d’importer les bananes en provenance de certains pays tiers que comporte la répartition du contingent tarifaire, elles sont inhérentes aux objectifs d’intérêt général communautaire poursuivis par l’instauration de l’organisation commune des marchés dans le secteur de la banane et ne portent dès lors pas indûment atteinte au libre exercice des activités professionnelles des opérateurs touchés. En ce qui concerne, enfin, le principe de proportionnalité, il n’apparaît pas que la répartition du contingent global pays tiers en contingents nationaux attribués à certains d’entre eux est manifestement inappropriée pour réaliser les objectifs poursuivis, à savoir l’écoulement de la production communautaire et de la production traditionnelle ACP de bananes et l’intégration des différents marchés nationaux jusqu’alors cloisonnés.

S’agissant, en revanche, de la différence de traitement consistant dans l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation, impliquant pour les seuls opérateurs des catégories A et C un accroissement du prix d’acquisition des bananes originaires des pays tiers concernés de l’ordre de 33%, celle-ci est incompatible avec l’interdiction de discrimination prévue à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité, qui n’est que l’expression spécifique du principe général d’égalité appartenant aux principes fondamentaux du droit communautaire, et entraîne l’annulation de la décision 94/800, dans la mesure où ledit accord-cadre exonère les opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation qu’il prévoit.

Il est vrai que l’organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, telle que mise en place par le règlement n_ 404/93, et notamment son régime de répartition du contingent tarifaire, comporte certaines restrictions ou différences de traitement au détriment des opérateurs des catégories A et C, qui ne sont pas contraires au principe général de non-discrimination dans la mesure où elles sont inhérentes à l’objectif d’une intégration de marchés jusqu’alors cloisonnés, compte tenu de la situation différente dans laquelle se trouvaient les différentes catégories d’opérateurs économiques avant l’instauration de l’organisation commune des marchés, et il est également vrai que la poursuite de l’objectif de celle-ci, qui consiste à garantir l’écoulement de la production communautaire et de la production traditionnelle ACP, implique l’établissement d’un certain équilibre entre les différentes catégories d’opérateurs concernés.

Cependant, il n’est pas démontré que cet équilibre, dans la mesure où il a été rompu par l’augmentation du contingent tarifaire et la réduction concomitante des droits de douane prévues dans l’accord-cadre, dont profitent également les opérateurs de la catégorie B, n’a pu être rétabli que par l’octroi d’un avantage substantiel à cette même catégorie d’opérateurs et, donc, au prix d’une nouvelle différence de traitement au détriment des autres catégories d’opérateurs qui, déjà, lors de l’instauration du contingent tarifaire et du mécanisme de répartition de celui-ci, avaient subi des restrictions et des différences de traitement semblables.

Par ailleurs, l’instauration du régime des certificats d’exportation vise, à côté du rétablissement dudit équilibre, à fournir une aide financière aux pays tiers qui sont parties contractantes à l’accord-cadre et à compenser ainsi les limitations que le règlement n_ 404/93 a imposées à la commercialisation de bananes en provenance de ces pays au profit des bananes communautaires et ACP. Or, il n’apparaît pas que l’augmentation du contingent tarifaire et sa répartition en contingents nationaux ainsi que la réduction concomitante des droits de douane n’étaient pas suffisantes pour compenser lesdites limitations et que cet objectif a dès lors dû être réalisé moyennant l’imposition d’une charge financière à une partie seulement des opérateurs économiques procédant à des importations en provenance de ces pays.

Parties


Dans l’affaire C-122/95,

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. E. Röder, Ministerialrat au ministère fédéral de l’Économie, et B. Kloke, Oberregierungsrat au même ministère, D-53107 Bonn, en qualité d’agents,

partie requérante,

soutenue par

Royaume de Belgique, représenté par M. J. Devadder, conseiller général au ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ambassade de Belgique, 4, rue des Girondins,

partie intervenante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. R. Bandilla, directeur au service juridique, A. Brautigam, conseiller juridique, et J.-P. Hix, membre du service juridique, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. B. Eynard, directeur de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d’investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie défenderesse,

soutenue par

Royaume d’Espagne, représenté par M. A. Navarro González, directeur général de la coordination juridique et institutionnelle communautaire, et Mme R. Silva de Lapuerta, abogado del Estado, du service juridique de l’État, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ambassade d’Espagne, 4-6, boulevard E. Servais,

République française, représentée par Mme C. de Salins, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et M. G. Mignot, secrétaire des affaires étrangères à la même direction, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ambassade de France, 8 B, boulevard Joseph II,

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. T. Christoforou et U. Wölker, membres du service juridique, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

parties intervenantes,

ayant pour objet l’annulation de l’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, de la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1), en tant que le Conseil y a approuvé la conclusion de l’accord-cadre sur les bananes avec la république du Costa Rica, la république de Colombie, la république du Nicaragua et la république du Venezuela,

