Tribunal de grande instance de Paris, 9e chambre 1re section, 16 décembre 2013, n° 11/17954

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 9e ch. 1re sect., 16 déc. 2013, n° 11/17954
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 11/17954

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

9e chambre

1re section

N° RG : 11/17954

N° MINUTE : 9

Assignations du :

9 Décembre 2011 et du 13/12/2011

JUGEMENT

rendu le 16 Décembre 2013

DEMANDEURS

Monsieur Z X

[…]

[…]

S.C.I. DÉCEMBRE GESTION représentée par son gérant monsieur X.

[…]

[…]

représentée par Maître Hélène FERON-POLONI de la SCP LECOQ VALLON & FERON-POLONI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0187

DÉFENDERESSES

S.A. SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

[…]

[…]

représentée par Maître Laurence GALTIER, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0010

S.A. SOGECAP

[…]

[…]

représentée par Maître Corinne CUTARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1693

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Bénédicte FARTHOUAT-DANON, Premier Vice Président adjoint

Vincent BRAUD, Vice-Président

A B, Juge

assisté de Séria BEN ZINA, Greffier, lors des débats, et de Christine-Marie CHOLLET, Greffier, lors de la mise à disposition

DÉBATS

A l’audience du 18 Novembre 2013 tenue en audience publique devant A B, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux Conseils des parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2013.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

********

EXPOSE DU LITIGE :

Afin de financer l’acquisition d’un bien immobilier situé à Villeurbanne, M. Z X, qui exerçait en qualité de cadre et gérait des SCI, s’est rapproché de sa banque la Société Générale.

Etait proposé, pour un financement à hauteur de 700.000 francs (106.714,31 euros), un prêt in fine d’une durée de 10 ans, au taux de 6,30% hors assurance avec adossement d’un contrat d’assurance-vie Hevea (premier versement de 200.000 francs, soit 30.489,80 euros suivi de cinq versements annuels de 50.000 francs, soit 7.622,45 euros) nanti au profit de la banque. Le nantissement d’un autre contrat d’assurance-vie était également prévu.

Le 5 décembre 2000 la Société Générale adressait à la SCI Décembre Gestion dirigée par M. X une offre de prêt immobilier in fine de 106.714,31 euros d’une durée de 12 ans, au taux d’intérêts de 6,20% l’an hors assurance-groupe, générant des intérêts mensuels de 551,36 euros. Au titre des garanties était indiqué : une promesse d’hypothèque, le nantissement d’un plan épargne actions à hauteur du montant du prêt, le nantissement d’un contrat d’assurance-vie Hevea à hauteur du prêt et la caution personnelle et solidaire de M. X. Les conditions générales de l’offre de prêt étaient remises avec l’offre.

Le 12 décembre 2000 M. X adhérait au contrat collectif d’assurance-vie Hevea souscrit par la Société Générale auprès de la société Sogecap moyennant le versement d’une prime de 30.489,80 euros (29.971,47 euros net) qu’il affectait sur le support Hevea Dynamique.

Le 22 décembre 2000 il C ce contrat au profit de la Société Générale.

Le 22 décembre 2000, M. X C également son PEA au profit de la Société Générale, PEA d’une valeur de 9.947 euros au jour de l’acte, ainsi qu’un contrat d’assurance vie Compte Projectis ouvert dans les livres de la Société Générale.

Des versements complémentaires étaient opérés sur le contrat Hevea, toujours sur un support dynamique : 8.000 euros le 6 mars 2002, 15.000 euros le 1er octobre 2004, 7.500 euros le 4 avril 2005 et 10.700 euros le 17 mai 2006. Des arbitrages étaient opérés par M. X : passage du support dynamique au support défensif le 20 août 2007, puis retour au support dynamique le 7 septembre 2007.

En avril 2010, constatant que son contrat Hevea ne permettrait pas de couvrir le capital dû à échéance du prêt in fine, M. X sollicitait un rendez-vous avec la banque.

A l’issue du rendez-vous, rappelant que le contrat Hevea était valorisé à 50.103 euros et le PEA à 27.779 euros et que le capital dû au 7 janvier 2011 était de 106.714,31 euros, la banque proposait :

— de prolonger le contrat in fine avec mise en place de versements programmés sur le contrat d’assurance-vie,

— transformation du solde dû (différence entre le capital et la valorisation du PEA et des contrats d’assurance-vie) en un prêt amortissable.

