Tribunal administratif de Martinique, 14 avril 2016, n° 1400472

  • Étude d'impact·
  • Environnement·
  • Enquete publique·
  • Périmètre·
  • Forage·
  • Martinique·
  • Plan·
  • Pêche maritime·
  • Protection·
  • Exploitation

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Martinique, 14 avr. 2016, n° 1400472
Juridiction : Tribunal administratif de Martinique
Numéro : 1400472

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE LA MARTINIQUE

N°1400472

___________

EXPLOITATION AGRICOLE DE LA MONTAGNE PELEE (EAMP)

___________

M. Lauzier

Rapporteur

___________

M. Clémenté

Rapporteur public

___________

Audience du 31 mars 2016

Lecture du 14 avril 2016

___________

34-01-01-02

34-02-01-01-01

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le tribunal administratif de la Martinique

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2014, l’exploitation agricole de la Montagne Pelée, représentée par Me Debray, demande au Tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté en date du 24 mars 2014 du préfet de la région Martinique déclarant d’utilité publique les périmètres de protection, du prélèvement et des forages du champ captant de l’allée Pécoul à Saint-Pierre et autorisant le traitement de l’eau aux fins de consommation humaine par la station de Morestin-Pécoul à Saint-Pierre au bénéfice du syndicat des communes de la côte nord-ouest (SCCNO) ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

— que le projet de la déclaration d’utilité publique n’a pas été mis à disposition du public par voie électronique en violation des dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement ;

— que l’arrêté d’ouverture d’enquête publique n’identifie pas le SCCNO comme responsable du projet et ne mentionne pas ses coordonnées ;

— que le dossier d’enquête publique est insuffisant ; qu’elle ne comporte pas de description tant du projet que des procédés de stockage, de production et de fabrication ; qu’on n’y trouve pas de plan général des travaux ; que les noms et qualités précises des auteurs de l’étude d’impact et des études ayant contribué à sa réalisation ne sont pas indiqués ; que ne sont pas indiquées les conséquences sur l’environnement ; que les restrictions à l’activité agricole ne sont pas analysées ; que le coût de l’opération est sous évalué ; que les besoins futurs sont sous estimés ; que l’implantation de stations d’épuration au sein du périmètre de protection rapprochée révèle les incohérences du dossier ;

— que le résumé non technique est insuffisant ;

— que les textes régissant l’enquête publique sont insuffisamment mentionnés ;

— que les périmètres de protection ne sont pas indiqués dans l’arrêté querellé ;

— que l’arrêté n’indique pas les motifs pour lesquels l’avis défavorable du ministre de l’agriculture n’a pas été suivi ; que ce faisant, il viole les dispositions de l’article L. 643-4 du code rural et de la pêche maritime ;

— que le projet va entraîner l’arrêt des activités agricoles ; qu’il a ainsi un fort impact économique et social ; qu’il existe des solutions alternatives ; que l’expropriation n’est pas indispensable ; que la délimitation du périmètre de protection rapprochée doit être revue.

Par un mémoire, enregistré le 20 octobre 2014, le syndicat de défense et de gestion de l’appellation d’origine contrôlée Rhum Agricole Martinique a présenté des observations au soutien de la requête.

Il soutient :

— que le dossier de l’enquête publique est incomplet et ne permet pas une bonne information du public ; que la notice explicative présente de nombreuses incohérences ; qu’aucun élément n’est apporté sur l’impact du projet sur la faune et la flore et, plus largement, sur l’environnement ; que l’impact sur les activités humaines, notamment agricoles, n’est pas analysé ; que l’estimation des dépenses est insuffisante ;

— que la commission de consommation des espaces agricoles n’a pas été saisie ; que la procédure est dès lors irrégulière ;

— que l’arrêté n’indique pas les motifs pour lesquels l’avis défavorable du ministre de l’agriculture n’a pas été suivi ; que ce faisant, il viole les dispositions de l’article L. 643-4 du code rural et de la pêche maritime ;

— que l’opération publique n’est pas nécessaire ; que deux solutions alternatives permettaient d’éviter de recourir à l’expropriation ; qu’une atteinte manifestement excessive est portée à la liberté de commerce et de l’industrie ; que les inconvénients sociaux sont excessifs ; que le projet conduit à détruire d’importants espaces agricoles.

