Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4 6, 17 novembre 2023, n° 20/02893

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4 6, 17 nov. 2023, n° 20/02893
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 20/02893
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulon, 12 janvier 2020, N° F18/01298
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 24 novembre 2023
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Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2023

N°2023/ 272

Rôle N° RG 20/02893 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFVBZ

[E] [U]

C/

S.A. ALLIANZ VIE

Copie exécutoire délivrée

le : 17/11/2023

à :

Me Caroline GRAS, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Pierre-Yves IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 13 Janvier 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F18/01298.

APPELANT

Monsieur [E] [U], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Caroline GRAS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

S.A. ALLIANZ VIE sise [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et par Me Laurent GUARDELLI, avocat au barreau de PARIS substitué pour plaidoirie par Me Valérie DENIS avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Septembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre chargé du rapport, et Madame Estelle de REVEL, Conseiller.

M. Philippe SILVAN, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre

Madame Estelle de REVEL, Conseiller

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2023..

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2023.

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon contrat à durée indéterminée du 1er avril 1993, M.[U] a été recruté en qualité de conseiller par la compagnie AGF, aux droits de laquelle vient la SA Allianz. Au dernier état de la relation de travail, il exerçait les fonctions de responsable de marché. Il relevait d’un secteur d’activité dit AEC.

Le 8 novembre 2017, M.[U] a été convoqué par la SA Allianz en vue de s’expliquer sur une insuffisance professionnelle récurrente alléguée par son employeur. Le 8 décembre 2017, il a été entendu par la SA Allianz dans le cadre d’un entretien destiné à mesurer les progrès réalisés. Selon lettre recommandée avec accusé de réception du 14 décembre 2017, la SA Allianz a proposé de l’affecter à un poste de conseiller en gestion de patrimoine expert. Le 2 janvier 2018, M.[U] a refusé cette nouvelle affectation.

Le 18 janvier 2018, M.[U] a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement prévu le 2 février 2018.

Le conseil de discipline de la SA Allianz s’est réuni le 15 juin 2018 et a estimé, d’une part, que M.[U] n’avait pas commis les faits reprochés et, d’autre part, qu’il pouvait faire l’objet d’une sanction ou d’une autre mesure que le licenciement, à savoir une aide à la mobilité interne ou externe.

Le 3 juillet 2018, M.[U] a fait l’objet d’un licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le 29 novembre 2019, M.[U] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulon d’une contestation de son licenciement.

Par jugement du 13 mai 2020, le conseil de prud’hommes de Toulon a':

''dit que le salaire de M.[U] doit être fixé à 4'373 euros mensuels';

''dit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse';

''condamné la SA Allianz à payer à M.[U] les sommes suivantes':

—  52'476 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';

—  1'000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile';

''débouté M.[U] du surplus de ses demandes';

''débouté la SA Allianz de ses demandes reconventionnelles';

''condamné la SA Allianz aux entiers dépens';

Le 25 février 2020, M.[U] a fait appel de ce jugement.

A l’issue de ses conclusions du 14 juin 2023, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M.[U] demande de':

à titre principal':

''constater que son licenciement reposait en réalité sur un motif économique';

''constater l’obligation, pour la SA Allianz, d’avoir à mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi';

''constater l’absence de plan de sauvegarde de l’emploi';

''constater que son licenciement est nul';

par conséquent';

''infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon en ce qu’il n’a pas considéré que son licenciement était nul, mais dépourvu de cause réelle et sérieuse';

''condamner la SA Allianz à la somme de 213.200,00'€ nets de CSG-cRDS et de toutes contributions et cotisations sociales à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul';

à titre subsidiaire';

''confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon en ce qu’il a considéré que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse';

par conséquent';

''le réformer et condamner la SA Allianz à la somme de 213.200,00'€ nets de CSG-cRDS et de toutes contributions et cotisations sociales à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';

en tout état de cause':

''condamner la SA Allianz à une indemnité de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens';

''condamner la SA Allianz aux dépens et aux intérêts légaux.

M.[U] soutient que la rupture de son contrat de travail s’inscrit dans un contexte de réorganisation et de diminution drastique des effectifs de la SA Allianz puisque, dès mars 2017, son employeur avait annoncé lors d’une consultation du comité d’entreprise la nécessité de supprimer, à l’horizon 2020, 282 postes au sein des effectifs AEC dont 59 postes de responsable de marché.

