Cour d'appel d'Amiens, 5ème chambre sociale cabinet a prud'hommes, 13 décembre 2011, n° 10/04896

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 5e ch. soc. cab. a prud'hommes, 13 déc. 2011, n° 10/04896
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 10/04896
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Laon, 20 octobre 2010, N° 09/00451

Texte intégral

ARRET

X

C/

Société MAGNETTO WHEELS FRANCE

JPA/PC

COUR D’APPEL D’AMIENS

5e chambre sociale cabinet A

PRUD’HOMMES

ARRET DU 13 DECEMBRE 2011

************************************************************

RG : 10/04896

JUGEMENT du Conseil de prud’hommes de LAON (REFERENCE DOSSIER N° RG 09/00451) en date du 21 octobre 2010

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur A X

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

comparant en personne, assisté concluant, plaidant par Me Nathalie CAMPAGNOLO-GRATELLE, avocat au barreau de MARSEILLE collaboratrice de la SELARL BRUN, avocats au barreau de REIMS

ET :

INTIMEE

Société MAGNETTO WHEELS FRANCE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domicilié en cette qualité audit siège :

XXX

XXX

XXX

non comparante, représentée concluant, plaidant par Me Clotilde GRAVIER, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN substituant Me Patrick MARGULES, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

DEBATS :

A l’audience publique du 25 Octobre 2011, devant Mme E-F, Conseiller , siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

— Mme E-F en son rapport,

— les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives .

Mme E-F a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 13 Décembre 2011 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Z

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme E-F en a rendu compte à la formation de la 5e chambre sociale, cabinet A de la Cour composée en outre de :

M. AARON, Conseiller faisant fonctions de Président de Chambre

Mme HAUDUIN, Conseiller

qui en a délibéré conformément à la Loi.

ARRET : CONTRADICTOIRE

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 13 Décembre 2011, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. AARON, Conseiller faisant fonctions de Président de Chambre, désigné par ordonnance de M. le Premier Président en date du 30 juin 2011 et Mme Z, Greffier

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 21 octobre 2010 par lequel le conseil de prud’hommes de Laon, statuant dans le litige opposant Monsieur A X à son ancien employeur, la SA Magnetto Wheels France ( MW France), a dit le licenciement pour motif économique du salarié, prononcé dans le cadre d’un licenciement collectif avec plan de sauvegarde de l’emploi , justifié par une cause réelle et sérieuse, dit que la société relève bien de l’article L 1233-65 du code du travail, déclaré le plan de sauvegarde de l’emploi conforme aux exigences légales et débouté le salarié de l’intégralité de ses demandes, l’employeur étant pareillement débouté de sa demande reconventionnelle ;

Vu l’appel interjeté le 17 novembre 2010 par Monsieur X à l’encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 28 octobre précédent ;

Vu les conclusions et observations orales des parties à l’audience des débats du 25 octobre 2011auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 30 mai 2011, régulièrement communiquées et soutenues oralement à l’audience, par lesquelles le salarié appelant, faisant valoir que la lettre de licenciement ne satisferait pas aux exigences légales de motivation applicables en matière de licenciement pour motif économique, notamment en ce que la cause économique invoquée ne concernerait que la société Magnetto Wheeels alors que le niveau d’appréciation pertinent se situerait au niveau de l’ensemble des sociétés du groupe de dimension internationale CLN exerçant dans le même secteur d’activité, que l’employeur n’aurait pas satisfait à son obligation individuelle de reclassement tant légale que conventionnelle, que le licenciement serait frappé de nullité à raison du caractère manifestement insuffisant du plan de sauvegarde de l’emploi en termes de reclassement interne, que la procédure d’information-consultation du comité d’entreprise n’aurait pas été régulièrement suivie, que les critères d’ordre n’auraient pas été respectés de même que les règles relatives au congé de reclassement ou à la priorité de réembauchage, sollicite l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société MW France à lui payer les sommes reprises au dispositif de ses écritures devant lui être allouées à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou pour violation des règles relatives à l’ordre des licenciements, indemnité pour privation du dispositif légal relatif au congé de reclassement, indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement collectif, dommages et intérêts pour violation de la priorité de réembauchage et indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 29 septembre 2011, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, aux termes desquelles la société intimée, réfutant les moyens et arguments de la partie appelante sur l’ensemble des éléments de contestation, aux motifs notamment que les dispositions en matière de congé de reclassement n’avaient pas vocation à s’appliquer en l’espèce, que la régularité et la légitimité du licenciement pour motif économique du salarié, prononcé après que l’employeur eut satisfait à ses obligations en matière de plan de sauvegarde, de reclassement interne ou externe, de mise en oeuvre de la procédure pour licenciement pour motif économique collectif, de priorité de réembauche, ne sauraient être utilement contestées, sollicite pour sa part la confirmation de la décision déférée, le débouté des demandes complémentaires présentées en cause d’appel par le salarié et la condamnation de ce dernier à lui payer une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR

