Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 17 décembre 2021, n° 20/05338

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Me Nicolas Taquet · consultation.avocat.fr · 23 novembre 2023

Selon l'URSSAF Caisse Nationale, 7 contrôles sur 10 aboutissent à une régularisation (pour Ayming, c'est 9 contrôles sur 10 qui aboutissent à une régularisation de cotisations par l'URSSAF, pour les entreprises de plus de 250 salariés[1]). C'est dire l'importance de ces vérifications pour les entreprises. A partir des ces données, plusieurs attitudes peuvent être envisageables : soit considérer que l'URSSAF a raison (ce qui est souvent le cas) et négocier avec elle des délais de paiement et une réduction des majorations de retard, soit au contraire se battre et ne pas subir. Et dans ce …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-8, 17 déc. 2021, n° 20/05338
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 20/05338
Sur renvoi de : Cour de cassation, 27 mai 2020
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 17 DECEMBRE 2021

N°2021/ .

Rôle N° RG 20/05338 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BF4WW

URSSAF DE CORSE CONTENTIEUX

C/

SNC VENDASI

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

— 

Me Jean victor BOREL

-

Me Isabelle BLATTER

N° RG 20/05338 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BF4WW

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 28 Mai 2020.

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

URSSAF DE CORSE CONTENTIEUX, demeurant […]

représenté par Me Jean victor BOREL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Jenna BROWN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

SNC VENDASI prise en la personne de son représentant légal domicilié en

cette qualité au siège social sis, demeurant Lieu-dit SUARICCIA – Route du village de Furiani – 20620 BUGUGLIA

représentée par Me Isabelle BLATTER, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 19 Octobre 2021 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre,

Mme Catherine BREUIL, Conseiller,

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Décembre 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Décembre 2021

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

En fin d’année 2012, la société en nom collectif (SNC) Vendasi et cie, immatriculée auprès de l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales de Corse (ci-après URSSAF de Corse) et ayant une activité de bâtiment et de travaux publics, a fait l’objet d’un contrôle sur l’application de la législation de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires, sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Un avis de contrôle lui a été adressé le 18 mai 2011 et, par lettre d’observations du 9 novembre 2012, l’URSSAF de Corse l’a informée de vingt et dix chefs de redressement, respectivement pour ses deux établissements situés à Furiani et à Ajaccio pour un montant total de 2 126 253 euros.

Par lettre du 23 novembre 2012, la société a entendu contester le montant redressé et a apporté des précisions notamment sur la ventilation du personnel effectuée par l’URSSAF entre les chantiers du 'bâtiment’ et les chantiers 'de travaux publics ou ouvrages d’art’ et sur la comptabilisation des frais kilométriques par application d’un barème fiscal inapproprié aux véhicules utilisés par ses salariés.

Par deux mises en demeure du 27 décembre 2012, la SNC Vendasi et cie a été enjointe de régler la somme totale de 2 155 890 euros.

Après saisine infructueuse de la commission de recours amiable (CRA) de l’organisme de sécurité sociale elle a, par lettre du 28 juin 2013, porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Corse.

Par jugement du 7 décembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Corse a déclaré recevables les recours de la société, dit que l’activité de la SNC Vendasi et cie s’entendait d’une activité de travaux publics s’agissant des chantiers du complexe sportif de Borgo, du stade Armand Cesari, du sémaphore de Brando, du hall des sports Borgo, dit que le taux AT/MP correspondant à cette activité devait être appliqué pour les deux sites d’Ajaccio et de Furiani aux cotisations et contributions calculées sur les années 2009 et 2010, a renvoyé l’URSSAF de Corse à procéder à un nouveau calcul des sommes éventuellement dues au titre des cotisations et contributions en cause et au titre de l’ensemble des postes de redressement concernés en suite de

l’application du taux AT/MP pour le risque de l’activité 'Travaux Publics', un nouveau calcul des sommes éventuellement dues au titre des redressements opérés pour frais professionnels et frais professionnels non justifiés, sur la vérification à faire du nombre de kilomètres parcourus, des jours de présence des salariés concernés sur les chantiers extérieurs et tenant compte de la réalité des véhicules utilisés, infirmé la décision de la CRA de l’organisme de sécurité sociale du 20 mars 2014, dit nulles et de nul effet les mises en demeure du 27 décembre 2012.