Par un mémoire, enregistré le 13 novembre 2014, le conseil interprofessionnel du rhum traditionnel des DOM a présenté des observations au soutien de la requête.

Il soutient :

— que l’arrêté n’indique pas les motifs pour lesquels l’avis défavorable du ministre de l’agriculture n’a pas été suivi ; que ce faisant, il viole les dispositions de l’article L. 643-4 du code rural et de la pêche maritime ;

— que le projet de la déclaration d’utilité publique n’a pas été mise à disposition du public par voie électronique en violation des dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement ;

— que l’étude d’impact est insuffisante ; qu’elle ne comporte pas de description tant du projet que des procédés de stockage, de production et de fabrication ; qu’on n’y trouve pas de plan général des travaux ; que les noms et qualités précises des auteurs de l’étude d’impact et des études ayant contribué à sa réalisation ne sont pas indiqués ;

— que la notice explicative est insuffisante ;

— que le dossier ne comporte pas un plan général des travaux ; que les besoins futurs de la population sont sous évalués ; que le résumé non technique ne contient pas tous les éléments exigés par l’article R. 122-5 du code de l’environnement ;

— que le défaut d’utilité publique a été constaté par les autorités consultées ; que le projet représente une menace pour l’activité économique et pour l’appellation d’origine contrôlée du rhum ; que les solutions alternatives n’ont pas été prises en considération.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2015, le préfet de la région Martinique conclut au rejet de la requête.

Il soutient :

— que le site retenu présente des caractéristiques avantageuses ; que les alternatives présentent des handicaps importants ;

— que les procédures ont été respectées ;

— que la déclaration d’utilité publique n’entraîne aucun déclassement de terres agricoles ; qu’il n’y avait pas lieu, par suite, de saisir pour avis la commission départementale de la consommation des espaces agricoles ;

— que les avis émis par les différentes instances ont entraîné des modifications du projet ;

— que l’atteinte à la propriété est limitée ; que l’impact économique est très faible ; que l’impact social est inexistant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’environnement ;

— le code rural et de la pêche maritime ;

— le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

— le code de la santé publique ;

— le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Lauzier,

— les conclusions de M. Clémenté, rapporteur public,

— et les observations de M. X pour le préfet.

1. Considérant que, par un arrêté du 24 mars 2014, le préfet de la région Martinique a déclaré d’utilité publique les périmètres de protection du prélèvement et des forages du champ captant de l’allée Pécoul à Saint-Pierre et a autorisé le syndicat de communes de la côte nord-ouest (SCCNO) à prélever et traiter l’eau aux fins de consommation par la station de Morestin-Pécoul à Saint-Pierre humaine ; que l’exploitation agricole de la Montagne Pelée demande l’annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité externe :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

S’agissant du non-respect des dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 120-1 du code de l’environnement : « I. – Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l’article 7 de la Charte de l’environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l’environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration (…) » ;

3. Considérant que le projet proposé est soumis, en application des dispositions du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, à une procédure particulière organisant la participation du public ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement doit être écarté comme inopérant ;

S’agissant de la légalité de l’arrêté portant ouverture d’enquête publique :

4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 123-7 du code de l’environnement : « Lorsqu’en application de l’article L. 123-6 une enquête publique unique est réalisée, l’arrêté d’ouverture de l’enquête précise, s’il y a lieu, les coordonnées de chaque maître d’ouvrage responsable des différents éléments du projet, plan ou programme soumis à enquête et le dossier soumis à enquête publique est établi sous la responsabilité de chacun d’entre eux. (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 123-9 : « L’autorité compétente pour ouvrir et organiser l’enquête précise par arrêté, quinze jours au moins avant l’ouverture de l’enquête et après concertation avec le commissaire enquêteur ou le président de la commission d’enquête : (…) /11° L’identité de la ou des personnes responsables du projet, plan ou programme ou de l’autorité auprès de laquelle des informations peuvent être demandées (…) » ;