Par lettre du 21 juillet 2010 M. X refusait ces propositions indiquant que seul le solde de l’assurance-vie Hevea servira à rembourser le prêt in fine et la Société Générale prendra en charge la différence.

Le 11 avril 2011 le rachat partiel du contrat Hevea était sollicité à hauteur de 47.527,08 euros.

Par courrier du 18 juillet 2011, M. X informait la Sogecap qu’il renonçait au contrat d’assurance-vie Hevea. La compagnie d’assurance s’opposait à la restitution des fonds.

Le capital du prêt in fine était remboursé en 2011.

Par acte d’huissier de justice du 13 décembre 2011, M. Z X et la SCI Décembre Gestion ont assigné la Société Générale et la société Sogecap devant ce tribunal en restitution des sommes investies sur le contrat d’assurance-vie et en nullité du contrat de prêt.

Dans leurs dernières écritures notifiées par voie électronique le 30 août 2013, M. X et la SCI décembre Gestion demandent au tribunal de :

Sur le contrat d’assurance-vie,

— dire et juger que c’est à bon droit que M. X a renoncé à son contrat Hevea par courrier recommandé avec accusé réception réceptionné le 18 juillet 2011,

— condamner la société Sogecap à restituer à M. X la somme de 22.610,9 € à titre principal,

— condamner la société Sogecap à payer sur la somme principale les intérêts de retard tels que prévus par l’article L.132-5-1 du Code des assurances, à savoir calculés au taux de l’intérêt légal majoré de moitié à compter du 18 août 2011 jusqu’au 18 octobre 2011, puis à partir de cette date, au double du taux légal,

— dire que les intérêts échus produiront eux-mêmes intérêts,

— condamner la société Sogecap à payer à M. X la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts pour résistance abusive,

Sur le contrat de prêt,

— à titre principal, sur la nullité du contrat de prêt fondée sur l’indivisibilité du montage contractuel, prononcer la nullité du contrat de prêt en raison de son indivisibilité par rapport au contrat d’assurance-vie,

— condamner la Société Générale au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt, soit la somme de 53.389,72 euros,

— condamner la Société Générale à payer sur ces sommes, les intérêts au taux légal à compter de l’assignation conformément à l’article 1154 du code civil,

— à titre subsidiaire, si par impossible la nullité n’était pas retenue, prononcer la résolution du contrat de prêt en raison de son indivisibilité par rapport au contrat d’assurance-vie,

— condamner la Société Générale au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt, soit la somme de 53.389,72 euros,

— condamner la Société Générale à payer sur ces sommes, les intérêts au taux légal à compter de l’assignation conformément à l’article 1154 du code civil,

— à titre très subsidiaire, si par impossible la résolution n’était pas retenue, prononcer la caducité à effet rétroactif du contrat de prêt en raison de son indivisibilité par rapport au contrat d’assurance-vie,

— condamner la Société Générale au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt, soit la somme de 53.389,72 euros,

— condamner la Société Générale à payer sur ces sommes, les intérêts au taux légal à compter de l’assignation conformément à l’article 1154 du code civil,

— à titre infiniment subsidiaire, si par impossible le Tribunal ne faisait pas droit aux demandes de M. X fondées sur l’anéantissement du contrat de prêt, condamner la Société Générale à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt, soit la somme de 53.389,72 euros,

— condamner la Société Générale à payer sur ces sommes, les intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation conformément à l’article 1153 du code civil,

— ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l’article 1154 du code civil,

En tout état de cause,

— condamner in solidum la société Sogecap et la Société Générale à payer à M. X une somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner in solidum la société Sogecap et la Société Générale aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Lecoq Vallon & Associés,

— ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 5 juillet 2013 la Société Générale demande au tribunal de :

— sur les conséquences sur le contrat de prêt de l’anéantissement du contrat d’assurance vie dans l’hypothèse où le tribunal retiendrait la renonciation, à titre principal,

— dire et juger la SCI Décembre Gestion irrecevable comme prescrite en sa demande de nullité,

— dire et juger la SCI Décembre Gestion irrecevable et à tout le moins mal fondée en sa demande de résolution, caducité du contrat de prêt dès lors que ce dernier n’a plus d’existence juridique pour avoir été intégralement remboursé avant l’introduction de l’instance,

— à titre subsidiaire, dire et juger que le contrat de prêt et le contrat d’assurance vie Hevea sont des contrats autonomes,