Par déclaration au greffe de la cour, l’URSSAF de Corse a régulièrement interjeté appel.

Par arrêt du 21 novembre 2018, la cour d’appel de Bastia a déclaré irrecevable la demande de nullité du contrôle, infirmé le jugement en date du 7 décembre 2015 du tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Corse, débouté la SNC Vendasi et cie de sa demande aux fins de voir l’URSSAF de la Corse condamnée au paiement d’une amende civile, débouté la SNC Vendasi et cie de sa demande en dommages et intérêts, validé le redressement et les mises en demeure en date du 27 décembre 2012 pour la somme totale de 2 507 497 euros comprenant la somme de 2 155 890 euros au titre des cotisations et celle de 351 607 euros au titre des majorations de retard, condamné la SNC Vendasi au paiement de la somme de 2 507 497 euros ainsi validée, à l’URSSAF de la Corse, l’a déboutée de sa demande au titre des dispositions de l’ article 700 du code de procédure civile, l’a condamnée à payer à l’URSSAF de la Corse la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles.

La SNC Vendasi et cie a alors formé un pourvoi.

Par arrêt du 28 mai 2020, la Cour de cassation a cassé et annulé la décision précitée en toutes ses dispositions considérant, s’agissant de la demande de nullité, qu’en écartant le moyen tiré de l’irrégularité de l’avis de contrôle pour déclarer irrecevable la demande de nullité du contrôle, la cour d’appel a violé l’article 563 du code de procédure civile en ce que les demandes d’annulation du contrôle au motif de son irrégularité formelle étaient nouvelles au sens des articles 564 et 565 du code de procédure civile, la Cour de cassation précisant qu’il s’agissait non pas d’une nouvelle prétention, mais d’un nouveau moyen.

L’affaire a été renvoyée devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence et l’URSSAF a formalisé une déclaration d’appel le 9 juin 2020.

Par conclusions déposées et reprises lors des débats, l’URSSAF de Corse, par la voix de son conseil, sollicite de la cour de :

— la recevoir en son appel,

— infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Corse en date du 7 décembre 2015 en toutes ses dispositions,

— dire et juger régulier et bien fondé le redressement litigieux,

— dire et juger régulières les mises en demeures en date du 27 décembre 2012,

— condamner la SNC Vendasi et cie à lui payer la somme totale de 2 507 497 euros, comprenant la somme de 2 155 890 euros au titre des cotisations et celle de 351 607 euros au titre des majorations de retard,

— condamner la SNC Vendasi et cie au paiement en cause d’appel, au profit de l’URSSAF de la Corse, de la somme de 15 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

— l’avis de passage expédié préalablement au contrôle n’est pas nul,

— la première étape du contrôle a été la constitution d’une base fiable permettant l’identification des rémunérations inscrites en document de paie (fiche de paie et fiches individuelles), et la ventilation des salariés par établissement (réalisée par la SNC Vendasi par l’intermédiaire d’un tableau excel complété),

— cette première étape a conduit à la notification du redressement n°1 : erreur matérielle de report ou de totalisation (pour chaque établissement) non remis en cause par la SNC Vendasi ce qui valide la reconstitution des salaires versés à chaque salarié (voir lettre d’observation),

— une fois ce premier travail réalisé, il a été procédé à de nombreux redressements dont les deux redressements contestés portant sur les taux AT/MP et les frais professionnels dépassant les limites d’exonérations (redressement n°10),

— afin de valider la ventilation des masses salariales en fonction des risques AT/MP notifiés par la CARSAT à la SNC Vendasi, les états précédemment évoqués ont été exploités en 4 étapes :

