Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 octobre 2014, n° 11/12847

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 30 oct. 2014, n° 11/12847
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 11/12847
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 24 mai 2011, N° 10/3538

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 30 OCTOBRE 2014

FG

N°2014/582

Rôle N° 11/12847

N B divorcée C

C/

AK-AO E-A divorcée Y

SCP D-X

H C

N B

Grosse délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES

SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE

SCP COHEN – GUEDJ – MONTERO – DAVAL-GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Z en date du 25 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/3538.

APPELANTE

Madame N B divorcée C

née le XXX à XXX,

XXX – XXX

représentée par la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, ayant pour avocat Me Philippe MONNET, avocat au barreau de Z.

INTIMES

Madame AK-AO E-A divorcée Y

née le XXX à XXX,

XXX

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat Me Michaël BISMUTH, avocat au barreau de MARSEILLE.

SCP PATRICE D OLIVIER D Q X,

anciennement SCP AA P et Patrice D, notaires, demeurant XXX

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN – GUEDJ – MONTERO – DAVAL-GUEDJ, avocats au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me François LOUSTAUNAU de la SCP LOUSTAUNAU FORNO, avocat au barreau de Z.

Monsieur H C

XXX

non comparant

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 02 Octobre 2014 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François GROSJEAN, Président, et Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller, chargés du rapport.

Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

Monsieur J TATOUEIX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme J K.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2014.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Par défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2014.

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme J K, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

Par acte authentique reçu le 21 juin 1999 par M°AA P, notaire associé à Sainte-Maxime, M. H C et Mme N B épouse C ont déclaré reconnaître devoir la somme de 330.000 francs à Mme AK-AO AX E-A divorcée Y , s’engageant à lui rembourser cette somme au plus tard le 21 décembre 1999.

L’acte prévoyait qu’à défaut de remboursement de cette somme à l’échéance, Mme N B épouse C s’engageait à donner en paiement un bien immobilier, avec une soulte de 100.000 francs à payer par Mme AK-AO E-A.

Ce bien consistait en les lots 4 et 7 d’une maison sise à XXX, XXX.

Mme C affectait hypothécairement ce bien immobilier à la garantie du prêt.

Les 10 et 31 août 2007 Mme AK-AO E-A divorcée Y a fait assigner Mme N B épouse C, M. H C, M°AA P, notaire, et la SCP AA P et Patrice D, titulaire d’un office notarial à Sainte-Maxime, aux fins de voir prononcer la dation en paiement, ordonner le transfert de propriété, dire que le jugement vaudra titre de propriété.

Par ordonnance du 20 février 2009, le juge de la mise en état a constaté le désistement d’instance à l’encontre de M°AA P.

Par acte du 12 novembre 2009, Mme N B divorcée C a déclaré s’inscrire incidemment en faux contre l’acte authentique du 21 juin 1999.

Par jugement en date du 25 mai 2011, le tribunal de grande instance de Z a :

— rejeté l’incident d’inscription de faux en écriture publique soulevé par Mme B,

— admis comme vrai et sincère l’acte de reconnaissance de dette portant dation en paiement en date du 21 juin 1999,

— rejeté l’exception de nullité de l’acte du 21 juin 1999 soulevée par Mme B,

— dit que le transfert de propriété de l’immeuble sis à La Motte cadastré section XXX pour 3 ares 32 centiares lieudit Trassavou formant les lots numéros quatre et sept de la copropriété résultant d’un état descriptif de division reçu par M°AI AJ, notaire associé à Trans-en-Provence, le 18 octobre 1991, publié le 14 octobre 1991, volume 91P numéro 11883, à la conservation des hypothèques de Z, est réalisé depuis le 21 décembre 1999, à défaut de remboursement du principal du prêt à cette date, entre Mme N B et Mme AK-AO E-A,

— dit que M. C et Mme B étaient débiteurs envers Mme AK-AO E-A au 31 août 2007 de la somme de quatre-vingt-dix-huit E cinq cent vingt-trois euros et cinquante -trois centimes (98.523,53 €) au titre du principal, des intérêts à titre de clause pénale et de l’indemnité forfaitaire,

— dit que la tradition réelle de l’immeuble donné en paiement permettra d’éteindre cette dette envers Mme E-A,

