Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 2e section, 7 octobre 2016, n° 14/14163

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 4e ch. 2e sect., 7 oct. 2016, n° 14/14163
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/14163

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

4e chambre 2e section

N° RG :

14/14163

N° MINUTE :

Assignation du :

23 Septembre 2014

JUGEMENT

rendu le 07 Octobre 2016

DEMANDERESSE

Madame Y Z

[…]

[…]

[…]

représentée par Maître Mariam PAPAZIAN de la SCP HOURBLIN PAPAZIAN, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #J0017 et la SCP CADORET-TOUSSAINT & DENIS avocat plaidant de l’inter-barreau de NANTES&SAINT-NAZAIRE

DÉFENDERESSE

MUTUELLE NATIONALE DE RETRAITE DES ARTISANS

[…]

[…]

représentée par Me Richard FORGET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C1834

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame STANKOFF, Vice-Président

Madame X, Juge

Madame ABBASSI-BARTEAU, Vice-président

assistées de Moinécha ALI, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 02 Septembre 2016 tenue en audience publique devant Madame ABBASSI-BARTEAU, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition par le greffe,

Contradictoire

En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

A l’âge de 41 ans, Madame Y Z a adhéré à l’Assurance Retraite Individuelle des Artisans (ARIA) auprès de la Mutuelle Nationale de Retraite des Artisans (MNRA) en y souscrivant deux contrats l’un le 27 décembre 1989 dénommé “Aria-Vie” et l’autre “Aria- Pep” le 1er janvier 1990.

Madame Y Z a sollicité le rachat total des contrats.

Par une lettre du 4 juin 2013, la MNRA lui a opposé une réponse négative, dans la mesure où le délai fixé par le règlement était “largement dépassé”.

Madame Y Z a encore réitéré par écrit, sa demande de rachat des deux contrats le 24 juillet 2013. Le 9 août 2013, elle a sollicité le rachat du contrat Aria-Vie. La MNRA lui a répondu par la négative le 13 août 2013.

Madame Y Z a renoncé à la proposition qui lui était faite de lui servir une rente à vie et a insisté sur le rachat total des deux contrats.

Après avoir reçu une ultime lettre de refus du 3 février 2014, elle a assigné la MNRA devant le tribunal de grande instance de Paris par acte d’huissier de justice en date du 23 septembre 2014.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 15 octobre 2015, auxquelles il est expressément référé, Madame Y Z demande au tribunal de céans, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil :

— à titre principal, de dire et juger les dispositions de l’article 24 du règlement ARIA invoquées par la MNRA lui sont inopposables et de la condamner à lui verser l’intégralité des fonds épargnés depuis le 27 décembre 1989 jusqu’à la date du jugement à intervenir,

— à titre subsidiaire, de dire et juger que la MNRA a manqué à son obligation d’information, et en conséquence, de la condamner aux mêmes fins.

Elle sollicite en tout état de cause, la condamnation de la MNRA à lui verser les sommes de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Cadoret-Toussaint & Denis.

Au soutien de ses prétentions principales et subsidiaires, Madame Y Z prétend que les dispositions de l’article 24 du règlement Aria n’ont jamais été portées à sa connaissance et que par conséquent, elles lui sont inopposables. Elle maintient qu’elle n’a jamais eu connaissance de ce texte ni à la date de signature du contrat, ni postérieurement. Elle réplique en premier lieu que la MNRA développe dans ses écritures une argumentation nouvelle tirée de l’article 30 du règlement alors qu’elle a toujours admis dans ses courriers la possibilité du rachat. En second lieu, elle conteste l’imprécision des termes “capital aliéné” qui ne lui ont pas été expliqués. Elle fait valoir en dernier lieu que la MNRA ne justifie toujours pas d’une clause contractuelle fixant une limite d’âge pour le rachat. Madame Y Z invoque en outre le manquement de la MNRA à son obligation d’information, renforcée par la loi du 21 août 2003, qui implique de porter à la connaissance de l’assuré tous les éléments pouvant avoir une influence sur sa retraite.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 24 septembre 2015, auxquelles il est expressément référé, la MNRA demande au tribunal au visa de l’article 1134 du code civil, de débouter Madame Y Z de l’ensemble de ses prétentions et de la condamner au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l’instance.

Pour s’opposer aux demandes, la MNRA soutient que les contrats Aria-Vie et Aria-Pep ont pour objet de permettre à leur souscripteur la constitution d’une rente viagère qui vient en complément de celle servie par le Rsi et qu’il ne s’agit pas d’une épargne mais bien d’une capitalisation en vue du versement d’une rente. Elle fait valoir que l’article 30 du règlement Aria en vigueur en 1989 et en 1990 stipule que la pension de retraite est constituée à capital aliéné ce qui signifie qu’il n’existait aucune possibilité de rachat mais que lors de son assemblée générale du 26 juin 2009, il a été décidé introduire dans le règlement un article 24 encadrant le rachat des cotisations avant leur 64e anniversaire à compter du 1er janvier 2013. La MNRA conclut que Madame Y Z n’entre pas dans les conditions d’âge requise puisque lors de sa demande de rachat au mois de juin 2013, elle était âgée de 64 ans révolus.