5. Considérant que l’arrêté d’ouverture d’enquête publique désigne clairement le syndicat des communes de la côte nord-ouest (SCCNO) comme maître d’ouvrage de l’opération ; que l’article 2 dudit arrêté indique que des observations peuvent être faites pendant toute la durée de l’enquête par écrit au commissaire enquêteur, dont les heures de présence à la mairie de Saint-Pierre sont précisées, ou par courrier électronique à une adresse internet ; que ces indications permettaient aux usagers qui le souhaitaient de s’informer utilement sur l’identité des services ou des personnes pouvant leur dispenser des informations ; qu’en tout état de cause, si l’arrêté d’ouverture d’enquête publique ne mentionne pas précisément le responsable du projet auprès duquel des information peuvent être demandées, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n’est même allégué par la requérante, que ces irrégularités ont pu avoir pour effet de nuire à l’information du public ou ont été de nature à exercer une influence sur les résultats de l’enquête ;

S’agissant du dossier d’enquête publique :

6. Considérant qu’aux termes de l’article R. 11-3 du code l’expropriation pour cause d’utilité publique, alors en vigueur : « L’expropriant adresse au préfet pour être soumis à l’enquête un dossier qui comprend obligatoirement : /I.-Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages : /1° Une notice explicative ; /2° Le plan de situation ; /3° Le plan général des travaux ; /4° Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; /5° L’appréciation sommaire des dépenses ; /6° L’étude d’impact définie à l’article R. 122-3 du code de l’environnement, lorsque les ouvrages ou travaux n’en sont pas dispensés ou, s’il y a lieu, la notice exigée en vertu de l’article R. 122-9 du même code ; /7° L’évaluation mentionnée à l’article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l’application de l’article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d’infrastructures tels que défini à l’article 3 du même décret. /II.-Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de l’acquisition d’immeubles, ou lorsqu’elle est demandée en vue de la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’urbanisme importante et qu’il est nécessaire de procéder à l’acquisition des immeubles avant que le projet n’ait pu être établi : /1° Une notice explicative ; /2° Le plan de situation ; /3° Le périmètre délimitant les immeubles à exproprier ; /4° L’estimation sommaire des acquisitions à réaliser. Dans les cas prévus aux I et II ci-dessus, la notice explicative indique l’objet de l’opération et les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l’insertion dans l’environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à l’enquête a été retenu. La notice explicative comprend, s’il y a lieu, les indications mentionnées à l’article R. 122-15 du code de l’environnement. » ;

7. Considérant qu’aux termes de l’article R 122-5 du code de l’environnement : « /I Le contenu de l’étude d’impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d’être affectée par le projet, à l’importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l’environnement ou la santé humaine. /II.-L’étude d’impact présente : /1° Une description du projet comportant des informations relatives à sa conception et à ses dimensions, y compris, en particulier, une description des caractéristiques physiques de l’ensemble du projet et des exigences techniques en matière d’utilisation du sol lors des phases de construction et de fonctionnement et, le cas échéant, une description des principales caractéristiques des procédés de stockage, de production et de fabrication, notamment mis en œuvre pendant l’exploitation, telles que la nature et la quantité des matériaux utilisés, ainsi qu’une estimation des types et des quantités des résidus et des émissions attendus résultant du fonctionnement du projet proposé. (…) /2° Une analyse de l’état initial de la zone et des milieux susceptibles d’être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l’article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l’eau, l’air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; /3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l’environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l’hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l’addition et l’interaction de ces effets entre eux (…) /5° Une esquisse des principales solutions de substitution examinées par le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage et les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l’environnement ou la santé humaine, le projet présenté a été retenu ; /6° Les éléments permettant d’apprécier la compatibilité du projet avec l’affectation des sols définie par le document d’urbanisme opposable, ainsi que, si nécessaire, son articulation avec les plans, schémas et programmes mentionnés à l’article R. 122-17, et la prise en compte du schéma régional de cohérence écologique dans les cas mentionnés à l’article L. 371-3 ; /7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l’ouvrage pour : /-éviter les effets négatifs notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine et réduire les effets n’ayant pu être évités ; /-compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine qui n’ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S’il n’est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage justifie cette impossibilité. /La description de ces mesures doit être accompagnée de l’estimation des dépenses correspondantes, de l’exposé des effets attendus de ces mesures à l’égard des impacts du projet sur les éléments visés au 3° ainsi que d’une présentation des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur les éléments visés au 3° ; /8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir l’état initial visé au 2° et évaluer les effets du projet sur l’environnement et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré ; /9° Une description des difficultés éventuelles, de nature technique ou scientifique, rencontrées par le maître d’ouvrage pour réaliser cette étude ; /10° Les noms et qualités précises et complètes du ou des auteurs de l’étude d’impact et des études qui ont contribué à sa réalisation ; (…) » ;