— ordonné à Mme N B de fournir au notaire qui sera choisi par Mme E-A pour la réitération de l’acte authentique constatant le transfert de propriété de l’immeuble donné en paiement tous les documents que ce dernier lui réclamera en vue de l’établissement de l’acte, sous peine du paiement d’une astreinte de 300 euros par jour passé un délai d’un mois suivant une simple demande de sa part par lettre recommandée avec avis de réception restée infructueuse,

— ordonné à Mme N B de comparaître devant le notaire choisi par Mme E-A pour la réitération de l’acte authentique constatant le transfert de propriété de l’immeuble donné en paiement, à la première convocation de ce dernier sous peine du paiement d’une astreinte de 100 euros par manquement constaté par procès verbal de carence ou par constat d’huissier de justice ou inexécution,

— dit que ces astreintes courront pendant un délai de six mois à l’issue duquel une nouvelle astreinte pourra être prononcée en tant que de besoin,

— rejeté la demande en paiement du solde des sommes dues,

— rejeté la demande de Mme E-A aux fins de condamnation à prendre en charge les frais de mainlevée de l’inscription du Crédit Logement,

— rejeté la demande reconventionnelle de Mme B à titre de dommages et intérêts à l’encontre de Mme E-A,

— rejeté la demande de Mme B aux fins d’être relevée et garantie par la SCP D-X,

— rejeté la demande d’exécution provisoire,

— condamné Mme N B et M. H C in solidum à payer à Mme AK-AO E-A la somme de 4.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné Mme N B à payer à la SCP D-X la somme de 2.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté la demande de Mme B en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné Mme N B et M. H C in solidum aux dépens, dont distraction au profit de M°Q W et de la SCP LOUSTAUNAU-FORNO.

Par déclaration de la SCP PRIMOUT et FAIVRE, avoués, en date du 19 juillet 2011, Mme N B a relevé appel de ce jugement.

Par arrêt mixte, rendu le 23 mai 2013, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a :

— confirmé partiellement le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a rejeté l’incident d’inscription de faux en écriture publique soulevé par Mme N B, admis comme vrai et sincère l’acte de reconnaissance de dette portant dation en paiement en date du 21 juin 1999,

— avant dire droit sur le surplus, ordonné la réouverture des débats, révoqué la clôture, pour conclusions des parties sur la qualification de l’acte comme pacte commissoire avec clause de voie parée et ses conséquences, pour production de l’état hypothécaire du bien immobilier litigieux, pour précisions sur les conséquences tenant à un droit de préemption et mise en cause éventuelle du titulaire de ce droit de préemption,

— dit que l’affaire reviendra à l’audience du 6 novembre 2013, avec clôture le 2 octobre 2013,

— réservé les dépens.

Par ordonnance en date du 5 décembre 2013, le magistrat de la mise en état a :

— dit que l’appel incident de Mme AK E-A n’était pas recevable,

— dit qu’il appartiendra à la cour de se prononcer sur la recevabilité des prétentions nouvelles de Mme AK E-A,

— enjoint à Mme AK E-A d’établir de nouvelles conclusions ne comportant pas appel incident du jugement du 25 mai 2011.

Par arrêt avant dire droit du 19 juin 2014, la cour d’appel a révoqué la clôture et ordonné la réouverture des débats, invité les parties à conclue et dit qu’elles joindront à leurs conclusions le récépissé de leur notification aux autres parties.

Par ses dernières conclusions au fond , notifiées et déposées le 18 septembre 2013, Mme N B demande à la cour d’appel de :

— au principal :

— déclarer nul et de nul effet l’acte litigieux, contenant la clause dite de voie parée,

— en conséquence, annuler les engagements pris par Mme B avec toutes ses conséquences de droit, et en tout état de cause, les déclarer inopposables à la concluante,

— débouter Mme E-A de toutes ses demandes, fins et conclusions,

— condamner Mme E-A à procéder ou à faire procéder à la mainlevée de l’hypothèque prise sur l’immeuble litigieux lui appartenant, et ce sous astreinte de 300 € par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de l’arrêt,

— condamner Mme E-A à payer à Mme B la somme de 7.500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral, et celle de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

— condamner Mme E-A aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE,

— à titre subsidiaire, au visa notamment des articles 1108 et 1129 du code civil et en tout état de cause au visa des règles relatives à la rescision pour lésion,