Etape n°1 : pour chaque salarié, indiqué par la SNC Vendasi, il a été déterminé mois par mois sur quels chantiers ils avaient travaillé,

Etape n° 2 : les chantiers ont été triés en fonction du risque AT/MP (Travaux de maçonnerie et de gros 'uvre « BTP », et Construction et entretien d’ouvrage d’art « TP »),

Etape n° 3 : pour chaque salarié, le temps de présence (en jours) a conduit à déterminer l’activité prépondérante au cours de chaque mois (BTP ou TP),

Etape n° 4 : les rémunérations mensuelles inscrites en fiches individuelles ont été ventilées en fonction de l’activité prépondérante du mois (déterminée à l’étape n°3),

— le redressement finalement notifié concernant les taux AT/MP, l’a été sur la base non pas de l’étude réalisée lors du contrôle, et ayant par erreur intégré les chantiers de la tribune Sud de Furiani et du complexe sportif de Borgo contestée par la SNC Vendasi, mais sur la base de la ventilation fournie par la SNC Vendasi,

— elle s’est efforcée de pallier la carence de la SNC Vendasi en procédant dans un premier temps à une étude de risques auxquels étaient exposés les salariés qu’elle n’était pas tenue de réaliser au moment du contrôle, puis en acceptant de prendre en compte les tableaux de ventilation de salariés fournis par la SNC Vendasi au soutien de sa contestation postérieurement au contrôle,

— la SNC Vendasi n’hésite pas à tenter de retourner la bienveillance de l’URSSAF, faisant preuve d’une moralité douteuse,

— l’argumentation de la partie adverse tendant à lui reprocher de ne pas avoir exécuté le jugement est à écarter, dans la mesure où elle a interjeté appel du jugement, ce qui en suspendait les effets,

— contrairement aux allégations de la partie adverse, la lettre d’observations explique les limites d’exonération des indemnités kilométriques en précisant que l’entreprise n’étant pas en mesure de fournir l’intégralité des certificats d’immatriculation des véhicules utilisés par les salariés, il a été choisi, par mesure de tolérance et de simplification d’appliquer le barème fiscal des véhicules de 4 chevaux aux kilomètres justifiés par les états reconstitués,

— la partie adverse semble avoir compris le mode de calcul utilisé car lors de sa contestation, elle ne remet pas en cause les calculs notifiés ou les kilomètres validés mais demande l’application du barème fiscal de 7 chevaux au lieu de celui retenu lors du contrôle,

— la SNC Vendasi ne fournit aucun justificatif concernant le véhicule utilisé dans ses déplacements par un salarié pris à titre d’exemple, soit M. X,

— pour ce salarié, sur les 6.022,41 euros de frais professionnels, la somme de 3.355,87 euros a été validée au titre des frais professionnels,

— l’entreprise n’a pas été en mesure de dissocier les sommes versées au titre des indemnités de repas, des déplacements (indemnités kilométriques) et des indemnités de frais de transport pour les salariés relevant de l’établissement d’Ajaccio,

— concernant les indemnités kilométriques versées, l’entreprise a choisi de verser des indemnités kilométriques aux salariés se rendant directement sur les chantiers, l’indemnité kilométrique versée étant de 2 euros du kilomètre quelle que soit la puissance fiscale du véhicule utilisé et la distance parcourue,

— les justificatifs de déplacements fournis par l’entreprise reprenaient salarié par salarié, les cumuls de kilomètres mensuels ainsi que les indemnités versées, aucun détail ne permettant de savoir pour quel motif et où le déplacement avait eu lieu,

— ainsi les justificatifs n’ont pas été retenus comme probants,

— l’entreprise n’étant pas en mesure de fournir l’intégralité des certificats d’immatriculation des véhicules utilisés par les salariés il a été choisi, par mesure de tolérance et de simplification d’appliquer le barème fiscal réservé aux véhicules de 4 CV,