8. Considérant qu’aux termes enfin de l’article R. 122-9 du code de l’environnement : « L’étude d’impact ainsi que, le cas échéant, la décision, visée au IV de l’article R. 122-3, rendant obligatoire la réalisation d’une étude d’impact et l’avis de l’autorité de l’Etat compétente en matière d’environnement visé à l’article R. 122-7 sont insérés dans les dossiers soumis à enquête publique ou mis à disposition du public conformément à l’article L. 122-1-1, le cas échéant selon les modalités prévues au 4° de l’article R. 123-8. » ; qu’aux termes de l’article R. 123-8 : « Le dossier soumis à l’enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins : /1° Lorsqu’ils sont requis, l’étude d’impact et son résumé non technique ou l’évaluation environnementale et son résumé non technique, et, le cas échéant, la décision d’examen au cas par cas de l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement visée au I de l’article L. 122-1 ou au IV de l’article L. 122-4, ainsi que l’avis de l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement mentionné aux articles L. 122-1 et L. 122-7 du présent code ou à l’article L. 104-6 du code de l’urbanisme ; /2° En l’absence d’étude d’impact ou d’évaluation environnementale, une note de présentation précisant les coordonnées du maître d’ouvrage ou du responsable du projet, plan ou programme, l’objet de l’enquête, les caractéristiques les plus importantes du projet, plan ou programme et présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l’environnement, le projet, plan ou programme soumis à enquête a été retenu ; /3° La mention des textes qui régissent l’enquête publique en cause et l’indication de la façon dont cette enquête s’insère dans la procédure administrative relative au projet, plan ou programme considéré, ainsi que la ou les décisions pouvant être adoptées au terme de l’enquête et les autorités compétentes pour prendre la décision d’autorisation ou d’approbation ; /4° Lorsqu’ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l’ouverture de l’enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. Dans le cas d’avis très volumineux, une consultation peut en être organisée par voie électronique dans les locaux de consultation du dossier ; /5° Le bilan de la procédure de débat public organisée dans les conditions définies aux articles L. 121-8 à L. 121-15, ou de la concertation définie à l’article L. 121-16, ou de toute autre procédure prévue par les textes en vigueur permettant au public de participer effectivement au processus de décision. Lorsqu’aucune concertation préalable n’a eu lieu, le dossier le mentionne ; /6° La mention des autres autorisations nécessaires pour réaliser le projet, plan ou programme, en application du I de l’article L. 214-3, des articles L. 341-10 et L. 411-2 (4°) du code de l’environnement, ou des articles L. 311-1 et L. 312-1 du code forestier. » ; qu’aux termes de l’article R. 123-19 : « (…) Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (…) » ;

8. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative ;

9. Considérant, en premier lieu, que, comme la requérante le soutient, le dossier soumis à enquête publique ne contenait pas un plan général des travaux ; que, toutefois, ledit dossier comporte un descriptif des travaux envisagés, des plans de coupe des forages et un plan de localisation ; que dans les circonstances de l’espèce, et au vu notamment de l’objet du projet qui consiste à remplacer trois forages d’exploration par des forages permettant d’exploiter le champ captant, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’absence de ce plan ait nui à l’information complète de la population ou été de nature à exercer une influence sur la décision attaquée ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que l’étude d’impact précise les restrictions apportées aux activités agricoles tant dans le périmètre de protection immédiate que dans le périmètre de protection rapprochée ; que l’étude d’impact n’avait pas à comporter de description des caractéristiques des procédés de stockage, de production et de fabrication dès lors que de tels procédés sont sans objet eu égard au projet proposé ; que, par ailleurs, l’étude d’impact précise que la zone où auront lieu les travaux ne renferme pas d’espèces protégées en raison du fauchage régulier de la canne par des engins mécaniques ; qu’elle a ainsi précisé les impacts du projet sur la faune et la flore ; qu’enfin l’étude d’impact précise les restrictions apportées aux activités agricoles tant dans le périmètre de protection immédiate que dans le périmètre de protection rapprochée ;

11. Considérant, en troisième lieu, que l’appréciation sommaire des dépenses a pour objet de permettre à tous les intéressés de s’assurer que les travaux ou ouvrages, compte tenu de leur coût total réel, tel qu’il peut être raisonnablement apprécié à l’époque de l’enquête, ont un caractère d’utilité publique ;

