Décision du 8 novembre 2018 à l'égard de la société Keren Finance SAS et de MM. A et B

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
AMF, 8 nov. 2018, n° SAN-2018-14
Numéro : SAN-2018-14
Identifiant AMF : SAN-2018-14

Sur les parties

Texte intégral

La Commission des sanctions

COMMISSION DES SANCTIONS Décision n° 12 du 08 novembre 2018

Procédure n° 17/13

Décision n° 12

Personnes mises en cause :

− M. Laurent Haegel Né […] Domicilié […]

− M. Xavier Lagae Né […] Ayant élu domicile au siège de la société Keren Finance, 178, boulevard Haussmann – 75008 Paris

− Keren Finance SAS Numéro de RCS 434 159 018 (Paris) Dont le siège social est 178, boulevard Haussmann – 75008 Paris Prise en la personne de son représentant légal Ayant élu domicile au cabinet de Mes Martine Samuelian et Jennifer Foubet, Jeantet AARPI, sis 87, avenue Kléber – 75016 Paris

La 2ème section de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après, « AMF ») :

Vu le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché, notamment ses article 12 et 15 et son annexe I section A ;

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 621-15 et R. 621-38 à R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 631-1 et 631-2 ;

Après avoir entendu au cours de la séance du 19 octobre 2018 :

— Mme Patricia Lazard-Kodyra, en son rapport ;

- M. Benjamin Mauduit, représentant le collège de l’AMF ;

- M. Clément Seitz, représentant la directrice générale du Trésor ;

- M. Laurent Haegel, non présent, représenté par Me François Klein, du cabinet KGA Avocats ;

- M. Xavier Lagae ;

- Keren Finance, représentée par M. Raphaël Elmaleh et assistée par ses conseils,

Mes Martine Samuelian et Viviane Tse du cabinet Jeantet AARPI.

Les mis en cause et leurs représentants ayant eu la parole en dernier.

17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20 www.amf-france.org

—  2 – FAITS ET PROCÉDURE

Compagnie du Cambodge est une société holding organisée autour de deux activités principales : l’exploitation de la ligne de chemin de fer entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire et la gestion de participations.

Au 31 décembre 2015, le groupe Bolloré détenait, directement et indirectement, 98,87 % du capital de la société.

L’action Compagnie du Cambodge est admise aux négociations sur le compartiment A d’Euronext Paris, où elle fait l’objet d’un double fixing quotidien, l’un à 11h30 (1er fixing), l’autre à 16h30 (2nd fixing).

En vertu des Règles de marché Euronext, chaque fixing commence par une période d’accumulation durant laquelle les ordres sont enregistrés sans exécution. Durant cette période, un cours théorique indicatif, lequel représente le prix auquel l’algorithme du système parviendrait compte tenu de la situation du moment du carnet, est diffusé en continu par Euronext. À la fin de la période d’accumulation, Euronext détermine un prix maximisant le volume exécuté. Ce prix devient alors le cours de la valeur et tous les titres compris dans le cumul sont immédiatement échangés à ce prix. Durant cette phase, il n’est pas possible d’entrer de nouveaux ordres ni de modifier ou d’annuler des ordres existants. Durant une période de 30 minutes suivant le fixing (dite de « trading at last »), il est possible de produire des ordres pour exécution au cours résultant de la confrontation générale.

Au cours de l’année 2015, la direction de la surveillance des marchés de l’AMF a observé plusieurs journées atypiques en termes de volumes échangés.

Le 8 avril 2016, le secrétaire général de l’AMF a décidé l’ouverture d’une enquête sur le marché du titre Compagnie du Cambodge, à compter du 1er janvier 2014.

Les enquêteurs de l’AMF ont relevé, au cours des séances des 29 janvier, 10 et 14 avril, 2 septembre, et 9 et 10 novembre 2015, des interventions répétées sur ce marché de M. Laurent Haegel et de la société de gestion Keren Finance, agissant pour le compte de la SICAV ACTIF.

M. Haegel est retraité. Keren Finance est une société de gestion de portefeuille agréée par l’AMF depuis le 19 janvier 2001 et présidée par M. Raphaël Elmaleh. À l’époque des faits, Keren Finance était chargée de la gestion de la SICAV ACTIF (FR0012336725), un fonds d’investissement alternatif dédié à la gestion de la fortune de M. Haegel et de sa famille. La gestion de la SICAV était assurée par M. Xavier Lagae, gérant privé, et par M. Elmaleh en son absence.

Le 25 novembre 2016, la direction des enquêtes et des contrôles de l’AMF a adressé à la société Keren Finance ainsi qu’à MM. Elmaleh, Haegel et Lagae des lettres les informant de manière circonstanciée des faits éventuellement susceptibles de leur être reprochés au regard des constats des enquêteurs, et de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations dans le délai d’un mois.

Des observations en réponse ont été respectivement présentées par la société Keren Finance et M. Elmaleh le 28 décembre 2016, M. Lagae le 29 décembre 2016 et M. Haegel le 16 janvier 2017.

L’enquête a donné lieu à un rapport daté du 11 avril 2017.

La commission spécialisée n° 2 du collège de l’AMF a décidé, le 27 avril 2017, de notifier des griefs à la société Keren Finance, ainsi qu’à MM. Haegel et Lagae.

Les notifications de griefs leur ont été adressées par lettres du 20 juillet 2017.

Il est reproché à la société Keren Finance ainsi qu’à M. Haegel d’avoir, au cours des séances des 10 et 14 avril, 2 septembre, et 9 et 10 novembre 2015, introduit des ordres massifs en « face à face » de manière concertée, ayant pour seul objet de transférer des titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de M. Haegel à celui de la SICAV ACTIF, et vice versa, sans en changer le bénéficiaire économique et, ainsi, de s’être livrés à des manipulations de cours au sens des dispositions

—  3 – des 1° a), 1° b) et 2° de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

Il est reproché les mêmes manquements à M. Lagae en ce qui concerne les séances des 2 septembre et 9 et 10 novembre 2015.

Il est également reproché à M. Haegel d’avoir réalisé, au cours des séances des 10 avril, 2 septembre, et 9 et 10 novembre 2015, des interventions agressives à l’achat et à la vente, permettant d’amplifier l’écart entre le prix auquel les titres Compagnie du Cambodge ont été transférés dans son portefeuille et celui auquel ces titres ont été rapatriés dans le portefeuille de la SICAV ACTIF et, ainsi, de s’être livré à une manipulation de cours au sens des dispositions du 1° b) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

Le 20 juillet 2017, le président de l’AMF a transmis une copie de la notification de griefs à la présidente de la commission des sanctions, conformément à l’article R. 621-38 du code monétaire et financier.