Attendu que Monsieur A X, engagé à compter du 23 avril 2001 par la société Dunlop Roues SA ( aujourd’hui MW france SA) en qualité de technicien études, promu 'pilote vie série’ le 29 septembre 2008, a été licencié pour motif économique dans le cadre d’un licenciement collectif avec plan de sauvegarde de l’emploi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 29 mai 2009, motivée comme suit:

Le comité d’entreprise de la société MW France a été informé et consulté sur le projet de réorganisation et de restructuration des activités industrielles de MWF et sur le projet de licenciement pour motif économique en résultant. La consultation s’est achevée le 9 avril 2009. Le CE a émis un avis favorable sur l’ensemble du projet.

Dans le cadre de cette procédure de licenciement collectif, nous sommes amenés à vous notifier par la présente, votre licenciement pour motif économique.

Nous avons bien noté que vous aviez refusé le bénéfice de la convention de reclassement personnalisé (CRP) que nous vous avons proposé le 07 mai 2009.

La cause de ce licenciement repose sur les éléments suivants :

La société MW France (MWF) a été amenée à présenter un projet de réorganisation et de restructuration de ses activités industrielles impliquant des réductions d’effectif. En effet, le marché de l’automobile a marqué un net repli au cours de l’année 2008. Ce mouvement doit s’accentuer au cours de l’année 2009. À ce jour, aucune reprise n’est prévisible avant 2011. Dans ce contexte, MWF qui fabrique et fournit des roues aux constructeurs automobiles se trouve confrontée à une diminution de ses commandes. En 2008, le nombre de roues fabriquées a diminué de 27 % par rapport aux prévisions initiales. De plus, au deuxième semestre 2008, les ventes ont été inférieures de 40 % à celles de l’année précédente à la même époque. Cette situation a entraîné une augmentation significative du coût de production unitaire. L’année 2009 doit enregistrer une baisse de chiffre d’affaires qui aura pour conséquence d’accentuer cette tendance. Si aucune mesure n’est entreprise pour adapter les coûts à la réduction des volumes de production, la dégradation de la situation économique de l’entreprise est inéluctable, ce qui compromet sa pérennité.

Face à cette situation et pour conserver sa compétitivité, MWF a été amenée à prendre des mesures de restructuration et de réorganisation en réduisant les effectifs et les coûts de structure afin de conserver un rapport coûts indirects sur coûts directs qui permet à l’entreprise de rester compétitive vis-à-vis de ses clients.

C’est le cas du service Développement produits dont l’effectif est réduit de 2 salariés afin de l’adapter à la diminution sensible du nombre de mise en série de nouveaux projets. Dans ce contexte, le poste de pilote vie série que vous occupez actuellement est directement visé par la procédure et doit être supprimé.

Nous avons recherché des postes de reclassement susceptibles de vous être proposés.

Par courrier remis en main propre le 7 mai, nous vous avons formulé les propositions de reclassement suivantes :

XXX

— Agent d’accueil

Vous n’avez donné suite à aucune d’elle dans les délais impartis.

Considérant votre refus, nous nous voyons donc contraint de prononcer votre licenciement pour motif économique.

La date de première présentation de cette lettre fixe le point de départ du préavis de deux mois au terme duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu. Nous vous précisons que nous vous dispensons de l’exécution de ce préavis qui vous sera rémunéré.

Nous vous informons que, conformément à l’article L. 1233-45 du code du travail et au plan de sauvegarde de l’emploi, vous pourrez bénéficier d’une priorité de réembauchage, qui a été définie pour une durée de deux ans dans notre PSE, à compter de la date de rupture de votre contrat de travail. Pour ce faire, vous devrez nous faire part de votre désir d’user de cette priorité au cours de cette période. Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendriez à acquérir, sous réserve que vous nous ayez informé de celles-ci.