Il en déduit que son licenciement repose sur une cause économique, motif étranger à sa personne.

Il précise qu’il n’a jamais été remplacé.

Il allègue que son départ aurait dû s’inscrire, a minima, dans le cadre de l’accord GPEC du 19 novembre 2017 conclu entre la SA Allianz et ses partenaires sociaux, et d’un licenciement pour motif économique.

Il affirme en outre qu’il incombait à la SA Allianz, en application de l’article L.'1233-61 du code du travail, de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) compte tenu du nombre de licenciements intervenus entre 2017 et 2018 suite à la mise en 'uvre du projet AEC 2020, et qu’il ressort de l’article l.'1235-10 du code du travail qu’un licenciement survenu en l’absence d’un plan de sauvegarde de l’emploi est nul.

Il expose que la SA Allianz ne peut prétendre que la liste des cas de nullité d’un licenciement est exhaustivement définie par l’article L.'1233-3-1 du code du travail aux motifs que la loi prévoit d’autres cas de licenciement et que, concernant l’absence de plan de sauvegarde de l’emploi, l’article L.'1235-11 du code du travail permet d’ordonner la réintégration du salarié.

À titre subsidiaire, il estime que son licenciement est une cause réelle et sérieuse aux motifs':

1/ concernant l’insuffisance professionnelle, qu’une insuffisance de résultats qui ne peut en elle-même, sauf insuffisance professionnelle ou faute imputable au salarié, justifier un licenciement, que l’absence de réalisation des objectifs fixés unilatéralement par l’employeur, non contractualisés, ne peut constituer un motif de licenciement, que la SA Allianz ne rapporte pas la preuve qu’il serait personnellement responsable de l’insuffisance de résultat qui lui est reprochée, que compte tenu du contexte économique global et de l’absence de plusieurs collaborateurs, ses résultats étaient plutôt satisfaisants et que la SA Allianz a fait preuve de déloyauté à son égard en lui accordant, à compter du 8 novembre 2017, un délai insuffisant pour s’améliorer,

2/ concernant le non respect du délai d’un mois prévu par l’article L.'1332-2 du code du travail, que la sanction disciplinaire ne peut intervenir plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien préalable, que si l’employeur doit, en vertu de dispositions statutaires conventionnelles, recueillir l’avis d’une instance disciplinaire, il convient d’informer le salarié de la convocation de cette instance avant l’expiration de ce délai d’un mois, que ce n’est que le 4 juin 2018 qu’il a été informé de la convocation du conseil de discipline et que ce délai d’un mois était donc expiré.

Il conteste le salaire de référence retenu par le conseil de prud’hommes et affirme que, la moyenne des trois derniers mois de salaire, mode de calcul le plus favorable, s’élève à 8528,02 euros bruts puisqu’il est sorti des effectifs de l’entreprise le 8 octobre 2018 et non à la somme de 4373 euros bruts comme mentionné sur son attestation Pôle Emploi.

Il sollicite en conséquence, dans l’hypothèse d’un licenciement nul, une indemnité d’un montant de 213'200 euros.

S’il était retenu que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, il conclut à l’éviction du plafonnement de l’indemnisation prévu par l’article L.'1235-3 du code du travail au motif qu’il n’est pas conforme aux dispositions de la convention OIT n°158 et de la Charte sociale européenne.

Pour caractériser le préjudice qu’il a subi, il fait valoir qu’il n’a pu bénéficier des dispositifs d’accompagnement du salarié licencié pour motif économique, notamment du bénéfice d’un contrat de sécurisation professionnelle, que compte tenu de son âge et de son profil, il existe un doute qu’il puisse retrouver un emploi aux mêmes conditions, qu’il a été placé en arrêt de travail pour état dépressif à compter du 21 décembre 2017, et ce pendant plus d’un an et sept mois, qu’il a été placé en invalidité à compter du 1er août 2019, qu’il ne pourra donc plus jamais travailler et qu’il bénéficie toujours d’un traitement psychiatrique et psychologique.

