Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 7 avril 2022, n° 19/02690

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-4, 7 avr. 2022, n° 19/02690
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/02690
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nice, 20 janvier 2019, N° F17/00997
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 07 AVRIL 2022

N° 2022/

FB/FP-D

Rôle N° RG 19/02690 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDZQL

Z X


C/

SAS Y DISTRIBUTION


Copie exécutoire délivrée

le :

07 AVRIL 2022

à :


Me Aïcha CONDE, avocat au barreau de PARIS


Me Antoine VIVANT, avocat au barreau de PARIS

Décision déférée à la Cour :


Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 21 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F17/00997.

APPELANT

Monsieur Z X, demeurant […]

représenté par Me Aïcha CONDE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SAS Y DISTRIBUTION, demeurant […]

représentée par Me Antoine VIVANT, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 24 Janvier 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.


La Cour était composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.


Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Avril 2022.

ARRÊT

contradictoire,


Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Avril 2022,


Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M. X (le salarié) a été engagé par la société NC Numéricable en qualité de conseiller clientèle boutique par contrat à durée indéterminée le 28 juin 2010, niveau 1, statut employé, classification C de la convention collective des télécommunications, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1300 euros et une rémunération variable déterminée en fonction des ventes réalisées, de l’atteinte d’objectifs boutique et d’un critère qualité, pour 35 heures par semaine.


Par avenant du 26 août 2010 les paramètres de sa rémunération variable ont été modifiés.


Le salarié a été élu délégué du personnel le 14 novembre 2014.


Dans le cadre de la cession par la société Numéricable de son activité de distribution à la société Y Distribution (la société), les contrats de travail des salariés concernés ont été transférés le 1er septembre 2016.


Le salarié étant titulaire d’un mandat de délégué du personnel suppléant, le transfert de son contrat de travail à la société Y Distribution a été autorisé par l’inspecteur du travail le 20 octobre 2016 et ce transfert était effectif à compter du 25 octobre 2016.


Du fait du transfert le salarié a perdu son mandat.


La société Y a signé le 19 octobre 2016 un accord majoritaire avec les organisations syndicales portant sur les mesures d’accompagnement du projet de réorganisation de la société prévoyant la suppression de 5000 postes dont 1000 dans la distribution par un plan de départ volontaire.


Ce plan a été validé par la DIRECCTE le 17 novembre 2016.


La boutique dans laquelle le salarié exerçait ses fonctions a cessé toute activité et a fermé le 1er novembre 2016.


Le salarié a été dispensé d’activité jusqu’au 31 mars 2017, date de la clôture du plan de départ volontaire.


Par lettre du 24 novembre 2016 la société a informé le salarié de la suppression de son poste et de son éligibilité au plan de mobilité professionnelle.


Le salarié a candidaté au plan de départ volontaire et présenté à cette fin le 12 janvier 2017 un projet finalisé portant sur la création d’un commerce.


Le 26 janvier 2017 le salarié a été convoqué à un entretien préalable à une rupture amiable du contrat de travail pour motif économique.


Compte tenu de la période de protection encore en cours, l’inspection du travail a autorisé le 7 mars 2017 cette rupture.


Les parties ont signé le 20 mars 2017 un protocole de rupture d’un commun accord pour motif économique avec une fin de contrat à l’issue de son préavis conventionnel de 2 mois.


Le même jour il a accepté le bénéfice du congé de reclassement ayant donné lieu à signature le 7 avril 2017 d’un d’engagement réciproque, dont il a demandé la rupture le 30 juin 2017 avec le versement de l’indemnité de solution professionnelle prévue par le PMP.


Le salarié a saisi le 15 novembre 2017 le conseil de Prud’hommes de Nice de demandes de rappels de salaire sur heures de délégations, de solde d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité conventionnelle de licenciement, d’indemnité complémentaire de licenciement, d’indemnité de solution professionnelle sur la base du salaire de référence recalculé, de dommages et intérêts pour exécution déloyale de l’accord majoritaire et de dommages et intérêts pour discrimination syndicale.

Par jugement du 21 janvier 2019 le conseil de prud’hommes de Nice a :


- débouté Monsieur Z X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.


- débouté la Société Y Distribution de sa demande sur le fondement de l’Article 700

du Code de Procédure Civile.


- condamné Monsieur Z X aux dépens.


Le salarié a interjeté appel du jugement par acte du 14 février 2019 en visant expressément le chef de jugement l’ayant débouté de ses demandes de rappel au titre des heures de délégation, des congés payés afférents, de soldes d’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, du solde d’indemnité conventionnelle de licenciement, d’indemnité complémentaire de licenciement, d’indemnité de solution professionnelle, des dommages et intérêts pour exécution déloyale de l’accord majoritaire et des dommages et intérêts pour discrimination syndicale .

PRÉTENTIONS ET MOYENS
Dans ses dernières conclusions reçues au greffe le 4 mai 2019, M. X, appelant, demande de :


RECEVOIR Monsieur Z X en son appel,


L’y DECLARER bien fondée,


Ce faisant:


INFIRMER le jugement du Conseil de prud’hommes de Nice du 21 janvier 2018,


Statant à nouveau:


CONDAMNER la société Y Distribution à lui verser:

1 – 3.194,72 € à titre de rappel de salaire au titre des heures de délégation, outre 319,47 € de

congés payés afférents;

2 – Fixer le salaire annuel de référence à 40.139,49 € soit 3.344,95 € par mois;


Ce faisant:

3 – Condamner la société Y DISTRIBUTION à lui verser:


- 605,52 € € à titre de solde d’indemnité compensatrice de préavis;


- 60,55 € € à titre de solde d’indemnité compensatrice de préavis;


- 761,69 € € à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement;


- 1.586,68 € à titre de solde d’indemnité complémentaire de licenciement;


- 398,36 €, à titre de solde d’allocation de reclassement;


- 2.316,87 €, à titre de solde d’indemnité de solution professionnelle;