— concernant les indemnités de paniers versés, ni les modalités de délivrance ni aucun justificatif n’a pu être fourni par l’entreprise mais en application des usages de la profession, l’exonération à hauteur du montant d’un panier chantier journalier a cependant été acceptée,

— le nombre de paniers exonérables a été déterminé pour chaque salarié non sédentaire, via la formule, 'nombre de mois travaillés *(x) 22 jours',

— pour les frais de déplacement, au lieu d’appliquer le barème fiscal modulant le remboursement kilométrique en fonction de la puissance du véhicule, elle a appliqué une indemnité kilométrique commune à tous ses salariés de 2 euros du kilomètre,

— une telle pratique conduit forcément à un dépassement des limites d’exonération justifiant le redressement,

— les prétentions selon lesquelles, elle devrait effectuer un calcul en retenant une moyenne de 7 chevaux fiscaux en l’absence de justificatifs probants, sont infondés juridiquement,

— en effet, soit les justificatifs produits doivent être considérés comme suffisamment probants auquel cas ils doivent conduire à une déductibilité sur une base réelle, soit ces justificatifs doivent être considérés comme non probants, auquel cas la valeur du barème kilométrique fiscal prévu pour un véhicule de 4 CV doit être validé, étant rappelé qu’il s’agit d’une mesure traduisant une certaine bienveillance puisqu’elle aurait pu procéder à une réintégration totale des indemnités versées aux salariés en l’absence de justificatifs probants,

— les difficultés rencontrées par la SNC Vendasi pour justifier de la réalité des frais de déplacement

exposés par ses salariés s’expliquent d’autant plus aisément que certains d’entre eux ont expressément reconnu avoir perçu des indemnités au titre de frais de déplacement, en lieu et place de salaire, alors même qu’ils n’avaient réalisé aucun déplacement professionnel,

— un contentieux avec M. Y sur ce point est pendant devant la cour d’Aix-en-Provence suite à jugement du Conseil des Prud’hommes d’Ajaccio ayant fait droit à la demande du salarié visant à obtenir la rectification de l’ensemble de ses bulletins de salaire portant sur la période de 2009, en reconnaissant le bien-fondé des indications de ce salarié selon lesquelles il n’avait en réalité effectué aucun déplacement professionnel,

— il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais exposés pour assurer sa défense.

Par conclusions déposées et reprises lors des débats, la SNC Vendasi et Cie, par la voix de son conseil, sollicite de la cour de :

— confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Corse en date du 7 décembre 2015 en ce qu’il a infirmé la décision de la CRA de l’URSSAF de la Corse du 20 mars 2014 et déclaré nul et de nul effet les mises en demeure en date du 27 décembre 2012,

plus particulièrement :

1/ sur l’avis de passage, de constater le manquement de l’URSSAF à l’accomplissement des formalités substantielles du contrôle, et en conséquence dire et juger nul le contrôle entrepris,

2/ sur l’application des taux AT de confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Corse en date du 7 décembre 2015 en ce qu’il a donné acte à la SNC Vendasi de sa répartition du personnel et des rémunérations selon les tableaux 17 et 18, et de :

— dire et juger que l’URSSAF n’a pas contesté les tableaux communiqués,

— dire et juger que les modifications des cotisations relatives au taux AT ont une incidence sur six postes du redressement,

— dire que l’URSSAF n’a pas procédé aux calculs nécessaires à la rectification des cotisations des six postes impactés par la modification des cotisations AT, malgré les injonctions du tribunal de première instance,

— dire et juger injustifié le redressement entrepris, faute pour l’URSSAF de ne pas avoir effectué les calculs nécessaires au redressement entrepris, et

en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu’il a infirmé la décision de la CRA de l’URSSAF de la Corse du 20 mars 2014 et déclaré nulles et de nul effet les mises en demeure en date du 27 décembre 2012,

4/ sur les frais professionnels de :

— dire et juger irrégulier le redressement dû à l’absence de communication, par l’URSSAF de son mode de calcul sur le redressement entrepris,