Par décision du 11 août 2017, la présidente de la commission des sanctions a désigné

Mme Patricia Lazard-Kodyra en qualité de rapporteur.

Par lettres datées du 22 août 2017, les mis en cause ont été informés qu’ils disposaient d’un délai d’un mois, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Des observations en réponse aux notifications de griefs ont été déposées par les mis en cause le 17 octobre 2017.

Le rapporteur a entendu M. Lagae le 28 mai 2018 puis la société Keren Finance le 29 mai 2018.

Par lettre du 24 avril 2018, le rapporteur a convoqué M. Haegel à une audition. Le 30 mai 2018, le conseil de M. Haegel a informé le rapporteur que son client ne pourrait s’y rendre. Le 3 juillet 2018, le rapporteur a demandé au conseil de M. Haegel si celui-ci jugeait utile d’être entendu et lui a proposé des dates auxquelles une audition pourrait se tenir. Par lettre du 17 juillet 2018, le conseil de M. Haegel a indiqué au rapporteur que son client ne serait pas en mesure de se rendre à une audition au cours des prochains mois.

Le 10 septembre 2018, le rapporteur a déposé son rapport.

Par lettres du 11 septembre 2018, auxquelles était joint le rapport du rapporteur, les mis en cause ont été convoqués à la séance de la commission des sanctions du 19 octobre 2018 et informés qu’ils disposaient d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse au rapport du rapporteur, conformément au III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par lettres du 14 septembre 2018, les mis en cause ont été informés de la composition de la formation de la commission des sanctions appelée à délibérer lors de la séance du 19 octobre 2018 ainsi que du délai de quinze jours dont ils disposaient, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Des observations en réponse au rapport du rapporteur ont été déposées le 26 septembre 2018 par Keren Finance et le 2 octobre 2018 par M. Haegel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. Sur les moyens tirés de l’obtention de preuves par des procédés illégaux

Les mis en cause font valoir que les factures détaillées obtenues par les enquêteurs et invoquées par les notifications de griefs doivent être écartées des débats dès lors que les dispositions de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier, sur le fondement desquelles ces factures détaillées ont été obtenues, ont été déclarées contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2017-646/647 QPC du 21 juillet 2017.

—  4 -

L’article L. 621-10 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 28 juillet 2013, dispose, en son 1er alinéa, que « les enquêteurs peuvent également se faire communiquer les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunications dans le cadre de l’article

L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique et en obtenir la copie ».

Dans sa décision n° 2017-646/647 QPC du 21 juillet 2017, le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier précitées non conformes à la Constitution, en reportant cependant au 31 décembre 2018 la prise d’effet de cette déclaration.

Il en résulte que les dispositions contestées demeurent en vigueur jusqu’à cette date, de sorte que le moyen sera écarté.

Keren Finance et M. Haegel font encore valoir que les factures détaillées obtenues par les enquêteurs et invoquées par les notifications de griefs doivent être écartées des débats dès lors qu’elles ont été obtenues en violation de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après, « CSDH »).

L’article 8 de la CSDH stipule :

« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

Les données de connexion entrent dans le champ des notions de « vie privée » et de « correspondance » visées à l’article 8 § 1 de la CSDH.

Il résulte des pièces du dossier que les enquêteurs de l’AMF se sont fait communiquer par les opérateurs de télécommunications les factures détaillées de deux numéros de téléphone appartenant à M. Haegel et d’un numéro de téléphone appartenant à M. Lagae. Il y a donc eu « ingérence d’une autorité publique », au sens de l’article 8 § 2 de la CSDH, dans l’exercice d’un droit garanti aux mis en cause par le paragraphe 1 de cette disposition.

Les dispositions de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier précitées, en vigueur au moment des faits, permettaient aux enquêteurs de se faire communiquer les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunications. Dès lors, cette ingérence était « prévue par la loi » au sens de l’article 8 § 2 de la CSDH.

Les informations litigieuses ont été obtenues et utilisées dans le cadre d’une enquête, puis d’une procédure de sanction dans laquelle il est fait grief aux mis en cause d’avoir méconnu l’interdiction de procéder à des manipulations de cours. Les pouvoirs conférés par ces dispositions à l’AMF répondent en conséquence aux buts légitimes de protection du bien-être économique du pays et de la défense de l’ordre et ni Keren, ni M. Haegel, ne démontrent, ni même n’allèguent, que ces pouvoirs conduisent à une ingérence qui ne serait pas nécessaire à la poursuite de ces objectifs ou qui serait disproportionnée.

Ainsi, le moyen tiré de ce que les dispositions autorisant les enquêteurs à se faire communiquer les factures détaillées méconnaîtraient les stipulations de l’article 8 de la CSDH sera écarté.

II. Sur les griefs de manipulation de cours notifiés à l’ensemble des mis en cause

Les notifications de griefs décrivent ainsi le mode opératoire des mis en cause : au cours de trois séquences distinctes, M. Haegel est intervenu de manière concertée avec Keren Finance, agissant pour le compte de la SICAV ACTIF (l’un à l’achat, l’autre à la vente, puis l’inverse) afin d’échanger des titres

—  5 – Compagnie du Cambodge entre le portefeuille de M. Haegel et celui de la SICAV ACTIF, sur la base d’un cours fixé successivement à un prix proche de la meilleure limite à la vente puis à un prix proche de la meilleure limite à l’achat.

Ces échanges de titres, portant sur une quantité de 100 titres (1ère séquence des 10 et 14 avril 2015), de 50 titres (2ème séquence du 2 septembre 2015) et de 93 titres (3ème séquence des 9 et 10 novembre 2015), n’entrainaient aucun changement de bénéficiaire économique des actions Compagnie du Cambodge dans la mesure où M. Haegel était le principal bénéficiaire économique de la SICAV ACTIF, et avaient ainsi pour objet, non pas de modifier la répartition des titres entre les portefeuilles, mais de transférer une quantité déterminée de titres d’un portefeuille à l’autre dès lors que les ordres, qui portaient sur des quantités similaires, étaient passés de manière concomitante par M. Haegel et Keren Finance à des conditions de prix identiques.