Elle ajoute que Madame Y Z ne justifie pas de sa demande de rachat au mois de juin 2009 ni le 14 juin 2012 et que quand bien même elle aurait demandé le rachat, elle était trop âgée pour bénéficier du nouvel article 24. Elle conclut que la question de l’inopposabilité de l’article 24 est donc superfétatoire. La MNRA affirme qu’elle a bien été informée par la lettre du 4 juin 2013 qui a utilisé les termes de “rachat à titre dérogatoire” pour qualifier la demande faite auprès d’elle par Madame Y Z. Elle fait également valoir que les termes “capital aliéné” ne sont pas techniques, qu’ils relèvent du langage courant et signifient que l’adhérent perd ses droits sur le capital, qu’il le transfère.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT

Conformément à l’article 1134 alinéa 1 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Aux termes de l’article L 133-2 du code de la consommation : « Les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non professionnels doivent être rédigées de façon claire et compréhensible. Elles s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non professionnel. »

En l’espèce, la clause stipulée à l’article 30 du règlement Aria en vigueur au jour de la souscription des deux contrats, opposable à Madame Y Z, prévoit que la pension de retraite est constituée, “à capital aliéné”, pour l’ouverture entre 60 et 65 ans du droit à une pension et que la date d’entrée en jouissance et la nature de la pension à servir sont arrêtées par le bénéficiaire, le jour où il décide de faire valoir ses droits.

Dans ses écritures, la MNRA déduit des stipulations de cette clause, en particulier des termes relatifs à l’aliénation du capital, que le droit au rachat était impossible lors de l’adhésion par Madame Y Z, alors que d’une part, la clause contractuelle susvisée n’exclut pas formellement le rachat des cotisations versées au contrat et que, d’autre part, la MNRA a toujours admis la faculté de rachat dans ses correspondances, tout en spécifiant qu’il était soumis à une limite d’âge, y compris lors de la souscription des contrats.

Ainsi, dans sa lettre du 4 juin 2013, la MNRA s’adressait en ces termes à Madame Y Z : “(…) au moment de la souscription de vos contrats, cet âge limite lié au rachat, était de 60 ans. Un élargissement de cette disposition a donc déjà été opéré au bénéfice de nos adhérents (…)”, ce qui fait référence au nouvel article 24 introduit dans le règlement Aria en juin 2009.

Le fait qu’il s’agisse d’un élargissement démontre que les adhérents disposaient de la possibilité de procéder au rachat des cotisations et la MNRA ne justifie pas que cette faculté de rachat aurait été admise postérieurement à la souscription des contrats par Madame Y Z.

Du reste, la pièce relative à l’approbation des modifications du règlement Aria-vie concernant l’article 24, qu’elle produit, indique dans la colonne “rédaction actuelle” que : “Les adhérents peuvent demander avant leur soixantième anniversaire le rachat de leurs cotisations” et non que le nouveau texte introduit cette possibilité qui n’existait pas auparavant, comme elle le soutient dans ses conclusions.

Dans ses lettres des 4 juin, 1er août et 13 août 2013, la MNRA a continué d’admettre la possibilité de rachat des cotisations par l’adhérent sous réserve de la limite d’âge stipulée à l’article 24 du règlement.

La clause de l’article 30 du règlement Aria n’est pas claire et les termes de “capital aliéné”, s’ils relèvent du langage courant, ne peuvent être interprétés dans le sens qu’ils excluraient tout droit au rachat comme soutenu par la MNRA.

Par surcroît, aucune définition contractuelle du “capital aliéné” n’est insérée aux conditions générales.

La MNRA n’est donc pas fondée à opposer à Madame Y Z l’absence de faculté de rachat alors qu’aucune clause du règlement ne l’exclut formellement et que les dispositions du nouvel article 24 introduit dans le règlement à la suite de l’assemblée générale du 26 juin 2009, ne lui sont pas opposables pour n’avoir pas été portées à sa connaissance.

Il doit donc être admis qu’aucune clause d’exclusion de la faculté de rachat n’est stipulée au contrat d’assurance en sorte qu’il sera fait droit à la demande principale de Madame Y Z, sans qu’il y ait lieu d’examiner une éventuelle limite d’âge qui n’était pas non mentionnée.

Il n’est pas établi ni même démontré que la MNRA ait résisté à la demande par mauvaise foi ou dans l’intention de nuire à Madame Y Z qui sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Partie perdante, la MNRA sera tenue aux dépens et condamnée à verser à Madame Y Z la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et susceptible d’appel,

Condamne la Mutuelle Nationale de Retraite des Artisans (MNRA) à verser à Madame Y Z l’intégralité des fonds épargnés depuis le 27 décembre 1989 jusqu’à la date du présent jugement.

Condamne la Mutuelle Nationale de Retraite des Artisans (MNRA) aux dépens de l’instance et à payer à Madame Y Z la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Accorde à la SCP Cadoret-Toussaint & Denis avocats au barreau de Paris, le droit de recouvrer les dépens conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Déboute Madame Y Z de sa demande de dommages-intérêts.

Fait et jugé à Paris le 07 Octobre 2016

Le Greffier Le Président

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