CJUE, n° C-45/09, Arrêt de la Cour, Gisela Rosenbladt contre Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH, 12 octobre 2010

  • Égalité de traitement en matière d'emploi et de travail·
  • Demande nouvelle sur une question tranchée par la cour·
  • Interdiction des discriminations fondées sur l'âge·
  • Interdiction de discrimination fondée sur l'âge·
  • Cee/ce - politique sociale * politique sociale·
  • Principes, objectifs et missions des traités·
  • Politique intérieure de l'Union européenne·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Recevabilité 2. politique sociale·
  • Compétence de la cour de justice

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 12 oct. 2010, C-45/09
Numéro(s) : C-45/09
Arrêt de la Cour (grande chambre) du 12 octobre 2010.#Gisela Rosenbladt contre Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH.#Demande de décision préjudicielle: Arbeitsgericht Hamburg - Allemagne.#Directive 2000/78/CE - Discriminations fondées sur l’âge - Cessation du contrat de travail pour cause d’âge de départ à la retraite.#Affaire C-45/09.
Date de dépôt : 2 février 2009
Précédents jurisprudentiels : 15 juillet 2010, Commission/Allemagne, C-271/08
22 novembre 2005, Mangold, C-144/04
5 mars 2009, Age Concern England ( C-388/07, Rec. p. I-1569
7 juin 2007, van der Weerd e.a., C-222/05 à C-225/05, Rec. p. I-4233
arrêt du 27 mars 1963, Da Costa e.a., 28/62 à 30/62
Lucchini, C-119/05
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 62009CJ0045
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2010:601
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Sur les parties

Texte intégral

Affaire C-45/09

Gisela Rosenbladt

contre

Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH

(demande de décision préjudicielle, introduite par l’Arbeitsgericht Hamburg)

«Directive 2000/78/CE — Discriminations fondées sur l’âge — Cessation du contrat de travail pour cause d’âge de départ à la retraite»

Sommaire de l’arrêt

1. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Demande nouvelle sur une question tranchée par la Cour — Recevabilité

(Art. 267 TFUE)

2. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Interdiction de discrimination fondée sur l’âge

(Directive du Conseil 2000/78, art. 6, § 1)

3. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Interdiction de discrimination fondée sur l’âge

(Directive du Conseil 2000/78, art. 6, § 1)

4. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Interdiction de discrimination fondée sur l’âge

(Directive du Conseil 2000/78, art. 1er et 2)

1. L’article 267 TFUE permet toujours à une juridiction nationale, si elle le juge opportun, de déférer à nouveau à la Cour des questions d’interprétation. Par ailleurs, dans le cadre de la procédure instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer. Tel est le cas lorsque la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité d’une réglementation nationale prévoyant une clause de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de 65 ans, pour cause d’admission à la retraite, avec la directive 2000/78. Une demande de décision préjudicielle portant sur le caractère éventuellement discriminatoire d’une telle clause est dès lors recevable.

(cf. points 31-32, 34-35)

2. L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une disposition nationale en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite, dans la mesure où, d’une part, ladite disposition est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. La mise en œuvre de cette autorisation par la voie d’une convention collective n’est pas, en soi, exemptée de tout contrôle juridictionnel, mais, conformément aux exigences de l’article 6, paragraphe 1, de ladite directive, doit, elle aussi, poursuivre un tel objectif légitime d’une manière appropriée et nécessaire.

En effet, d’une part, au vu de la large marge d’appréciation dont disposent les États membres dans le choix non seulement de la poursuite d’un objectif déterminé en matière de politique sociale et de l’emploi, mais également dans la définition des mesures susceptibles de le réaliser, de telles clauses sont objectivement et raisonnablement justifiées dès lors que la cessation des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de départ à la retraite bénéficierait directement aux jeunes travailleurs en favorisant leur insertion professionnelle rendue difficile dans un contexte de chômage persistant et que les droits des travailleurs les plus âgés seraient, par ailleurs, adéquatement protégés. Ce mécanisme repose sur un équilibre entre considérations d’ordre politique, économique, social, démographique et/ou budgétaire et dépend du choix d’allonger la durée de vie active des travailleurs ou, au contraire, de prévoir le départ à la retraite précoce de ces derniers.

D’autre part, ce mécanisme, distinct du licenciement et de la démission, repose sur un fondement conventionnel. Celui-ci ouvre non seulement aux salariés et aux employeurs, au moyen d’accords individuels, mais également aux partenaires sociaux la faculté de faire usage, par voie de conventions collectives – et dès lors avec une flexibilité non négligeable -, de son application, en sorte qu’il peut être dûment tenu compte non seulement de la situation globale du marché de travail concerné, mais également des caractéristiques propres aux emplois en cause. Compte tenu de ces éléments, il n’apparaît pas déraisonnable pour les autorités d’un État membre d’estimer qu’une mesure telle que l’autorisation des clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge d’admission au bénéfice d’une pension de retraite puisse être appropriée et nécessaire pour atteindre des objectifs légitimes relevant de la politique nationale du travail et de l’emploi

(cf. points 41, 43-44, 49, 51, 53, disp. 1)

3. L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une mesure telle que la clause de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de départ à la retraite fixé à 65 ans, prévue dans la convention collective d’application générale aux travailleurs salariés dans le secteur du nettoyage industriel.

En effet, d’une part, en garantissant aux travailleurs une certaine stabilité de l’emploi et, à long terme, la promesse d’un départ à la retraite prévisible, tout en offrant aux employeurs une certaine flexibilité dans la gestion de leur personnel, la clause de cessation automatique des contrats de travail est le reflet d’un équilibre entre des intérêts divergents mais légitimes, s’inscrivant dans un contexte complexe de relations de travail, étroitement lié aux choix politiques en matière de retraite et d’emploi.