Ces échanges conduisaient de plus à une très nette augmentation des volumes de titres échangés puisqu’en moyenne, seules 15 actions s’échangeaient quotidiennement sur le marché du titre.

Les notifications de griefs soulignent que l’écart de cours constaté entre le prix par action auquel s’était réalisée l’opération de transfert de titres du portefeuille de M. Haegel vers celui de la SICAV ACTIF et le prix par action auquel s’était réalisée l’opération inverse, permettait, à l’issue de chaque séquence, de matérialiser une plus-value pour la SICAV ACTIF et une moins-value du même montant pour M. Haegel. Elles relèvent également que les ordres passés lors des séances des 2 septembre et 9 et 10 novembre 2015 étaient précédés ou suivis de contacts téléphoniques entre M. Haegel et M. Lagae, qui démontrent que ces derniers agissaient de manière concertée.

Ainsi, selon les notifications de griefs, les interventions des mis en cause sur le titre Compagnie du Cambodge lors des séances des 10 et 14 avril, 2 septembre, et 9 et 10 novembre 2015 sont constitutives de manipulations de cours au sens des articles 631-1 et 631-2 du règlement général de l’AMF. M. Lagae n’ayant pas été à l’origine des ordres passés par Keren Finance lors des séances des 10 et 14 avril 2015, ces derniers ne lui sont pas reprochés.

II.1. Les textes applicables

Les notifications de griefs se réfèrent à trois cas de manipulation de cours qui figurent aux 1° a), 1° b) et 2° de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF et à l’article 631-2 du même règlement qui décrit les indicateurs de manipulation.

Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre le 10 avril et le 10 novembre 2015, seront examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuelles dispositions moins sévères entrées en vigueur postérieurement.

Sur la définition des manipulations de cours

L’article 631-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur du 15 juin 2014 au 23 septembre 2016, dispose :

« Toute personne doit s’abstenir de procéder […] à des manipulations de cours. Constitue une manipulation de cours : 1° Le fait d’effectuer des opérations ou d’émettre des ordres : a) Qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours d’instruments financiers […] ; b) Qui fixent, par l’action d’une ou de plusieurs personnes agissant de manière concertée, le cours d’un ou plusieurs instruments financiers […] à un niveau anormal ou artificiel, à moins que la personne ayant effectué les opérations ou émis les ordres établisse la légitimité des raisons de ces opérations ou de ces ordres et leur conformité aux pratiques de marché admises sur le marché réglementé concerné […] ;

—  6 – 2° Le fait d’effectuer des opérations ou d’émettre des ordres qui recourent à des procédés donnant une image fictive de l’état du marché ou à toute autre forme de tromperie ou d’artifice […] ».

À ces dispositions, abrogées le 24 septembre 2016, se sont substituées celles de l’article 12 du règlement n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (ci-après, « règlement MAR »), entré en application le 3 juillet 2016 et qui dispose :

« 1. Aux fins du présent règlement, la notion de « manipulation de marché » couvre les activités suivantes : a) effectuer une transaction, passer un ordre ou adopter tout autre comportement qui : i) donne ou est susceptible de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier […] ; ou ii) fixe ou est susceptible de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers […] ; à moins que la personne effectuant une transaction, passant un ordre ou adoptant tout autre comportement établisse qu’une telle transaction, un tel ordre ou un tel comportement a été réalisé pour des raisons légitimes et est conforme aux pratiques de marché admises telles qu’établies conformément à l’article 13 ; b) effectuer une transaction, passer un ordre ou effectuer toute autre activité ou adopter tout autre comportement influençant ou étant susceptible d’influencer le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers […] en ayant recours à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d’artifice ; […] »

L’article 15 du règlement MAR dispose :

« Une personne ne doit pas effectuer des manipulations de marché […] ».

Les définitions précitées énoncées au 1° de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF et au 1. a) de l’article 12 du règlement MAR sont équivalentes.

En revanche, les dispositions de l’article 12 1. b) du règlement MAR, qui exigent un élément constitutif supplémentaire tenant à l’influence avérée ou potentielle de l’utilisation du procédé sur le cours de l’instrument financier, sont moins sévères que celles du 2° de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF, de sorte qu’il y a lieu, sur ce point, d’en faire une application rétroactive.

Sur les indicateurs de manipulation de cours

L’article 631-2 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur du 15 juin 2014 au 23 septembre 2016, énonce :

« Sans que ces éléments puissent être considérés comme formant une liste exhaustive ni comme constituant en eux-mêmes une manipulation de cours, l’AMF prend en compte, pour apprécier les pratiques mentionnées au 1° de l’article 631-1 : 1° L’importance de la part du volume quotidien des transactions représentée par les ordres émis ou les opérations effectuées sur les instruments financiers […] concernés, en particulier lorsque ces interventions entraînent une variation sensible du cours de ces instruments […] ; 7° Les variations de cours résultant des ordres émis ou des opérations effectuées au moment précis ou à un moment proche de celui où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations. »

Ces dispositions, abrogées par l’arrêté du 14 septembre 2016 précité, ont été remplacées le 3 juillet 2016 par celles de la section A de l’annexe 1 du règlement MAR qui définit ainsi les « indicateurs de manipulations de cours consistant à donner des indications fausses ou trompeuses ou à fixer les cours à un niveau anormal ou artificiel » :

—  7 -

« Aux fins de l’application de l’article 12, paragraphe 1, point a), du présent règlement, et sans préjudice des formes de manipulations décrites au paragraphe 2 dudit article, les participants au marché et les autorités compétentes prennent en considération, lors de l’examen de transactions ou d’ordres, les indicateurs suivants, dont la liste n’est pas exhaustive et qui ne doivent pas pour autant être considérés en soi comme constituant une manipulation de marché : a) la mesure dans laquelle les ordres passés ou les transactions effectuées représentent une proportion importante du volume quotidien de transactions réalisé sur l’instrument financier concerné […], en particulier lorsque ces activités entraînent une variation sensible de leur cours ; g) la mesure dans laquelle les ordres sont passés ou les transactions effectuées au moment précis où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations, ou aux alentours de ce moment, et entraînent des variations de cours qui ont un effet sur ces cours et ces évaluations. »

Les dispositions précitées des a) et g) de la section A de l’annexe I du règlement MAR et des 1° et 7° de l’article 631-2 du règlement général de l’AMF sont équivalentes, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’en faire une application rétroactive.