- 10.000 €, pour violation des accords d’entreprise;


- 10.000 €, à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale;


- 3.000 €, sur le fondement de l’article 700 du CPC ;


Ordonner la remise de bulletins de paie conformes et d’une attestation pôle emploi

conforme, sous astreinte de 50 par jour et par document;


Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 2 août 2019, la SAS Y Distribution, intimée, demande de:


DIRE et JUGER que Monsieur X n’a subi aucun préjudice du fait de la dispense d’activité dont il a bénéficié;


DIRE et JUGER que la Société Y Distribution a exécuté de bonne foi l’accord majoritaire du 19 octobre 2016
DIRE et JUGER que les heures de délégation de Monsieur X lui ont été exactement rémunérées;


DIRE et JUGER que le salaire de référence retenu pour le calcul des indemnités de rupture est exact


DIRE et JUGER qu’il n’y a pas lieu de prononcer de rappel d’indemnités de rupture;


DIRE et JUGER que Monsieur X ne produit aucun élément permettant de laisser supposer qu’elle aurait été victime de discrimination syndicale.


En conséquence:


CONFIRMER la décision du Conseil de prud’hommes de Nice;


DEBOUTER Monsieur X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions;


CONDAMNER Monsieur X à payer à Y la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;


CONDAMNER Monsieur X aux entiers dépens.


Vu l’article 455 du code de procédure civile,


L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2022.

SUR CE

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures de délégation


Il incombe à l’employeur de justifier du paiement du salaire dû.


L’article L. 2315-3 du code du travail dans sa version applicable dispose que le temps passé en délégation est de plein droit considéré comme temps de travail et payé à l’échéance normale.


Les heures de délégation étant considérées comme du temps de travail effectif, leur utilisation ne doit entraîner aucune perte de salaire, ce faisant tous les éléments de rémunération qui auraient été acquis si le salarié avait travaillé doivent être pris en compte.


Ainsi la part variable de la rémunération doit également être prise en compte.


En cas de litige le juge doit vérifier que le système mis en place neutralise réellement l’impact des heures de délégation et notamment en ce qu’il n’a pas une incidence défavorable sur la réalisation du chiffre d’affaires déclenchant le droit à commissions.


Lorsque les heures de délégation sont prises pendant le temps de travail, elle sont rémunérées comme tel, sans permettre aux intéressés de percevoir une rémunération supérieure à celle qu’il auraient perçues s’ils avaient travaillé.


En application de l’article L. 2315-1 du code du travail les délégués du personnel disposent d’un crédit d’heures pour l’exercice de leurs fonctions maximal, sauf circonstances exceptionnelles qu’il appartient au salarié de justifier, de 15 heures par mois dans les entreprises d’au moins cinquantes salariés.


Les réunions périodiques obligatoires des instances des représentants du personnel et celles organisées à l’initiative de l’employeur ne s’imputent pas sur le crédit d’heures.
En l’espèce le salarié sollicite un rappel de salaire à hauteur de 3194,72 euros et 319,47 euros de congés payés afférents pour les années 2015-2016 au titre de ses heures de délégation en ce que celles-ci lui étaient payées sur la base de son seul salaire fixe sans prise en compte de sa rémunération variable, laquelle était au surplus négativement impactée par l’absence de proratisation des objectifs du fait de son mandat.


A l’appui de sa demande le salarié produit :


- ses bulletins de paie et leur annexe récapitulant les informations sur les heures de délégation, lesquelles mentionnent de janvier à mai 2015 les dates d’utilisation, leur nombre mensuel et le taux horaire correspondant au taux horaire de base et les annexes postérieures ne faisant figurer que leur date et leur nombre sans précision sur la rémunération applicable;


- un courrier de la DIRECCTE de Seine et Marne adressé à la direction de Numéricable en date du 14 février 2012 l’invitant à apporter des réponses aux signalements reçus sur la surcharge générale de travail des salariés exerçant une fonction commerciale eu égard aux objectifs fixés et en particulier sur ceux de ces salariés représentants du personnel dont les objectifs fixés ne tiennent pas compte du temps consacré à leur mandat ce qui aboutit à les pénaliser financièrement et à encourir un risque d’entrave;


- des mails du salarié évoquant le paiement de ses indemnités DP : 12 février 2015 (demande d’information sur l’état d’avancement du traitement de sa demande d’indemnités de DP ), 9 juin 2015 ('Lors de nos derniers échanges, il était convenu que le calcul de paiement de mes IRP était dorénavant automatique via la saisie dans Web Rh. Sur mon salaire du mois d’Avril, il apparaît une ligne de rattrapage concernant le paiement d’une partie de mes IRP des mois précédents mais n’ayant pas de détail, je ne comprends pas à quoi cela correspond’ Sur mon salaire de Mai, il n’y a aucune compensation pour ma journée de réunion DP de Mai, ainsi que pour mes 15 heures de délégation du mois. J’ose espérer que cela pourra se résoudre rapidement, l’impact sur mon salaire n’étant quand même pas négligeable') et 14-16 juin 2016 (demandes d’entretien concernant le calcul de ses IRP).


- des comptes rendus des réponses aux questions des délégués du personnel de la région Méditerranée d’août 2015 et de novembre 2015 (sur le défaut d’adaptation des objectifs des élus et délégués au regard de leur mandat), de mars 2016 (sur le défaut d’indemnisation des élus UNSA, en particulier l’une d’elle, lors de l’exercice leur mandat notamment pour les réunions mensuelles à la demande de la direction);


- les convocations mensuelles aux réunions des délégués du personnels de la région méditerranée de décembre 2014 à octobre 2016 dont le salarié délégué du personnel titulaire UNSA;


- un extrait du procès-verbal du CE du 31 mars 2014 relatif à la procédure d’information et de consultation des IRP sur le projet de réorganisation accordant un crédit de 15 heures exceptionnel supplémentaires de délégation du 1er avril au 30 juin 2014, mesure prorogée aux termes du procès-verbal de réunion extraordinaire du CE et de l’UES Ypso France du 28 mai 2014 jusqu’à la notification de la décision de l’autorité de la concurrence.