— dire et juger mal fondée l’action de la SCI Décembre Gestion tendant à sa condamnation au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt, soit la somme de 53.389,72 €,

— débouter en conséquence les demandeurs de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

— sur sa responsabilité, à titre principal,

— dire et juger irrecevable comme prescrite la demande de M. X et de la SCI Décembre Gestion tendant à sa condamnation, pour faute, au paiement de la somme de 53.389,72 €,

— à titre subsidiaire, dire et juger qu’elle n’a commis aucun manquement,

— dire et juger que les demandeurs ne justifient pas de l’existence de leur préjudice,

— débouter en conséquence les demandeurs de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions,

— en tout état de cause, condamner in solidum M. X et la SCI Décembre Gestion au paiement d’une somme de 10.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 octobre 2013 la société Sogecap demande au tribunal de :

— la déclarer recevable et bien fondée en l’ensemble de ses arguments, moyens et demandes,

— dire et juger irrecevables et en tout cas mal fondées toutes les demandes de M. Z X et la SCI Décembre Gestion formées à son encontre,

— déclarer irrecevable la demande subsidiaire de dommages et intérêts correspondant à la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt,

— à titre subsidiaire, déclarer irrecevable comme prescrite la demande subsidiaire de dommages et intérêts correspondant à la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt,

— débouter M. Z X et la SCI Décembre Gestion de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

— condamner M. Z X et la SCI Décembre Gestion à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. Z X et la SCI Décembre Gestion aux entiers dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions susvisées pour l’exposé détaillé des moyens des parties.

MOTIFS :

Sur la renonciation :

Les requérants soutiennent tout d’abord, qu’en violation de l’article L 132-5-1 du code des assurances, dont les dispositions sont compatibles avec les normes européennes, le bulletin d’adhésion ne contient pas de projet de lettre de renonciation et n’indique pas les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années au moins, en nombre d’unités de compte et en fonction de leur investissement ; que ce projet de lettre tout comme les valeurs de rachat ne peuvent se trouver dans la note d’information ou dans les conditions générales ; qu’en outre, il n’est pas fait mention en caractères très apparents, dans les documents remis, de l’information sur le risque lié aux contrats libellés en unités de compte en application de l’article A 132-5 du code des assurances. Les requérants font ensuite valoir que leur a été remise une note d’information qui constitue, en fait, des conditions générales dès lors qu’elle comporte des informations surabondantes (et donc non essentielles) sur le contrat, notamment des informations sur les avances, les arbitrages, l’information annuelle, l’introduction de la monnaie unique européenne, le délai de prescription et des renseignements complémentaires ; que la note d’information ne contient pas en revanche, les informations prévues aux articles A 132-4 et A 132-5 du code des assurances (notamment les frais et indemnités de rachat prélevés par l’entreprise d’assurance, l’énumération des valeurs de référence et la nature des actifs entrant dans leur composition, les indications générales relatives au régime fiscal, l’information sur le sort de la garantie décès en cas d’exercice de la faculté de renonciation et le délai et les modalités pour renoncer au contrat) ; qu’il ne peut être soutenu que ces informations étaient dans l’annexe à la note d’information, M. X n’ayant jamais eu communication de ce document intitulé Orientation de gestion des supports ; qu’en toute hypothèse, cette annexe est insuffisante puisqu’elle n’énumère pas les valeurs de référence et la nature des actifs entrant dans leur composition ; que faute d’avoir reçu ces informations, le droit de renonciation de M. X a été prorogé, de sorte qu’il l’a exercé valablement en juillet 2011 et que la Sogecap doit lui restituer la somme de 22.610,90 euros.