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, C. Gulmann, M. Wathelet et R. Schintgen (rapporteur), présidents de chambre, G. F. Mancini, P. J. G. Kapteyn, J. L. Murray, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet, G. Hirsch et P. Jann, juges,

avocat général: M. M. B. Elmer,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l’audience du 4 février 1997, au cours de laquelle le gouvernement allemand était représenté par M. E. Röder, le gouvernement belge par M. J. Devadder, le Conseil par MM. A. Brautigam et J.-P. Hix, le gouvernement espagnol par Mme R. Silva de Lapuerta, le gouvernement français par M. F. Pascal, attaché d’administration centrale à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, en qualité d’agent, et la Commission par MM. U. Wölker, P. J. Kuyper, conseiller juridique, et K.-D. Borchardt, membre du service juridique, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 juin 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 10 avril 1995, la République fédérale d’Allemagne a, en vertu de l’article 173, premier alinéa, du traité CE, demandé l’annulation de l’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, de la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1, ci-après la «décision litigieuse»), en tant que le Conseil y a approuvé la conclusion de l’accord-cadre sur les bananes avec la république du Costa Rica, la république de Colombie, la république du Nicaragua et la république du Venezuela (ci-après l'«accord-cadre»).

2 Le règlement (CEE) n_ 404/93 du Conseil, du 13 février 1993, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane (JO L 47, p. 1), a, au titre IV, substitué un régime commun des échanges avec les pays tiers aux différents régimes nationaux antérieurs.

3 L’article 18, paragraphe 1, du règlement n_ 404/93, dans sa version originale, prévoyait qu’un contingent tarifaire de 2 millions de tonnes (poids net) était ouvert pour chaque année pour les importations des bananes pays tiers et des bananes non traditionnelles ACP. Dans le cadre de ce contingent, les importations des bananes pays tiers étaient soumises à la perception d’un droit de douane de 100 écus par tonne, tandis que celles de bananes non traditionnelles ACP n’étaient soumises à aucun droit.

4 L’article 19, paragraphe 1, de ce règlement opère une répartition du contingent tarifaire qui est ouvert à concurrence de 66,5 % à la catégorie des opérateurs qui ont commercialisé des bananes pays tiers et/ou des bananes non traditionnelles ACP, 30 % à la catégorie des opérateurs qui ont commercialisé des bananes communautaires et/ou des bananes traditionnelles ACP et 3,5 % à la catégorie des opérateurs établis dans la Communauté qui ont commencé à commercialiser des bananes autres que les bananes communautaires et/ou traditionnelles ACP à partir de 1992.

5 L’article 20 du règlement n_ 404/93 charge la Commission d’arrêter les modalités d’application du titre IV.

6 Ainsi, la Commission a adopté le règlement (CEE) n_ 1442/93, du 10 juin 1993, portant modalités d’application du régime d’importation de bananes dans la Communauté (JO L 142, p. 6). Ce règlement reproduit la répartition du contingent tarifaire entre les trois catégories d’opérateurs économiques dénommées «catégories A, B et C».

7 Le 19 février 1993, la république de Colombie, la république du Costa Rica, la république de Guatemala, la république du Nicaragua et la république du Venezuela ont demandé à la Communauté d’ouvrir des consultations, au titre de l’article XXII, paragraphe 1, de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (ci-après le «GATT»), à propos du règlement n_ 404/93. Les consultations n’ayant pas abouti à une solution satisfaisante, les États latino-américains en cause ont déclenché, en avril 1993, la procédure de règlement des litiges prévue à l’article XXIII, paragraphe 2, du GATT.

8 Le 18 janvier 1994, le groupe d’experts institué dans le cadre de cette procédure a présenté un rapport dans lequel il conclut à l’incompatibilité avec les règles du GATT du régime d’importation institué par le règlement n_ 404/93.

9 Ce rapport n’a pas été adopté par les parties contractantes au GATT.

10 Les 28 et 29 mars 1994, la Communauté est parvenue à un arrangement avec la république de Colombie, la république du Costa Rica, la république du Nicaragua et la république du Venezuela, sous la forme de l’accord-cadre.

11 L’accord-cadre se compose de deux documents: le premier, intitulé «Résultat convenu des négociations entre la Colombie, le Costa Rica, le Nicaragua, le Venezuela et la Communauté européenne sur le régime communautaire d’importation de bananes», constitue une sorte de préambule de l’accord proprement dit; le second document, intitulé «Accord-cadre sur les bananes», comporte les dispositions techniques de l’arrangement avec les États latino-américains.

12 Dans le premier document, il est stipulé:

«Le projet d’accord sur les bananes ci-joint représente un résultat satisfaisant des négociations sur les bananes dans le contexte de l’Uruguay Round.

L’accord constitue aussi le résultat des négociations et consultations au titre de l’article XXVIII qui ont eu lieu au sujet des bananes entre la CE et les pays susmentionnés.

En outre, l’accord constitue un règlement du différend sur les bananes qui fait l’objet d’un rapport du groupe d’experts du GATT. Il a donc été convenu que la Colombie, le Costa Rica, le Nicaragua, le Venezuela et la CE renonceront à demander l’adoption du rapport du groupe d’experts précité.