Sans contester le principe du paiement des heures de délégation sur la base du salaire réel comprenant les commissions, la société affirme s’y être conformé en englobant dans la part variable, la part correspondant à ses heures de délégation calculée en application de l’accord du 5 mars 2012 sur le dialogue social au sein de l’UES Ypso d’une part sur le temps de présence de la salariée à son poste en fonction d’objectifs réduits à la mesure du temps dédié au mandat, d’autre part au prorata des heures dédiées à son mandat sur la moyenne des primes perçues par ses collègues .


La société verse aux débats les éléments suivants :
- l’accord du 5 mars 2012 sur les moyens du dialogue social avec les représentants du personnel au sein de l’UES Ypso dont :

* l’article 1-3 fixe à 15 heures par mois le crédit d’heures des délégués du personnel;

* l’article 3 prévoit que 'l’exercice des mandats représentatifs ne pouvant avoir aucune incidence défavorable sur la rémunération variable en commissionnement du salarié, celui-ci doit avoir le droit de percevoir une somme fixée en tenant compte, pour la partie de son activité correspondant à ses mandats, au montant moyen de cette prime versée, pour un temps équivalent, aux autres salariés et, pour la part correspondent à son temps de production, une somme calculée sur la base d’objectifs réduits à la mesure de ce temps. Ainsi, les éléments de rémunération variable en commissionnement se calculent en deux temps: pour la part du temps de présence du salarié à son poste elle est calculée sur la base d’objectifs réduits à la mesure du temps dédiés aux mandats et pour la part réservée à son activité syndicale, l’entreprise doit calculer une moyenne des primes perçues par ses collègues';


- le listing des heures de délégation enregistrées mensuellement au nom du salarié sur le logiciel de gestion du temps de travail Tempo du 1er juin 2015 au 31 mars 2017 correspondant à un quantum d’heures prises inférieur à celui réclamé par le salarié.


A l’analyse de ces pièces la cour constate d’abord que la société ne produit aucune pièce de nature à vérifier et à établir que les commissions qui lui étaient versées chaque mois comprenaient effectivement la part correspondant à ses heures de délégation en application effective des modalités de calcul en deux temps de l’accord ci-dessus mentionné.


Ainsi, les bulletins de salaire font état d’une somme globale versée au titre des commissions et les annexes n’apportent aucun élément d’appréciation en dehors du nombre d’heures de délégation et leur contre-valeur au taux horaire du salaire fixe de base.


En conséquence le salarié est fondé à réclamer un rappel de salaire au titre de la part variable de sa rémunération sur les heures de délégation.


Sur le quantum réclamé, le salarié présente pour chaque mois de janvier 2015 à octobre 2016, une demande se référant au nombre d’heures de délégation figurant sur l’annexe de son bulletin de paie auquel il ajoute 7 heures au titre de la réunion mensuelle avant de procéder à un calcul basé sur la base des commissions du mois proratisées au nombre d’heures de délégation.


Pour s’y opposer, la société fait d’abord valoir que les calculs du salarié ne sont pas opérés sur la bonne base en ce qu’il ne prend pas en compte le décalage d’un mois existant entre le bulletin de paie et son annexe qui correspond aux heures du mois précédent, ce que vérifient les pièces du dossier ou qu’ils retiennent par erreur des commissions d’un montant supérieur à celles versées sur le mois considéré, ce qu’encore une fois les pièces du dossier vérifient (septembre 2016).


La société conteste ensuite le nombre d’heures revendiqué en faisant valoir d’une part que la demande ne peut excéder le crédit de 15 heures de délégation par mois, le doublement auquel il se réfère ayant pris fin le 27 novembre 2014, date de la décision de l’Autorité de la concurrence relative à la prise de contrôle de Y par le groupe Altice, d’autre par que le nombre d’heures de délégation enregistré sur le logiciel de gestion du temps de travail Tempo est inférieur à celui qu’il revendique, enfin que les heures consacrées aux réunions à la demande de l’employeur ont lieu sur le temps de travail, sont donc rémunérées comme tel sans ouvrir droit à rémunération supplémentaire et dont il ne démontre ni la fréquence, ni la durée.


Mais la cour relève que la société ne justifie par aucune pièce de la fin du doublement des heures de délégation, et qu’au demeurant les réunions périodiques obligatoires des instances représentatives du personnel comme les réunions à l’initiative de l’employeur ne s’imputent pas sur le crédit d’heures.
Il convient ensuite de relever que le nombre d’heures de délégation devant être retenu est bien celui qui figure sur les annexes au bulletin de salaire comme étant admises par l’employeur et justement repris par le salarié sous la réserve du décalage d’un mois précédemment observé.


En revanche s’agissant des heures de réunions mensuelles ajoutées pour sept heures tous les mois par la salariée, la cour relève que le salarié ne produit aucun autre élément que les convocations aux réunions quasi mensuelles des délégués du personnel de la région Méditerranée dont les dates coïncident pour partie aux heures mentionnées sur l’annexe et qu’il n’est précisé aucune date.


En définitive à l’issue de l’analyse comparative des fiches de paie, de leur annexe, des convocations à la réunion des délégués du personnel de la région Méditerranée et des éléments issus du logiciel Tempo, la cour fixe, en infirmant le jugement déféré, un rappel de salaire dû au salarié au titre des commissions sur heures de délégation à la somme de 2 210,41 euros et 221,04 euros de congés payés afférents.