— dire que les engagements sont nuls et de nul effet,

— débouter en conséquence Mme E-A de toutes ses demandes et la condamner à payer à Mme B la somme de 7.500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral par elle subi, ainsi que celle de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile , et ce au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

— condamner Mme E-A à procéder ou faire procéder à la mainlevée de l’hypothèque prise sur l’immeuble litigieux appartenant à la concluante, et ce sous astreinte de 300 € par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de l’arrêt à intervenir,

— condamner Mme E-A aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE,

— plus subsidiairement, si la cour n’annule pas totalement l’acte litigieux,

— dire que le renouvellement de l’hypothèque effectué par le notaire le 12 septembre 2011 à effet au 8 septembre 2021 est nul et de nul effet, et en conséquence ordonner la mainlevée de cette inscription hypothécaire prise sur l’immeuble aux frais du notaire qui en a pris l’initiative,

— vu les dispositions des articles 1907 alinéa 2 du code civil et L.313-2 du code de la consommation, dire que l’intérêt légal sera substitué au taux d’intérêt réclamé sur l’intégralité des sommes réclamées,

— dire que les intérêts antérieurs au 14 mai 2002 sont prescrits,

— ordonner la suppression de l’indemnité de 1% s’agissant d’une clause pénale inapplicable en l’espèce, et subsidiairement de ce chef voir la cour réduire le montant de l’indemnité à une somme symbolique d’un euro, en l’absence d’un préjudice qui ne serait pas réparé par l’allocation des intérêts aux taux légal,

— plus subsidiairement encore, dans l’hypothèse où l’acte de prêt litigieux serait considéré comme en totalité comme valide et opposable à Mme B,

— débouter Mme E-A de toutes ses prétentions et la renvoyer à mieux se pourvoir après avoir relevé que la procédure de notification préalable au locataire actuel n’a pas été régularisée, en violation des termes de l’acte litigieux,

— condamner Mme E-A à payer à Mme B la somme de 7.500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral par elle subi, ainsi que celle de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile , et ce au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

— condamner Mme E-A aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE,

— sur la garantie de la SCP S D X au visa des dispositions de l’article 1382 du code civil, dans l’hypothèse où la cour condamnerait la concluante à rembourser même en partie le montant du prêt litigieux,

— débouter la SCP S D X qui vient aux droits de Me P, notaire, de toutes ses demandes, fins et conclusions,

— dire que la SCP D X est solidairement responsable avec Me P, décédé, des conséquences dommageables des actes qu’il a pu accomplir de son vivant,

— en conséquence, condamner la SCP S D X à garantir Mme B de toutes les condamnations qui seraient prononcées contre elle en raison des fautes commises par M°P, dont la SCP doit répondre, de façon à ce que la concluante ne soi en rien inquiétée à quelque titre que ce soit par suite de la procédure introduite contre elle, le tout à titre de dommages et intérêts en application de l’article 1382 du code civil,

— mettre à la charge de ladite SCP S les frais de mainlevée de l’hypothèque prise sur l’immeuble litigieux,

— condamner ladite SCP S à payer à Mme B la somme de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

— condamner Mme E-A et/ou la SCP S aux dépens, avec distraction au profit de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE.

Mme B estime que l’acte est nul car contenant une clause de voie parée.

A titre subsidiaire, Mme B fait observer que les parties n’ont pas prévu d’estimer le bien litigieux, de sorte que le pacte commissoire serait nul.

A titre plus subsidiaire, Mme B fait observer que la valeur du bien immobilier n’a pas été clairement déterminée et que la dation en paiement est nulle faute de précision d’équivalence entre la chose prêtée et celle remise en paiement.

En tout état de cause, elle considère qu’il a lésion alors que le bien immobilier vaut plus de trois fois le montant du prêt.

Mme B fait observer que le renouvellement de l’inscription hypothécaire le 12 septembre 2011 est nul, alors que l’effet de l’inscription antérieure se terminait le 21 décembre 2001, que les intérêts sont prescrits, que le taux ne peut être que le taux légal, que l’indemnité sur le capital correspond à une clause pénale qui sera réduite.

Elle considère que le notaire a commis une faute en ne lui expliquant pas les conséquences de l’engagement de cautionnement hypothécaire en raison de la disproportion entre l’obligation et l’immeuble objet de la dation.

