Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8 avril 2016, n° 14/20963

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 8 avr. 2016, n° 14/20963
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 14/20963
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nice, 19 octobre 2014, N° 14/02524

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 08 AVRIL 2016

N° 2016/ 318

Rôle N° 14/20963

SAS B C

C/

Z Y

Grosse délivrée

le :

à : Me Yann CHARAMNAC

Me Nina TROMBETTA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 20 Octobre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02524.

APPELANTE

SAS B C anciennement dénommée SAS SAMAREL, prise en la personne de son représentant légal en activité y domicilié es qualité audit siège, demeurant XXX

représentée par Me Yann CHARAMNAC, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE, assisté par Me Deborah SAMAK, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Madame Z Y

née le XXX à XXX

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/003659 du 04/05/2015 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représentée par Me Nina TROMBETTA, avocat au barreau de NICE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 02 Mars 2016 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Agnès MOULET, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président

Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller

Madame Agnès MOULET, Conseiller (rédacteur)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. D E.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2016,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. D E, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LES FAITS ET LA PROCÉDURE

En vertu d’une ordonnance de référé du conseil de prud’hommes de NICE du 30 janvier 2014, notifiée le 10 février 2014, Mme Z Y a fait pratiquer le 31 mars 2014 une saisie-attribution entre les mains de la Banque Populaire Côte d’Azur de Nice pour avoir paiement des condamnations mises à la charge de la société par actions simplifiée B C anciennement dénommée SAS SAMAREL (la société B C), pour un montant de 3.675,28 €. Cette saisie-attribution a été dénoncée à la débitrice le 3 avril 2014.

Par acte du 2 mai 2014, la société B C a saisi le juge de l’exécution aux fins d’obtenir mainlevée partielle de cette saisie-attribution à concurrence de 482,05€, outre la condamnation de Mme Y à lui payer la somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour saisie abusive et celle de 1.200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Mme Y a conclu à l’irrecevabilité de la contestation et a notamment demandé des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle a subi et pour procédure abusive.

Par jugement dont appel du 20 octobre 2014 le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nice a :

— déclaré irrecevable la contestation de la société B C ;

— condamné la société B C à payer à Mme Y une somme de 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société B C aux dépens ;

— débouté pour le surplus

aux motifs que :

— l’assignation devant le juge de l’exécution du 2 mai 2014, délivrée à Mme Y à domicile élu chez l’huissier saisissant et non à son domicile pourtant connu et précisé dans le corps de ladite assignation, aurait dû être faite à personne conformément à l’article 654 du code de procédure civile et ne permet pas le respect de l’article R 211-11 du code des procédures civiles d’exécution puisque le créancier n’a été avisé de la signification de l’assignation que postérieurement au délai d’un mois

— le domicile élu doit être stipulé dans l’intérêt exclusif du destinataire ou dans l’intérêt commun des parties, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;

— l’abus de procédure apparaît insuffisamment caractérisé.

La société B C a relevé appel de cette décision le 4 novembre 2014 .

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 30 septembre 2015 de la société B C qui demande à la Cour de :

— infirmer la décision

Et statuant de nouveau :

— dire que l’assignation qu’elle a délivrée à domicile élu en l’étude du huissier saisissant est régulière

— dire que sa contestation du 2 mai 2014 est conforme aux dispositions de l’article R211-11 du code des procédures civiles d’exécution

— constater qu’en l’état de la levée de la mesure, il n’y a plus lieu de statuer sur la mainlevée de celle-ci

— condamner Mme Y au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour saisie abusive

— condamner Mme Y au paiement de la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile

— la condamner aux entiers dépens,

L’appelante fait valoir que :

— l’assignation délivrée le 2 mai 2014 est régulière

— l’ordonnance de référé du 30 janvier 2014 a condamné B C SAS à la somme brute de 1.995,58 € à titre de provision sur complément de salaire, à la somme brute de 188,46 € au titre d’une provision sur commission et à 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et que sur certaines sommes les charges patronales et salariales doivent être déduites

— en agissant par voie d’exécution forcée sur des sommes qu’elle savait parfaitement erronées, Mme Y a en toute connaissance de cause et en parfaite mauvaise foi causé un préjudice à la SAS B qui ne souhaitait régler que les sommes réellement dues.