— dire et juger mal fondée la méthode de calcul de l’URSSAF,

— dire et juger régulières et probantes les preuves fournies par l’employeur,

— dire et juger insuffisants les calculs faits par l’URSSAF des indemnités kilométriques au regard des

éléments fournis,

en conséquence, de :

* rejeter le redressement entrepris sur le calcul des frais professionnels et frais professionnels non justifiés pour manque de base légale,

* confirmer la décision de première instance, en ce qu’elle a infirmé la décision de la CRA de l’URSSAF de la Corse du 20 mars 2014 et déclarée nulles et de nul effet les mises en demeure en date du 27 décembre 2012,

5/sur l’article 700 du code de procédure civile, de :

— condamner l’URSSAF au paiement en cause d’appel,à son profit, de la somme de 20 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— lui donner acte de ce qu’elle se réserve de droit de compléter ou de modifier les présentes écritures, ainsi que de formuler éventuellement toutes observations orales.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

— contrairement aux allégations de l’URSSAF, cette dernière n’a fait preuve d’aucune bienveillance à son égard et s’obstine à vouloir lui imposer un redressement de 3 millions d’euros alors qu’elle ne produit pas le moindre fondement matériel,

— l’organisme de sécurité sociale n’a pas contrôlé les plannings tenus à sa disposition lors du contrôle et communiqués en première instance, ni vérifié les listes d’affectation du personnel,

— les conclusions de l’URSSAF ne sont pas sérieuses puisqu’elle affirme avoir retraité une partie des informations, dont les rémunérations et non pas les tableaux dans leur ensemble, avouant ainsi implicitement qu’aucun contrôle de la ventilation n’a été effectué,

— après avoir pris les conseils d’un conseil de son choix, elle a pu procéder à la répartition de chaque salarié en fonction de son affectation principale sur les périodes de 2009 et 2010 et rétablir ainsi les bases des cotisations AT, selon que les salariés étaient affectés sur des chantiers relevant du bâtiment ou des travaux publics,

— la justesse de la méthode ainsi que le fondement de ces tableaux ont été reconnus en première instance par le tribunal des affaires de sécurité sociale,

— concernant les frais professionnels, le tableau communiqué par L’URSSAF est difficilement compréhensible dès lors que l’on ignore comment est déterminée la première colonne appelée 'limite d’exonération indemnités kilométriques',

— l’organisme de sécurité sociale ne s’est pas expliqué sur ses méthodes de calcul retenues dans les tableaux de redressement,

— l’organisme de sécurité sociale n’a apporté aucune indication sur les éléments l’ayant conduite à écarter les attestations fournies par les salariés, ni à évincer l’ensemble des autres frais professionnels,

— contre toute attente, il n’a pas procédé à un nouveau calcul des indemnités kilométriques alors qu’il détient les éléments lui permettant de le faire,

— ayant retenu le remboursement des frais selon la réalité des dépenses engagées, l’ URSSAF se devait de contrôler le nombre de kilomètres parcouru tel qu’il figure dans le planning des chantiers et appliquer le barème selon les CV fiscaux déclarés par les salariés,

— les indemnités kilométriques sont réputés utilisées conformément à leur objet dans la limite du barème fiscal,

— les éléments fournis par ses soins permettent de constater que la moyenne de puissance fiscale des véhicules utilisés par les salariés pour se rendre sur les chantiers est de l’ordre de 7CV à 8CV,

— il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais exposés pour assurer sa défense compte-tenu des nombreux reports d’audience uniquement dus à la communication tardive de ses écritures par l’URSSAF, de son refus d’examiner les pièces communiquées sans oublier les coûts de déplacements.

Conformément aux dispositions de l’article 446-1 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétention des parties, il convient de se reporter à leurs observations orales ou à celles qu’elles auraient formulées par écrit et auxquelles elles ont invité à se reporter.

Lors des débats les parties ont été avisées que la décision serait mise à disposition au greffe.