Sur les demandes de rappels au titre des indemnités de rupture


L’accord majoritaire portant sur les mesures sociales d’accompagnement du projet de réorganisation de la société Y Distribution du 19 octobre 2016 prévoit en son article 12 les modalités d’indemnisation des ruptures, au moyen d’une part d’une indemnité équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement (article 12.2.1) d’autre part d’une indemnité complémentaire (article 12.2.2) calculée selon des paramètre liés à l’ancienneté et à l’âge du salarié, enfin une indemnité de solution professionnelle pour les salariés ayant finalisé leur projet de mobilité externe.


L’indemnité équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement et l’indemnité complémentaire exprimées en mois de salaire brut sont définies sur la base du salaire brut moyen versé sur les 12 derniers mois précédents la rupture, primes, bonus, heures supplémentaires, astreintes, variables inclus, exclusion faite de tout élément perçu qui ne correspond pas à la contrepartie du travail du salarié sans tenir compte des périodes d’indemnisation maladie et à l’exclusion des remboursements de frais. L’intéressement et la participation n’entrent pas dans l’assiette de calcul.


L’indemnité de solution professionnelle est une mesure d’accompagnement financière alternative au congés de reclassement pour les salariés porteurs d’un projet professionnel finalisé. Son montant pour les salariés de 30 ans et plus et/ou ayant au moins 4 ans d’ancienneté est égal à la somme des allocations spéciales restant à courir et non encore perçus jusqu’au 12ème mois, avec un maximum de 10 mois d’allocations spéciales en cas de préavis de 2 mois, 9 mois en cas de préavis de 3 mois.


En l’espèce, le salarié demande à voir réintégrer dans le salaire de référence pris en compte dans le protocole de rupture amiable pour motif économique signé le 20 mars 2017, sur la base des salaires perçus de mars 2016 à février 2017, un certain nombre de sommes qui n’ont pas été comptabilisées en raison de régularisations différées ou d’erreurs alors qu’elles se rapportaient à la période.


La société conteste les demandes.

Sur le rappel au titre des commissions sur heures de délégation


Le salarié demande de réintégrer aux salaires des douze derniers mois le rappel de salaire portant sur les heures de délégation de mars à octobre 2016.


La société s’y oppose en reprenant le caractère non fondé du rappel de salaire sur les heures de délégation.


Comme il a été précédemment dit, le salarié établit son droit à réintégration des sommes dues au titre des commissions sur heures de délégation, pour celles qui sont afférentes à la période de mars 2016 à octobre 2017, ce qui représente, au vu des calculs auxquels il a été procédé à partir de l’analyse comparative des pièces produites, la somme de 842,36 euros.

Sur le rappel de congés payés


Le salarié demande de réintégrer la somme de 1 238,71 euros correspondant à la régularisation intervenue en mars 2017 des congés payés pris en octobre 2016.


La société s’y oppose en faisant valoir que le salarié ne justifie ni des dates auxquelles se rapportent les congés régularisés, le bulletin de paie d’octobre 2016 ne mentionnant pas de prise de congés, ni s’il était alors salarié de Numéricable ou de Y.


La cour rappelle d’abord que lorsque la substitution d’employeurs intervient dans le cadre d’une convention entre ceux-ci, comme tel est le cas en l’espèce, le nouvel employeur est tenu, en application de l’article L.1224-2 du code du travail, des obligations qui incombaient à l’ancien employeur de sorte que peu importe que la créance de salaire réclamée ait été acquise au service du précédent employeur.


La cour relève ensuite après analyse des pièces du dossier que le bulletin de paie d’octobre 2016 qui effectivement ne fait pas figurer la prise de congés, mentionne 11 jours de congés payés acquis, celui de novembre 2016, période du transfert du contrat, montre un solde de congés de 0,62 jours, soit un redémarrage du compteur des congés payés et celui de mars 2017 une régularisation de l’indemnité de congés payés acquis pour un montant de 1 238,71 euros avec une mention spéciale 'régularisation CP novembre 2016".


Il s’ensuit que le salarié établit son droit à réintégration de la régularisation de l’indemnité de congés payés dans les salaires de mars 2016 à février 2017 dès lors qu’elle avait bien trait à cette période.

Sur le rappel pour absence autorisée payée


Le salarié demande de réintégrer la somme de 2 488,42 euros correspondant à la fraction du rappel de salaire pour dispense d’activité des mois de janvier-février 2017. Il fait ainsi valoir que deux rappels d’absences autorisées sont intervenus, en mars 2017 (retenue de -1732,69 euros et rappel de 2992,33 euros, soit un différentiel de 1259,64 euros) et en mai 2017 (retenue de -2850,55 euros et rappel de 4922,87 euros, soit un différentiel de 2072,32 euros) pour un total de 3331,96 euros, ne peuvent correspondre qu’à la période entre la fin de son arrêt maladie le 31 décembre 2016 et le début du préavis le 21 mars 2017.


Il produit :


- un échange de mails avec la responsable RH les 7 et 8 octobre 2016 par lequel le salarié l’interroge sur les modalités du maintien de salaire lors de la fermeture de la boutique et celle-ci lui confirme qu’il sera en dispense d’activité du 11 au 17 octobre 2016 du fait de l’absence de sa collègue avec maintien de sa rémunération variable sur la base de la moyenne des douze derniers mois;


- un mail de la responsable RH du 16 décembre 2016 informant le salarié et sa collègue qu’un point va être fait avec la responsable paie avant de revenir vers eux 'sur la date de régularisation des dispenses d’activité';


- le courrier de la société du 1er décembre 2016 l’informant de la prolongation de sa dispense d’activité jusqu’au 31 mars 2017.


La société s’oppose à la demande en faisant valoir que le salarié ne justifie pas de la période à laquelle se rapporte l’absence autorisée rémunérée ni celle-ci correspond à une période où elle était encore salariée de la société Numéricable.


A l’analyse des pièces du dossier, la cour relève que ni l’examen des bulletins de paie ni les pièces versées par le salarié qui procède par seule déduction, ne sont de nature à établir à quelle période se rapporte précisément les rappels d’absences autorisées payées versés en mars et mai 2017.