Sur l’imputabilité des manquements de manipulation de cours

L’article 631-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur à compter du 15 juin 2014, non modifiée sur ce point jusqu’à son abrogation par l’arrêté du 14 septembre 2016, dispose que l’obligation d’abstention de procéder à une manipulation de cours s’applique à « toute personne ».

Le règlement MAR, dont les dispositions se sont substituées à celles du règlement général de l’AMF à compter du 3 juillet 2016, dispose, en son article 15, qu’ « une personne » ne doit pas effectuer des manipulations de marché ni tenter d’effectuer des manipulations de marché et, en son article 3.1, 13), que le terme « personne » s’entend de « toute personne physique ou morale ». Enfin, son considérant 40 précise : « Afin de garantir la responsabilité tant de la personne morale que de toute personne physique participant à la prise de décision de la personne morale, il est nécessaire de reconnaître les différents mécanismes juridiques nationaux des États membres. Ces mécanismes devraient concerner directement les méthodes d’imputation de la responsabilité dans le droit national. »

Il en résulte que le règlement MAR ne comporte pas de dispositions plus douces relatives à l’imputabilité qui seraient susceptibles de recevoir une application rétroactive.

Il convient à présent d’apprécier si le mode opératoire décrit par les notifications de griefs constitue une manipulation de cours au sens du 1° a) et b) et du 2° de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

II.2. Sur l’examen des griefs

Selon les notifications de griefs, en introduisant dans le carnet des ordres massifs d’achat puis de vente (ou l’inverse) au cours des trois séquences en cause, dans un marché peu liquide et alors que ces ordres, passés en « face à face » de manière concertée entre M. Haegel et Keren Finance, avaient pour seul objet de transférer les titres Compagnie du Cambodge d’un portefeuille à l’autre, sans en changer le bénéficiaire économique, les mis en cause auraient donné des indications fausses ou trompeuses sur l’offre et la demande des titres Compagnie du Cambodge, ce qui serait constitutif d’une manipulation de cours aux termes des dispositions du 1° a) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

M. Haegel fait valoir qu’il n’avait aucun intérêt à dégager des moins-values sur ses comptes-titres personnels, en l’absence de plus-values imposables sur ces derniers. Il conteste avoir été en position dominante sur le marché du titre Compagnie du Cambodge et relève que l’enquête, qui s’est concentrée sur un nombre réduit de séances, n’a pas pris en compte l’ensemble de ses opérations sur le titre. Il indique de plus s’être toujours intéressé aux valeurs du groupe Bolloré, en ce compris

Compagnie du Cambodge, dont la faible liquidité, selon le mis en cause, conduit nécessairement à des variations de cours dès que des ordres portant sur des volumes importants sont introduits dans le carnet. En outre, il conteste s’être concerté avec Keren Finance et relève l’absence de simultanéité entre leurs

—  8 – ordres respectifs et l’aléa existant au moment de la passation des ordres, des tiers pouvant toujours intervenir avant le fixing. Enfin, il soutient que les opérations reprochées n’ont eu aucun impact sur le marché du titre Compagnie du Cambodge, les variations de cours devant être analysées à la lumière du caractère peu liquide du titre, et n’ont pas causé de préjudice aux investisseurs.

Keren Finance fait valoir que ses ordres n’ont pas donné et n’étaient pas susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours du titre Compagnie du Cambodge, dès lors qu’ils répondaient à des offres préexistantes dans le carnet d’ordres et n’ont pas été annulés, que les opérations litigieuses ont entraîné un changement de bénéficiaire effectif puisque les parts de la SICAV ACTIF étaient détenues par des compagnies d’assurance et non par M. Haegel, et, enfin, qu’elle n’avait pas connaissance des opérations réalisées par ce dernier.

M. Lagae conteste s’être concerté avec M. Haegel avant la passation des ordres litigieux. Il indique être intervenu sur le titre Compagnie du Cambodge suite à la réception d’alertes Bloomberg et conformément aux orientations de gestion de la SICAV ACTIF, de sorte que ses interventions correspondaient à un intérêt acheteur et répondaient à une offre préexistante dans le carnet d’ordres. Il conteste également que ses ordres aient eu un impact sur le cours théorique indicatif du titre.

Le caractère concerté de la passation d’ordres peut être prouvé par tous moyens, notamment en examinant les relations entre les personnes mises en cause et les circonstances dans lesquelles les opérations reprochées ont été effectuées.

Les dépouillements versés au dossier permettent de relever les opérations suivantes.

Le 10 avril 2015, M. Haegel a introduit dans le carnet un ordre d’achat au marché de 50 titres à 16 heures 20 minutes 22 secondes puis un second ordre d’achat au marché de 50 titres à 16 heures 20 minutes 48 secondes. Keren Finance a introduit un ordre de vente au marché de 100 titres à 16 heures 20 minutes 53 secondes. Ces ordres, de sens opposé, portaient sur une quantité identique de titres (100 titres). La transaction, qui s’est effectuée à un prix de 8 498,99 euros par action, a conduit au transfert d’une quantité de 100 titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de la SICAV ACTIF vers celui de M. Haegel.

Le 14 avril 2015, les ordres enregistrés dans le carnet par les autres intervenants ont permis d’établir le cours lors du 1er fixing à 7 590 euros. Au cours de la période de 30 minutes suivant ce fixing (période dite de « trading at last »), Keren Finance a introduit un ordre d’achat de 104 titres à 11 heures 32 minutes 54 secondes et M. Haegel a introduit deux ordres de vente de 50 titres chacun à 11 heures 56 minutes 57 secondes et 11 heures 57 minutes 21 secondes, respectivement. L’effet de ces ordres a été de transférer 100 titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de M. Haegel vers celui de la SICAV ACTIF, à un prix de 7 590 euros par action.

L’opération de transfert de titres effectuée lors du 2nd fixing du 10 avril 2015 puis l’opération inverse, effectuée lors du 1er fixing du 14 avril 2015 sur la base d’un prix par action inférieur de 908,99 euros à celui constaté le 10 avril, a permis à la SICAV ACTIF de réaliser une plus-value de 90 899 euros et à M. Haegel de réaliser une moins-value du même montant.