Par ses dernières conclusions, déposées le 14 janvier 2014 et notifiées le 20 juin 2014, Mme AK AO E-A divorcée Y demande à la cour d’appel, au visa de l’article 1134 du code civil, des articles 1289 à 1293 du code civil, de l’article 1382 du code civil, des articles 2134 et suivants du code civil, de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975, de l’article 15 II. de la loi du 6 juillet 1989, de l’article 1589 du code civil, de l’article 565 du code de procédure civile, de :

— dire que le locataire ne bénéficie d’aucun droit de préemption tant sur le terrain de la loi du 6 juillet 1989 que sur celui de la loi du 31 décembre 1975,

— constater qu’aucune hypothèque n’a été prise avant celle résultant de l’acte du 21 juin 1999,

— dire que le transfert de propriété était réalisé depuis le 21 décembre 1999 à défaut de remboursement du prêt à cette date,

— dire que l’acte notarié du 21 juin 1999 est une dation en paiement et ne peut être qualifié de pacte commissoire avec clause de voie parée,

— confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— à titre subsidiaire, si l’acte du 21 juin 1999 était qualifié de pacte commissoire avec clause de voie parée et si la cour devait juger que la tradition réelle de l’immeuble ne permettra pas d’éteindre la dette de Mme B et de M. C envers Mme E-A, dire Mme B et M. C restent redevables à la date du 19 janvier 2014 de la somme de 143.167,01 € et les condamner solidairement à payer cette somme à Mme E-A,

— dire que cette prétention n’est pas nouvelle et est parfaitement recevable sur le fondement de l’article 565 du code de procédure civile puisque Mme E-A en première instance avait demandé la condamnation des époux C à lui payer la somme de 24.247,01 € arrêtée au 31 août 2007 (outre intérêts contractuels à compter de cette date) après dation en paiement et compensation de la soulte de 15.244,90 €,

— à titre subsidiaire, condamner Mme B et M. C à payer à Mme E -A la somme due au 19 janvier 2014 ( à parfaire au jour de la décision) de 143.167,01 €,

— en toute hypothèse condamner solidairement Mme B et M. C au paiement de la somme de 5.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, avec distraction au profit de M°BOULAN de la Selarl BOULAN CHERFILS IMPERATORE.

Mme E-A estime que la dation en paiement avait été clairement convenue dans la reconnaissance de dette et considère que le transfert de propriété doit être ordonné. Elle estime que la dation en paiement n’exclut pas l’application de la clause pénale.

Mme E-A fait valoir que l’engagement de dation en paiement ne peut être déclaré nul pour indétermination. Elle estime que l’acte ne peut être qualifié de pacte commissoire mais qu’il est une dation en paiement. Elle considère que le transfert de propriété doit être dit comme réalisé depuis le 21 décembre 1999.

A titre subsidiaire, Mme E-A rappelle que l’obligation de remboursement demeure.

Mme E-A fait observer que les droits du locataire ne sont pas affectés par cette dation en paiement.

Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 4 octobre 2013, la SCP Patrice D, Olivier D et Q X, titulaire d’un office notarial à Sainte-Maxime, demande à la cour d’appel de :

— confirmer le jugement,

— débouter Mme E-A sur les fins poursuivies par elle au titre d’une €responsabilité de la société civile professionnelle S, ladite prétention ayant été abandonnée en appel et n’ayant pas fait l’objet d’un appel incident dans les délais,

— constater la fin de non recevoir par prescription en application de l’article 2224 du code civil, pour ce qui est de la prétention de Mme B d’une responsabilité de la part de la SCP S,

— condamner Mme B au paiement de la somme de 4.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme B aux entiers dépens, distraits au profit de la SCP Hervé COHEN, Q COHEN, Paul GUEDJ, Jean-Philippe MONTERO et Maud DAVAL-GUEDJ, avocats.

La société civile professionnelle S fait observer que l’action en responsabilité civile n’a été intentée par Mme B pour la première fois que par conclusions du 15 novembre 2010 alors que l’acte est du 21 juin 1999.

M. H C, assigné le XXX à l’étranger, XXX, n’a pas comparu. Il n’est pas établi que l’assignation lui été remise à sa personne.

L’instruction de l’affaire a été déclarée close le 18 septembre 2014.