D’autre part, étant donné que la réglementation nationale de l’État membre concerné n’interdit pas à une personne ayant atteint un âge lui permettant d’obtenir la liquidation de ses droits à pension de poursuivre une activité professionnelle et que, en outre, un travailleur se trouvant dans une telle situation continue de bénéficier de la protection contre les discriminations fondées sur l’âge, la cessation de plein droit du contrat de travail n’a pas pour effet automatique de contraindre les personnes visées à se retirer définitivement du marché du travail. Ladite réglementation n’instaure, par conséquent, pas un régime impératif de mise à la retraite d’office. Elle ne s’oppose pas à ce qu’un travailleur qui le souhaiterait, par exemple pour des raisons financières, poursuive son activité professionnelle au-delà de l’âge de départ à la retraite et ne prive pas de la protection contre les discriminations fondées sur l’âge les salariés ayant atteint l’âge de la retraite lorsque ces derniers souhaitent demeurer actifs et cherchent un nouvel emploi. Compte tenu de ces éléments, la réglementation nationale ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis, compte tenu de la large marge d’appréciation reconnue aux États membres et aux partenaires sociaux en matière de politique sociale et de l’emploi.

(cf. points 68, 74-77, disp. 2)

4. Les articles 1er et 2 de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’un État membre déclare d’application générale une convention collective contenant une clause de cessation automatique des contrats de travail des travailleurs salariés dans le secteur du nettoyage industriel, pour autant que celle-ci ne prive pas les travailleurs relevant du champ d’application de cette convention collective de la protection qui leur est conférée par ces dispositions contre les discriminations fondées sur l’âge.

En effet, la directive 2000/78 ne régit pas, en tant que telle, les conditions dans lesquelles les États membres peuvent déclarer d’application générale une convention collective même si les États membres sont tenus d’assurer, par des mesures législatives, réglementaires ou administratives appropriées, que tous les travailleurs puissent bénéficier, dans toute son étendue, de la protection qui leur est conférée par la directive 2000/78 contre les discriminations fondées sur l’âge.

(cf. points 79-80, disp. 3)

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

12 octobre 2010 (*)

«Directive 2000/78/CE – Discriminations fondées sur l’âge – Cessation du contrat de travail pour cause d’âge de départ à la retraite»

Dans l’affaire C-45/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par l’Arbeitsgericht Hamburg (Allemagne), par décision du 20 janvier 2009, parvenue à la Cour le 2 février 2009, dans la procédure

Gisela Rosenbladt

contre

Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. A. Tizzano, J. N. Cunha Rodrigues, K. Lenaerts, J.-C. Bonichot et A. Arabadjiev, présidents de chambre, MM. G. Arestis, A. Borg Barthet, M. Ilešič, J. Malenovský, L. Bay Larsen, Mme P. Lindh (rapporteur) et M. T. von Danwitz, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 février 2010,

considérant les observations présentées:

– pour Mme Rosenbladt, par Me K. Bertelsmann, Rechtsanwalt,

– pour Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH, par Me P. Sonne, Rechtsanwalt,

– pour le gouvernement allemand, par MM. M. Lumma et J. Möller, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement danois, par Mme B. Weis Fogh, en qualité d’agent,

– pour l’Irlande, par M. D. O’Hagan, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement italien, par Mme I. Bruni, en qualité d’agent, assistée de Mme W. Ferrante, avvocato dello Stato,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme V. Jackson, en qualité d’agent, assistée de M. T. Ward, barrister,

– pour la Commission européenne, par MM. J. Enegren et V. Kreuschitz, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 avril 2010,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO L 303, p. 16).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Rosenbladt à Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH (ci-après «Oellerking») au sujet des conditions de cessation de son contrat de travail.

Le cadre juridique

La réglementation de l’Union

3 Le vingt-cinquième considérant de la directive 2000/78 énonce:

«L’interdiction des discriminations liées à l’âge constitue un élément essentiel pour atteindre les objectifs établis par les lignes directrices sur l’emploi et encourager la diversité dans l’emploi. Néanmoins, des différences de traitement liées à l’âge peuvent être justifiées dans certaines circonstances et appellent donc des dispositions spécifiques qui peuvent varier selon la situation des États membres. Il est donc essentiel de distinguer entre les différences de traitement qui sont justifiées, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et les discriminations qui doivent être interdites.»

4 Aux termes de son article 1er, la directive 2000/78 «a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement».

5 L’article 2 de la directive 2000/78, intitulé «Concept de discrimination», prévoit:

«1. Aux fins de la présente directive, on entend par ‘principe de l’égalité de traitement’ l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2. Aux fins du paragraphe 1:

a) une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er;

b) une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion ou de convictions, d’un handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres personnes, à moins que:

i) cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, ou que

ii) dans le cas des personnes d’un handicap donné, l’employeur ou toute personne ou organisation auquel s’applique la présente directive ne soit obligé, en vertu de la législation nationale, de prendre des mesures appropriées conformément aux principes prévus à l’article 5 afin d’éliminer les désavantages qu’entraîne cette disposition, ce critère ou cette pratique.

[…]»

6 Aux termes de l’article 6 de la directive 2000/78, intitulé «Justification des différences de traitement fondées sur l’âge»:

«1. Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

Ces différences de traitement peuvent notamment comprendre:

a) la mise en place de conditions spéciales d’accès à l’emploi et à la formation professionnelle, d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, pour les jeunes, les travailleurs âgés et ceux ayant des personnes à charge, en vue de favoriser leur insertion professionnelle ou d’assurer leur protection;

b) la fixation de conditions minimales d’âge, d’expérience professionnelle ou d’ancienneté dans l’emploi, pour l’accès à l’emploi ou à certains avantages liés à l’emploi;

c) la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite.

2. Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge la fixation, pour les régimes professionnels de sécurité sociale, d’âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité, y compris la fixation, pour ces régimes, d’âges différents pour des travailleurs ou des groupes ou catégories de travailleurs et l’utilisation, dans le cadre de ces régimes, de critères d’âge dans les calculs actuariels, à condition que cela ne se traduise pas par des discriminations fondées sur le sexe.»

7 L’article 16 de la directive 2000/78, intitulé «Conformité», prévoit:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires afin que:

a) soient supprimées les dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe de l’égalité de traitement;

b) soient ou puissent être déclarées nulles et non avenues ou soient modifiées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les contrats ou les conventions collectives, dans les règlements intérieurs des entreprises, ainsi que dans les statuts des professions indépendantes et des organisations de travailleurs et d’employeurs.»