Selon ses conclusions du 6 juillet 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Allianz demande de':

''déclarer l’appel de M.[U] recevable mais non-fondé';

''déclarer son appel incident recevable';

''la déclarer bien ' fondée dans cet appel incident'

''infirmer le jugement en ce qu’il a juger le licenciement sans cause réelle ni sérieuse';

''rejugeant à nouveau';

''débouter M.[U] de l’intégralité de ses demandes';

''condamner M.[U] au paiement de la somme de 2.000'€ au titre de l’article

700 du code de procédure civile';

''condamner M.[U] en tous les dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence, avocats aux offres de droit.

La SA Allianz expose que M.[U] ne peut prétendre à la nullité de son licenciement aux motifs que ce n’est qu’à titre exceptionnel et si cette nullité est prévue par les textes que la nullité du licenciement peut-être retenue, que l’article L.'1235-10 du code du travail ne prévoit la nullité du licenciement que lorsque l’employeur, qui a élaboré un PSE, licencie un salarié pour motif économique avant sa validation ou son homologation par la Direccte mais, qu’en revanche, ce texte ne prévoit pas de nullité du licenciement en l’absence totale de PSE.

Elle indique en outre qu’elle n’était pas tenue de mise en 'uvre d’un PSE au motif que la réorganisation de son réseau de commerciaux (AEC) n’entraînait pas de licenciement.

Concernant l’indemnisation sollicitée par M.[U], elle fait valoir qu’il ressort des articles L.'1235-3-1 et L.'1235-11 du code du travail que l’indemnité à la charge de l’employeur est égale au salaire des six derniers mois, que doivent être pris en compte les salaires des six derniers mois précédant l’arrêt de travail, que le salaire moyen de M.[U] était de 5'863'euros, qu’il ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité entre son classement en invalidité et son licenciement, que l’indemnité due à M.[U] devrait être prononcée en brut, que la prise en charge par l’employeur de la CSG-CRDS et des cotisations sociales serait constitutive d’un avantage en nature, qu’il incombe à chaque partie de payer ses cotisations sociales et qu’elle encourrait un redressement Urssaf si elle payait les cotisations sociales de son salarié.

Elle soutient qu’elle était fondée à procéder au licenciement de M.[U] pour insuffisance professionnelle aux motifs que les objectifs des commerciaux, plus particulièrement des conseillers, étaient définis par accord collectif d’entreprise, que les collaborateurs devaient donc les réaliser et les responsables de marché, leur supérieur hiérarchique, veiller à ce qu’ils soient atteints que M.[U] n’a jamais contesté les objectifs auxquels il était tenu, qu’il a fait l’objet d’alertes antérieurement à son licenciement, que conformément à l’article 57 de la convention collective applicable, elle lui a proposé un reclassement dès lors qu’elle avait constaté son insuffisance professionnelle et que, compte tenu du refus de M.[U], elle a engagé la procédure de licenciement, que M.[U] n’a pas respecté les objectifs de son employeur considéré comme «'clairs et bien annoncés'» et que la rupture du contrat de travail ne reposant pas sur un motif disciplinaire, M.[U] ne peut invoquer la violation de l’article L.'1332-2 du code du travail.

Elle expose enfin que M.[U] ne peut remettre en cause la conventionnalité du barème d’indemnisation issue de l’ordonnance n° 2017 ' 1387 du 22 septembre 2017 par rapport aux dispositions de l’article 10 de la convention OIT n°158 et de l’article 24 de la charte sociale européenne aux motifs que ces dispositions ne reconnaissent aucun principe de réparation intégrale du préjudice, qu’au contraire ces textes accordent aux autorités nationales une marge d’appréciation, que M.[U], qui était en arrêt maladie bien avant l’engagement de la procédure de licenciement, ne produit aucune pièce de nature à démontrer l’étendue du préjudice qu’il allègue,que l’article 10 de la convention et les articles 24 de la charte sociale européenne ne sont pas applicables en droit interne, que le barème prévu par l’article L.1235-3 du code du travail est parfaitement compatible avec ces dispositions et que la validité de ce barème a été reconnue par le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État et la Cour de cassation.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 juillet 2023. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.

MOTIVATION':

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, à défaut d’accord entre l’employeur et le salarié, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

La détermination de la cause réelle et sérieuse du licenciement implique donc de rechercher le motif véritable du licenciement.