MOTIFS,

— I) sur la qualification de l’acte :

L’acte authentique reçu le 21 juin 1999 par M°AA P, notaire associé à Sainte-Maxime, a été passé entre d’une part Mme AK-AO AX E-A divorcée Y , qualifiée de 'le prêteur', et d’autre part, M. H C et Mme N B épouse C, dénommés 'l’emprunteur'.

Il est précisé en page deux 'reconnaissance de dette’ :par ces présentes, l’emprunteur’ reconnaît devoir bien et légitimement au 'prêteur’ qui accepte la somme de trois cent trente E francs (330.000 F) objet du prêt, de pareille somme qu’il leur a fait avant ces présentes et hors la comptabilité du notaire soussigné>>.

Il est prévu dans l’acte au chapitre 'conditions du prêt’ et au paragraphe 4° : à défaut de remboursement de la somme prêtée à son échéance ci-dessus fixée, Mme C, emprunteur s’oblige à donner au prêteur, à titre de dation en paiement, les biens et droits immobiliers ci-après désignés, sis à XXX, et le prêteur s’oblige à verser à Mme C, emprunteur une soulte de cent E francs (100.000 F). A cet effet, il est donné pouvoir irrévocable à tous clercs de l’office notarial de Sainte-Maxime-sur-mer (Var) … pour réitérer par acte authentique la dation en paiement ci-dessus stipulée>>.

Une affectation hypothécaire est prévue page trois :pour concrétiser les garanties convenues entre les parties, Mme C, emprunteur, déclare affecter et hyothéquer l’immeuble ci-après désigné, à la sûreté et garantie du remboursement du prêt en principal, soit la somme de trois cent trente E francs (330.000 F), et tous autres frais et accessoires, tels que dommages et intérêts quelconques, amendes conventionnelles, indemnités, débours, ces diverses dépenses évaluées à 20% du montant initial du prêt, au profit du prêteur, ce qui accepté par ce dernier l’immeuble ci-après désigné ..>> suit description de l’immeuble correspondant bien à celui visé au chapitre conditions du prêt et relatif au remboursement par dation en paiement.

En page cinq, il est stipulé un cautionnement hypothécaire par Mme C, co-emprunteur :Mme C, emprunteur sus-nommée, déclare se rendre et constituer caution simplement hypothécaire de M. C, co-emprunteur, envers le prêteur, qui accepte, pour raison du prêt sus-énoncé. En conséquence, à la garantie de la somme de trois cent trente E francs (330.000 F) montant du prêt ainsi cautionné en principal, et tous frais et accessoires, la caution affecte et hypothèque au profit du prêteur qui accepté, les biens et droits immobiliers ci-dessus…>>suit description de l’immeuble correspondant bien à celui visé au chapitre conditions du prêt et relatif au remboursement par dation en paiement.

Il est précisé page cinq que l’inscription hypothécaire sur ce bien vient en premier rang et sans concurrence.

Le bien visé est décrit et consiste en : dans une maison située à XXX, XXX, élevée de deux étages sur rez-de-chaussée , cadastrée section G, XXX, ..lot numéro quatre (4) soit au premier étage, un appartement composé d’un living, d’une chambre, d’une cuisine et d’une salle d’eau….lot numéro sept (7)

soit au premier étage, une grande pièce à laquelle on accède par une porte voisine à celle du lot n°4..>>.

Mme B-C, débitrice, a donné en garantie ce bien immobilier pour elle-même et en cautionnement hypothécaire de son co-débiteur.

Cette convention correspond à un pacte commissoire par lequel le créancier peut, faute de paiement de la créance à l’échéance prévue, s’approprier l’immeuble d’un débiteur, lequel l’a donné en garantie hypothécaire pour lui-même et en tant que caution hypothécaire de l’autre débiteur sur ce bien.

— II) sur la validité de la convention :

II-1) sur la question de la clause de voie parée :

L’article 742 de l’ancien code de procédure civile applicable à la date de la conclusion de l’acte du 21 juin 1999 disposait que toute convention portant qu’à défaut d’exécution des engagements pris envers lui le créancier aura le droit de faire vendre les immeubles de son débiteur sans remplir les formalités prescrites pour la saisie immobilière, est nulle et non avenue.

En l’occurrence la convention prévoit, non pas une vente forcée aux tiers du bien immobilier

du débiteur, mais une dation en paiement entre le débiteur et le créancier.