En défense, la société Sogecap soutient que l’exercice discrétionnaire de la faculté de renonciation constitue une sanction automatique qui, en l’absence de contrôle de proportionnalité et d’un rôle modérateur par le juge, porte atteinte à ses biens en violation de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits et libertés fondamentales ; qu’en lui faisant supporter les pertes financières de l’opération d’assurance, elle est privée de sa propriété en violation de l’article précité. Elle ajoute, sur le respect des dispositions des articles L 132-5-1 et A 132-4 du code des assurances, que la note d’information remise porte bien sur les dispositions essentielles du contrat ; que M. X ne justifie pas qu’un surplus d’information l’ait gêné et, qu’en toute hypothèse, il résulte de la directive européenne du 10 novembre 1992 et de son interprétation par la CJUE qu’il s’agit des informations minimales qui doivent être communiquées, de sorte qu’un surplus d’information ne peut être sanctionné ; que la note d’information litigieuse contient les informations exigées par l’article A 132-4 du code précité ; que les valeurs de rachat au terme de chacune des huit années au moins ont bien été communiquées à M. X dès lors que le texte n’exige pas la communication des valeurs réelles (ce que l’assureur ne peut faire faute de connaître au moment de la proposition le montant qui sera investi) mais que l’assuré puisse, au regard des valeurs communiquées, mesurer l’impact des frais de gestion prélevés par l’assureur. La société Sogecap précise encore que l’annexe financière à la note d’information faisant partie intégrante de cette note, décrit les supports financiers du contrat d’assurance et a informé M. X des valeurs de référence et de la nature des actifs entrant dans leur composition ; que M. X a été informé du risque financier ainsi que du sort de la garantie décès en cas d’exercice de la faculté de renonciation par la formule “en cas de décès de l’assuré : qu’elles qu’en soient l’époque et la cause, Sogecap versera l’épargne constituée à la date du décès aux bénéficiaires désignés”, tout comme il a été informé du régime fiscal par la mention selon laquelle les impôts et taxes s’appliquant à l’adhésion sont à la charge de l’adhérent sauf dispositions légales contraires ; que faute de prélever des frais et indemnités de rachat, elle n’avait pas à les mentionner. Enfin, sur la faculté de renonciation et le projet de lettre, la société Sogecap retient que ces éléments figurent dans la note d’information.

En premier lieu, sur la lettre de renonciation, il résulte de l’article L 132-5-1 du code des assurances dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce que :

(…)

La proposition d’assurance ou de contrat doit comprendre un projet de lettre destiné à faciliter l’exercice de cette faculté de renonciation. Elle doit indiquer notamment, pour les contrats qui en comportent, les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années au moins. L’entreprise d’assurance ou de capitalisation doit, en outre, remettre, contre récépissé, une note d’information sur les dispositions essentielles du contrat, sur les conditions d’exercice de la faculté de renonciation, ainsi que sur le sort de la garantie décès en cas d’exercice de cette faculté de renonciation. Le défaut de remise des documents et informations énumérés au présent alinéa entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu au premier alinéa jusqu’au trentième jour suivant la date de remise effective de ces documents. Un nouveau délai de trente jours court à compter de la date de réception du contrat, lorsque celui-ci apporte des réserves ou des modifications essentielles à l’offre originelle, ou à compter de l’acceptation écrite, par le souscripteur, de ces réserves ou modifications.

Il résulte de ces dispositions que le projet de lettre de renonciation doit se trouver dans la proposition d’assurance ou de contrat et non dans la note d’information.

Au cas particulier, le bulletin d’adhésion ne contient aucun projet de lettre de renonciation conformément à l’article L 132-5-1 du code des assurances. La circonstance qu’un tel projet se trouve dans la note d’information remise à M. X est indifférente.

En deuxième lieu sur l’information sur les risques liés au contrat libellé en unités de compte, il résulte de l’article A 132-5 du même code :

Pour les contrats qui relèvent des catégories 8 et 9 définies à l’article A. 344-2, l’information sur les valeurs de rachat au titre des garanties exprimées en unités de compte prévue par l’article L. 132-5-1 est donnée en nombre d’unités de compte. Ce nombre doit tenir compte des prélèvements effectués à quelque titre que ce soit sur la provision mathématique du contrat.

Cette information est complétée par l’indication en caractères très apparents que l’assureur ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte, mais pas sur leur valeur, et que celle-ci est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse.

Elle est également complétée par l’indication des modalités de calcul du montant en francs de la valeur de rachat.

Au cas particulier, le bulletin d’adhésion ne comporte aucune information relative au risque et la note d’information contient les mentions suivantes :

- la valeur de rachat est égale à la contre-valeur en francs français des unités de compte inscrites à l’adhésion. Le nombre d’unités de compte représentatif de la valeur de rachat ne pourra pas être inférieur aux valeurs indiquées ci-après (suit un tableau sur l’évolution du nombre d’unités de compte), compte tenu des frais de gestion maximum (note d’information p. 2) ;

— sous le paragraphe l’épargne constituée, il est indiqué que le nombre d’unités de compte inscrites à votre adhésion pour chaque support choisi s’obtient en divisant le montant du versement (net de frais sur versement) affecté à ce support par la valeur liquidative de l’unité de compte. La valeur liquidative retenue est celle du deuxième jour ouvré suivant la date d’effet du versement si le support est à cotation quotidienne. Si la cotation est hebdomadaire, la valeur retenue sera celle du vendredi suivant la date d’effet du versement, sous réserve d’un délai minimum de deux jours ouvrés.