La réglementation nationale

La loi générale sur l’égalité de traitement

8 La directive 2000/78 a été transposée dans l’ordre juridique allemand par la loi générale sur l’égalité de traitement (Allgemeines Gleichbehandlungsgesetz) du 14 août 2006 (BGBl. I, p. 1897, ci-après l’«AGG»). Cette loi prévoit à son article 1er, intitulé «Objectif de la loi»:

«La présente loi a pour objectif d’empêcher ou d’éliminer tout désavantage fondé sur la race ou l’origine ethnique, le sexe, la religion ou les croyances, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.»

9 L’article 2 de l’AGG, intitulé «Champ d’application», dispose:

«(1) Les discriminations résultant de l’un des motifs cités à l’article 1er sont interdites en vertu de la présente loi en ce qui concerne:

[…]

2. Les conditions d’emploi et de travail, y compris la rémunération et les conditions de licenciement, notamment celles figurant dans les conventions collectives et dans les contrats de travail individuels, et les mesures prises lors de l’exécution et de la cessation d’une relation de travail ainsi qu’en cas d’avancement professionnel.

[…]

(4) Seules les dispositions sur la protection générale et spécifique contre le licenciement s’appliquent aux licenciements.

[…]»

10 Aux termes de l’article 7 de l’AGG, intitulé «L’interdiction de la discrimination»:

«(1) Les salariés ne peuvent pas être désavantagés en raison de l’un des motifs cités à l’article 1er; cela vaut également lorsque l’auteur de la discrimination ne fait que supposer l’existence de l’un des motifs cités à l’article 1er lors de la discrimination.

[…]»

11 L’article 10 de l’AGG, intitulé «Licéité de certaines différences de traitement fondées sur l’âge», énonce:

«1. Nonobstant l’article 8, une différence de traitement en raison de l’âge est également autorisée lorsqu’elle est objectivement et raisonnablement justifiée et qu’elle est fondée sur un objectif légitime. Les moyens mis en œuvre pour réaliser cet objectif doivent être appropriés et nécessaires. Ces différences de traitement peuvent notamment comprendre:

[…]

5. Un accord qui prévoit la cessation de la relation de travail, sans licenciement ni démission, à une date à laquelle le travailleur peut solliciter une pension de retraite en raison de son âge; et ce sans préjudice de l’application de l’article 41 du sixième livre du code de la sécurité sociale […]»

12 Au cours de la période comprise entre le 18 août et le 11 décembre 2006, l’article 10 de l’AGG comprenait, parmi les différences de traitement fondées sur l’âge susceptibles d’être autorisées, celle figurant au point suivant:

«7. Le fait de convenir, par contrat individuel ou par convention collective, une interdiction de licencier les salariés d’un certain âge et d’une certaine ancienneté dans l’entreprise, pour autant que cela ne diminue pas de manière manifeste et grave la protection due à d’autres salariés dans le cadre du choix fondé sur des critères sociaux prévu à l’article 1er, paragraphe 3, de la loi sur la protection contre le licenciement (Kündigungsschutzgesetz)»

Le code de la sécurité sociale

13 Dans sa version en vigueur entre le 1er janvier 1992 et le 31 juillet 1994, l’article 41, paragraphe 4, du sixième livre du code de la sécurité sociale, relative au régime légal de sécurité sociale (Sozialgesetzbuch sechstes Buch, ci-après le «SGB VI») était rédigé comme suit:

«Le droit de l’assuré à une pension de retraite en raison de son âge ne peut être considéré comme un motif susceptible de conditionner la résiliation d’une relation de travail par l’employeur en vertu de la loi sur la protection contre le licenciement.
En cas de licenciement pour contraintes pressantes pesant sur l’entreprise, le droit d’un salarié à une pension de retraite en raison de son âge ne peut être pris en considération, dans le cadre du choix fondé sur des critères sociaux, avant qu’il n’ait atteint l’âge de 65 ans révolus. Un accord en vertu duquel une relation de travail doit prendre fin à la date à laquelle le salarié a le droit à une pension de retraite en raison de son âge n’est valable que si l’accord a été conclu ou a été confirmé par l’employé au cours des trois dernières années précédant cette date.»

14 Sur la base de cette dernière disposition, la jurisprudence nationale a considéré comme nulles et non avenues les clauses des conventions collectives prévoyant la cessation automatique du contrat de travail du salarié ayant atteint l’âge de 65 ans révolus [arrêt du Bundesarbeitsgericht du 1er décembre 1993 (7 AZR 428/93, BAGE 75, 166)].

15 Par la suite, le législateur est intervenu afin d’éviter que les limites d’âge prévues par les conventions collectives ne soient considérées comme invalides en vertu de cette jurisprudence. C’est ainsi que, au cours de la période s’étendant du 1er août 1994 au 31 juillet 2007, l’article 41, paragraphe 4, troisième phrase, du SGB VI était rédigé dans les termes suivants:

«Un accord qui prévoit la cessation de la relation de travail, sans licenciement ni démission, à une date à laquelle le salarié peut solliciter une pension de retraite en raison de son âge avant d’avoir atteint l’âge de 65 ans révolus est réputé avoir été conclu, à l’égard du salarié, à l’âge où ce dernier a atteint cet âge, à moins que l’accord ait été conclu ou confirmé par l’employé au cours des trois dernières années précédant cette date.»

16 Depuis le 1er janvier 2008, l’article 41 du SGB VI est libellé comme suit:

«Pension de retraite et protection contre le licenciement

Le droit de l’assuré à une pension de retraite en raison de son âge ne peut être considéré comme un motif susceptible de conditionner la cessation d’une relation de travail par l’employeur en vertu de la loi sur la protection contre le licenciement. Un accord qui prévoit la cessation de la relation de travail d’un salarié, sans licenciement ni démission, à une date à laquelle ce salarié peut prétendre à une pension en raison de son âge avant d’avoir atteint l’âge normal de la retraite est réputé, à l’égard du salarié, viser la date de l’âge normal de la retraite, à moins que l’accord ait été conclu ou confirmé par l’employé au cours des trois dernières années précédant cette date.»