12. Considérant, d’une part, que le SCCNO devra acquérir, afin de procéder au forage et à l’exploitation du champ captant, 174 m² de terrains auprès de la commune de Saint-Pierre et 6 950 m² de terres agricoles auprès de l’exploitation agricole de la Montagne Pelée, ces terrains constituant le périmètre de protection immédiate ; qu’il ressort des pièces du dossier que, dans son dossier à la page 94, le pétitionnaire, d’une part, évalue le coût d’achat du terrain agricole à une somme de 5 369 euros en se fondant sur une estimation de la SAFER de 91 centimes du mètre carré et, d’autre part, informe que la commune de Saint-Pierre cède à titre gracieux son terrain ; que, à la page 114 du dossier, dans le tableau récapitulatif des coûts, le SCCNO estime à 6 000 euros le coût d’achat du terrain ; que la requérante soutient que le SCCNO a sous-évalué le prix d’achat des terrains et que le prix du mètre carré prévu pour l’indemnisation est en réalité de 21,34 euros ; qu’elle soutient également qu’elle subit un préjudice de 23 000 euros par année et par hectare soit un préjudice total de 690 000 euros ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le SCCNO ait proposé à l’exploitation agricole de la Montagne Pelée une telle indemnisation ; qu’au contraire, dans un courrier du 29 juin 2004, le président du SCCNO indique que le « prix de vente sera défini suite à la valeur au mètre carré estimée par la SAFER » ; que, par ailleurs, la requérante évalue son préjudice en se fondant sur la perte d’une surface d’exploitation de 30 hectares correspondant à la surface du périmètre de protection rapprochée alors que les terres situées dans ce périmètre peuvent être cultivées ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les échanges entre le SCCNO et l’exploitation agricole de la Montagne Pelée fixaient l’indemnisation de cette dernière à hauteur de 160 000 euros ; qu’ainsi, il n’est pas établi que l’indemnisation de l’exploitant agricole concerné n’aurait pas été correctement évaluée ; qu’au surplus, en admettant que le coût d’indemnisation des terres agricoles inclue un dédommagement de la perte d’exploitation, le préfet fait état, sans être utilement contredit sur ce point, de ce que la perte de chiffre d’affaires pour l’exploitation agricole de la Montagne Pelée résultant de l’expropriation est, au vu de la superficie en cause, du rendement moyen et du prix de la tonne de canne, de 2 200 euros par an, soit 22 000 euros pour dix ans ; que la différence entre l’évaluation réalisée par le dossier d’enquête et celle intégrant l’indemnisation du préjudice d’exploitation serait donc de 16 000 euros et représente un écart de 2,9% par rapport à l’estimation du coût global des travaux qui est de 544 000 euros ; qu’un tel écart n’a pu, en tout état de cause, nuire à l’information du public ni exercer une influence sur la décision prise ;

13. Considérant, d’autre part, que si le dossier d’instruction ne précise pas le coût d’installation de clapets anti-retour sur les pompes et d’organes de sortie de puits, de mise en place de moyens de surveillance ou encore la transformation en piézomètre du forage SP2, l’absence d’évaluation de ces dépenses, dans les circonstances de l’espèce et au vu notamment du coût global de l’opération évalué à 544 000 euros, n’a pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou d’exercer une influence sur la décision attaquée ;

14. Considérant, en quatrième lieu, que si l’exploitation agricole de la Montagne Pelée soutient que les « besoins futurs [en eau] sont sous-estimés », elle ne l’établit pas alors que, en tout état de cause, le projet querellé a d’abord pour objectif de fournir une source d’approvisionnement secondaire en eau susceptible de pallier les défaillances de la source principale d’approvisionnement du SCCNO ;

15. Considérant, en cinquième lieu, que le dossier d’instruction relève que deux zones situées dans le périmètre de protection rapprochée sont classées 2NC par le plan local d’urbanisme et que la construction de stations d’épuration pourrait y être autorisée ; que le pétitionnaire du projet n’a pas estimé nécessaire de demander spécifiquement l’interdiction de telles constructions compte tenu, d’une part, de l’éloignement de ces deux zones du champ captant et, d’autre part, du strict encadrement de telles activités ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’un tel choix soit « incohérent » alors, en tout état de cause, qu’aux termes de l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme : « le permis de construire ou d’aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés ne sont pas incompatibles avec une déclaration d’utilité publique » ;