Ces mentions, contrairement à ce que soutient la société Sogecap, ne correspondent pas aux exigences de l’article A 132-5 précité, notamment la mention en caractères très apparents selon laquelle la valeur des unités de compte est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse.

En troisième lieu sur le contenu de la note d’information, l’article A 132-4 du même code dispose que la note d’information contient les informations prévues dans le modèle annexé, lequel mentionne :

(…)

2° Caractéristiques du contrat :

a) Définition contractuelle des garanties offertes ;

b) Durée du contrat ;

c) Modalités de versement des primes ;

d) Délai et modalités de renonciation au contrat, sort de la garantie décès en cas de

renonciation ;

e) Formalités à remplir en cas de sinistre ;

f) Précisions complémentaires relatives à certaines catégories de contrats :

- contrats en cas de vie ou de capitalisation : frais et indemnités de rachat prélevés par l’entreprise d’assurance ;

- autres contrats comportant des valeurs de rachat : frais prélevés en cas de rachat;

- capital variable : énumération des valeurs de références et nature des actifs entrant dans leur composition ;

- contrat groupe : formalités de résiliation et de transfert ;

g) Information sur les primes relatives aux garanties principales et complémentaires lorsque de telles informations s’avèrent appropriées ;

h) Précision quant à la loi applicable au contrat lorsque celle-ci n’est pas la loi française et indications générales relatives au régime fiscal.

3° Rendement minimum garanti et participation :

a) Taux d’intérêt garanti et durée de cette garantie ;

b) Indications des garanties de fidélité, des valeurs de réduction et des valeurs de rachat ; dans le cas où celles-ci ne peuvent être établies exactement au moment de la souscription, indication du mécanisme de calcul ainsi que des valeurs minimales ;

c) Modalités de calcul et d’attribution de la participation aux bénéfices.

4° Procédure d’examen des litiges :

Modalités d’examen des réclamations pouvant être formulées au sujet du contrat.

Existence le cas échéant, d’une instance chargée en particulier de cet examen.

Ces éléments doivent donc figurer dans un note d’information.

Au cas particulier, il ne résulte ni de la note d’information, ni de son annexe, ni des conditions générales, qu’une information ait été donnée relativement au régime fiscal, la mention relative à la charge des impôts sur l’adhérent ne constituant pas une telle information.

En définitive, au cas d’espèce, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres griefs invoqués, les insuffisances de mentions tant du bulletin d’adhésion que de la note d’information, ont entraîné prorogation de plein droit du délai de renonciation.

En quatrième lieu, sur les effets de la prorogation du délai de renonciation et le droit européen, la prorogation du droit de renonciation résulte d’un manquement de l’assureur à son obligation à l’égard de l’assuré. L’assureur a la possibilité d’éviter cette sanction en notifiant à tout moment à l’assuré les informations manquantes, faisant courir ainsi un nouveau délai de trente jours. Il s’ensuit que la société Sogecap ne démontre pas que l’application de cette prorogation du délai de renonciation porte une atteinte disproportionnée et injustifiée à ses biens au regard du but poursuivi tenant essentiellement à la protection du consommateur.

Il s’ensuit que M. X a valablement exercé sa faculté de renonciation le 18 juillet 2011.

Dès lors, la société Sogecap sera condamnée à verser à M. X la somme de 22.610,90 euros. En application de l’article L 132-5-1 du code précité l’assureur doit restituer les sommes dans un délai de trente jours, au-delà duquel les sommes non restituées produisent de plein droit intérêt au taux légal majoré de moitié durant deux mois, puis à l’expiration de ce délai de deux mois, au double du taux légal. Il s’ensuit que la somme de 22.610,90 euros portera intérêt au taux légal majoré de moitié du 18 août 2011 au 18 octobre 2011, puis à compter du 19 octobre 2011 au double du taux légal.

Sur l’indivisibilité du contrat de prêt et du contrat d’assurance-vie :

Au soutien de sa demande principale de nullité du contrat de prêt, subsidiaire de résolution du contrat de prêt et très subsidiaire de caducité du contrat de prêt, les requérants font valoir que les contrats d’assurance-vie et de prêt formeraient un tout indivisible.