La Colombie, le Costa Rica, le Nicaragua et le Venezuela sont convenus de ne pas engager de procédure de règlement des différends du GATT contre le régime communautaire d’importation de bananes pendant la durée de l’accord ci-joint.»

13 Le second document qui constitue l’accord-cadre proprement dit fixe, au point 1, le contingent tarifaire global de base à 2 100 000 tonnes pour 1994 et à 2 200 000 tonnes pour 1995 et les années suivantes, sous réserve de toute augmentation résultant de l’élargissement de la Communauté.

14 Au point 2, l’accord-cadre établit les pourcentages de ce contingent attribués respectivement à la Colombie, au Costa Rica, au Nicaragua et au Venezuela. Ces États reçoivent 49,4 % du contingent total, tandis que la république Dominicaine et les autres États ACP se voient accorder 90 000 tonnes pour les importations non traditionnelles, le surplus revenant aux autres pays tiers.

15 Les points 3 à 5 traitent de l’application ou de la modification des contingents par pays, au cas où l’un d’eux ne pourrait pas utiliser son contingent ou en cas d’accroissement du contingent global.

16 Le point 6 prévoit que la gestion des contingents, y compris toute augmentation, reste inchangée par rapport aux dispositions du règlement n_ 404/93. Ce point précise encore:

«les pays fournisseurs auxquels un contingent spécifique a été attribué peuvent délivrer des licences d’exportation spéciales pour une quantité pouvant atteindre jusqu’à 70 % de leur contingent, ces licences étant une condition préalable pour la délivrance, par la Communauté, de certificats pour l’importation de bananes en provenance desdits pays par les opérateurs de la `catégorie A’ et de la `catégorie C'.

L’autorisation de délivrer les licences d’exportation spéciales est accordée par la Commission de sorte qu’il soit possible d’améliorer la régularité et la stabilité des relations commerciales entre producteurs et importateurs et à la condition que les licences d’exportation soient délivrées sans aucune discrimination entre les opérateurs».

17 Le point 7 fixe le droit de douane contingentaire à 75 écus par tonne.

18 D’après les points 8 et 9, le système convenu sera opérationnel à partir du 1er octobre 1994 au plus tard et viendra à expiration le 31 décembre 2002.

19 Aux termes des points 10 et 11,

«Le présent accord sera incorporé dans la liste de la Communauté pour l’Uruguay Round.

Le présent accord présente un règlement du différend entre la Colombie, le Costa Rica, le Venezuela, le Nicaragua et la Communauté au sujet du régime communautaire pour les bananes. Les parties au présent accord renonceront à demander l’adoption du rapport du groupe d’experts du GATT sur ce sujet.»

20 Les points 1 et 7 de l’accord-cadre ont été intégrés à l’annexe LXXX du GATT de 1994 qui contient la liste des concessions douanières de la Communauté. Le GATT de 1994 constitue, à son tour, l’annexe 1 A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (ci-après l'«OMC»). Une annexe de cette annexe LXXX reproduit l’accord-cadre.

21 Le 25 juillet 1994, la République fédérale d’Allemagne a saisi la Cour d’une demande d’avis relatif à la compatibilité de l’accord-cadre avec le traité.

22 Par arrêt du 5 octobre 1994, Allemagne/Conseil (C-280/93, Rec. p. I-4973), la Cour a rejeté le recours en annulation introduit par la République fédérale d’Allemagne à l’encontre du règlement n_ 404/93.

23 Dans une déclaration inscrite au procès-verbal du Conseil, du 20 décembre 1994, ayant pour objet l’adoption de la décision de conclusion des accords du cycle de l’Uruguay, prévue pour le 22 décembre suivant, le gouvernement allemand a souligné que, «bien qu’il ait approuvé la décision du Conseil relative à la conclusion par la Communauté de l’accord relatif à l’OMC, il tient pour illégal l’accord-cadre» et que cette approbation «ne saurait être interprétée comme une approbation» de l’accord-cadre.

24 Le 21 décembre 1994, la Commission a adopté le règlement (CE) n_ 3224/94 établissant des mesures transitoires pour la mise en oeuvre de l’accord-cadre sur les bananes conclu dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du cycle de l’Uruguay (JO L 337, p. 72).

25 Le 22 décembre 1994, le Conseil a adopté, à l’unanimité, la décision litigieuse dont l’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, est ainsi rédigé:

«1. Sont approuvés au nom de la Communauté européenne, pour ce qui est de la partie relevant de la compétence de celle-ci, les accords et actes multilatéraux suivants:

— l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce ainsi que les accords figurant aux annexes 1, 2 et 3 de cet accord.»

26 Cette décision a fait l’objet d’une publication au Journal officiel des Communautés européennes L 336 (p. 1), portant la date du 23 décembre 1994, sous la rubrique «Actes dont la publication n’est pas une condition de leur applicabilité». D’après une information de l’Office des publications des Communautés européennes, le Journal officiel des Communautés européennes L 336 n’a été disponible qu’à partir du 13 février 1995.