Vu les dernières conclusions d’appel incident déposées et notifiées le 30 mars 2015 par Mme Y demandant à la Cour de :

Sur l’appel principal :

— confirmer le jugement du 20 octobre 2014 en ce qu’il a déclaré irrecevable la contestation de la saisie-attribution formée par la société B C le 2 mai 2014 et a alloué à Mme Y une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Si par extraordinaire la Cour ne confirmait pas l’irrecevabilité de la contestation :

— débouter la société B C de l’intégralité de ses demandes

Sur l’appel incident ,

— infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts formulée par Mme Y au titre de la résistance abusive de son employeur

Et statuant à nouveau,

— condamner la société B C au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice subi par Madame Y, résultant de l’inexécution de la décision de référé par la société B C, sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la signification de la décision

— condamner la société B C au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement des dispositions des articles 1382 du Code civil et 32-1 du code de procédure civile, sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la signification de la décision,

En tout état de cause,

— condamner la société B C au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 37 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 se substituant à l’article 700

du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Mme Y soutient sur l’appel principal que :

— la contestation formée par assignation du 2 mai 2014 n’a pas été effectuée dans le respect des dispositions de l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution,

— la société B C l’a assignée à domicile élu, en l’étude de la SCP LILAMAND -X et cette élection s’est décidée dans l’intérêt exclusif du requérant,

— Mme Y n’a jamais été avisée de la signification de cette assignation par la lettre simple prévue à l’article 658 du code de procédure civile,

— et subsidiairement, la société B n’a exécuté spontanément aucune des condamnations mises à sa charge par l’ordonnance de référé du 30 janvier 2014, et Mme Y a donc été contrainte de faire exécuter les condamnations financières de manière forcée, et la saisie-attribution du 31 mars 2014 était bien fondée,

Mme Y fait valoir sur l’appel incident que :

— la société B C est manifestement de mauvaise foi

— la saisine du juge de l’exécution était purement dilatoire et manifestement destinée à retarder davantage l’exécution de la décision prudhommale du 30 janvier 2014,

— l’opposition à la saisie-attribution est constitutive d’une faute dans l’exercice de ses droits par la société B C et caractérise sa résistance abusive,

— l’inexécution de la décision de référé par la société B C lui cause un préjudice considérable du fait de l’absence de revenus pendant plus de 3 mois, de ses difficultés financières et de l’aggravation de son état de santé .

Vu l’ordonnance de clôture du 2 février 2016,

MOTIFS

Sur la recevabilité de la contestation de la saisie-attribution :

L’article 654 du code de procédure civile énonce que la signification doit être faite à personne.

Cependant, Mme Y a déclaré, tant dans le procès verbal de saisie-attribution du 31 mars 2014 que dans sa dénonce du 3 avril 2014, faire élection de domicile en l’étude de son huissier saisissant (pièces 1 et 2 de l’appelante). L’intimée ne saurait dès lors valablement critiquer le fait que l’assignation du 2 mai 2014 en contestation de cet acte, qui est délivrée dans le seul intérêt du créancier, l’ait été au domicile qu’elle a entendu élire.

De même, aux termes de l’article R 141-1 du code des procédures civiles d’exécution , «La remise du titre exécutoire à l’huissier de justice vaut pouvoir pour toute exécution pour laquelle il n’est pas exigé de pouvoir spécial. Elle emporte élection de domicile en son étude pour toutes notifications relatives à cette exécution.»

En conséquence, la signification de l’assignation contestant l’exécution d’un titre exécutoire faite à domicile élu en l’étude d’huissier saisissant est régulière.

Par ailleurs Mme Y soutient ne pas avoir été avisée de la signification de cette assignation par la lettre simple prévue par l’article 658 du code de procédure civile.

Cependant, les dispositions des articles 654 et suivants du code de procédure civile ne sont sanctionnés par la nullité que si leur violation a porté grief à la partie qui l’invoque .

Mme Y, qui a eu connaissance de cette procédure et a pu constituer avocat et soutenir ses intérêts en justice, ne démontre l’existence d’aucun grief.

Enfin l’article R211-11 du code des procédures civiles d’exécution énonce qu'«A peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie. L’auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple et en remet une copie, à peine de caducité de l’assignation, au greffe du juge de l’exécution au plus tard le jour de l’audience .»

La formalité de la lettre recommandée n’est pas impérative et l’huissier peut en être informé autrement.