La loi sur les conventions collectives

17 Au cours de la période comprise entre le 28 novembre 2003 et le 7 novembre 2006, l’article 5 de la loi sur les conventions collectives (Tarifvertragsgesetz, BGBl. 1969 I, p. 1323), intitulé «Force obligatoire générale», était libellé comme suit:

«(1) Le ministre de l’économie et du travail peut, sur demande d’une partie à une convention collective et en accord avec un comité composé de trois représentants des organisations patronales nationales et de trois représentants des centrales syndicales, déclarer une convention collective d’application générale, si

1. les employeurs liés par ladite convention n’emploient pas moins de 50 % des salariés relevant du domaine d’application de la convention collective et si

2. la déclaration d’application générale semble être dictée par l’intérêt général.

Il peut être fait abstraction des conditions figurant aux paragraphes 1 et 2 si la déclaration d’applicabilité générale apparaît nécessaire pour remédier à un état de nécessité sociale.

[…]»

La convention collective d’application générale aux travailleurs salariés dans le secteur du nettoyage industriel

18 Depuis l’année 1987, l’article 19, point 8, de la convention collective d’application générale aux travailleurs salariés dans le secteur du nettoyage industriel (Allgemeingültiger Rahmentarifvertrag für die gewerblichen Beschäftigten in der Gebäudereinigung, ci-après le «RTV») prévoit:

«Sauf stipulation contraire dans le contrat de travail, la relation de travail prend fin au terme du mois civil à partir duquel le (la) salarié(e) peut prétendre à une pension de retraite, […] au plus tard au terme du mois au cours duquel le (la) salarié(e) a atteint l’âge de 65 ans.»

19 Par une communication publiée le 3 avril 2004, le ministre de l’Économie et du Travail a déclaré cette convention d’application générale avec effet au 1er janvier 2004.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

20 Pendant 39 ans, l’activité professionnelle de Mme Rosenbladt a consisté à effectuer des travaux de nettoyage dans une caserne à Hamburg-Blankenese (Allemagne).

21 À compter du 1er novembre 1994, Mme Rosenbladt a été employée par Oellerking, entreprise de nettoyage, selon un contrat de travail à temps partiel (deux heures par jour; dix heures par semaine) prévoyant une rémunération mensuelle brute de 307,48 euros.

22 Ce contrat stipule que, conformément à l’article 19, point 8, du RTV, il prend fin au terme du mois civil à partir duquel la salariée peut prétendre à une pension de retraite, soit au plus tard au terme du mois au cours duquel elle atteint l’âge de 65 ans.

23 Conformément à cette clause, le 14 mai 2008, Oellerking a notifié à Mme Rosenbladt la cessation de son contrat de travail, avec effet au 31 mai 2008, en raison du fait qu’elle avait atteint l’âge de départ à la retraite.

24 Par une lettre du 18 mai 2008, Mme Rosenbladt a indiqué à son employeur qu’elle entendait continuer à travailler. En dépit de cette opposition, le contrat de travail de l’intéressée a cessé de produire ses effets le 31 mai 2008. Néanmoins, Oellerking a proposé à Mme Rosenbladt une nouvelle relation de travail à compter du 1er juin 2008 et ce pour la durée de l’instance au principal.

25 Le 28 mai 2008, Mme Rosenbladt a saisi l’Arbeitsgericht Hamburg d’une action dirigée contre son employeur. Elle fait valoir que la cessation de son contrat de travail est illicite, car constitutive d’une discrimination fondée sur l’âge. Elle soutient qu’une limite d’âge telle que celle prévue à l’article 19, point 8, du RTV est injustifiable au regard tant de l’article 4 de la directive 2000/78 que de l’article 6 de celle-ci.

26 Depuis le 1er juin 2008, Mme Rosenbladt perçoit une pension du régime légal d’assurance vieillesse d’un montant de 253,19 euros par mois, soit 228,26 euros net.

27 La juridiction de renvoi doute de la conformité de la clause de cessation automatique des contrats de travail prévue à l’article 19, point 8, du RTV avec le principe de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail consacré par le droit primaire de l’Union et par la directive 2000/78.

28 C’est dans ces conditions que l’Arbeitsgericht Hamburg a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Après l’entrée en vigueur de [l’AGG], des dispositions d’une convention collective, qui différencient en fonction de la caractéristique de l’âge sans que ladite loi ne l’autorise expressément (comme elle le faisait auparavant à son article 10, [point] 7), sont-elles compatibles avec l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge, édictée aux articles 1er et 2, paragraphe 1, de la directive [2000/78]?

2) Une réglementation nationale, qui autorise l’État, les partenaires sociaux et les parties à un contrat de travail à prévoir la cessation automatique de la relation de travail lorsque l’intéressé atteindra un âge déterminé (en l’espèce 65 ans), contrevient-elle à l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge édictée aux articles 1er et 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78, lorsque, dans l’État membre concerné, des clauses en ce sens sont appliquées, de façon constante, depuis des décennies à la relation de travail de presque tous les salariés, indépendamment de la situation économique, sociale et démographique et de la situation prévalant concrètement sur le marché de l’emploi?

3) Une convention collective qui autorise l’employeur à mettre fin à la relation de travail lorsque l’intéressé atteint un âge déterminé (en l’espèce 65 ans) contrevient-elle à l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge édictée aux articles 1er et 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78 lorsque, dans l’État membre concerné, des clauses en ce sens sont appliquées, de façon constante, depuis des décennies à la relation de travail de presque tous les salariés, indépendamment de la situation économique, sociale et démographique et de la situation prévalant concrètement sur le marché de l’emploi?

4) L’État qui déclare d’application générale une convention collective autorisant l’employeur à mettre fin à la relation de travail lorsque l’intéressé atteint un âge déterminé (en l’espèce 65 ans) et maintient cette application générale enfreint-il l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge édictée aux articles 1er et 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78 lorsqu’il fait cela indépendamment de la situation économique, sociale et démographique existant alors concrètement et de la situation prévalant concrètement sur le marché de l’emploi?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la recevabilité

29 L’Irlande fait valoir que les questions posées sont matériellement identiques à celles auxquelles la Cour a répondu dans l’arrêt du 5 mars 2009, Age Concern England (C-388/07, Rec. p. I-1569). En outre, les deuxième à quatrième questions concerneraient moins l’interprétation du droit de l’Union que son application. La Cour devrait donc décliner sa compétence.