27 Le règlement (CE) n_ 3290/94 du Conseil, du 22 décembre 1994, relatif aux adaptations et aux mesures transitoires nécessaires dans le secteur de l’agriculture pour la mise en oeuvre des accords conclus dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du cycle d’Uruguay (JO L 349, p. 105), comporte une annexe XV relative aux bananes. Cette annexe prévoit que l’article 18, paragraphe 1, du règlement n_ 404/93 est modifié en ce sens que, pour l’année 1994, le volume du contingent tarifaire est fixé à 2,1 millions de tonnes et, pour les années suivantes, à 2,2 millions de tonnes. Dans le cadre de ce contingent tarifaire, les importations de bananes pays tiers sont assujetties à la perception d’un droit de douane de 75 écus par tonne.

28 Le règlement (CE) n_ 478/95 de la Commission, du 1er mars 1995, portant modalités d’application complémentaires du règlement n_ 404/93 en ce qui concerne le régime de contingent tarifaire à l’importation de bananes dans la Communauté et modifiant le règlement n_ 1442/93 (JO L 49, p. 13), vise à arrêter les mesures nécessaires pour la mise en oeuvre, sur une base qui ne soit plus transitoire, de l’accord-cadre.

29 Dans l’avis 3/94, du 13 décembre 1995 (Rec. p. I-4577), la Cour a constaté qu’il n’y avait pas lieu de répondre à la demande d’avis de la République fédérale d’Allemagne, celle-ci étant devenue sans objet du fait que l’accord-cadre, intégré dans les accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay, avait été conclu avec ces accords après la saisine de la Cour.

Sur la recevabilité du recours

30 Le Conseil soulève plusieurs moyens à l’encontre de la recevabilité du recours, tirés, d’une part, de la tardiveté de l’introduction de celui-ci et, d’autre part, du fait que l’accord-cadre, une fois approuvé, lie la Communauté et les États membres et qu’il constitue une partie de l’ensemble de l’accord instituant l’OMC.

31 En premier lieu, le Conseil, soutenu par le royaume d’Espagne, la République française et la Commission, fait valoir que le recours est irrecevable au motif que, en méconnaissance de l’article 173, cinquième alinéa, du traité, il n’a pas été introduit dans le délai de deux mois à compter du jour où la requérante a eu connaissance de l’acte attaqué, en l’occurrence le 22 décembre 1994, date d’adoption de la décision litigieuse par le Conseil.

32 A l’appui de ce moyen d’irrecevabilité, le Conseil soutient que la date de la publication au Journal officiel des Communautés européennes ou, lorsque, comme en l’espèce, celle-ci ne correspond pas à la date à laquelle le Journal officiel des Communautés européennes a été effectivement disponible, la date de la parution effective de celui-ci ne sauraient être retenues comme points de départ du délai de recours que pour les actes pour lesquels la publication est une condition de leur applicabilité, ce qui ne serait pas le cas de la décision litigieuse.

33 La République fédérale d’Allemagne rétorque qu’il résulte du libellé de l’article 173, cinquième alinéa, du traité que la date de la prise de connaissance de l’acte par la requérante ne saurait être retenue qu’à défaut d’une publication ou d’une notification de l’acte et que, à cet égard, la circonstance que la décision litigieuse ne constitue pas un acte dont la publication est une condition d’applicabilité n’est pas pertinente.

34 Aux termes de l’article 173, cinquième alinéa, du traité, les recours prévus à cet article doivent être formés dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance.

35 Il découle du libellé même de cette disposition que le critère de la date de prise de connaissance de l’acte en tant que point de départ du délai de recours présente un caractère subsidiaire par rapport à ceux de la publication ou de la notification de l’acte.

36 Il convient de constater, ensuite, qu’il est de pratique constante que les actes du Conseil portant conclusion d’accords internationaux liant la Communauté européenne sont publiés au Journal officiel des Communautés européennes.

37 La requérante pouvait donc légitimement escompter que la décision litigieuse, par laquelle ont été approuvés, au nom de la Communauté européenne, notamment l’accord instituant l’OMC ainsi que les accords figurant aux annexes de celui-ci, dont le GATT 1994, ferait l’objet d’une publication au Journal officiel des Communautés européennes.

38 Cette publication a effectivement eu lieu moins de deux mois après l’adoption de l’acte par le Conseil, le Journal officiel des Communautés européennes qui l’a assurée ayant été disponible à partir du 13 février 1995.

39 Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que, en l’espèce, c’est la date de la publication qui a fait courir le délai de recours.

40 La République fédérale d’Allemagne ayant introduit le présent recours dans un délai inférieur à deux mois à compter de la parution effective du Journal officiel des Communautés européennes assurant la publication de la décision litigieuse, le premier moyen d’irrecevabilité, tiré de la tardiveté du recours, doit être rejeté.

41 En second lieu, le Conseil fait valoir qu’un État membre ne saurait mettre en cause, par un recours en annulation dirigé contre l’acte de conclusion au nom de la Communauté, un accord international conclu sans réserve par celle-ci et qui lie, tant sur le plan du droit communautaire que sur celui du droit international, les institutions et les États membres.