Le 2 septembre 2015, M. Haegel et Keren Finance ont passé, à 11 heures 27 minutes 19 secondes et à 11 heures 28 minutes 5 secondes, respectivement, des ordres au marché de sens opposé pour une quantité identique de titres (50 titres). Ces ordres ont conduit au transfert de 50 titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de la SICAV ACTIF vers celui de M. Haegel, à un prix de 8 899,90 euros par action.

Le même jour, avant le 2nd fixing, Keren Finance et M. Haegel ont passé, à 16 heures 25 minutes 52 secondes et à 16 heures 26 minutes 4 secondes, respectivement, des ordres au marché de sens opposé pour une quantité identique de titres (50 titres). Ces ordres ont conduit au transfert de 50 titres du portefeuille de M. Haegel vers celui de la SICAV ACTIF, à un prix de 8 009,99 euros par action.

L’opération de transfert de 50 titres effectuée lors du 1er fixing du 2 septembre 2015 puis l’opération inverse, effectuée lors du 2nd fixing le même jour sur la base d’un prix par action inférieur de 889,91 euros à celui du 1er fixing, a permis à la SICAV ACTIF de réaliser une plus-value de 44 500 euros et à M. Haegel

—  9 – de réaliser une moins-value du même montant.

Le 9 novembre 2015, M. Haegel a passé un ordre d’achat au marché de 47 titres à 11 heures 28 minutes 55 secondes puis un second ordre d’achat au marché de 46 titres à 11 heures 29 minutes 13 secondes. Keren Finance a passé, à 11 heures 29 minutes 59 secondes, un ordre de vente au marché de 92 titres. Ces ordres ont conduit au transfert de 92 titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de la SICAV ACTIF vers celui de M. Haegel, à un prix de 8 250 euros par action.

Le 10 novembre 2015, M. Haegel a passé un ordre de vente au marché de 47 titres à 11 heures 28 minutes 56 secondes puis un second ordre de vente au marché de 46 titres à 11 heures 29 minutes 7 secondes. Le même jour, Keren Finance a introduit, à 11 heures 29 minutes, un ordre d’achat au marché de 93 titres. Ces ordres ont conduit au transfert de 93 titres Compagnie du Cambodge du portefeuille de M. Haegel vers celui de la SICAV ACTIF, à un prix de 7 010 euros par action.

L’opération de transfert de 92 titres effectuée le 9 novembre 2015 puis l’opération inverse portant sur 93 titres, effectuée le 10 novembre 2015 sur la base d’un prix par action inférieur de 1 240 euros à celui constaté le 9 novembre 2015, a permis à la SICAV ACTIF de réaliser une plus-value de 114 570 euros et à M. Haegel de réaliser une moins-value du même montant.

Il résulte de ces éléments qu’au cours des trois séquences étudiées, les ordres de sens opposé ont été passés de manière concomitante par M. Haegel et les gérants de Keren Finance, pour des quantités similaires ou identiques de titres Compagnie du Cambodge et à des conditions de prix identiques, ce qui constitue un indice de concertation.

Le rapport d’enquête, auquel les notifications de griefs renvoient, relève que sur l’année 2015, le volume moyen par séance sur Euronext était de 15 titres Compagnie du Cambodge échangés. Les interventions de M. Haegel et de Keren Finance ont conduit à une augmentation sensible des volumes de titres échangés le 10 avril 2015 (100 titres échangés au 2nd fixing), le 14 avril 2015 (100 échangés au 1er fixing), le 2 septembre 2015 (50 titres échangés au 1er fixing et 50 titres au 2nd fixing), le 9 novembre 2015 (92 titres échangés au 1er fixing) et le 10 novembre 2015 (93 titres échangés au 1er fixing), puisqu’elles représentaient, pour chaque séance, plus de six fois le volume moyen quotidien. Le rapport d’enquête relève par ailleurs que sur la journée du 10 avril 2015, M. Haegel a réalisé l’intégralité du volume acheteur et Keren Finance a réalisé 99 % du volume vendeur, que sur la journée du 14 avril 2015, M. Haegel a réalisé 99 % du volume vendeur et Keren Finance a réalisé 99 % du volume acheteur et le solde du volume vendeur, qu’au 1er fixing de la séance du 2 septembre 2015, M. Haegel a réalisé l’intégralité du volume acheteur et Keren Finance a réalisé 98 % du volume vendeur et qu’au 2nd fixing de cette séance, M. Haegel a réalisé l’intégralité du volume vendeur et Keren Finance a réalisé 98 % du volume acheteur. Ainsi, au regard de l’importance de la part du volume quotidien des transactions représentées par les ordres litigieux, l’indicateur mentionné au 1° de l’article 631-2 du règlement général de l’AMF est vérifié.

Le caractère massif des ordres litigieux constitue un indice supplémentaire de concertation entre les mis en cause.

De plus, au cours de chaque séquence étudiée, les titres Compagnie du Cambodge, après avoir été transférés du portefeuille de la SICAV ACTIF vers celui de M. Haegel, ont été rapatriés au sein du portefeuille initial. L’écart de cours constaté entre le prix par action auquel s’est réalisée l’opération de transfert de titres vers le portefeuille de M. Haegel et le prix par action auquel s’est réalisée l’opération inverse permettait de matérialiser une plus-value pour la SICAV ACTIF et une moins-value pour le compte personnel de M. Haegel.

Or, il résulte de la liste des porteurs de parts de la SICAV ACTIF que 24 860 parts sur un total de 32 957 (soit 75 %) étaient détenues par des compagnies d’assurance pour le compte de M. Haegel, et que M. Haegel, son épouse et ses enfants étaient ensemble les bénéficiaires effectifs de 32 765 de ces parts (soit 99 %), le solde étant détenu par l’un de ses amis.

Ainsi, M. Haegel étant le principal bénéficiaire effectif des parts de la SICAV ACTIF, les échanges de titres permettaient simultanément de générer des moins-values pour M. Haegel à titre personnel, tout en conservant la plus-value correspondante logée économiquement au sein de la SICAV ACTIF, et n’ont pas

—  10 – eu pour effet de modifier la répartition des titres entre le portefeuille de la SICAV ACTIF et celui de M. Haegel, ce qui constitue également un indice de concertation.