30 Tant les parties au principal que le gouvernement allemand contestent la recevabilité de la première question. Ils soutiennent, en substance, que la juridiction de renvoi s’est référée à une disposition de l’AGG qui n’est pas applicable au litige au principal, privant ainsi cette question de pertinence.

31 Ces arguments ne sont pas fondés. Indépendamment du fait que les questions qui ont donné lieu aux réponses de la Cour dans l’arrêt Age Concern England, précité, ne sont pas identiques à celles posées dans la présente affaire, il convient de rappeler que l’article 267 TFUE permet toujours à une juridiction nationale, si elle le juge opportun, de déférer à nouveau à la Cour des questions d’interprétation (arrêt du 27 mars 1963, Da Costa e.a., 28/62 à 30/62, Rec. p. 59, 76). En outre, il ressort clairement des termes de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi sollicite l’interprétation du droit de l’Union et, en particulier, de la directive 2000/78 afin de pouvoir trancher le litige au principal.

32 Par ailleurs, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêts du 18 juillet 2007, Lucchini, C-119/05, Rec. p. I-6199, point 43, et du 22 décembre 2008, Magoora, C-414/07, Rec. p. I-10921, point 22).

33 Selon une jurisprudence constante, les questions relatives à l’interprétation du droit de l’Union posées par le juge national dans le cadre réglementaire et factuel qu’il définit sous sa responsabilité, et dont il n’appartient pas à la Cour de vérifier l’exactitude, bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une demande de décision préjudicielle formée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 2007, van der Weerd e.a., C-222/05 à C-225/05, Rec. p. I-4233, point 22 et jurisprudence citée).

34 En l’espèce, le litige au principal porte sur le caractère éventuellement discriminatoire de la clause de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de 65 ans, pour cause d’admission à la retraite, prévue à l’article 19, point 8, du RTV. La juridiction de renvoi s’interroge, notamment, sur la compatibilité d’une telle règle avec la directive 2000/78. Les questions posées sont suffisamment précises pour permettre à la Cour d’y répondre de façon utile.

35 Dès lors, la demande de décision préjudicielle doit être considérée comme recevable.

Sur le fond

Sur la deuxième question

36 Par sa deuxième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une disposition nationale telle que l’article 10, point 5, de l’AGG, dans la mesure où celle-ci prévoit que les clauses de cessation automatique des contrats de travail, en raison du fait que le salarié a atteint l’âge d’admission à la retraite, peuvent échapper à l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge.

37 À titre liminaire, il y a lieu de constater que l’article 10, point 5, de l’AGG instaure une différence de traitement directement fondée sur l’âge, au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2000/78 (voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2007, Palacios de la Villa, C-411/05, Rec. p. I-8531, point 51).

38 L’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2000/78 énonce qu’une différence de traitement fondée sur l’âge ne constitue pas une discrimination lorsqu’elle est objectivement et raisonnablement justifiée, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens pour réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. Le second alinéa du même paragraphe énumère plusieurs exemples de différences de traitement revêtant des caractéristiques telles que celles mentionnées audit premier alinéa.

39 L’article 10 de l’AGG reprend, en substance, ces principes. Le point 5 de cette disposition inclut, parmi les exemples de différences de traitement fondées sur l’âge susceptibles d’être justifiées, les accords prévoyant la cessation de la relation de travail, sans licenciement ni démission, à une date à laquelle le travailleur peut solliciter une pension de retraite en raison de son âge. Cette mesure n’instaure donc pas un régime impératif de départ obligatoire à la retraite, mais autorise les employeurs et les employés à convenir, par des accords individuels ou collectifs, d’un mode d’extinction des relations de travail fondé sur l’âge d’admission au bénéfice d’une pension de retraite, indépendamment des hypothèses de démission ou de licenciement.

40 L’article 6, paragraphe 1, sous a), de la directive 2000/78 n’inclut pas les clauses de cessation automatique des contrats de travail parmi celles figurant sur la liste des différences de traitement fondées sur l’âge susceptibles d’être justifiées et, à ce titre, de ne pas être considérées comme discriminatoires. Cette circonstance n’est toutefois pas, en soi, déterminante.
En effet, cette liste n’a qu’une valeur indicative. Ainsi, les États membres, lorsqu’ils mettent en œuvre cette directive, ne sont pas tenus d’établir une liste spécifique des différences de traitement pouvant être justifiées par un objectif légitime (arrêt Age Concern England, précité, point 43). S’ils décident de le faire, dans le cadre de leur marge d’appréciation, ils peuvent inclure dans cette liste des exemples de différences de traitement et d’objectifs autres que ceux expressément visés par ladite directive, pour autant que ces objectifs sont légitimes, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de cette dernière et que ces différences de traitement sont appropriées et nécessaires pour atteindre ces objectifs.

41 Il convient de rappeler, à cet égard, que les États membres ainsi que, le cas échéant, les partenaires sociaux au niveau national disposent d’une large marge d’appréciation dans le choix non seulement de la poursuite d’un objectif déterminé parmi d’autres en matière de politique sociale et de l’emploi, mais également dans la définition des mesures susceptibles de le réaliser (voir arrêts du 22 novembre 2005, Mangold, C-144/04, Rec. p. I-9981, point 63, et Palacios de la Villa, précité, point 68).

42 Il ressort des explications fournies par la juridiction de renvoi que le législateur, lors de l’adoption de l’article 10, point 5, de l’AGG, aurait entendu ne pas remettre en cause, au nom de la lutte contre les discriminations fondées sur l’âge, la situation existante, caractérisée par un recours généralisé aux clauses de cessation automatique des contrats de travail lorsque le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite. Elle souligne ainsi que ces clauses sont fréquemment appliquées depuis des décennies, indépendamment des conditions sociales, démographiques et de la situation du marché de l’emploi.