42 A cet égard, il suffit de rappeler que, dans l’avis 3/94, précité, point 22, la Cour a expressément constaté, pour justifier qu’il n’y avait pas lieu de répondre à une demande d’avis, introduite au titre de l’article 228, paragraphe 6, du traité, lorsque l’accord international sur lequel cette demande porte a déjà été conclu, que, en toute hypothèse, l’État ou l’institution communautaire à l’origine de la demande d’avis dispose de la voie du recours en annulation contre la décision du Conseil de conclure l’accord ainsi que de la possibilité de solliciter, à cette occasion, des mesures provisoires par une demande de référé.

43 Le Conseil soutient, en troisième lieu, que l’accord-cadre ne constitue qu’un élément de l’ensemble des accords conclus dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du cycle de l’Uruguay et que son annulation ne saurait dès lors être demandée isolément, sous peine de remettre en cause l’équilibre fragile des concessions et engagements réciproques négociés dans ce cadre. Le Conseil invoque, à l’appui de ce moyen, l’arrêt du 28 avril 1988, LAISA et CPC España/Conseil (31/86 et 35/86, Rec. p. 2285), dans lequel la Cour aurait jugé que la remise en cause de certaines dispositions de l’acte relatif aux conditions d’adhésion du royaume d’Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO 1985, L 302, p. 23), en tant qu’éléments d’un ensemble plus vaste consacrant les résultats des négociations d’adhésion, n’était pas admissible.

44 A cet égard, il convient de souligner d’abord que, dans l’arrêt LAISAet CPC España/Conseil, précité, point 18, la Cour a rejeté les recours en annulation comme irrecevables au motif que les dispositions attaquées faisaient partie intégrante de l’acte d’adhésion et ne constituaient donc pas un acte du Conseil au sens de l’article 173 du traité.

45 Il y a lieu de relever en outre que, en l’espèce, le Conseil n’a fait état d’aucun élément particulier de nature à démontrer que l’annulation de la décision litigieuse, dans la seule mesure où elle porte conclusion de l’accord-cadre, a pour effet de rendre inopérants d’autres concessions et engagements réciproques consentis dans le cadre des négociations du cycle de l’Uruguay.

46 Il importe d’observer également que, dans le secteur de l’agriculture, la mise en oeuvre interne des accords conclus dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du cycle de l’Uruguay, par le biais du règlement n_ 3290/94, s’est faite au moyen d’adaptations apportées de façon séparée aux différentes réglementations communautaires portant organisation commune des marchés agricoles. Dans ces conditions, une éventuelle annulation de la décision litigieuse, dans la mesure où elle porte conclusion de l’accord-cadre, ne serait pas de nature à affecter les adaptations apportées à des secteurs autres que celui de la banane.

47 Aucun des moyens d’irrecevabilité soulevés par le Conseil ne pouvant ainsi être retenu, le recours est dès lors recevable.

Sur le fond

48 La République fédérale d’Allemagne, soutenue par le royaume de Belgique, fait valoir que le régime mis en place par l’accord-cadre atteint les opérateurs des catégories A et C dans leurs droits fondamentaux, à savoir le droit au libre exercice de leur profession et le droit de propriété, et les discrimine par rapport aux opérateurs de la catégorie B. Par ailleurs, cet accord contreviendrait aux principes du respect de la confiance légitime et de proportionnalité.

49 A l’appui de ces moyens, la requérante expose que l’attribution de contingents nationaux aux pays tiers qui sont parties contractantes à l’accord-cadre limite les possibilités, pour les opérateurs des catégories A et C, d’importer des bananes originaires d’autres pays tiers. Elle risquerait, en outre, de priver ces opérateurs de la valeur inhérente à des marques de produits fondées sur le pays d’origine et les obligerait à procéder à une diversification coûteuse de leurs sources d’approvisionnement.

50 La République fédérale d’Allemagne souligne également que le régime des certificats d’exportation comporte le paiement de taxes aux pays les délivrant et aboutit de ce fait à un renchérissement des importations en provenance de ceux-ci. Dans ces conditions, l’application du régime des certificats d’exportation aux seuls opérateurs des catégories A et C entraînerait une discrimination de ceux-ci par rapport aux opérateurs de la catégorie B, qui se verraient déjà privilégiés par le fait que la clé de répartition, instituée par le règlement n_ 404/93, s’applique à l’augmentation du contingent tarifaire prévue dans l’accord-cadre. Selon la requérante, cette discrimination ne saurait être justifiée au titre de l’intérêt de la Communauté à mettre un terme à la contestation, par les pays tiers concernés, du régime communautaire d’importation de bananes devant les instances du GATT.

51 Le Conseil, soutenu par le royaume d’Espagne, la République française et la Commission, conteste que l’accord-cadre contrevienne aux principes fondamentaux du droit communautaire invoqués par la requérante. Il fait valoir que l’instauration des contingents nationaux et du régime des certificats d’exportation n’entraîne pas une détérioration de la situation concurrentielle des opérateurs des catégories A et C. A cet égard, il observe que l’augmentation du contingent tarifaire et la réduction des droits de douane, convenues dans l’accord-cadre, accroissent la disponibilité de bananes pays tiers et augmentent les possibilités de concurrence entre les opérateurs de toutes les catégories.