La dénonciation peut ainsi être faite par signification, conformément à l’article 651 al 3 du code de procédure civile, qui dispose de façon générale, que la notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l’aurait prévue sous une autre forme.

De plus, la formalité prévue par ce texte, ayant pour seul objet d’informer l’huissier de justice ayant procédé à la saisie de l’existence d’une contestation, son omission n’entraine pas l’irrecevabilité de celle-ci lorsque l’huissier, informé de la contestation par l’assignation délivrée à domicile élu, est celui qui a procédé à la saisie.

La dénonciation aux huissiers poursuivants de l’assignation en contestation de la saisie-attribution a été délivrée par lettre recommandée le même jour que l’assignation, le 2 mai 2014, et les huissiers saisissants en ont accusé réception le 5 mai 2014 (pièces 3, 4 et 5 de l’appelante).

La dénonciation à la banque de la contestation a été effectuée par lettre recommandée du 6 mai 2014, dont l’accusé de réception a été signé le 9 mai 2014 (pièce 6 de la société B C).

Dans ces conditions, la procédure de l’article 66 du décret n°92-755 du 31 juillet 1992, devenu l’article R 211-11 du code des procédures civiles d’exécution, a été respectée par l’appelante et le jugement déféré sera réformé de ce chef.

Sur le fond :

L’ordonnance de référé du conseil de prud’hommes de NICE du 30 janvier 2014 a notamment condamné la société B C à payer à Mme Y les sommes de :

1.995,58 € brut à titre de provision sur complément de salaire

188,46 € net à titre de provision sur commission

500 € net sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

(pièce 7 de l’appelante)

La saisie-attribution du 31 mars 2014 porte sur ces sommes, sans prendre en considération le fait que la première concerne une somme brute (pièce 12 de la société B C) et que doivent être déduites du complément de salaire brut les charges patronales et salariales, dont le versement aux organismes sociaux et à l’État appartient à l’employeur et au paiement desquelles ne peut prétendre la salariée.

Une saisie-attribution, pratiquée sur une somme excessive, n’encourt cependant par la nullité mais la limitation de ses effets, conformément à l’article R211-12 du code des procédures civiles d’exécution.

Le paiement par l’employeur le 20 novembre 2014 du solde débiteur de 1.009,18 € n’était pas apparu comme suffisant pour que la mainlevée de la mesure soit ordonnée, la somme de 297,63 € étant encore due (pièces 12 et 13 de l’appelante). L’ensemble des sommes faisant l’objet de la saisie-attribution a toutefois été réglé le 24 novembre 2014 (pièce 15 de l’intimée) et il n’est pas contesté que la mainlevée de la mesure a été ordonnée, ce qui ôte ainsi son objet à la demande présentée de ce chef par la société B C.

L’appelante ne démontre pas avoir informé Mme Y du montant net des condamnations mises à sa charge avant la mesure de saisie-attribution critiquée. Il n’incombait pas à la salariée, qui n’était pas en mesure de le faire, de calculer le montant net issu des condamnations prononcées.

Il ne peut dès lors être reproché à Mme Y d’avoir mis à exécution l’ordonnance du 30 janvier 2014 .

Par ailleurs l’appelant n’établit pas le caractère abusif de la saisie-attribution diligentée par Mme Y et sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts.

La Cour est saisie d’une contestation de la mesure de saisie-attribution et dans le cadre de cette saisine elle ne peut que constater que Mme Y ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui réparé par les intérêts moratoires. L’intimée sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive de son employeur à exécuter l’ordonnance du 30 janvier 2014.

Faute en outre pour l’intimée de démontrer le caractère abusif de la contestation de la procédure d’exécution par la société B C, sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée ne peut prospérer.

De même, Mme Y, qui ne caractérise pas l’abus de procédure de son employeur en première instance ni devant la Cour, sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

la Cour,

Infirme le jugement dont appel et, statuant à nouveau,

Déclare recevable la contestation, par la SAS B C, de la saisie-attribution pratiquée le 31 mars 2014;

Juge que la saisie-attribution n’était valable que à concurrence des sommes allouées par le titre après déduction des charges patronales et salariales;

Constate que la demande de mainlevée de la saisie-attribution du 31 mars 2014 est devenue sans objet ;

Déboute les parties de leurs demandes de dommages et intérêts ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes ;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples ;

Partage par moitié entre les parties les dépens de première instance et d’appel, ces derniers recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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