Il résulte de l’article L.1232-6 du code du travail que c’est le motif de la rupture mentionné dans la lettre de licenciement qui détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement.

En l’espèce, la lettre de licenciement adressée à M.[U] par la SA Allianz le 3 juillet 2018 est rédigée dans les termes suivants':

'Nous vous informons de notre décision de vous licencier de l’Entreprise en raison de votre insuffisance professionnelle, qui résulte notamment de la non-réalisation des objectifs commerciaux et des objectifs qualitatifs s’imposant à vous en tant que Responsable de Marché.

En votre qualité de Responsable de Marché, les missions qui vous sont confiées sont principalement d’organiser et de piloter les conseillers pour développer la production des affaires et faire progresser le professionnalisme de vos collaborateurs, en les accompagnant, en vous assurant de la qualité des conseils donnés, et en réalisant des contrôles de conformité. Ceci dans le respect des directives et instructions de l’entreprise. Vos objectifs sont fixés annuellement en lien avec la politique commerciale et la stratégie mise en place par Allianz.

Ayant constaté une insuffisance dans les résultats que vous avez obtenus sur te plan quantitatif et qualitatif au cours des 15 derniers mois, nous vous avons convoqué à un entretien qui s’est tenu le 8 novembre 2017, conformément à l’article 57 de la Convention Collective Nationale de l’Inspection d’Assurances du 27 Juillet 1992. Nous avons alors fait le constat de votre insuffisance et cherché les moyens d’y remédier.

A titre de rappel, lors de votre dernier Entretien Annuel de Développement en date du 4 Avril 2017, réalisé avec votre responsable Hiérarchique, l’appréciation de votre performance sur l’année écoulée a été considérée en deçà des exigences du poste de Responsable de Marché. L’appréciation de votre performance au titre de l’année 2015 sur le même poste avait été considérée « s’approche des exigences du poste ».

Au terme de l’année 2017, vous affichez les résultats suivants sur la production de votre équipe, qui pour rappel vous a été confiée dès le mois de mai 2015 :

— Un Chiffre d’Affaires Epargne Retraite de 14 039 000€, soit – 11.2 % par rapport à Décembre 2016, comparé à celui de la Délégation Régionale qui est de 83 241 000€, en croissance de +4,4% ,

— La productivité sur ce même critère est de 1 578 000 € en croissance de 12,5 % par rapport à décembre 2016, comparée à celle de la Délégation Régionale qui est de 1 812 000 €, en croissance de 45,3 % ;

— La productivité collecte nette technique UC de votre équipe est de 511 000€ soit -3,8'% par rapport à décembre 2016 et inférieure à celle de la Délégation Régionale qui est de 770 697 € en croissance de 26,60 euros.

En reprenant la productivité moyenne des collaborateurs de votre équipe sur les indicateurs prioritaires, nous ne pouvons que constater des résultats inférieurs à ceux de la Délégation Régionale .

— Une productivité en produit Retraite AA4L de 109 000 € comparativement aux 256 000 € de la Délégation Régionale (DR)

— Une productivité Allianz Versement Régulier de 84 000 € vs 114 000 € au niveau de la DR

— Une productivité AR14L de 60 000 € vs 140 000 € au niveau de la DR,

— Une productivité en prévoyance de 20 000 € vs 89 450 € au niveau de la DR

—  0.87 cmtrats Protection Juridique vs 2,33 en moyenne pour la DR

—  4,75 conquêtes Haut de Gamme vs 6,65 en moyenne pour la DR

—  1,12 conquêtes Très Haut de Gamme vs 1 ,28 en moyenne pour la DR.

En janvier 2017, vous aviez la responsabilité de 10 collaborateurs. Parmi eux, 3 étaient en difficulté et ont été accompanés par la mise en place d’un plan de progrès individuel.

Vous avez reconnu lors de rentretien du 8 Novembre 2017 vote incapæité à manager vos collaborateurs dans le respect des de l’Entreprise : vous rencontrie des difficultés, notamment, à faire respecter les normes du dossier client numérisé et les nomes de conformité.

En termes d’activité conquête, nous avons constaté lors de votre entretien quadrimestriel de septembre 2017 que le plan d’ætions conquête de la Délégation Régionale n’avait pas été déployé efficacement.