Une option existe, laquelle est donnée, tant au créancier qu’au débiteur, soit le remboursement en espèces, soit le remboursement par dation en paiement.

II-2) sur l’indétermination de la valeur du bien immobilier :

La valeur du bien immobilier est clairement déterminable.

L’acte prévoit pour un prêt sans intérêts d’une durée de six mois, prêt d’une somme de 330.000 francs, une dation en paiement avec soulte de 100.000 francs.

La valeur du bien immobilier objet de la dation en paiement était donc de 330.000 francs moins 100.000 francs à la date de l’acte, 21 juin 1999, et à la date prévue pour le remboursement, 21 décembre 1999, à peine 6 mois plus tard, soit 230.000 francs.

II-3) sur la lésion :

L’acte dont s’agit est un contrat de prêt. La dation en paiement est une option offerte pour éviter de rembourser en espèces.

Le débiteur qui a l’option de rembourser en espèces la somme prêtée ne peut se dire victime d’une lésion à propos de la dation en paiement, puisqu’il lui suffit de rembourser la somme prêtée et la dation en paiement n’aura pas lieu.

D’autre part, la lésion, dans la mesure où elle serait possible dans ce cas, supposerait un déséquilibre entre le montant de la dation et la valeur du bien à la date du contrat en 1999, selon son état et sa situation juridique à cette date, ce qui n’est pas établi.

Les valeurs données aujourd’hui sont sans intérêt sur le litige. Il appartenait aux débiteurs de ne pas laisser traîner les choses.

L’acte est en conséquence valable.

— III) sur la réalisation de la dation en paiement :

III-1) sur la question du droit de préemption :

Il s’agit ici d’une dation en paiement, mode de paiement, de sorte que la question du droit de préemption du locataire en cas de vente ne se pose pas.

Le locataire mentionné dans l’acte n’est plus dans les lieux.

Mme B produit un contrat sous seing privé de bail emphytéotique sur le bien à un certain M. L M. Ce bail qualifié d’emphytéotique sous seing privé et non publié à la conservation des hypothèques est éminemment suspect, cela d’autant que Mme B indique dans ses conclusions une adresse personnelle qui correspond à celle des lieux.

Ce document sans valeur sérieuse ne peut être opposé comme prétexte pour empêcher la dation en paiement.

III-2) sur la situation hypothécaire du bien :

L’état hypothécaire produit permet de vérifier qu’aucune inscription hypothécaire n’avait été prise sur le bien immobilier litigieux avant l’inscription prise en application de l’acte du 21 juin 1999.

L’inscription hypothécaire a été prise initialement le 19 août 1999 avec publication de cet acte du 21 juin 1999 contenant dation en paiement le 21 décembre 1999 à défaut de remboursement du prêt.

Cette inscription, valable jusqu’au 21 décembre 2001, a été renouvelée le 20 décembre 2001 avec effet jusqu’au 13 décembre 2011.

L’inscription a été renouvelée le 12 septembre 2011 référence 2011V5097.

Ce renouvellement d’inscription est parfaitement valable. L’inscription est toujours en cours à ce jour, primant tout.

Rien ne s’oppose à la dation en paiement.

— IV) sur les comptes entre Mme E-A et les débiteurs :

Mme E-A demande la confirmation de la disposition du jugement qui a dit que M. C et Mme B étaient débiteurs envers Mme AK-AO E-A au 31 août 2007 de la somme 98.523,53 € au titre du principal, des intérêts à titre de clause pénale et de l’indemnité forfaitaire, et que la tradition réelle de l’immeuble donné en paiement permettra d’éteindre cette dette envers Mme E-A.

Mme B contests ces sommes, sur les intérêts, les indemnités, la clause pénale.

L’acte du 21 juin 1999 prévoit en page 2 'conditions du prêt’ paragraphe 2° : dans le cas où pour arriver au recouvrement du principal de sa créance ou de ses accessoires, le prêteur se trouverait obligé d’exercer des poursuites même par simple commandement ou de produire à un ordre, il aurait doit à une indemnité forfaitaire de deux pour cent du montant des sommes à recouvrer>>.

Cette indemnité forfaitaire de deux pour cent n’a pas vocation à s’appliquer du fait de l’option de la dation en paiement.