Nous vous indiquons par ailleurs que vous pouvez faire valoir les droits que vous avez acquis au titre du droit individuel à la formation (DIF), sous réserve d’en formuler la demande avant l’expiration de votre préavis… ;

( …)

En application de l’article L. 1235-7 du code du travail, nous vous rappelons que les actions en contestation de la régularité ou de la validité du licenciement doivent être engagées dans le délai de douze mois à compter de la notification de la présente (…) » ;

Attendu que contestant la régularité et la légitimité de son licenciement, Monsieur A X a saisi dans le délai légal imparti ( le 23 octobre 2009) le conseil de prud’hommes de Laon de demandes indemnitaires diverses dont il a été intégralement débouté par jugement du 21 octobre 2010, frappé d’ appel ;

Attendu concernant le moyen d’absence de cause réelle et sérieuse de licenciement tiré de l’insuffisance de motivation de la lettre de notification de la rupture que satisfait aux exigences des articles L 1232-6, L.1233-16 et L 1233-3 du code du travail, la lettre de licenciement qui invoque tout à la fois l’une des causes économiques prévues par la loi et mentionne l’incidence de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié ; qu’il n’est toutefois pas exigé à ce stade que la cause économique alléguée soit détaillée ou précisée dans ses éléments constitutifs, notamment quant au niveau auquel elle doit être appréciée lorsque l’entreprise appartient à un groupe ; qu’ainsi la lettre de licenciement qui invoque une réorganisation, tout en précisant son incidence sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, satisfait aux exigences légales de motivation et ouvre le champ des justifications économiques susceptibles d’être invoquées en cas de contestation lors du débat probatoire et qu’il appartiendra au juge de contrôler ;

Attendu qu’au regard de ces principes, la lettre de licenciement ci-dessus reproduite, qui invoque une réorganisation-restructuration rendue nécessaire par une réduction des commandes liée au repli du marché de l’automobile et par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise dans son secteur d’activité, tout en précisant l’incidence de cette cause économique sur l’emploi du salarié, satisfait aux exigences légales de motivation, sans qu’il puisse être utilement tiré argument de l’absence d’indication dans cette lettre que la cause économique invoquée se retrouve au niveau des différentes sociétés du même secteur d’activité faisant partie du groupe CLN ;

Attendu que le moyen tiré de l’insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne peut donc être accueilli ;

Attendu que la cause économique de licenciement n’est pas autrement contestée; qu’au demeurant, les pièces et documents comptables versés aux débats font clairement apparaître l’existence à l’époque du licenciement de graves difficultés économiques rencontrées par la société MWF et par la quasi totalité des sociétés du groupe CLN oeuvrant dans le secteur d’activité ou la 'division roues’ du fait du repli du marché de l’automobile en Europe, difficultés, caractérisées par d’importantes baisses des commandes et des ventes, une diminution sensible du chiffre d’affaires et des pertes au niveau des résultats consolidés du groupe dans ce secteur d’activité de plus de 10 000 000 €, toutes circonstances justifiant la mise en oeuvre de mesures de réorganisation et de réduction des effectifs rendues nécessaires pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et du groupe dans le secteur d’activité de la fabrication de roues ;

Attendu toutefois que tel qu’il se trouve défini aux articles L1233-1, L 1233-3 et L.1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique suppose au-delà de sa justification économique ( difficultés économiques, mutations technologiques, réorganisation de l’entreprise, cessation non fautive d’activité de l’entreprise…) et de l’incidence de la cause économique sur l’emploi du salarié concerné (suppression ou transformation) ou sur son contrat de travail (modification substantielle) que l’intéressé ait bénéficié des actions de formation et d’adaptation nécessaires et que son reclassement individuel sur un emploi de même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l’accord exprès de l’intéressé, sur un emploi de catégorie inférieure, ne puisse être réalisé au sein de l’entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient, les offres de reclassement proposées devant être écrites et précises ;

Qu’ainsi, même justifié par une cause économique avérée, le licenciement d’un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l’employeur a préalablement satisfait à son égard à son obligation générale de reclassement, dont le périmètre s’étend au-delà de l’entreprise à toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient, même situées à l’étranger ( dans la mesure où la législation locale ne s’oppose pas à l’engagement de salariés étrangers), dont l’activité, la localisation et l’organisation permettent la permutation de tout ou partie du personnel ;