En ce qui concerne, enfin, l’argument des mis en cause consistant à soutenir qu’ils ignoraient que leurs ordres étaient passés en « face à face » et que Keren Finance s’était bornée à répondre à une offre préexistante dans le carnet, correspondant aux ordres de M. Haegel, dont elle avait été informée au moyen d’alertes paramétrées dans le logiciel Bloomberg, comme l’a relevé le représentant du collège de l’AMF lors de la séance du 19 octobre 2018, sans être utilement contredit par les mis en cause, il résulte des fichiers d’horodatage correspondant aux enregistrements des conversations téléphoniques ou aux échanges sur la messagerie Bloomberg entre Keren Finance et le courtier Tradition Securities and Futures, en charge de transmettre à Euronext les ordres passés par les gérants de la société de gestion, qu’à l’exception de l’ordre passé le 2 septembre 2015 à 11 heures 28 minutes 5 secondes, Keren Finance a appelé son courtier afin de solliciter la passation des ordres litigieux avant que les ordres de M. Haegel, de sens opposé, ne soient visibles dans le carnet.

En conséquence, contrairement à ce que soutiennent les mis en cause, Keren Finance n’a pas adapté ses ordres à une offre préexistante dans le carnet.

Il résulte ainsi de l’ensemble de ces éléments que M. Haegel agissait de manière concertée avec les gérants de Keren Finance.

L’analyse des séquences reprochées fait en conséquence apparaître que l’objectif ultime des mis en cause n’était pas d’acquérir ou de céder des titres, mais d’échanger en « face à face » des titres Compagnie du Cambodge entre le portefeuille de la SICAV ACTIF et celui de M. Haegel.

Les dispositions du 1° a) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF, qui incriminent la passation d’ordres non seulement quand ceux-ci donnent, mais aussi quand ils sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours d’instruments financiers, n’exigent la preuve ni de l’existence d’une position dominante sur le marché de ces instrument financiers, d’avantages ou de profits tirés du manquement, ou de pertes subies par des tiers du fait de celui-ci, ni d’un rapport de causalité entre les opérations reprochées et les variations du cours du titre. Les moyens tirés d’une absence de démonstration de ces éléments sont donc inopérants, dès lors qu’il suffit, pour vérifier si le manquement est caractérisé de rechercher si les opérations reprochées, dont la matérialité n’est pas contestée, étaient susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre et la demande de l’action Compagnie du Cambodge.

Les ordres litigieux représentaient une part importante du volume quotidien des transactions et, même s’ils n’ont eu qu’une influence limitée sur le cours du titre, animaient fictivement le marché du titre Compagnie du Cambodge, très peu liquide, et étaient susceptibles de générer, auprès des investisseurs, un intérêt renforcé pour ce titre.

De surcroît, ces ordres étaient de nature à induire les investisseurs en erreur quant au nombre d’intervenants sur le marché.

Partant, les ordres émis par M. Haegel et les gérants de Keren Finance étaient susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre et la demande du titre Compagnie du Cambodge.

Les ordres reprochés à Keren Finance ont été passés au nom et pour le compte de la société de gestion par ses préposés, ce que Keren Finance ne conteste pas.

En conséquence, le manquement de manipulation de cours est imputable à Keren Finance.

Il s’ensuit que le manquement de manipulation de cours par indications fausses ou trompeuses défini par le 1° a) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF est caractérisé, à l’égard de M. Haegel et de Keren Finance, pour les trois séquences en cause, et à l’égard de M. Lagae, pour les deuxième et troisième séquences.

Les notifications de griefs reprochent également aux mis en cause d’avoir, d’une part, agi de manière

—  11 – concertée en échangeant des titres Compagnie du Cambodge en « face à face » pour des quantités de titres nettement supérieures au volume de titres échangés quotidiennement, ce qui serait constitutif d’une manipulation de cours aux termes des dispositions du 1° b) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF, d’autre part, recouru à une forme d’artifice qui visait à maximiser la moins-value réalisée à titre personnel par M. Haegel tout en lui permettant de conserver la plus-value correspondante, logée dans la SICAV ACTIF, ce qui serait constitutif d’une manipulation de cours aux termes des dispositions du 2° du même article.

Dès lors qu’a déjà été retenu que le manquement de manipulation de cours par indications fausses ou trompeuses, défini par le 1° a) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF, était caractérisé pour les trois séquences invoquées par la poursuite, il n’y a pas lieu d’examiner si les ordres litigieux caractérisent en outre une manipulation de cours au titre des dispositions des 1° b) et 2° de cet article.

III. Sur le grief de manipulation de cours notifié à M. Haegel

Il est reproché à M. Haegel d’avoir réalisé, avant le 1er fixing du 10 avril 2015, les 1er et 2nd fixing du 2 septembre 2015, le 1er fixing du 9 novembre 2015 et le 1er fixing du 10 novembre 2015, des interventions agressives à l’achat, puis à la vente, qui permettaient d’amplifier l’écart entre le prix auquel les titres Compagnie du Cambodge ont été transférés dans son portefeuille et celui auquel ces titres ont été rapatriés dans le portefeuille de la SICAV ACTIF, et qui ont conduit à fixer le cours du titre à un niveau artificiel, ce qui serait constitutif d’une manipulation de cours aux termes des dispositions du 1° b) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

M. Haegel fait valoir qu’il poursuivait l’objectif d’acquérir des titres Compagnie du Cambodge, et non de fixer le cours de ce titre à un niveau artificiel.

Il résulte des dépouillements versés au dossier que, le 10 avril 2015, à 11 heures 29 minutes 36 secondes, soit 24 secondes avant le 1er fixing, M. Haegel a passé un ordre d’achat au marché, qui a permis de fixer le cours du 1er fixing de 11h30 à la meilleure limite à la vente, soit 8 500 euros. Avant cette intervention, la meilleure limite à l’achat présente dans le carnet s’établissait à 6 605 euros, et la meilleure limite à la vente s’établissait à 8 500 euros, de sorte que l’offre et la demande de titres

Compagnie du Cambodge ne permettaient aucune transaction. Sans l’intervention de M. Haegel, le cours du 1er fixing se serait établi au cours de référence du 2nd fixing du 9 avril 2015, soit 8 270 euros.

Le 2 septembre 2015, à 11 heures 29 minutes 40 secondes, soit 20 secondes avant le 1er fixing, M. Haegel a passé un ordre d’achat à un cours limité à 8 899,90 euros portant sur deux titres, qui a permis de fixer le cours du 1er fixing de 11h30 à 8 899,90 euros. Avant cette intervention, le cours théorique indicatif s’établissait à 8 499,90 euros. La meilleure limite à l’achat présente dans le carnet s’établissait à 7 740 euros, et la meilleure limite à la vente s’établissait à 8 500 euros, de sorte que l’offre et la demande de titres Compagnie du Cambodge ne permettaient aucune transaction à l’exception des ordres de sens opposé préalablement introduits par M. Haegel et Keren Finance, pour une quantité identique de titres et à des conditions identiques de prix.