16. Considérant, en sixième lieu, que si le dossier d’enquête publique ne comporte pas la mention des textes régissant l’enquête publique ni l’indication de la façon dont cette enquête s’insère dans la procédure administrative, cette omission n’apparaît pas, dans les circonstances de l’espèce, et dès lors que l’enquête ne portait que sur un seul objet, comme ayant pu priver le public d’une garantie ni comme ayant été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision prise au terme de la procédure ;

17. Considérant, en septième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, l’étude d’impact mentionne les noms et qualités des auteurs des études ayant contribué à sa réalisation, notamment des rapports établis par le bureau de recherches géologiques et minières et par un hydrogéologue agréé ; qu’elle présente également les nom et qualités du pétitionnaire ;

18. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de l’insuffisance du résumé non technique est dépourvu des précisions permettant d’en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne les informations techniques contenues dans l’arrêté de déclaration d’utilité publique :

19. Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’arrêté querellé précise les coordonnées géographiques des forages ; que, par suite, le moyen tiré de l’insuffisance des informations techniques contenues dans la déclaration d’utilité publique manque en fait ;

En ce qui concerne la violation de l’article L. 181-3 du code rural et de la pêche maritime :

20. Considérant qu’aux termes de l’article L. 181-3 du code rural et de la pêche maritime : « Tout projet d’élaboration ou de révision d’un document d’aménagement ou d’urbanisme ayant pour conséquence d’entraîner le déclassement de terres classées agricoles, ainsi que tout projet d’opération d’aménagement et d’urbanisme ayant pour conséquence la réduction des surfaces naturelles, des surfaces agricoles et des surfaces forestières dans les communes disposant d’un document d’urbanisme, ou entraînant la réduction des espaces non encore urbanisés dans une commune soumise au règlement national d’urbanisme, doit faire l’objet d’un avis favorable de la commission mentionnée à l’article L. 181-1. (…) » ;

21. Considérant qu’une opération d’aménagement, au sens du code de l’urbanisme et notamment de l’article L. 300-1, a pour objet de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d’enseignement supérieur, de lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels ; que le projet autorisé par l’arrêté litigieux et consistant en la mise en place de trois forages d’exploitation du champ captant de Pécoul ne constitue pas une opération d’aménagement pour le sens de ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l’article L. 181-3 du code rural et de la pêche maritime est inopérant ;

En ce qui concerne le défaut de motivation :

22. Considérant qu’aux termes de l’article L. 643-4 du code rural et de la pêche maritime : « Tout organisme de défense et de gestion d’une appellation d’origine peut saisir l’autorité administrative compétente s’il estime que le contenu d’un document d’aménagement ou d’urbanisme en cours d’élaboration, un projet d’équipement, de construction, d’exploitation du sol ou du sous-sol, d’implantation d’activités économiques est de nature à porter atteinte à l’aire ou aux conditions de production, à la qualité ou à l’image du produit d’appellation. Préalablement à toute décision, cette autorité administrative doit recueillir l’avis du ministre chargé de l’agriculture, pris après consultation de l’Institut national de l’origine et de la qualité. Le ministre chargé de l’agriculture dispose, pour donner son avis, d’un délai de trois mois à compter de la date à laquelle il est saisi par l’autorité administrative. Lorsqu’elle décide de ne pas suivre l’avis du ministre, l’autorité administrative en précise les motifs dans sa décision. (…) » ;

23. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le ministre a émis un avis défavorable le 26 septembre 2013 en raison des risques d’atteinte à la pérennité de la culture de la canne causées par les prescriptions instituées dans le périmètre de protection rapprochée, notamment celle relative à l’interdiction d’usage de fertilisants d’origine organique ; que le préfet, dans son arrêté du 24 mars 2014, après avoir visé l’avis du ministre, a indiqué que « des pratiques de fertilisation des sols (…) peuvent être menées dès lors que les produits épandus (…) ne sont pas de nature à compromettre la qualité de la nappe d’eau » et qu’au regard de l’avis du ministre, des dispositions ont été introduites dans l’arrêté afin de garantir la compatibilité des prescriptions avec « la poursuite des activités agricoles liées à la production du rhum d’appellation d’origine contrôlée Martinique » ; que ces mesures sont listées à l’article de l’arrêté intitulé « périmètre de protection rapprochée ; que, notamment, l’arrêté autorise les composts « contenant des matières organiques d’origine animale » s’ils sont hygiénisés ; qu’ainsi, le préfet a précisé les motifs pour lesquels il n’avait pas suivi l’avis du ministre ; qu’il suit de là que le moyen tiré de la violation des dispositions de l’article L. 643-4 du code rural et de la pêche maritime manque en fait ;