En conséquence la cour rejette la demande.

Sur le salaire de référence des douze derniers mois


Il découle de ce qui précède que doivent s’ajouter au cumul des salaires versés de mars 2016 à février 2017 d’un montant non contesté de 35 035,99 euros les sommes de 842,36 euros au titre des heures de délégation et de 1238,71 euros au titre du rappel de congés payés.


En conséquence la cour fixe, en infirmant le jugement déféré, le salaire sur les douze mois ayant précédé la rupture à 37 117,06 euros, soit une moyenne de 3093,08 euros par mois.

Sur les rappels d’indemnités de rupture


Le salarié réclame un solde d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité conventionnelle de licenciement, d’indemnité complémentaire de licenciement, d’allocation de reclassement et d’indemnité de solution professionnelle sur la base du salaire de référence reconstitué sur les douze derniers mois ayant précédé la rupture.


- Sur le solde au titre du préavis


En application de l’article L.1234-5 du code du code du travail l’inexécution du préavis, notamment en cas de dispense de l’employeur, n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçu s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.


En l’espèce, le salarié qui se réfère improprement à une indemnité compensatrice de préavis, a bénéficié d’un préavis de deux mois dont il a été dispensé d’exécution.


Il n’est cependant pas fondé en sa demande de répercution du nouveau salaire moyen des douze derniers mois dès lors que les régularisations réintégrées dans les salaires qui avaient été minorés de mars 2016 à février 2017 par le caractère différé de ces régularisations, sont sans incidence sur le montant de la rémunération perçue durant le préavis du 21 mars au 21 mai 2017. Ainsi au cours de la période de préavis il n’avait plus d’heures de délégation du fait de la perte de son mandat par l’effet du transfert du contrat de travail et il n’y a pas lieu de tenir compte de la régularisation des droits antérieurement acquis à congés payés alors que son salaire lui a été versé dans son intégralité durant le préavis.


En conséquence, la cour dit que la demande n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.


- Sur le solde d’indemnité de rupture équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement


En réalité, sous la qualification d’indemnité conventionnelle de licenciement, le salarié réclame un solde de l’indemnité de rupture prévue par l’accord majoritaire du 19 octobre 2016 équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement de la convention collective des télécommunications, qui fixe en son article 4.4.1.2 que celle-ci est égale à 3% du salaire annuel brut par année entière d’ancienneté jusqu’à 9 ans d’ancienneté révolus.
Au vu d’une ancienneté de 6 ans révolus, de son salaire annuel de référence (37 117,06 euros), l’indemnité prévue par l’accord majoritaire s’élève à la somme de 6 681,07 euros et le salarié est en conséquence fondé à réclamer le différentiel entre cette somme et la somme de 6 463,41 euros déjà versée à ce titre.


En conséquence, en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 217,66 euros à titre de solde d’indemnité de rupture équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement.


- Sur le solde d’indemnité complémentaire


En réalité, sous la qualification d’indemnité complémentaire de licenciement, le salarié réclame un solde de l’indemnité complémentaire de rupture prévue par l’accord majoritaire du 19 octobre 2016 dont l’article 12.2.2 fixe le montant à 4,5 mois de salaire compte tenu d’une ancienneté de 6 ans.


Au vu du salaire mensuel de référence (3 093,08 euros), l’indemnité complémentaire prévue par l’accord collectif s’élève à la somme de 13 918,90 euros et le salarié est en conséquence fondé à réclamer le différentiel entre cette somme et la somme de 13 465,44 euros déjà versée à ce titre.


En conséquence, et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 453,45 euros à titre de solde d’indemnité complémentaire de rupture.


- Sur le solde d’allocation de reclassement


Le salarié réclame un solde d’allocation de reclassement perçue durant 1 mois et 14 jours.


Il résulte de la charte d’engagements réciproques dans le cadre du congé de reclassement signé le 7 avril 2017, que pour la durée du reclassement qui excède la durée du préavis, le salarié perçoit une allocation spéciale de reclassement égale à 77% du salaire mensuel brut et ce jusqu’au 12ème mois de congé de reclassement. Cette allocation est calculée sur le salaire brut mensuel moyen versé sur les douze derniers mois précédents la rupture.


Les formulaires de rupture du congé de reclassement et de demande de l’indemnité de Solution Professionnelle, signés des parties le 30 juin 2017, font état d’un congé de reclassement débutant le 29 mars 2017 et rompu le 3 juillet 2017. Le préavis du salarié a pris fin le 21 mai 2017.


Au vu du salaire de référence mensuel de référence (3 093,08 euros), le montant de l’allocation spéciale de reclassement durant la période de perception s’élève à la somme de 3 493,12 euros et le salarié est en conséquence fondé à réclamer le différentiel entre cette somme et la somme de 3 379,20 euros déjà versée à ce titre.


En conséquence, et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 113,92 euros à titre de solde d’allocation spéciale de reclassement.


- Sur le solde d’indemnité de Solution Professionnelle


Le salarié réclame un solde d’indemnité de Solution Professionnelle.


Il résulte de la charte d’engagements réciproques dans le cadre du congé de reclassement signé le 7 avril 2017 que lorsque le salarié ne souhaite pas poursuivre son congé de reclassement, il bénéficie d’une indemnité de Solution Professionnelle sur la base du nombre mois restant à courir jusqu’au 12ème mois du congés de reclassement, égale à la somme des allocations spéciales restant à courir.


Au vu du salaire de référence (3 098,08 euros), de sa sortie du congé de reclassement le 3 juillet 2017, le salarié est fondé à réclamer le différentiel entre le montant perçu à ce titre (19 661,66 euros) et celui auquel elle pouvait prétendre qui s’élève à la somme de 20 958,70 euros, soit une somme de 1 297,04 euros.