52 Le Conseil et les parties qui sont intervenues au soutien de ses conclusions ajoutent que la différence de traitement qui découle de l’exonération des opérateurs de la catégorie B de l’obligation de se procurer des certificats d’exportation coûteux est objectivement justifiée par la nécessité de restaurer entre ces opérateurs et ceux des catégories A et C l’équilibre concurrentiel que le règlement n_ 404/93 a eu pour but d’établir. Ils rappellent à cet égard que, dans l’arrêt Allemagne/Conseil, précité, la Cour a reconnu la légalité de certains avantages attribués aux opérateurs de la catégorie B par la nécessité de réaliser un tel équilibre. Or, l’augmentation du contingent tarifaire et la réduction des droits de douane convenues dans l’accord-cadre auraient eu pour effet de rompre ledit équilibre au détriment des opérateurs de la catégorie B.

53 Pour apprécier le bien-fondé du présent recours, il convient d’examiner, d’abord, le moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination et, ensuite, les moyens tirés respectivement de la violation du droit de propriété, du droit au libre exercice d’une profession, du principe de la protection de la confiance légitime ainsi que du principe de proportionnalité.

Sur le moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination

54 Afin d’apprécier le bien-fondé du moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination, il convient de distinguer entre, d’une part, l’instauration des contingents nationaux et, d’autre part, l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation.

55 En ce qui concerne le premier aspect, il y a lieu de souligner que, dans l’arrêt Allemagne/Conseil, précité, la Cour a reconnu la légalité de l’instauration du contingent tarifaire global pour les importations des bananes pays tiers et des bananes non traditionnelles ACP par opposition aux importations traditionnelles en provenance des États ACP bénéficiant, en vertu de la convention de Lomé, d’un régime de faveur.

56 Il convient de rappeler également qu’il n’existe pas en droit communautaire de principe général obligeant la Communauté, dans ses relations extérieures, à consentir à tous égards un traitement égal aux différents pays tiers. Dès lors, comme la Cour l’a déclaré dans l’arrêt du 28 octobre 1982, Faust/Commission (52/81, Rec. p. 3745, point 25), si une différence de traitement entre pays tiers n’est pas contraire au droit communautaire, on ne saurait non plus considérer comme contraire à ce droit une différence de traitement entre opérateurs économiques communautaires qui ne serait qu’une conséquence automatique des différents traitements accordés aux pays tiers avec lesquels ces opérateurs ont noué des relations commerciales.

57 Or, force est de constater que les restrictions aux possibilités d’importation que l’instauration des contingents nationaux est susceptible d’entraîner dans le chef des opérateurs économiques des catégories A et C sont la conséquence automatique des différents traitements accordés aux pays tiers, selon qu’ils sont ou non parties contractantes à l’accord-cadre et selon l’importance du contingent qui leur a été attribué dans cet accord.

58 Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination doit être rejeté comme non fondé pour ce qui concerne l’instauration des contingents nationaux.

59 En ce qui concerne la différence de traitement consistant dans l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation, il y a lieu de constater d’emblée qu’elle n’est pas la conséquence automatique d’un quelconque traitement différent accordé à certains pays tiers par rapport à celui accordé à d’autres.

60 En effet, cette différence de traitement ne trouve pas son origine dans le fait que le régime des certificats d’exportation, tel que prévu dans l’accord-cadre, est applicable pour les importations en provenance de certains pays tiers, qu’ils soient ou non parties contractantes à l’accord-cadre, mais découle du fait que, parmi les opérateurs communautaires qui ont noué des relations commerciales avec les pays tiers pour les importations en provenance desquels le régime des certificats d’exportation est applicable, certains se trouvent soumis à l’obligation de se procurer des certificats d’exportation alors que d’autres en sont exemptés.

61 Il importe de souligner, ensuite, que cette différence de traitement des opérateurs des catégories A et C par rapport à ceux de la catégorie B est manifeste dans la mesure où, ainsi que la requérante l’a allégué et le Conseil l’a expressément admis, la soumission au régime des certificats d’exportation implique, pour les premiers, un accroissement du prix d’acquisition des bananes originaires des pays tiers concernés de l’ordre de 33 % par rapport au prix payé par les seconds.

62 Il convient dès lors d’examiner si cette différence de traitement est incompatible avec l’interdiction prévue à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité, qui n’est que l’expression spécifique du principe général d’égalité qui appartient aux principes fondamentaux du droit communautaire (voir, notamment, arrêts du 19 octobre 1977, Ruckdeschel et Ströh, 117/76 et 16/77, Rec. p. 1753, point 7, et Moulins et Huileries de Pont-à-Mousson et Providence agricole de la Champagne, 124/76 et 20/77, Rec. p. 1795, point 16, et du 25 octobre 1978, Koninklijke Scholten-Honig et De Bijenkorf, 125/77, Rec. p. 1991, point 26, et Royal Scholten-Honig et Tunnel Refineries, 103/77 et 145/77, Rec. p. 2037, point 26) ou, au contraire, si elle peut être objectivement justifiée, comme le prétendent notamment le Conseil et la Commission, par la nécessité de rétablir l’équilibre concurrentiel entre ces catégories d’opérateurs.