Qu’il appartient à cet égard à l’employeur de justifier par des éléments objectifs des recherches entreprises, éventuellement étendues aux sociétés du groupe, et de l’impossibilité de reclassement à laquelle il s’est trouvé confronté au regard de son organisation ( ou de celle des sociétés du groupe), de la structure de ses effectifs ou de ceux des sociétés du groupe, de la nature des emplois existants en son sein ou dans les sociétés du groupe ; que cette recherche préalable de reclassement individuel qui commande la légitimité de tout licenciement pour motif économique qu’il soit individuel ou collectif doit être effective et mise en oeuvre de bonne foi par l’employeur au regard des moyens dont il dispose, toutes les possibilités de reclassement devant être explorées, en sorte que le seul refus d’une offre par le salarié n’épuise pas les obligations de l’employeur, dès lors que d’autres possibilités de reclassement dans des emplois disponibles existent au sein de l’entreprise ou du groupe ;

Attendu que par application de l’article L1233-4 du code du travail, les offres de reclassement faites au salarié doivent en outre être écrites et précises quant à l’emploi proposé (notamment quant à sa localisation, à sa qualification, au statut catégoriel , au niveau de rémunération, à la nature du contrat…) afin que celui-ci soit en mesure de prendre sa décision en toute connaissance de cause ;

Attendu par ailleurs qu’il résulte du dispositif légal issu notamment des lois du 2 août 1989, 27 janvier 1993 et 17 janvier 2002 (article L 1233-61, applicable en l’espèce), que tout licenciement pour motif économique de plus de dix salariés sur une même période de trente jours dans une entreprise employant au moins cinquante salariés doit donner lieu à l’établissement et à la mise en oeuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi destiné à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre et à faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou qui présentent des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile ;

Que ce plan, qui doit préalablement soumis à la procédure d’information-consultation des représentants du personnel ( article L 1233-63 du code du travail), doit prévoir un certain nombre de mesures énumérées à l’article L 1233-62 du code du travail, dont, en premier lieu, des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d’emplois ou équivalents à ceux qu’ils occupent ou, sous réserve de l’accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; que lorsque l’entreprise appartient à un groupe, ces emplois de reclassement doivent être recensés au sein de l’ensemble des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d’activité dont l’organisation et la localisation permettent la permutabilité de tout ou partie des salariés ;

Que l’absence de plan de sauvegarde ou son caractère insuffisant, en termes notamment d’actions de reclassement interne, au regard des moyens qui étaient susceptibles d’être mobilisés par l’entreprise ou par le groupe auquel elle appartient, sont sanctionnés par la nullité du plan et cette nullité s’étend à toutes les actes subséquents et en particulier à la procédure de licenciement collectif et aux licenciements individuels prononcés dans le cadre de cette procédure ( cf. article L 1235-10 ) ; qu’en cas de nullité de la procédure de licenciement, le salarié, qui ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou dont la réintégration est devenue impossible, peut prétendre, par application des dispositions de l’article L.1235-11 du code du travail, à des dommages et intérêts qui ne peuvent être inférieurs aux salaires des douze derniers mois ;

Attendu qu’en l’espèce sur 49 suppressions d’emplois, le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit en tout et pour tout un total de 15 postes à pourvoir en reclassement, tous au sein de la société MWF sur le site de Tergnier, outre la possibilité pour les salariés menacés de licenciement de postuler pour les postes susceptibles de se libérer au sein de l’établissement et portés à la connaissance du personnel dans l’espace mobilité ou par voie d’affichage ; qu’aucun élément objectif tenant notamment à l’organisation de l’entreprise et à la structure de ses effectifs n’est toutefois versés aux débats de nature de faire apparaître qu’il n’existait effectivement aucune autre possibilité de reclassement interne susceptible d’être recensée au sein de l’entreprise dans le plan de sauvegarde de l’emploi soumis aux représentants du personnel ;

Que de surcroît la société MWF appartenant au groupe de dimension internationale CLN, le périmètre pertinent de l’obligation de reclassement interne était en l’espèce étendu à l’ensemble des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d’activité ( division 'roues voiture de tourisme, commercial, poids lourds et motocycle') dont l’organisation et la localisation permettaient la permutabilité des salariés, soit en l’occurrence aux société Distribution Roues, DEF, XXX, XXX, XXX;