En effet, aucun collaborateur de votre équipe n’atteint les 4 rendez-vous prévisionnels hebdomadaires ni l’objectif de 5 recommandations hebdomadaires de notre Plan d’Actions Conquête.

De fait, un seul collaborateur est en mesure d’atteindre l’objectif de 3 Conquêtes Haute Gamme (CHG) et d’une Conquête Très Haute Gamme par quadrimestre.

En termes de management, nous constatons que vous ne relayez pas les informations et ne prenez pas connaissances des mails transmis. Vous avez d’ailleurs été alerté par écrit à ce sujet.

En otite, nous avons déjà été amenés à vous sanctionner pour votre comportement inadapté vis-à-vis d’un de vos collègues.

Enfin, concernant la conformité des contrats souscrits par les conseillers sous votre responsabilité, nous vous avons alerté à plusieurs reprises sur la nécessité de respecter les procédures et de mettre en place tes contrôles (Cl, C2, C3 et CA) relevant de votre mission.

Nous vous rappelons que le strict respect de ces procédures relève de votre responsabilité (activité dans Siebel, dossier client,…). Le non-respect de ces directives met en risque l’ensemble de la chaîne managériale et de contrôle de la stnnture ainsi que la qualité du conseil apportée aux clients.

Malgré les mesures convenues ensemble pour favoriser votre retour à la performance, et notamment':

— L’exploitation des actions « clic et pack » par vos collaborateurs ;

— L’accompagnement des collaborateurs de votre équipe

— La réalisation des actions de recommandation et de parrainage sur le portefeuille confié pour les conquêtes de nouveaux clients Haut de Gamme et Très Haut de Gamme en utilisant les NPS Post RDV

— Le développement des actions de transversalité avec les collaborateurs Protection Sociale, ainsi qu’avec les collaborateurs de l’Agence en Ligne Allianz plus particulièrement sur les clients segmentés 9/1/2/4 ;

nous avons à nouveau fait constat de votre non performance, ainsi que de votre incapacité à développer l’activité commerciale et le professionnalisme de votre équipe lors de notre entretien du 8 décembre 2017.

Cette situation ne nous permettant pas de vous maintenir à votre poste de Responsable de Marché, nous avons alors étudié les alternatives à ce constat d’insuffisance. Prenant en considération votre souhait de rester au sein des équipes de la Délégation Régionale Côte d’Azur, nous vous avons proposé une affectation à un poste de Conseiller en Gestion de Patrimoine, au sein de cette Délégation, ce poste étant adapté à vos compétences.

Vous avez refusé notre proposition par courrier en date du 2 janvier 2018, alors même que celle -ci constituait une alternative à votre insuffisance professionnelle sur votre poste de responsable de marché.

Les explications recueillies au cours de notre entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Cette situation nous conduit donc à vous notifier par la présente votre licenciement en raison de votre insuffisance professionnelle constatée dans le cadre de vos fonctions de Responsable de Marché'.

Il en ressort qu’il est principalement reproché à M.[U] son incapacité à encadrer ses équipes, un défaut de relais des informations et le non-respect des procédures internes.

Si ces griefs portent sur l’incapacité de M.[U] à assurer ses fonctions de responsable de marché, il n’en résulte l’expression d’aucun grief de nature à caractériser un comportement fautif chez ce dernier. M.[U] ne peut en conséquence prétendre que son licenciement présentait un caractère disciplinaire et reprocher à la SA Allianz, en violation de l’article L.1332-2 du code du travail, de l’avoir informé de la convocation du conseil de discipline plus d’un mois après l’entretien préalable à licenciement.

En tout état de cause, une telle irrégularité ne peut suffire à priver le licenciement de M.[U] de cause réelle et sérieuse.

En effet, il ressort clairement de l’article L.1235-2 du code du travail qu’une telle irrégularité ouvre seulement droit à une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. Dès lors, à supposer que le licenciement de M.[U] soit de nature disciplinaire, elle n’est pas de nature à en remettre en cause la validité.

Conformément aux dispositions précitées de l’article L.1235-1 du code du travail, il conviendra, en premier lieu, de rechercher si l’insuffisance professionnelle reprochée à M.[U] présente un caractère réel et sérieux et, dans la négative, si la rupture de son contrat de travail était en réalité fondée sur un motif économique.