MOTIFS

Il est observé que, à la suite de la décision de la Cour de cassation, le moyen selon lequel la demande de nullité soulevée par la SNC Vendasi et Cie et qui constituerait une nouvelle prétention, serait irrecevable n’est plus articulé.

*****

La SNC Vendasi et Cie soutient la nullité du contrôle opéré par l’organisme devant entraîner la nullité du redressement, relevant le manquement de l’URSSAF à l’accomplissement des formalités substantielles du contrôle s’agissant de l’avis de passage lequel, d’une part a restreint ses possibilités d’assistance ce qui l’a privé d’un exercice effectif des droits de la défense, et d’autre part n’a pas été adressé à son représentant légal.

L’URSSAF de la Corse, considère que la procédure est régulière, les droits de la défense ayant pu parfaitement être exercés par la société tout au long de la procédure de contrôle, celle-ci ne pouvant faire la démonstration d’aucun grief quant à la mention relative à l’assistance par un comptable, seule une absence totale de celle-ci pouvant causer grief ce qui n’est pas le cas d’espèce. Elle soutient par ailleurs que la mention portée à l’avis n’interdisait pas à la société de se faire assister par une quelconque autre personne que le comptable.

Elle relève par ailleurs que l’article R. 243-59 dans sa version applicable à l’espèce, ne prévoyait pas l’obligation d’adresser l’avis de passage au représentant légal de la société.

L’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable lors de l’envoi de l’avis de contrôle, dispose notamment :

— en son premier alinéa, que tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 est précédé de l’envoi par l’organisme chargé du recouvrement des cotisations d’un avis adressé à l’employeur ou au travailleur indépendant par lettre recommandée avec accusé de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l’article L. 324-9 du code du travail. Cet avis mentionne qu’un document présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu’ils sont définis

par le présent code, lui sera remis dès le début du contrôle et précise l’adresse électronique où ce document est consultable. Lorsque l’avis concerne un contrôle mentionné à l’article R. 243-59-3, il précise l’adresse électronique où ce document est consultable et indique qu’il est adressé au cotisant sur sa demande, le modèle de ce document, intitulé « Charte du cotisant contrôlé », est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

— en son second alinéa, que l’employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l’avis prévu à l’alinéa précédent.

— en son cinquième alinéa, qu’à l’issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l’employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s’il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l’indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l’employeur ou du travailleur indépendant. Ce constat d’absence de bonne foi est contresigné par le directeur de l’organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu’il dispose d’un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu’il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix.

La lettre circulaire n°2007-107 du 27 juillet 2007 prévoit de même sorte en son article 4.1.1 l’instauration d’une charte du cotisant contrôlé dont l’avis de contrôle doit faire mention de la remise au cotisant dès le début du contrôle, et qui présente la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son terme, ledit avis de contrôle devant également obligatoirement mentionner le droit pour le cotisant de se faire assister pendant le contrôle par le conseil de son choix.

En l’espèce, l’URSSAF de la Corse a adressé le 18 mai 2011, par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception, à la SNC Vendasi et Cie – […], un avis de contrôle. Cet avis informait le cotisant de ce qu’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, de l’assurance chômage et de la garantie des salaires AGS pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, aurait lieu le 28 juin 2011 vers 09 heures, dans l’entreprise.

Il était porté la mention suivante s’agissant de l’un des droits ouverts à la société du fait de ce contrôle, 'Je vous informe que votre comptable peut vous assister durant cette vérification', puis que dès le début du contrôle, la Charte du cotisant contrôlé lui serait remise, charte dont le modèle fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale était consultable sur le site ://www.urssaf.fr.

Dans sa version actuelle (2020), la charte du cotisant contrôlé porte mention page 7 dans le paragraphe 'comment êtes-vous informé du contrôle '' au 3ème alinéa, que lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l’avis de contrôle est adressé à l’attention de son représentant légal et envoyé à l’adresse du siège social de l’entreprise ou, le cas échéant, à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées à l’organisme de recouvrement et page 8 second alinéa, de ce que ce l’avis préalable précise que le cotisant peut se faire assister par un conseil de son choix.