Le même jour, après le 1er fixing, entre 16 heures 28 minutes 06 secondes et 16 heures 29 minutes 45 secondes, M. Haegel a introduit trois ordres de vente portant chacun sur un titre, à un cours limité, respectivement à 8 200 euros, 8 009,99 euros et 8 010 euros, qui, ensemble, ont permis de fixer le cours au 2nd fixing, à 16h30, à 8 009,99 euros. Avant ces interventions, le cours théorique indicatif s’établissait à 8 899,90 euros, identique au 1er fixing, et l’offre et la demande de titres Compagnie du Cambodge ne permettaient aucune transaction à l’exception des ordres de sens opposé préalablement introduits par M. Haegel et Keren Finance, pour une quantité identique de titres et à des conditions identiques de prix.

Le 9 novembre 2015, à 11 heures 29 minutes 59 secondes, soit une seconde avant le 1er fixing, M. Haegel a passé un ordre d’achat au marché portant sur un titre, qui a permis de fixer le cours du 1er fixing de 11h30 à 8 250 euros. Avant cette intervention, le cours théorique indicatif s’établissait à 8 198,99 euros.

Le 10 novembre 2015, à 11 heures 27 minutes 53 secondes, M. Haegel a passé deux ordres de vente portant chacun sur un titre, à un cours limité à 7 251 euros et 7 010 euros, respectivement. À 11 heures 29 minutes 38 secondes, M. Haegel a passé un ordre de vente au marché portant sur un titre, lequel a

—  12 – conduit le cours théorique indicatif à s’établir à 7 006 euros, contre 7 009,99 euros avant cette intervention.

Interrogé par les enquêteurs sur les raisons l’ayant conduit à placer un ordre d’achat le 10 avril 2015 portant sur un titre, M. Haegel a déclaré : « Je fais du trading dessus j’achète et je vends régulièrement. […] 1 titre plus 1 titre font que l’on gagne de l’argent. » Interrogé sur les ordres portant sur des faibles quantités placés le 2 septembre, le 9 novembre et le 10 novembre, M. Haegel a répondu « Le cours était profitable, la société fait son trading. […] C’est du trading. »

Les ordres litigieux, passés à quelques minutes ou à quelques secondes avant le calcul des fixings, correspondent à l’indicateur de manipulation de cours mentionné au 7° de l’article 631-2 du règlement général de l’AMF.

Les ordres saisis par M. Haegel lors des séquences reprochées étaient toujours agressifs et, lorsqu’ils étaient assortis d’une limite, celle-ci était souvent, à l’achat, à un cours bien supérieur à la meilleure limite à la vente et, à la vente, à un cours nettement inférieur à la meilleure limite à l’achat. Il en résulte que, contrairement à ce qu’il indique, M. Haegel ne recherchait pas une exécution au meilleur prix, mais avant tout une cotation de la valeur.

Le 2 septembre 2015, lors du 1er fixing à 11h30, l’ordre d’achat au marché portant sur 50 titres introduit par M. Haegel a été exécuté au cours de 8 899,90 euros. Son ordre d’achat à un cours limité à 8 899,90 euros portant sur deux titres, qui avait permis de fixer le cours du 1er fixing à ce prix, en hausse de 4,70 % par rapport au cours théorique indicatif précédent, n’a, lui, été que partiellement exécuté. À 11 heures 30 minutes 11 secondes, M. Haegel a annulé cet ordre d’achat qui demeurait partiellement non exécuté. L’annulation de cet ordre montre que son introduction paraît avoir été motivée non pas par la volonté d’acquérir davantage d’actions, mais par celle d’obtenir un cours de fixing plus élevé.

La stratégie mise en œuvre par M. Haegel lors des séquences en cause l’a conduit à acheter à des cours élevés et à vendre à des cours bas et, ainsi, à subir des moins-values au cours de chacune des séquences reprochées, qui se sont élevées à un montant total de 255 324 euros.

L’analyse des séquences reprochées fait apparaître que les interventions agressives à l’achat, puis à la vente de M. Haegel, effectuées à un moment proche de celui où étaient calculés les cours de fixing, avaient pour unique objet, au cours de chacune de ces séquences, d’amplifier l’écart entre le prix auquel les titres Compagnie du Cambodge ont été transférés dans son portefeuille et celui auquel ces titres ont été rapatriés dans le portefeuille de la SICAV ACTIF, et non de lui permettre d’acquérir ou de céder des titres supplémentaires.

Si les interventions de M. Haegel n’ont eu qu’une influence limitée sur le cours du titre, l’établissement des cours de fixing lors du 1er fixing du 10 avril 2015, des 1er et 2nd fixings du 2 septembre 2015, du 1er fixing du 9 novembre 2015 et du 1er fixing du 10 novembre 2015 n’est pas résulté de l’interaction de l’offre et de la demande de titres Compagnie du Cambodge.

Il s’ensuit que les ordres saisis par M. Haegel ont fixé le cours du titre Compagnie du Cambodge à un niveau artificiel. Le manquement de manipulation de cours reproché à M. Haegel est en conséquence caractérisé sur le fondement du 1° b) de l’article 631-1 du règlement général de l’AMF.

SANCTIONS ET PUBLICATION

I. Sanctions

Les manquements ont été commis entre le 10 avril et le 10 novembre 2015.

L’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 28 juillet 2013 au 5 décembre 2015, non modifiée depuis sur ces points dans un sens moins sévère, dispose : « II.- La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : […] / c) Toute personne qui, sur le territoire français ou à l’étranger, s’est livrée

—  13 – ou a tenté de se livrer […] à une manipulation de cours […], dès lors que ces actes concernent : / -un instrument financier […] admis aux négociations sur un marché réglementé […] ».

Le III c) de l’article L. 621-15 du même code, dans sa version applicable du 24 octobre 2010 au 5 décembre 2015, non modifiée depuis sur ces points dans un sens moins sévère, prévoit que les sanctions applicables sont « a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; / b) Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 15 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c […] du II […] ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l’autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; / c) Pour les personnes autres que l’une des personnes mentionnées au II de l’article L. 621-9, auteurs des faits mentionnés aux c […] du II, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au Trésor public ».