En conséquence, et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 1 297,04 euros à titre de solde d’indemnité de Solution Professionnelle.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale des accords


La réparation d’un préjudice résultant d’un manquement de l’employeur suppose que le salarié qui s’en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d’une part la réalité du manquement et d’autre part l’existence et l’étendue du préjudice en résultant.


Sur les manquements, le salarié soutient d’abord que sa catégorie d’emploi n’était pas impactée par la restructuration, sans expliciter davantage le moyen.


A l’appui de son assertion, il produit le courrier que lui a adressé la société le 24 février 2017 pour l’informer d’un accord d’entreprise du 15 février 2017 destiné à harmoniser les statuts sociaux des salariés dont le contrat de travail a été transféré à la société Y Distribution relevant pour sa part de la convention collective nationale des commerces et services de l’audiovisuel, de l’électronique et de l’équipement ménager, ayant pour effet le concernant de correspondre à l’intitulé d’emploi et au positionnement dans la nouvelle classification conventionnelle de conseiller de vente, niveau II, échelon 1, statut employé.


La société affirme au contraire que sa catégorie d’emploi était bien visée par le Plan de Mobilité Professionnelle en faisant valoir que l’accord majoritaire du 19 octobre 2016 avait justement procédé à un tableau listant les postes relevant de chaque catégorie à partir des fonctions et libellés coexistants par suite des transferts des contrats de travail ayant leurs propres intitulés dans les sociétés d’origine. Ainsi la catégorie 'conseiller Thd' dans le PMP correspondait à l’emploi de 'conseiller commercial boutique' chez NC Numéricable, tel que défini dans l’annexe de l’accord majoritaire du 19 octobre 2016. La société ajoute que le salarié ne saurait se prévaloir du courrier du 24 février 2017, qui avait pour objet d’harmoniser des statuts postérieurement à la restructuration, pour contester le fait que sa catégorie d’emploi était bien visée par la restructuration prévoyant la suppression et l’éligibilité de cinq postes dans les Alpes Maritimes.


La société verse aux débats l’accord majoritaire du 19 octobre 2016 vérifiant ses assertions.


A l’analyse des pièces de la procédure, la cour constate que le salarié n’établit pas qu’il aurait été compris à tort dans le plan de réduction des effectifs avec mise en oeuvre du Plan de Mobilité Professionnelle.


Le salarié invoque ensuite le non respect de l’accord de majoritaire du 19 octobre 2016, dérivé du contrat de contrat, en ce que la société ne lui a proposé aucun poste de réaffectation lors de la fermeture de la boutique Y mais l’a dispensé d’activité, et ne l’a pas fait bénéficier d’un entretien de concertation avec la DRH pour cerner ses contraintes et souhaits d’affectation, ce qui l’a incité à considérer que sa seule issue était le départ volontaire, alors que le principe de réaffectation était la règle et le plan de départ volontaire l’exception. Sur son préjudice il invoque la perte de chance de conserver un emploi.


A l’appui de sa prétention le salarié se réfère à:


- l’article 1.1 , l’article 4 du titre II et le titre III de l’accord majoritaire du 19 octobre 2016 aux termes desquels:
* 'Pour les salariés travaillant dans une boutique dont la fermeture est prévue pendant la période de volontariat: ils seront réaffectés, du fait de la fermeture, sur une boutique du même bassin d’emploi, étant précisé que cette réaffectation n’impactera pas leur éligibilité et ne remettra pas en cause leur priorité'

* 'Les postes permettant la réaffectation des salariés dont la boutique sera fermée pendant la période de volontariat ne figureront pas au titre des postes disponibles auprès de l’ECM.'

* 'En ce qui concerne le cas particulier des boutiques qui seront amenées à fermer les Parties conviennent d’appliquer dans ces cas, les règles relatives à « l’entretien de concertation» ci-dessous. Un entretien de concertation sera réalisé avec les collaborateurs concernés afin de prendre en compte les contraintes personnelles et familiales et leur souhait quant à leur affectation géographique. Cet entretien sera formalisé, signé et remis par écrit au / à la collaborateur-trice concerné-e.

La Directrice des Ressources Humaines après avoir recensé les souhaits de mobilités géographiques des collaborateurs-trices concerné-e-s, lors de l’entretien de concertation, étudiera l’adéquation entre les souhaits et les postes à pourvoir.

Si aucun poste à pourvoir ne répond aux souhaits du / de la collaborateur-trice, alors la Directrice des Ressources Humaines prendra en compte les contraintes personnelles et familiales en appliquant les critères de choix prévus à l’article 7.3.3, avant de formaliser un avis d’affectation.

Le / la collaborateur-trice qui totalisera le nombre de point le plus élevé en application des critères de choix se verra affecter au plus proche de son lieu de travail habituel en fonction des postes à pourvoir au sein de l’ entreprise.';


- l’article 2 3° de l’accord New Deal pour le Pôle France Télécom de Y Groupe du 3 août 2016 au termes duquel 'les salariés des boutiques amenées à fermer à compter du 1er septembre 2016 …. pourront à titre exceptionnel bénéficier des mesures prévues à l’article 1-2 et ce jusqu’au 31 décembre 2016", l’article 1-2 précisant que la garantie d’emploi signée par accord du 25 juin 2004 au sein de Numéricable groupe n’empêchera nullement la mise en place des plans de départ volontaire annoncés au sein des sociétés Y Distribution et Y Business Distribution.