Il est cependant observé que l’organisme ne produit pas copie de la charte telle que rédigée au moment du contrôle permettant de visualiser le libellé de cette possibilité offerte au cotisant, telle qu’il existait à l’époque, et qu’elle met en avant dans ses écritures en se basant sur les mentions actuelles.

A l’issue du contrôle réalisé sur place, une lettre d’observations a été adressée le 09 novembre 2012

par l’organisme au cotisant contrôlé. Elle porte mention de ce que la société peut fait part de ses remarques dans le délai de 30 jours par lettre recommandée avec accusé de réception et que pour ce faire, qu’elle peut se faire assister par un conseil de son choix. C’est donc uniquement à compter de cette date, après les opérations de contrôle elles-mêmes, que la société a eu connaissance de la plénitude des droits qui étaient les siens ici pour répondre éventuellement à la lettre d’observations.

La société ayant fait usage directement de cette possibilité par courrier du 23 novembre 2012, l’organisme de sécurité sociale a adressé une réponse sur les points en litige à une date non portée sur le document mais postérieure à la lettre de contestation de la société, l’invitant si elle le souhaitait, à saisir la commission de recours amiable de toute contestation, dans les délais requis.

C’est ainsi que par lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 23 janvier 2013, la SNC Vendasi et Cie a saisi la commission de recours amiable, laquelle a rendu son avis le 20 mars 2013, notifié le 29 avril 2014.

L’article 114 du code de procédure civile mis en avant par l’URSSAF dispose qu’aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public, et que la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

La SCN Vendasi et Cie considère que les mentions portées à l’avis de contrôle adressé, sont des mentions substantielles dont le défaut entraîne la nullité des opérations de contrôle, sans qu’il ne soit nécessaire pour le cotisant de rapporter la preuve d’un préjudice et ce qui a pour conséquence d’entraîner la nullité du redressement entrepris.

Il est ici observé que les jurisprudences rappelées par la société, comme elle le décrit elle-même dans ses écritures, concernent les hypothèses d’absence de mention alors qu’il s’agit ici d’une mention existante, mais non conforme à la formulation portée à l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale.

La SCN Vendasi et Cie considère au demeurant que cette mention erronée lui a porté grief puisqu’elle n’a pu préparer utilement la visite du contrôleur dans le respect du contradictoire et organiser sa défense comme le prévoient les textes.

L’appelante expose que l’intimée ne peut faire état d’aucun grief en réalité puisqu’elle a été assistée non seulement par son comptable, mais également par son avocat, de façon précoce et aux divers stades du redressement, ce qui démontre qu’elle connaissait parfaitement l’étendue de ses droits et n’a subi aucun véritable grief, ayant ainsi exercé tous ses droits dans les délais, ce qui ne l’a privé d’aucune garantie.

La lettre d’observations ne fait pas état des personnes que les agents chargés du contrôle ont été amenés à rencontrer dans l’entreprise. En tout état de cause, elle ne démontre pas que, comme le sous-entend l’organisme de sécurité sociale, l’entreprise aurait été assistée d’un avocat de façon précoce.

Il ressort même des pièces versées par l’appelante et rappelées ci-dessus, que ce n’est qu’à compter de la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale que l’intimée s’est fait assister/représenter aux divers stades des procédures par un avocat (quand bien même avait-elle été informée de la possibilité dans la lettre d’observations), tous les échanges précédents ayant été réalisés par la SNC elle-même (sans mention de la personne les ayant signés), à une période où le contentieux était déjà noué puisque les recours amiables et préalables avaient tous été épuisés.

Le contrôle s’est déroulé du 28 juin 2011 au 08 novembre 2012.