En premier lieu, s’agissant de l’action en nullité, s’applique la prescription quinquennale de l’article 1304 du code civil, peu important que soit invoquée l’indivisibilité avec un contrat d’assurance-vie auquel il a été renoncé en application d’une règle d’ordre public. Il s’ensuit qu’au cas particulier l’action en nullité est prescrite.

S’agissant des actions subsidiaires en résolution et en caducité, elles supposent d’une part, la démonstration d’une indivisibilité entre les contrats d’assurance-vie et de prêt et d’autre part, que le contrat de prêt perdure. Or, au cas particulier, il est établi que le contrat de prêt in fine a été remboursé en 2011, qu’il n’a donc plus d’existence. En outre, l’indivisibilité entre les contrats n’est pas démontrée, aucune des pièces du dossier ne permettant d’établir qu’un lien contractuel ait été fait entre les deux contrats, la banque ne s’étant notamment pas engagée à ce que le placement génère un résultat suffisant pour permettre le paiement de la totalité de l’échéance finale du prêt, l’épargne placée par M. X sur le contrat d’assurance-vie restant disponible à tout moment et le souscripteur pouvant également à tout moment modifier le choix ou la répartition de ses supports.

Il s’ensuit que les requérants seront déboutés de leur demande tendant à la résolution et la caducité du contrat de prêt.

Sur la demande infiniment subsidiaire sur le manquement de la Société Générale à ses obligations d’information, de mise en garde et de conseil :

Les manquements invoqués par les requérants à l’encontre de la Société Générale portent tant sur sa qualité de dispensateur de crédit que de courtier en assurance. Il convient donc d’examiner les règles de prescription eu égard aux deux types d’activités exercées par la banque, étant rappelé que le délai de prescription applicable est, dans les deux cas, décennal aux termes de l’article L. 110-4 du code du commerce alors en vigueur régissant les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants et non-commerçants.

En ce qui concerne le point de départ du délai de prescription de l’action exercée contre l’établissement dispensateur de crédit, il est par principe fixé à la date de la réalisation du dommage ou à la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance.

S’agissant d’un dommage résultant d’un manquement à l’obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter, celui-ci se manifeste dès l’octroi des crédits de sorte que l’action intentée le 13 décembre 2011 concernant un dommage qui s’est manifesté le 5 décembre 2000 doit être déclarée irrecevable comme prescrite.

En ce qui concerne le point de départ du délai de prescription de l’action exercée contre le courtier en assurances, il est également par principe fixé à la date de la réalisation du dommage ou à la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance.

En l’espèce, les dommages allégués résulteraient de manquements aux obligations pré-contractuelles d’information, de conseil et de mise en garde de la Société Générale et seraient en conséquence constitués par la seule perte de chance de n’avoir pas conclu le contrat du 12 décembre 2000, date qui est de ce fait celle de la réalisation du dommage.

L’action engagée le 13 décembre 2011 à l’encontre du banquier agissant en qualité de courtier en assurances sera donc également déclarée irrecevable comme prescrite.

L’exécution provisoire sera prononcée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il convient de mettre à la charge de la société Sogecap qui succombe à l’égard des demandeurs une somme au titre des frais de procédure engagés et non compris dans les dépens. Cette somme sera fixée à 3.500 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et publiquement par mise à disposition au greffe :

— Déclare irrecevable comme prescrite l’action en nullité du contrat de prêt formée par M. X et la SCI Décembre Gestion contre la Société Générale,

— Déclare irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité formée par M. X et la SCI Décembre Gestion contre la Société Générale,

— Déboute M. X et la SCI Décembre Gestion de leur action en résolution et en caducité du prêt,

— Dit que M. X a valablement renoncé à son contrat d’assurance vie le 18 juillet 2011,

— Condamne la société Sogecap à restituer à M. X la somme de 22.610,90 euros qui portera intérêt au taux légal majoré de moitié du 18 août 2011 au 18 octobre 2011, puis à compter du 19 octobre 2011 au double du taux légal,

— Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

— Condamne la société Sogecap à payer à M. X et la SCI Décembre Gestion une somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la société Sogecap aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 16 Décembre 2013

Le Greffier Le Président

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Tribunal de grande instance de Paris, 9e chambre 1re section, 16 décembre 2013, n° 11/17954