Le salarié produit par ailleurs les éléments suivants extraits des compte-rendus des réunions des comités d’entreprise :


- CE du 2 décembre 2015 : à la question d’un membre sur le sort des salariés qui n’accepteraient pas le changement de contrat et se retrouveraient en mobilité donc sans activité, le représentant de la direction indiquait 'personne ne sera sans activité. Un CCB a vocation à rester dans sa boutique jusqu’à ce qu’il trouve un autre poste', à la question d’un autre membre faisant observer qu’un CCB ne pourra rester éternellement dans sa boutique alors que l’entreprise a fixé des délais de fermeture, le représentant de la direction indiquait 'non, les boutiques seront fermées une fois que tout le monde aura été repositionné';


- CE du 22 mars 2016 à la question posée de ce qu’il est prévu lorsqu’un salarié refuse la proposition et dont la boutique ferme, le représentant de la direction répond que 'il sera transféré dans une boutique du même bassin d’emploi' et confirmant 'qu’il y aura une proposition pour chaque personne. Encore faut-il qu’elle l’accepte';


- CE du 21 juin 2016 à la question de l’issue pour les salariés en dispense d’activité suite à la fermeture de leur boutique, le représentant de la direction répond que ' ils le sont jusqu’à ce qu’ils retrouvent un poste….(lorsqu’ils n’en trouvent pas ou si les propositions ne leur conviennent pas) que l’entreprise les aide à retrouver un poste…. et admet que dans les régions où il n’y a pas de boutique proche, la situation devient extrêmement contraignante'.


Pour sa part la société réfute tout manquement dans la mise en oeuvre de l’accord majoritaire et fait valoir que :


- celui-ci excluait les départs ou modifications du contrat de travail contraints et la réduction des effectifs était traitée dans le cadre d’un Plan de Mobilité Professionnelle au moyen d’une mobilité interne et d’une mobilité externe, via un Plan de Départ Volontaire, prévoyant des démarches pro-actives du salarié et encadré par une procédure garantissant la liberté des salariés de candidater ou non au départ;


- sa dispense d’activité était sans incidence sur son maintien dans l’entreprise dès lors qu’il aurait été repositionné s’il n’avait pas adhéré au plan de mobilité professionnelle;


- les multiples et différentes étapes du déroulement du processus auxquelles le salarié a activement participé sans émettre de réserve, attestent d’une adhésion volontaire;


- le salarié n’a usé d’aucune des facultés qui lui étaient offertes de contester la liberté de choix, ou de revenir sur sa décision devant le comité d’entreprise ou en saisissant la commission de validation des projets chargée d’examiner les recours des salariés estimant subir des actes de la direction visant à les contraindre à la mobilité;


- le salarié dont le départ a été autorisé par l’inspecteur du travail compte tenu de sa qualité de salariée protégée, n’a pas contesté la liberté de son consentement en formant un recours hiérarchique.


La société verse aux débats les éléments suivants :


- le document de présentation projet finalisé le 12 janvier 2017 de départ volontaire 'création d’entreprise’ listant quatre rendez-vous avec l’Espace conseil mobilité le 18 novembre 2016, le 2 décembre 2016, le 2 janvier 2017, le 4 janvier 2017 et portant descriptif d’un projet de création d’épicerie fine et petite restauration sur le site du port de Nice, commenté par le consultant création d’entreprise comme 'un projet mûrement réfléchi avec son associée depuis plusieurs mois en raison de l’opportunité de la ligne 2 du tramway sur le port de Nice, ce qui va considérablement densifier la fréquentation de cette zone de la ville' et qui est préparé sur le plan financier et prévisionnel;


- le formulaire de dépôt de la demande de départ volontaire signé par le salarié le 12 janvier 2017 énonçant qu’il reconnaît notamment:


- avoir pris connaissance de tous les détails du dispositif


- prendre sa décision de candidater au plan de départs volontaires librement et en pleine possession de toutes les informations et conseils relatifs à sa situation personnelle, à son projet et aux conséquences en résultant


- renoncer formellement à la garantie d’emploi qu’il tient de l’accord collectif en vigueur;


- le formulaire de confirmation de demande de départ volontaire signé par le salarié le 19 janvier 2017 en pièce jointe de son mail du même jour 'En réponse à votre courriel, veuillez trouver … ma confirmation d’acceptation au plan de départ volontaire, dûment remplie' faisant suite au mail l’informant le 18 janvier 2017 de la validation de son projet par la commission et l’invitant à confirmer sous 48h s’il souhaite maintenir sa démarche de départ volontaire ;


- la convocation du salarié à un entretien préalable à une éventuelle rupture amiable de son contrat de travail, fixé le 7 février 2017;
- le formulaire de confirmation de candidature au plan de départ volontaire signé par le salarié le 7 février 2017;


- la convocation à une audition devant les membres du comité d’entreprise le 16 février 2017 en application de l’article R. 2421-11 du code du travail dans sa rédaction applicable, compte tenu de la période de protection dont il bénéficiait encore;


- l’extrait du procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise du 16 février 2017 faisant figurer un vote favorable des membres sur la rupture amiable du contrat de travail de la salariée pour motif économique;


- la demande d’autorisation de rupture d’un commun accord du contrat de travail adressée le 17 février 2017 à la DIRECCTE ayant donné lieu à l’autorisation du 7 mars 2017 par l’administration motivée notamment en ce que 'Considérant que le salarié a confirmé le caractère volontaire de son départ et que la mise en oeuvre d’un plan de départ volontaire est incompatible avec la recherche d’une solution de reclassement et Considérant l’absence de lien entre la présente demande et le mandat détenu';


- le protocole de rupture d’un commun accord du contrat de travail pour motif économique signé des parties le 20 mars 2017 .


A l’analyse du moyen énoncé par le salarié la cour observe que s’il fait implicitement valoir que sa décision d’accepter le départ volontaire ne résultait pas d’une décision libre et éclairée, il ne conteste pas la rupture sur le fondement d’un vice du consentement.


A l’analyse des pièces produites la cour relève ensuite que le texte de l’accord prévoyait que les salariés travaillant dans une boutique dont la fermeture était prévue pendant la période de volontariat seront réaffectés sur une boutique du même bassin d’emploi, mais sans précision d’immédiateté ce qui n’excluait pas entre-temps une dispense d’activité.