Malgré les demandes figurant dans les diverses écritures de la société, l’organisme ne démontre pas avoir transmis à celle-ci les tableaux rectificatifs qui lui auraient été fournis par son salarié, comptable, durant la période de contrôle et dont il est fait état par l’inspecteur (page 136/137 de la lettre d’observations), qui indique que ce n’est qu’après un délai de plusieurs mois qu’ils lui ont été adressés, sous une forme difficilement exploitable en raison de nombreuses carences, de sorte qu’il a été décidé de reconstituer les DADS sous une autre forme, ce qui témoigne du manque de fiabilité de la personne possédant la fonction autorisée à assister à la vérification selon l’avis de contrôle.

Cette mention page 136 démontre également que l’inspecteur a eu ces tableaux durant la procédure de contrôle elle-même et non comme le soutient l’URSSAF le 06 décembre 2012 durant la période contradictoire en réponse à sa lettre d’observations, voir lors de la procédure devant la commission de recours amiable, et qu’il en a utilisé les éléments pour rédiger sa lettre d’observations, peu important ensuite que des modifications et/ou minorations soient intervenues pour d’autres motifs, le montant total restant réclamé s’élevant à 666 189 euros pour l’établissement d’Ajaccio et à 1 841 308 euros pour l’établissement de Furiani selon les mises en demeure datées du 27 décembre 2012 ce qui témoigne de l’importance des opérations.

En tout état de cause, cette façon de procéder n’a pas davantage permis l’exercice du principe du contradictoire dans toute sa plénitude, au moment même le plus important à savoir la période de contrôle elle-même, lors de laquelle selon les termes mêmes de la charte du cotisant, plusieurs choix peuvent s’ouvrir à la société concernant le type de contrôle (exemple par échantillonage).

La définition du mot 'conseil’ donnée par le Larousse, fait état en première intention de ce qu’il s’agit d’un avis, d’indication donnés à quelqu’un par quelqu’un d’autre pour le diriger dans sa conduite, dans ses actes, recommandation et en troisième intention de ce qu’il s’agit d’une personne, souvent spécialisée, à qui on s’adresse pour avoir un avis sur une question, dans un domaine précis.

La restriction portée à l’avis de contrôle, de l’assistance possible pour la société contrôlée, uniquement par un comptable porte au demeurant nécessairement grief à celle-ci dans la mesure où elle n’a pu s’entourer d’avis plus qualifiés prodigués par un conseil, qu’il s’agisse à son choix d’un expert comptable, un juriste spécialisé, un avocat… et qu’elle n’a pu ainsi exercer la plénitude des droits de la défense dont elle disposait. Alors que l’organisme de sécurité sociale ne démontre pas avoir remis à la société contrôlée la charte lors de son arrivée sur site pour procéder au contrôle, cette dernière ne pouvait que légitimement penser qu’elle ne disposait que de la possibilité de se faire assister d’un comptable, comme elle l’a été, sans qu’elle n’ait eu à aller vérifier les informations données sur un site.

Dès lors et sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner les autres demandes et moyens des parties, la nullité de la procédure de contrôle et partant de l’intégralité de la procédure de redressement qui s’en est suivie sera prononcée et la décision de première instance infirmée en toutes ses dispositions.

*****

L’URSSAF sollicite la condamnation de la SNC Vendasi et cie à lui payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La SNC Vendasi et cie réclame sur le même fondement une somme de 20 000 euros.

L’URSSAF succombant en ses demandes, elle sera condamnée aux entiers dépens de l’instance.

Elle sera en outre condamnée à payer à la SNC Vendasi et cie la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après rapport et débats en audience publique, par arrêt contradictoire mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu le 07 décembre 2015 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Corse de Bastia, en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau :

Prononce la nullité des opérations de contrôle de la SNC Vendasi et cie par l’URSSAF de la Corse et partant de l’intégralité de la procédure de redressement opérée à la suite.

Condamne l’URSSAF de la Corse à payer à la SNC Vendasi et cie la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne l’URSSAF de la Corse aux entiers dépens.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 17 décembre 2021, n° 20/05338