L’acte prévoit par ailleurs en page 3 paragraphe 7° : toutes les sommes dues et non réglées à l’échéance seront majorées, à titre de clause pénale expressément convenue, de un pour cent par mois ou fraction de mois de retard, sans que cela puisse nuire aux droits d’exigibilité avant terme ci-dessus prévu>>.

Cette clause pénale n’a pas non plus vocation à s’appliquer du fait du choix de la dation en paiement.

La tradition du bien avec remise de la soulte éteint la dette.

Le jugement sera confirmé et précisé en ce qu’il a dit que la tradition éteint la dette.

— V) sur l’action contre le notaire :

Mme B demande la garantie de la société civile professionnelle D-X.

Il ne peut être reproché au notaire rédacteur de l’acte du 21 juin 1999, considéré comme valable par la cour, d’avoir commis une faute.

Les termes du contrat étaient très clairs.

Il s’agissait en tout état de cause d’un prêt de très courte durée, sur six mois.

Mme B ne peut reprocher au notaire ni erreur de rédaction, ni défaut d’information, ni manquement à devoir de conseil.

En tout état de cause le notaire ne peut être garant de sommes contractuellement dues et encore moins d’une dation en paiement.

Le jugement sera en tout état de cause confirmé sur le rejet de l’action contre le notaire.

Mais par équité la société civile professionnelle de notaires conservera ses dépens de première instance et d’appel et ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Pour le reste Mme B et M. C seront condamnés aux dépens de Mme E-A et à indemniser celle-ci de ses frais irrépétibles. Les frais irrépétibles de première instance seront confirmés. Il sera rajouté 1.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt par défaut par suite de la défaillance de M. H C, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Vu l’arrêt mixte rendu le 23 mai 2013 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui a confirmé partiellement le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a rejeté l’incident d’inscription de faux en écriture publique soulevé par Mme N B, admis comme vrai et sincère l’acte de reconnaissance de dette portant dation en paiement en date du 21 juin 1999,

Vu l’ordonnance du 5 décembre 2013 du magistrat de la mise en état disant que l’appel incident de Mme AK E-A n’était pas recevable,

Confirme le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité de l’acte du 21 juin 1999 soulevée par Mme B,

Dit l’acte du 21 juin 1999 valable,

Dit qu’aucun droit de préemption ne s’oppose à cet acte,

Dit que la situation hypothécaire du bien objet de la dation en paiement est conforme à la constatation de la réalisation de cette dation,

Confirme le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a dit que le transfert de propriété de l’immeuble sis à La Motte cadastré section XXX pour 3 ares 32 centiares lieudit Trassavou formant les lots numéros quatre et sept de la copropriété résultant d’un état descriptif de division reçu par M°AI AJ, notaire associé à Trans-en-Provence, le 18 octobre 1991, publié le 14 octobre 1991, volume 91P numéro 11883, à la conservation des hypothèques de Z, est réalisé depuis le 21 décembre 1999, à défaut de remboursement du principal du prêt à cette date, entre Mme N B et Mme AK-AO E-A,

Rappelle que l’acte du 21 juin 1999 prévoit une soulte de cent E francs soit quinze E deux cent quarante-quatre euros et quatre-vingt-dix centimes (15.244,90 €) qui sera versée par Mme AK-AO E-A à Mme N B lors de l’acte constatant le transfert de propriété, par la comptabilité du notaire qui établira l’acte constatant le transfert,

Confirme et précise le jugement en ce qu’il a dit que la tradition réelle de l’immeuble donné en paiement éteindra la dette de M. C et Mme B envers Mme E-A résultant de l’acte du 21 juin 1999,

Confirme le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a rejeté la demande de Mme B aux fins d’être relevée et garantie par la SCP D-X,

Le réforme sur la condamnation de Mme B à payer des frais irrépétibles à la SCP D-X et à supporter les dépens exposés par la SCP D-X, et dit que, dans les rapports entre eux, tant Mme B que la SCP D-X conserveront leurs dépens de première instance et d’appel et leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Confirme le jugement rendu le 25 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Z en ce qu’il a condamné M. C et Mme B aux dépens exposés par Mme E-A, avec distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile et à lui payer 4.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance,

Condamne M. C et Mme B aux dépens exposés par Mme E-A en appel, avec distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile et à lui payer E euros de plus (1.000 €) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 octobre 2014, n° 11/12847