63 A cet égard, il y a lieu de souligner que, dans l’arrêt Allemagne/Conseil, précité, la Cour a reconnu que l’organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, telle que mise en place par le règlement n_ 404/93, et notamment son régime de répartition du contingent tarifaire, comporte certaines restrictions ou différences de traitement au détriment des opérateurs des catégories A et C, qui voient leurs possibilités d’importations de bananes en provenance des pays tiers restreintes, tandis que les opérateurs de la catégorie B, qui étaient obligés de commercialiser jusque-là essentiellement des bananes communautaires et ACP, se voient accorder la possibilité d’importer des quantités déterminées de bananes pays tiers.

64 La Cour a jugé qu’un tel traitement différencié n’est pas contraire au principe général de non-discrimination dans la mesure où il est inhérent à l’objectif d’une intégration de marchés jusqu’alors cloisonnés, compte tenu de la situation différente dans laquelle se trouvaient les différentes catégories d’opérateurs économiques avant l’instauration de l’organisation commune des marchés, et que la poursuite de l’objectif de celle-ci, qui consiste à garantir l’écoulement de la production communautaire et de la production traditionnelle ACP, implique l’établissement d’un certain équilibre entre les différentes catégories d’opérateurs concernés (point 74).

65 Dès lors, lorsque l’équilibre ainsi mis en place par le règlement n_ 404/93 vient à être rompu parce que l’un ou plusieurs des paramètres qui contribuent à son établissement, tels, par exemple, le niveau du contingent tarifaire ou celui des droits de douane applicables aux importations, ont subi des modifications, fût-ce pour des raisons étrangères à l’organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, son rétablissement peut s’avérer nécessaire. Il reste toutefois à savoir si, en l’espèce, ce rétablissement a valablement pu être opéré au détriment des opérateurs économiques des catégories A et C au moyen d’une mesure telle que l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation.

66 A cet égard, il convient de constater que le régime de répartition du contingent tarifaire, tel qu’il a été institué par le règlement n_ 404/93, qui réserve 30 % de ce contingent aux opérateurs de la catégorie B, est également applicable à l’augmentation dudit contingent convenue dans l’accord-cadre.

67 Il en découle, d’une part, que les opérateurs de la catégorie B profitent, au même titre que ceux des catégories A et C, de l’augmentation du contingent et de la réduction concomitante des droits de douane qui, selon le Conseil et la Commission, sont à l’origine de la rupture de l’équilibre entre les différentes catégories d’opérateurs concernés. D’autre part, les restrictions et différences de traitement au détriment des opérateurs des catégories A et C que comporte le régime d’importation de bananes institué par le règlement n_ 404/93 existent également au niveau de la partie du contingent correspondant à cette augmentation.

68 Dans ces conditions, il y a lieu d’admettre que, pour justifier le recours à une mesure telle celle en cause en l’espèce, le Conseil aurait dû démontrer que l’équilibre rompu par l’augmentation du contingent tarifaire et la réduction concomitante des droits de douane, dont profitent également les opérateurs de la catégorie B, n’a pu être rétabli que par l’octroi d’un avantage substantiel à cette même catégorie d’opérateurs et, donc, au prix d’une nouvelle différence de traitement au détriment des autres catégories d’opérateurs qui, déjà, lors de l’instauration du contingent tarifaire et du mécanisme de répartition de celui-ci, avaient subi des restrictions et différences de traitement semblables.

69 Or, force est de constater que, en l’occurrence, en faisant valoir une rupture dudit équilibre et en se bornant à alléguer que l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation était justifiée par la nécessité de rétablir cet équilibre, le Conseil n’a pas apporté cette preuve.

70 Il y a lieu de relever également que le Conseil admet expressément que l’instauration du régime des certificats d’exportation vise, à côté du rétablissement de l’équilibre entre les différentes catégories d’opérateurs communautaires, à fournir une aide financière aux pays tiers qui sont parties contractantes à l’accord-cadre et à compenser ainsi les limitations que le règlement n_ 404/93 a imposées à la commercialisation de bananes en provenance de ces pays au profit des bananes communautaires et ACP.

71 Il importe toutefois de souligner que le Conseil n’a pas fourni à la Cour les éléments suffisants de nature à expliquer que l’augmentation du contingent tarifaire et sa répartition en contingents nationaux ainsi que la réduction concomitante des droits de douane n’étaient pas suffisantes pour compenser les limitations que le règlement n_ 404/93 avait imposées à la commercialisation de bananes en provenance des pays tiers parties contractantes à l’accord-cadre et que cet objectif a dès lors dû être réalisé moyennant l’imposition d’une charge financière à une partie seulement des opérateurs économiques procédant à des importations en provenance de ces pays.

72 En conséquence, il convient de conclure que le moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination est fondé pour ce qui concerne l’exonération des opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation prévu dans l’accord-cadre.