Par ailleurs les dispositions prévues au titre III intervenaient à l’issue de la période de volontariat. Celles-ci disposaient que la société devait alors procéder à la réaffectation des salariés concernés par la réorganisation qui n’avaient opté ni pour une mobilité interne ni pour un départ volontaire et ce, dans les conditions d’un simple changement dans les conditions de travail et pour les salariés des boutiques concernées par une fermeture au terme d’une procédure passant par le recueil des informations et souhaits géographiques lors d’un entretien de concertation avant de formuler un avis d’affectation au regard des postes à pourvoir et des critères d’ordre par l’âge, l’ancienneté et la situation personnelle et familiale.


Il s’ensuit que non seulement le salarié n’établit pas de méconnaissance de l’accord majoritaire mais que le préjudice qu’il invoque reste hypothétique et que la société établit pour sa part que le salarié dont la boutique a fermé le 1er novembre 2016 s’est engagé dans un processus de départ volontaire finalisé dès le 12 janvier 2017, dont il a validé les étapes successives en renonçant expressément à la garantie d’emploi et rendait obsolète la poursuite du processus de réaffectation passant par l’organisation d’un entretien de concertation.


En conséquence, la cour dit que la demande de dommages et intérêts n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

Sur les dommages et intérêts pour discrimination


En application de l’article L.1232-1 du code du travail dans sa rédaction applicable à la relation de travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en raison de ses activités syndicales.
En application de l’article L.1134-1 du code du travail dans sa rédaction applicable, lorsqu’un salarié invoque une discrimination prohibée, il présente des éléments de fait laissant supposer l’existence de la discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.


En l’espèce, le salarié invoque à l’appui de sa demande au titre d’une discrimination à raison de ses activités syndicales les faits suivants:


- ne pas avoir adapté ses objectifs et sa charge de travail au temps dédié à son mandat, ce qui a affecté sa rémunération variable subordonnée à des objectifs quantitatifs;


- avoir délibérément rémunéré ses heures de délégation sur son seul salaire de base en dépit des recommandations de l’inspecteur du travail et des condamnations déjà prononcées en ce sens.


Dans ses écritures le salarié renvoie aux éléments invoqués au titre de ses heures de délégation, soit les éléments suivants :


- le courrier de la DIRECCTE de Seine et Marne à la direction de Numéricable en date du 14 février 2012 l’invitant à apporter des réponses aux signalements reçus sur la surcharge générale de travail des salariés exerçant une fonction commerciale eu égard aux objectifs fixés et en particulier sur ceux de ces salariés représentants du personnel dont les objectifs fixés ne tiennent pas compte du temps passé pour leur mandat ce qui aboutit à les pénaliser financièrement et à encourir un risque d’entrave;


- les comptes rendus des Réponses aux questions des délégués du personnel de la région Méditerranée d’août 2015 et de novembre 2015 (sur le défaut d’adaptation des objectifs des élus et délégués au regard de leur mandat), de mars 2016 (sur le défaut d’indemnisation des élus UNSA, en particulier l’une d’elle, lors de l’exercice leur mandat notamment pour les réunions mensuelles à la demande de la direction);


- les arrêts de la cour d’appel de Paris du 11 février 2010 et du 2 février 2017.


A l’analyse de ces pièces, la cour relève la généralité du courrier de la DIRECCTE comme des comptes rendus d’août et de novembre 2015 des réponses aux délégués du personnels et que la salariée ne présente aucun élément de comparaison avec d’autres salariés de nature à établir le fait tenant au manque d’adaptation des objectifs et de la charge de travail.


La cour relève ensuite que si elle a retenu que les heures de délégation n’ont pas été intégralement rémunérées, le courrier sus-visé de l’administration est étranger à la question et la production de deux arrêts d’appel, dont rien ne démontre le caractère définitif, n’est pas de nature à établir le caractère délibéré du constat opéré ci-dessus.


Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le salarié ne présente aucun élément de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination à raison de ses activités syndicales.


En conséquence, la cour dit que la demande de dommages et intérêts n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

Sur les dispositions accessoires


En application de l’article 696 du code de procédure civile, il échet de mettre les dépens de première instance et d’appel à la charge de la société qui succombe en partie.
En application de l’article 700 du code de procédure civile il est équitable que la société contribue aux frais irrépétibles que le salarié a exposés en première instance et en appel. La société sera en conséquence condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros et sera déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,


Infirme le jugement déféré en ce qu’il a :


- débouté M. X de sa demande de rappel de salaire au titre des heures de délégation,


- débouté M. X de sa demande de fixation de son salaire annuel sur les douze mois précédent la rupture du contrat de travail,


- débouté M. X de sa demande au titre du solde d’indemnité de rupture équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement,


- débouté M. X de sa demande de solde d’allocation de reclassement,


- débouté M. X au titre du solde d’indemnité complémentaire de rupture,


- débouté Mme X au titre du solde d’indemnité de solution professionnelle,


Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,


Fixe à la somme de 37 117,06 euros le salaire annuel de référence de M. X sur les douze derniers mois ayant précédé la rupture du contrat de travail,


Condamne la SAS Y Distribution à verser à M. X les sommes de :


- 2 210,41 euros de rappel de salaire au titre des heures de délégation et 221,04 euros de congés payés afférents,


- 217,66 euros à titre de solde d’indemnité de rupture équivalente à l’indemnité conventionnelle de licenciement,


- 453,45 euros à titre de solde d’indemnité complémentaire de rupture,


- 113,92 euros à titre de solde d’allocation spéciale de reclassement,


- 1 297,04 euros à titre de solde d’indemnité de solution professionnelle,


Dit que les sommes allouées ci-dessus sont exprimées en brut,


Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,


Y ajoutant,


Condamne la SAS Y Distribution à verser à M. X la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile de première instance et d’appel,
Condamne la SAS Y Distribution à supporter les dépens de première instance et d’appel.


LE GREFFIER LE PRESIDENT
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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 7 avril 2022, n° 19/02690