43 Dans le cadre de la procédure devant la Cour, le gouvernement allemand a, notamment, souligné que la licéité des clauses de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de départ à la retraite, également reconnue dans de nombreux États membres, est le reflet d’un consensus politique et social qui dure depuis de nombreuses années en Allemagne.
Ce consensus reposerait avant tout sur l’idée d’un partage du travail entre les générations. La cessation des contrats de travail desdits salariés bénéficierait directement aux jeunes travailleurs en favorisant leur insertion professionnelle rendue difficile dans un contexte de chômage persistant. Les droits des travailleurs les plus âgés seraient, par ailleurs, adéquatement protégés. En effet, la plupart d’entre eux souhaiteraient cesser de travailler dès leur admission à la retraite, la pension perçue leur offrant un revenu de substitution après la perte de leur salaire. La cessation automatique du contrat de travail aurait également le mérite de ne pas contraindre les employeurs à licencier les salariés en établissant qu’ils ne sont plus aptes au travail, ce qui pourrait s’avérer humiliant pour ceux ayant un âge avancé.

44 Il y a lieu de relever que la cessation automatique des contrats de travail des salariés qui remplissent les conditions d’âge et de cotisation pour bénéficier de la liquidation de leurs droits à pension fait, depuis longtemps, partie du droit du travail de nombreux États membres et est d’un usage répandu dans les relations de travail. Ce mécanisme repose sur un équilibre entre considérations d’ordre politique, économique, social, démographique et/ou budgétaire et dépend du choix d’allonger la durée de vie active des travailleurs ou, au contraire, de prévoir le départ à la retraite précoce de ces derniers (voir, en ce sens, arrêt Palacios de la Villa, précité, point 69).

45 Partant, des objectifs de la nature de ceux indiqués par le gouvernement allemand doivent, en principe, être considérés comme justifiant «objectivement et raisonnablement», «dans le cadre du droit national», ainsi que le prévoit l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, une différence de traitement fondée sur l’âge, telle que celle édictée à l’article 10, point 5, de l’AGG.

46 Encore faut-il vérifier si une telle mesure est appropriée et nécessaire, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

47 L’autorisation des clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite ne saurait, en principe, être regardée comme portant une atteinte excessive aux intérêts légitimes des travailleurs concernés.

48 En effet, une réglementation telle que celle en cause au principal ne se fonde pas seulement sur un âge déterminé, mais prend également en considération la circonstance que les intéressés bénéficient au terme de leur carrière professionnelle d’une compensation financière au moyen d’un revenu de substitution prenant la forme d’une pension de retraite (voir, en ce sens, arrêt Palacios de la Villa, précité, point 73).

49 En outre, le mécanisme de cessation automatique des contrats de travail prévu par une mesure telle que celle figurant à l’article 10, point 5, de l’AGG n’autorise pas les employeurs à mettre fin unilatéralement à la relation de travail lorsque les travailleurs ont atteint l’âge leur permettant de faire liquider leur pension de retraite. Ce mécanisme, distinct du licenciement et de la démission, repose sur un fondement conventionnel. Celui-ci ouvre non seulement aux salariés et aux employeurs, au moyen d’accords individuels, mais également aux partenaires sociaux la faculté de faire usage, par voie de conventions collectives – et dès lors avec une flexibilité non négligeable –, de l’application de ce mécanisme, en sorte qu’il peut être dûment tenu compte non seulement de la situation globale du marché de travail concerné, mais également des caractéristiques propres aux emplois en cause (arrêt Palacios de la Villa, précité, point 74).

50 La réglementation en cause au principal contient, en outre, une limitation supplémentaire destinée à s’assurer du consentement des salariés lorsque les clauses de cessation automatique des contrats de travail peuvent être appliquées avant l’âge normal de départ à la retraite. En effet, l’article 10, point 5, de l’AGG autorise les clauses de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge d’admission à une pension de retraite, «et ce sans préjudice de l’application de l’article 41 du sixième livre du code de la sécurité sociale». Or, cette dernière disposition impose, en substance, aux employeurs de recueillir ou de confirmer le consentement des travailleurs à toute clause de cessation automatique d’un contrat de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge d’admission au bénéfice d’une pension lorsque cet âge est inférieur à l’âge normal de départ à la retraite.

51 Compte tenu de ces éléments, il n’apparaît pas déraisonnable pour les autorités d’un État membre d’estimer qu’une mesure telle que l’autorisation des clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge d’admission au bénéfice d’une pension de retraite, prévue à l’article 10, point 5, de l’AGG, puisse être appropriée et nécessaire pour atteindre des objectifs légitimes relevant de la politique nationale du travail et de l’emploi tels que ceux évoqués par le gouvernement allemand (voir, en ce sens, arrêt Palacios de la Villa, précité, point 72).

52 Une telle conclusion ne signifie pas pour autant que de telles clauses, contenues dans une convention collective, soient exemptées de tout contrôle juridictionnel effectif au regard des dispositions de la directive 2000/78 et du principe de l’égalité de traitement. Un tel contrôle s’exerce en fonction des spécificités caractérisant la clause faisant l’objet de l’examen. Il convient, en effet, de s’assurer, pour chaque convention qui prévoit le mécanisme de cessation automatique de la relation de travail, du respect, notamment, des conditions énoncées à l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive.
En outre, l’article 16, sous b), de ladite directive impose expressément aux États membres de prendre les mesures nécessaires afin que «soient ou puissent être déclarées nulles ou non avenues ou soient modifiées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les contrats ou dans les conventions collectives».

53 Dès lors, il convient de répondre à la deuxième question que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une disposition nationale telle que l’article 10, point 5, de l’AGG, en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite, dans la mesure où, d’une part, ladite disposition est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. La mise en œuvre de cette autorisation par la voie d’une convention collective n’est pas, en soi, exemptée de tout contrôle juridictionnel, mais, conformément aux exigences de l’article 6, paragraphe 1, de ladite directive, doit, elle aussi, poursuivre un tel objectif légitime d’une manière appropriée et nécessaire.

Sur les première et troisième questions

54 Par ses première et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 s’oppose à la clause de cessation automatique des contrats de travail prévue à l’article 19, point 8, du RTV, lorsque le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite, fixé à 65 ans.