L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité objective et durable d’un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. Elle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due soit à une incompétence professionnelle, soit à une inadaptation à l’emploi.

Il est de jurisprudence constante que l’insuffisance de résultats ne peut constituer, en elle-même, une cause réelle et sérieuse de rupture et que le défaut de réalisation de ceux-ci ne peut caractériser une cause réelle et sérieuse qu’à la double condition que ces ces objectifs soient réalistes et que cette non-réalisation résulte d’une faute du salarié ou de son insuffisance professionnelle.

M.[U] produit aux débats une feuille de route de la SA Allianz pour l’année 2017, datée du mois de janvier 2017, relevant de bons résultats d’activité pour les années antérieures, déterminant les priorités de l’entreprise pour l’année 2017 et rappelant que la société intervenait dans un environnement économique, financier et réglementaire très compliqué.

Par ailleurs, la SA Allianz verse à l’instance divers courriels, adressés à M.[U] entre le 8 mars 2016 et le 8 septembre 2017, dans lesquels elle relève la non-réalisation des objectifs par ses collaborateurs, imparti à M.[U] des actions prioritaires, des actions ciblées, des plans d’actions conquêtes ou des actions de suivi concernant certains collaborateurs, lui reproche de ne prendre que partiellement connaissance des courriels de sa hiérarchie et sollicite de sa part un meilleur engagement.

La SA Allianz produit en outre les compte-rendu des trois derniers entretiens d’évaluation de M.[U], dont le dernier daté du 14 février 2017 qui constate chez ce salarié l’absence de réalisation des objectifs assignés (fédérer l’équipe, développer la prévoyance et le pôle patrimonial et développer le parrainage auprès de certains clients) et imparti à M.[U] des objectifs portant sur le développement de la conquête de très haut niveau, l’orientation des clients et la rentabilité.

En l’état de ces éléments, et notamment de la feuille de route de l’année 2017, qui indique que la SA Allianz intervient dans un environnement économique, financier et réglementaire très compliqué, il n’apparait pas clairement que les objectifs assignés à M.[U] en mai 2015 pour l’année 2017 étaient réalistes.

En outre, le surplus des pièces produites aux débats par la SA Allianz, qui émanent uniquement de celle-ci, n’est pas suffisant pour rapporter la preuve d’un défaut d’encadrement par M.[U] de ses équipes, d’une transmission insuffisante des informations reçues de sa hiérarchie ou d’un contrôle insuffisant des procédures internes. Au contraire, la lettre de licenciement relève clairement que, sur les dix collaborateurs de M.[U], trois étaient en difficulté et avaient fait l’objet d’un plan de progrès individuel. Cette défaillance d’une partie notable de l’équipe de M.[U], dont il n’est pas établi qu’elle soit imputable à un manquement de ce dernier dans ses fonctions de responsable de marché, apparaît de nature à expliquer la non-réalisation des objectifs par l’équipe de M.[U]. Il existe en conséquence un doute sur l’insuffisance professionnelle reprochée à M.[U] qui devra lui profiter.

L’article L1233-3 du code du travail, dans sa version issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, dispose que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment:

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ';

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ';

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ';

2° A des mutations technologiques ';

3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ';

4° A la cessation d’activité de l’entreprise.

En l’espèce, le 15 mars 2017, la SA Allianz a présenté à son comité d’entreprise commun un projet dit AEC 2020 relevant notamment que le poste de travail des conseillers AEC manquait de fluidité et ne permettait pas de répondre aux exigences réglementaires à venir, que le réseau AEC évoluait dans un champ concurrentiel en mouvement qui s’adaptait à l’environnement actuel, qu’une nouvelle orientation stratégique pour 2020 avait été arrêtée comprenant une nouvelle organisation des équipes commerciales et du management, une organisation régionale simplifiée et une organisation des fonctions supports plus resserrée et en relation directe avec le terrain, que cette nouvelle organisation impliquait notamment la réduction du nombre de postes de responsable de marché de 236 postes à 177 postes et, de manière plus générale, la suppression de 282,2 postes en 3 ans.