Il en résulte que Keren Finance encourt une sanction disciplinaire et, en sus ou à la place, une sanction pécuniaire d’un montant au plus égal à 100 millions d’euros ou au décuple des profits éventuellement réalisés, que M. Haegel encourt une sanction pécuniaire d’un montant au plus égal à 100 millions d’euros ou au décuple des profits éventuellement réalisés, et que M. Lagae encourt une sanction disciplinaire et, en sus ou à la place, une sanction pécuniaire d’un montant au plus égal à 15 millions d’euros ou au décuple des profits éventuellement réalisés.

Le III ter de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version entrée en vigueur le 3 janvier 2018, précise en ces termes les éléments à prendre en compte pour déterminer la sanction : « Dans la mise en œuvre des sanctions mentionnées aux III et III bis, il est tenu compte notamment :

- de la gravité et de la durée du manquement ; – de la qualité et du degré d’implication de la personne en cause ; – de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, s’agissant d’une personne physique de ses revenus annuels, s’agissant d’une personne morale de son chiffre d’affaires total ; – de l’importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ;

- des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; – du degré de coopération avec l’Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veiller à la restitution de l’avantage retiré par cette personne ; – des manquements commis précédemment par la personne en cause ; – de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par elle pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement ».

Le rapport d’enquête, auquel les notifications de griefs renvoient, relève que « [l]e fait que M. Haegel soit à la fois systématiquement perdant sur les opérations décrites ci-dessus mais également bénéficiaire économique de la Sicav pourrait laisser penser que celui-ci réalise volontairement des moins-values sur ses différents comptes-titres personnel et celui de sa société afin de minimiser ses plus-values imposables sur ses comptes titres. Sur la valeur Compagnie du Cambodge, M. Haegel a réalisé une moins-value de 2 347 euros sur le compte de sa société LH et une moins-value de de 253 952 euros sur ses comptes personnels sur l’ensemble des jours où il est intervenu sur ce titre ». Ces montants reflètent l’ensemble des opérations sur le titre Compagnie du Cambodge réalisées par M. Haegel au cours de l’année 2015. S’agissant uniquement des opérations reprochées, il résulte des pièces produites à la procédure que M. Haegel a réalisé une moins-value totale de 255 324 euros.

—  14 – En l’état, la commission ne dispose pas d’éléments suffisants pour déterminer avec précision l’avantage retiré par M. Haegel.

En tout état de cause, l’importance des gains ou avantages obtenus par la personne mise en cause n’est qu’un des éléments pertinents pour déterminer le montant de la sanction qui lui sera infligée.

M. Haegel a produit sa déclaration de revenus 2017, dont il résulte que le montant de ses revenus d’activité pour l’année 2016 s’élève à […], le montant de ses gains de cession de valeurs mobilières ou assimilés à […] et le montant de ses revenus fonciers imposables à […]. Il a déclaré aux enquêteurs que son patrimoine s’élevait à […], composé aux trois-quarts de valeurs mobilières.

Compte tenu de ces éléments, il convient de prononcer à l’encontre de M. Haegel une sanction pécuniaire de 650 000 (six cent cinquante mille) euros.

M. Lagae a fourni son avis d’imposition sur le revenu 2017, dont il ressort que le revenu fiscal de référence de son foyer s’établit à […], ainsi qu’un jugement du tribunal de grande d’instance d’Arras, fixant à […] par mois le montant de la pension alimentaire devant être versée par ce mis en cause pour l’entretien et l’éducation de ses deux enfants. Lors de la séance du 19 octobre 2018, M. Lagae a indiqué qu’il n’était plus salarié de Keren Finance.

Il sera en conséquence infligé à M. Lagae une sanction pécuniaire de 20 000 (vingt mille) euros.

La société Keren Finance a fourni son bilan et le compte de résultats qui font apparaître un résultat net de 7 111 512 euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2017 et de 2 470 339 euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2016.

Il lui sera infligé une sanction pécuniaire de 250 000 (deux cent cinquante mille) euros.

II. Publication

Aux termes du V de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction entrée en vigueur le 3 janvier 2018, non modifiée depuis : « La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. / La commission des sanctions peut décider de reporter la publication d’une décision ou de publier cette dernière sous une forme anonymisée ou de ne pas la publier dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes : / a) Lorsque la publication de la décision est susceptible de causer à la personne en cause un préjudice grave et disproportionné, notamment, dans le cas d’une sanction infligée à une personne physique, lorsque la publication inclut des données personnelles ; / b) Lorsque la publication serait de nature à perturber gravement la stabilité du système financier, de même que le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours ».

La publication de la présente décision n’est ni susceptible de causer aux personnes mises en cause un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours. Elle sera donc ordonnée, sans anonymisation.

—  15 – PAR CES MOTIFS,

Et ainsi qu’il en a été délibéré par M. Jean Gaeremynck, président de 2ème section de la commission des sanctions, par M. Didier Guérin, Mme Anne-José Fulgeras, M. Christophe Lepitre et

M. Lucien Millou, membres de la 2ème section de la commission des sanctions, en présence du secrétaire de séance, la commission des sanctions :

— prononce à l’encontre de Keren Finance une sanction pécuniaire de 250 000 € (deux cent cinquante mille euros) ;

— prononce à l’encontre de M. Laurent Haegel une sanction pécuniaire de 650 000 € (six cent cinquante mille euros) ;

— prononce à l’encontre de M. Xavier Lagae une sanction pécuniaire de 20 000 € (vingt mille euros) ;

— ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers et fixe à 5 ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme.

À Paris, le 08 novembre 2018,

Le Secrétaire de séance,

Le Président,

Marc-Pierre Janicot

Jean Gaeremynck

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

Document Outline

  • FAITS ET PROCÉDURE
  • MOTIFS DE LA DÉCISION
  • II. Sur les griefs de manipulation de cours notifiés à l’ensemble des mis en cause
  • II.1. Les textes applicables
  • II.2. Sur l’examen des griefs
  • III. Sur le grief de manipulation de cours notifié à M. Haegel
    • SANCTIONS ET PUBLICATION
    • I. Sanctions
    • II. Publication

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Décision du 8 novembre 2018 à l'égard de la société Keren Finance SAS et de MM. A et B