55 La réponse à cette question dépend du point de savoir si, d’une part, cette mesure répond à un objectif légitime et, d’autre part, si elle est appropriée et nécessaire au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

56 La juridiction de renvoi expose que le Bundesarbeitsgericht, dans un arrêt du 18 juin 2008 (7 AZR 116/07) a jugé cette disposition du RTV compatible avec l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Elle doute toutefois que cette solution soit transposable à la situation en cause au principal, dans la mesure où celle-ci est postérieure à l’entrée en vigueur de l’AGG.

57 La juridiction de renvoi souligne que les objectifs poursuivis ne sont pas identifiés dans la convention collective en cause au principal.

58 Il y a lieu de rappeler que, à défaut de précision de la réglementation nationale en cause quant à l’objectif poursuivi, il importe que d’autres éléments, tirés du contexte général de la mesure concernée, permettent l’identification de l’objectif sous-tendant cette dernière aux fins de l’exercice d’un contrôle juridictionnel quant à sa légitimité ainsi qu’au caractère approprié et nécessaire des moyens mis en œuvre pour réaliser cet objectif (voir arrêts précités Palacios de la Villa, point 57, et Age Concern England, point 45).

59 À cet égard, la juridiction de renvoi précise que, selon l’organisme représentant les intérêts des employeurs lors de la négociation du RTV, l’article 19, point 8, de cette convention collective visait à faire prévaloir la planification adéquate et prévisible de la gestion du personnel et des recrutements sur l’intérêt des salariés au maintien de leur situation économique.

60 Cette juridiction s’est également référée à l’arrêt du Bundesarbeitsgericht du 18 juin 2008, précité, dans lequel il est précisé que l’article 19, point 8, du RTV a pour objectifs de faciliter l’embauche des jeunes, de planifier les recrutements et de permettre une bonne gestion du personnel des entreprises, équilibrée selon les âges.

61 Il convient donc d’examiner si des objectifs de cette nature peuvent être considérés comme légitimes au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

62 La Cour a déjà jugé que des clauses de cessation automatique des contrats de travail des salariés pouvant être admis au bénéfice d’une pension de retraite peuvent être justifiées dans le cadre d’une politique nationale visant à promouvoir l’accès à l’emploi par une meilleure distribution de celui-ci entre les générations, les objectifs ainsi poursuivis devant, en principe, être considérés comme justifiant objectivement et raisonnablement, dans le cadre du droit national, ainsi que le prévoit l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2000/78, une différence de traitement fondée sur l’âge édictée par les États membres (voir, en ce sens, arrêt Palacios de la Villa, précité, points 53, 65 et 66). Il s’ensuit que des objectifs tels que ceux mentionnés par la juridiction de renvoi sont «légitimes» au sens de cette disposition.

63 Dès lors, il y a lieu d’examiner si les moyens mis en œuvre pour réaliser ces objectifs sont «appropriés et nécessaires».

64 En ce qui concerne, en premier lieu, le caractère approprié de la clause de cessation automatique des contrats de travail prévue par le RTV, la juridiction de renvoi estime que les clauses de ce type, en raison de leur inefficacité, ne permettent pas d’atteindre les objectifs poursuivis.

65 S’agissant de l’objectif relatif à la promotion de l’emploi, cette juridiction indique que les clauses de cessation automatique du contrat de travail du salarié ayant atteint l’âge de 65 ans ont, depuis longtemps, été fréquemment utilisées, sans pour autant avoir eu la moindre incidence sur le niveau de l’emploi en Allemagne. En outre, elle fait observer que l’article 19, point 8, du RTV n’interdit pas à l’employeur d’engager des personnes âgées de plus de 65 ans, pas plus qu’il n’exige de l’employeur le remplacement d’un salarié ayant atteint l’âge de 65 ans par un travailleur plus jeune.

66 Quant à l’objectif visant à assurer une structure harmonieuse de la pyramide des âges dans le secteur des travaux de nettoyage, la juridiction de renvoi doute de sa pertinence en raison de l’absence de risque particulier de vieillissement de la main d’œuvre employée dans ce secteur.

67 Au regard des appréciations de la juridiction de renvoi, il convient de relever que la clause de cessation automatique des contrats de travail en cause au principal est le fruit d’un accord négocié entre les représentants des employés et ceux des employeurs qui ont ainsi exercé leur droit de négociation collective reconnu en tant que droit fondamental (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2010, Commission/Allemagne, C-271/08, non encore publié au Recueil, point 37). Le fait de laisser ainsi aux partenaires sociaux le soin de définir un équilibre entre leurs intérêts respectifs offre une flexibilité non négligeable, chacune des parties pouvant, le cas échéant, dénoncer l’accord (voir, en ce sens, arrêt Palacios de la Villa, précité, point 74).

68 En garantissant aux travailleurs une certaine stabilité de l’emploi et, à long terme, la promesse d’un départ à la retraite prévisible, tout en offrant aux employeurs une certaine flexibilité dans la gestion de leur personnel, la clause de cessation automatique des contrats de travail est donc le reflet d’un équilibre entre des intérêts divergents mais légitimes, s’inscrivant dans un contexte complexe de relations de travail, étroitement lié aux choix politiques en matière de retraite et d’emploi.

69 Dès lors, compte tenu de la large marge d’appréciation reconnue aux partenaires sociaux au niveau national dans le choix non seulement de la poursuite d’un objectif déterminé en matière de politique sociale et de l’emploi, mais également dans la définition des mesures susceptibles de le réaliser, il n’apparaît pas déraisonnable pour les partenaires sociaux d’estimer qu’une mesure telle que celle figurant à l’article 19, point 8, du RTV puisse être appropriée pour atteindre les objectifs évoqués précédemment.

70 En second lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur le caractère nécessaire d’une clause de cessation automatique des contrats de travail telle que celle prévue à l’article 19, point 8, du RTV.

71 D’une part, la cessation automatique des contrats de travail causerait un préjudice financier important aux travailleurs du secteur du nettoyage industriel en général et à Mme Rosenbladt en particulier. Ce secteur étant caractérisé par des emplois faiblement rémunérés et à temps partiel, les pensions du régime légal d’assurance vieillesse ne permettraient pas aux travailleurs de subvenir à leurs besoins vitaux.