Il en ressort ainsi clairement que cette nouvelle organisation de l’entreprise était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la SA Allianz. Dès lors, le licenciement de M.[U], sous couvert d’une insuffisance professionnelle dont le caractère infondé a été retenu, était fondé sur un motif économique.

Il n’est pas contesté que le projet AEC 2020 n’a fait l’objet d’aucun plan de sauvegarde de l’emploi de la part de la SA Allianz.

L’article L.1235-10 du code du travail prévoit que, dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le licenciement intervenu en l’absence de toute décision relative à la validation ou à l’homologation ou alors qu’une décision négative a été rendue est nul.

Ces dispositions n’opèrent pas de distinction entre les décisions rendues ou qui auraient dues être rendues en présence d’un plan de sauvegarde de l’emploi ou les licenciements prononcés en l’absence d’un tel plan lorsqu’il est obligatoire. Dès lors, est nul le licenciement pour motif économique prononcé en l’absence d’un plan de sauvegarde de l’emploi lorsque son établissement est obligatoire.

Cependant, il n’est pas démontré par M.[U] que le plan ACE 2020 mis en 'uvre par la SA Allianz a entraîné, dans les conditions de nombre et de délais requises par l’article L.1235-10 du code du travail, des licenciements rendant obligatoire l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

M.[U] ne peut en conséquence conclure à la nullité de son licenciement.

Le licenciement de M.[U] s’avère en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’article L.'1235-3 du code du travail détermine, sur la base de l’ancienneté du salarié licencié pour cause réelle et sérieuse, le montant minimal et maximal de l’indemnité à laquelle il peut prétendre.

L’article 8 de la Convention (n° 158) de l’Organisation international du travail sur le licenciement, 1982, énonce que':

1. Un travailleur qui estime avoir fait l’objet d’une mesure de licenciement injustifiée aura le droit de recourir contre cette mesure devant un organisme impartial tel qu’un tribunal, un tribunal du travail, une commission d’arbitrage ou un arbitre.

2. Dans les cas où le licenciement aura été autorisé par une autorité compétente, l’application du paragraphe 1 du présent article pourra être adaptée en conséquence conformément à la législation et à la pratique nationales.

3. Un travailleur pourra être considéré comme ayant renoncé à exercer son droit de recourir contre le licenciement s’il ne l’a pas fait dans un délai raisonnable.

Article 10 de la même convention précise que, si les organismes mentionnés à l’article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Il est de principe que les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail et celles des articles L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du même code, qui permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi et assurent le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur, sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Dès lors, il en résulte que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention précitée.

L’article 24 de la charte sociale européenne prévoit notamment que, en vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement les Parties à la Convention s’engagent à reconnaître le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée.

Cependant, il est de principe que ces dispositions sont dépourvus d’effet direct en droit interne.

En conséquence, M.[U] ne peut prétendre à l’éviction du plafonnement prévu par l’article L.'1235-3 du code du travail.

Compte tenu de l’ancienneté de M.[U], de sa rémunération mensuel moyenne au cours des douze derniers mois précédant son licenciement, soit 6314,41 euros, et de la situation personnelle de M.[U], caractérisée la dégradation de son état de santé mental puis son placement en invalidité, le préjudice qu’il a subi au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera indemnisé en lui allouant la somme de'95 000€ à titre de dommages- intérêts.

Il est de principe que les sommes allouées à titre indemnitaire sont prononcées en net.

Le licenciement ne résultant pas d’une cause réelle et sérieuse. Il conviendra en conséquence de faire application des dispositions de l’article L.'1235-4 du code du travail et d’ordonner le remboursement par l’employeur, qui emploie plus de onze salariés, des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de six mois d’indemnités de chômage.

Enfin la SA Allianz, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra payer à M.[U] la somme de 2 000'euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS';

LA COUR, STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT';

INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon du 13 mai 2020';

STATUANT à nouveau';

DIT que le licenciement de M.[U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse';

CONDAMNE la SA Allianz à payer à M.[U] les sommes suivantes':

—  95 000 euros à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';

—  2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile';

ORDONNE le remboursement par la SA Allianz des indemnités de chômage versées à M.[U], du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de six mois d’indemnités de chômage';

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes';

CONDAMNE la SA Allianz aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier Le Président

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4 6, 17 novembre 2023, n° 20/02893