Sur la légalité interne :

24. Considérant qu’une opération ne peut être déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social ou l’atteinte à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ; qu’il appartient au juge, lorsqu’il doit se prononcer sur le caractère d’utilité publique d’une opération nécessitant l’expropriation d’immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu’elle répond à une finalité d’intérêt général, que l’expropriant n’était pas en mesure de réaliser l’opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ;

25. Considérant, en premier lieu, que l’opération projetée vise à compenser les défaillances éventuelles de la source Morestin, source d’approvisionnement de 75% des besoins en eau du SCCNO ; que la source Morestin représente 90% de l’approvisionnement en eau des communes de Prêcheur, Carbet, Case-Pilote et Bellefontaine ; qu’il est constant par ailleurs que la canalisation reliant la source Morestin à la commune de Saint-Pierre se trouve dans une zone d’instabilité du sol à l’origine de coupures récurrentes ; qu’en cas de coupures, le rétablissement total de la distribution peut ne pas avoir lieu avant un délai de trois jours ; que la mise en place du prélèvement sur le site de Pécoul, qui présente une eau de qualité, permet de compenser jusqu’à 70% de l’apport en eau de la source Morestin en cas de défaillance de celle-ci ; que le projet permet également de réaliser des travaux d’entretien sur la source Morestin en limitant l’ampleur et la durée des coupures d’eau ainsi induites ; qu’une telle opération poursuit ainsi un objectif d’utilité publique ;

26. Considérant, en deuxième lieu, que le projet nécessite l’expropriation d’un terrain d’une superficie de 6 950 mètres carrés ; que la requérante soutient qu’un bail « qui permettrait à la collectivité publique d’exploiter légalement les forages concernés » constitue une solution alternative au transfert de propriété ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le SCCNO aurait été en mesure de réaliser l’opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation, dès lors que les dispositions de l’article L. 1321-2 du code de la santé publique lui font obligation d’acquérir en pleine propriété les terrains faisant l’objet d’un périmètre de protection immédiate ; que si la requérante soutient que d’autres projets étaient possibles sur d’autres sites, il n’appartient pas au juge administratif statuant au contentieux de procéder à une telle comparaison ;

27. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, la mise en place d’un périmètre de protection rapprochée, dans lequel sont incluses des terres agricoles appartenant à la requérante et consacrées exclusivement à la culture de la canne, n’a pas pour effet d’empêcher l’exploitation desdites terres ; que, par ailleurs, les prescriptions du périmètre de protection rapprochée n’interdisent pas l’épandage du compost mais uniquement l’usage de matières organiques d’origine animale non hygiénisées ; qu’ainsi il ne ressort pas des pièces du dossier, nonobstant les avis défavorables par la chambre d’agriculture de la Martinique et l’institut national de l’origine et de la qualité, que les atteintes à la propriété privée et le coût financier de l’opération seraient excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ;

28. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation de l’arrêté du 24 mars 2014 doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’exploitation agricole de la Montagne Pelée est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à l’exploitation agricole de la Montagne Pelée, au préfet de la région Martinique, au syndicat des communes de la cote nord-ouest (SCCNO), au conseil interprofessionnel du rhum traditionnel des DOM, et au syndicat de défense de l’appellation d’origine Rhum Agricole Martinique.

Délibéré après l’audience du 31 mars 2016, à laquelle siégeaient :

Mme Folscheid, président,

Mme Boissard, premier conseiller,

M. Lauzier, conseiller,

Lu en audience publique le 14 avril 2016.

Le rapporteur, Le président,

A. LAUZIER B. FOLSCHEID

Le greffier,

L. AMATA

La République mande et ordonne au préfet de la région Martinique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Martinique, 14 avril 2016, n° 1400472