73 Dès lors, il n’y a lieu d’examiner le bien-fondé des autres moyens que dans la mesure où ils sont dirigés contre l’instauration des contingents nationaux.

Sur les moyens tirés de la violation du droit de propriété, du droit au libre exercice d’une profession, du principe de la protection de la confiance légitime et du principe de proportionnalité

74 Il importe de rappeler que les moyens tirés de la violation du droit de propriété, du droit au libre exercice d’une profession, du principe de la protection de la confiance légitime et du principe de proportionnalité avaient déjà été invoqués par la requérante dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt Allemagne/Conseil, précité, à l’encontre du régime des échanges avec les pays tiers institué au titre IV du règlement n_ 404/93, et notamment de l’ouverture d’un contingent tarifaire pour les importations des bananes pays tiers et des bananes non traditionnelles ACP ainsi que des modalités de répartition de ce contingent entre les opérateurs communautaires des catégories A, B et C.

75 Ainsi, la requérante avait fait valoir que la perte de parts de marché que subissaient de ce fait les opérateurs de la catégorie A constituait une atteinte à leur droit de propriété et au libre exercice de leurs activités professionnelles ainsi qu’à leurs droits acquis. Elle avait également soutenu que le régime des échanges avec les pays tiers contrevenait au principe de proportionnalité, en ce que les objectifs poursuivis auraient pu être atteints par des mesures affectant moins la concurrence et les intérêts de certaines catégories d’opérateurs économiques.

76 Dans l’arrêt Allemagne/Conseil, précité, la Cour a toutefois jugé qu’aucun de ces moyens n’était fondé.

77 La Cour a en particulier considéré qu’aucun opérateur économique ne peut revendiquer un droit de propriété sur une part de marché qu’il détenait à un moment antérieur à l’adoption dudit régime (point 79 ) ni faire valoir un droit acquis ou une confiance légitime dans le maintien de la situation telle qu’elle existait avant celle-ci (point 80). Elle a également jugé que les restrictions à la faculté d’importer les bananes pays tiers que comportent l’ouverture du contingent tarifaire et son mécanisme de répartition sont inhérentes aux objectifs d’intérêt général communautaire poursuivis par l’instauration de l’organisation commune des marchés dans le secteur de la banane et ne portent dès lors pas indûment atteinte au libre exercice des activités professionnelles des opérateurs traditionnels de bananes pays tiers (points 82 et 87). Elle a enfin constaté que les mesures incriminées ne violaient pas le principe de proportionnalité, dès lors que la preuve n’était pas rapportée qu’elles étaient manifestement inappropriées pour réaliser les objectifs poursuivis (points 94 et 95).

78 En ce qui concerne le droit de propriété, le libre exercice des activités professionnelles et la protection de la confiance légitime, les mêmes considérations valent, en l’espèce, pour la répartition du contingent tarifaire en contingents nationaux.

79 En ce qui concerne le principe de proportionnalité, il convient de relever que la requérante est restée en défaut de prouver en quoi, contrairement à ce que la Cour a jugé pour l’instauration du contingent global pays tiers lui-même, la répartition de celui-ci en contingents nationaux attribués à certains d’entre eux était manifestement inappropriée pour réaliser les objectifs poursuivis, à savoir l’écoulement de la production communautaire et de la production traditionnelle ACP de bananes et l’intégration des différents marchés nationaux jusqu’alors cloisonnés.

80 Il y a lieu, par ailleurs, de considérer que, dans la mesure où ces différents moyens tendent à souligner que l’instauration de contingents nationaux affecte les opérateurs des catégories A et C d’une manière différente de celle dont elle affecte ceux de la catégorie B, ils se confondent avec le moyen tiré de la violation du principe général de non-discrimination.

81 Dès lors, les moyens tirés d’une violation du droit de propriété, d’une atteinte au libre exercice des activités professionnelles et du non-respect de la confiance légitime et du principe de proportionnalité doivent, en l’espèce, également être rejetés comme non fondés.

82 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’annuler l’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, de la décision litigieuse en tant que le Conseil y a approuvé l’accord-cadre, dans la mesure où ce dernier exonère les opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation qu’il prévoit, et de rejeter le recours pour le surplus.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

83 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Conformément à l’article 69, paragraphe 3, la Cour peut cependant répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. Chacune des parties ayant succombé sur un chef du recours, il y a lieu de décider que chacune supporte ses propres dépens. Par ailleurs, aux termes de l’article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) L’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, de la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994), en tant que le Conseil y a approuvé la conclusion de l’accord-cadre sur les bananes entre la Communauté européenne, d’une part, et la république du Costa Rica, la république de Colombie, la république du Nicaragua et la république du Venezuela, d’autre part, est annulé, dans la mesure où ledit accord-cadre exonère les opérateurs de la catégorie B du régime des certificats d’exportation qu’il prévoit.

2) Le recours est rejeté pour le surplus.

3) Chaque partie, y compris les parties intervenantes, supportera ses propres dépens.

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CJCE, n° C-122/95, Arrêt de la Cour, République fédérale d'Allemagne contre Conseil de l'Union européenne, 10 mars 1998