72 D’autre part, il existerait des mesures moins contraignantes que la cessation automatique des contrats de travail. Ainsi, s’agissant de l’intérêt des employeurs à planifier leur politique de gestion du personnel, la juridiction de renvoi relève qu’il suffit que ces derniers demandent à leurs salariés s’ils envisagent de travailler au-delà de l’âge de départ à la retraite.

73 Afin d’examiner si la mesure en cause au principal dépasse ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis et porte une atteinte excessive aux intérêts des travailleurs qui atteignent l’âge de 65 ans, à partir duquel ils peuvent obtenir la liquidation de leurs droits à pension, il convient de replacer cette mesure dans le contexte réglementaire dans lequel elle s’insère et de prendre en considération tant le préjudice qu’elle peut occasionner aux personnes visées que les bénéfices qu’en tirent la société en général et les individus qui la composent.

74 Il ressort des explications fournies par la juridiction de renvoi ainsi que des observations présentées à la Cour que le droit du travail allemand n’interdit pas à une personne ayant atteint un âge lui permettant d’obtenir la liquidation de ses droits à pension de poursuivre une activité professionnelle. En outre, il ressort de ces explications qu’un travailleur se trouvant dans une telle situation continue de bénéficier de la protection contre les discriminations fondées sur l’âge au titre de l’AGG. La juridiction de renvoi a précisé, à cet égard, que l’AGG interdit qu’une personne se trouvant dans la situation de Mme Rosenbladt, après la cessation de son contrat de travail en raison du fait qu’elle a atteint l’âge de départ à la retraite, se voie refuser un emploi, que ce soit par son ancien employeur ou par un tiers, pour un motif lié à son âge.

75 Replacée dans ce contexte, la cessation de plein droit du contrat de travail résultant d’une mesure telle que celle prévue à l’article 19, point 8, du RTV n’a pas pour effet automatique de contraindre les personnes visées à se retirer définitivement du marché du travail. Ladite disposition n’instaure, par conséquent, pas un régime impératif de mise à la retraite d’office (voir, en ce sens, arrêt Age Concern England, précité, point 27). Elle ne s’oppose pas à ce qu’un travailleur qui le souhaiterait, par exemple pour des raisons financières, poursuive son activité professionnelle au-delà de l’âge de départ à la retraite.
Elle ne prive pas de la protection contre les discriminations fondées sur l’âge les salariés ayant atteint l’âge de la retraite lorsque ces derniers souhaitent demeurer actifs et cherchent un nouvel emploi.

76 Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de considérer qu’une mesure telle que celle prévue à l’article 19, point 8, du RTV ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis, compte tenu de la large marge d’appréciation reconnue aux États membres et aux partenaires sociaux en matière de politique sociale et de l’emploi.

77 Il convient, par conséquent, de répondre aux première et troisième questions que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une mesure telle que la clause de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de départ à la retraite fixé à 65 ans, prévue à l’article 19, point 8, du RTV.

Sur la quatrième question

78 Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande si le principe d’interdiction des discriminations fondées sur l’âge, tel qu’énoncé aux articles 1er et 2 de la directive 2000/78, s’oppose à ce qu’un État membre déclare d’application générale une convention collective contenant une clause de cessation automatique des contrats de travail, telle que celle figurant à l’article 19, point 8, du RTV, sans prendre en considération la situation économique, sociale et démographique ainsi que la situation du marché de l’emploi.

79 La directive 2000/78 ne régit pas, en tant que telle, les conditions dans lesquelles les États membres peuvent déclarer d’application générale une convention collective. Cependant, les États membres sont tenus d’assurer, par des mesures législatives, réglementaires ou administratives appropriées, que tous les travailleurs puissent bénéficier, dans toute son étendue, de la protection qui leur est conférée par la directive 2000/78 contre les discriminations fondées sur l’âge. L’article 16, sous b), de cette directive impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires afin que «soient ou puissent être déclarées nulles ou non avenues ou soient modifiées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les contrats ou dans les conventions collectives». Dès lors qu’une convention collective n’est pas contraire aux articles 1er et 2 de la directive 2000/78, l’État membre concerné est libre de la rendre obligatoire à des personnes qui ne sont pas liées par celle-ci (voir, par analogie, arrêt du 21 septembre 1999, Albany, C-67/96, Rec. p. I-5751, point 66).

80 Eu égard à ces considérations, il y a lieu de répondre à la quatrième question que les articles 1er et 2 de la directive 2000/78 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’un État membre déclare d’application générale une convention collective telle que celle en cause au principal, pour autant que celle-ci ne prive pas les travailleurs relevant du champ d’application de cette convention collective de la protection qui leur est conférée par ces dispositions contre les discriminations fondées sur l’âge.

Sur les dépens

81 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit:

1) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une disposition nationale telle que l’article 10, point 5, de la loi générale sur l’égalité de traitement (Allgemeines Gleichbehandlungsgesetz), en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite, dans la mesure où, d’une part, ladite disposition est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. La mise en œuvre de cette autorisation par la voie d’une convention collective n’est pas, en soi, exemptée de tout contrôle juridictionnel, mais, conformément aux exigences de l’article 6, paragraphe 1, de ladite directive, doit, elle aussi, poursuivre un tel objectif légitime d’une manière appropriée et nécessaire.

2) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une mesure telle que la clause de cessation automatique des contrats de travail des salariés ayant atteint l’âge de départ à la retraite fixé à 65 ans, prévue à l’article 19, point 8, de la convention collective d’application générale aux travailleurs salariés dans le secteur du nettoyage industriel (Allgemeingültiger Rahmentarifvertrag für die gewerblichen Beschäftigten in der Gebäudereinigung).

3) Les articles 1er et 2 de la directive 2000/78 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’un État membre déclare d’application générale une convention collective telle que celle en cause au principal, pour autant que celle-ci ne prive pas les travailleurs relevant du champ d’application de cette convention collective de la protection qui leur est conférée par ces dispositions contre les discriminations fondées sur l’âge.

Signatures


* Langue de procédure: l’allemand.

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CJUE, n° C-45/09, Arrêt de la Cour, Gisela Rosenbladt contre Oellerking Gebäudereinigungsges. mbH, 12 octobre 2010