Qu’à cet égard il est indiqué dans le plan de sauvegarde que « compte tenu de la crise mondiale, aucun poste n’est à ce jour disponible dans le groupe. Toute opportunité qui se présenterait serait immédiatement communiquée par la Direction de MWH au comité d’entreprise et aux salariés'; que l’affirmation de l’absence de postes disponibles au sein du groupe n’est toutefois pas étayée objectivement, notamment en ce qui concerne la justification et le caractère pertinent des recherches de reclassement qui auraient pu être entreprises au sein des différentes sociétés du groupe, ni les lettres qui ont pu être adressées dans cette perspective à ces sociétés ni leurs réponses écrites n’étant versées aux débats, alors même que la preuve de l’effectivité et de la pertinence des recherches entreprises incombe à l’employeur et que cette preuve ne peut se déduire des seuls termes d’attestations délivrées dans des termes strictement identiques par trois dirigeants des sociétés concernés se bornant à affirmer, sans autre justification, que des recherches de postes susceptibles d’être proposés aux salariés de MW France auraient été entreprises à partir du mois de février 2009 mais se seraient révélées infructueuses ;

Attendu qu’il n’est donc pas justifié en l’espèce qu’au stade du plan de sauvegarde de l’emploi les recherches de reclassement aient été étendues à l’ensemble des sociétés déterminant le périmètre de l’obligation de reclassement de l’employeur, en sorte que par application des principes rappelés ci-dessus, le plan de sauvegarde de l’emploi doit être tenu pour manifestement insuffisant en ses dispositions relatives au reclassement interne des salariés et doit par conséquent être annulé, annulation entraînant celle de la procédure de licenciement collectif et du licenciement individuel de Monsieur X ;

Que pour les mêmes raisons les offres individuelles de reclassement emportant réduction de la qualification et de la rémunération, de surcroît imprécises quant au salaire effectivement proposé, faites au salarié et refusées par celui-ci ne sauraient être considérées comme ayant eu pour effet d’épuiser l’obligation de reclassement mise à la charge de l’employeur ;

Attendu que si l’on considère en outre que la société MW France a par ailleurs méconnu l’article 28 de l’accord national sur l’emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 imposant à l’employeur qui 'envisage’ des licenciements pour motif économique de rechercher les possibilités de reclassement à l’extérieur de l’entreprise en faisant appel à la commission territoriale de l’emploi, alors que la méconnaissance de ces dispositions conventionnelles, qui étendent le périmètre de l’obligation de reclassement et prévoient une procédure destinée à favoriser un reclassement à l’extérieur de l’entreprise, avant tout licenciement, constitue un manquement à l’obligation de reclassement préalable au licenciement et a pour effet de priver celui-ci de cause réelle et sérieuse, le salarié, par ailleurs en droit pour les considérations ci-dessus énoncées tenant à l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi de se prévaloir de la nullité de son licenciement et donc de prétendre à l’application de l’article L 1235-11 du code du travail, sera indemnisé compte tenu des justificatifs fournis quant à l’étendue de son préjudice à hauteur de la somme qui sera précisée au dispositif de l’arrêt, étant observé que l’intéressé ne sollicite pas la poursuite de son contrat de travail ;

Attendu qu’il n’est pas justifié en l’espèce de la réunion des conditions d’application de l’article L. 1233 – 71 du code du travail, notamment en ce qui concerne les entreprises assujetties telles que désignées par référence aux articles L 2331-1 et L. 2341-4 du même code, en sorte que le salarié ne peut faire grief à son employeur de ne pas lui avoir proposé un congé de reclassement ; que la demande indemnitaire qu’il présente à ce titre sera par conséquent rejetée ;

Attendu qu’il ressort pas davantage les pièces et documents du dossier que le salarié ne se serait pas vu proposer au cours de la période couverte par la priorité de réembauchage un emploi, correspondant à sa qualification professionnelle, nouvellement créé ou qui serait devenu vacant au sein de l’entreprise ; que sa demande d’indemnité sera dans ces conditions pareillement rejetée ;

Qu’il résulte enfin des dispositions de l’article L 2325-15 du code du travail que l’ordre du jour des réunions du comité d’entreprise doit être arrêté conjointement par l’employeur et le secrétaire du comité d’entreprise, l’employeur disposant toutefois de la faculté de déléguer ses pouvoir en la matière à un cadre régulièrement habilité ; que s’il est justifié en l’espèce que l’employeur a régulièrement délégué ses pouvoirs à Madame Y, responsable RH, pour organiser avec le secrétaire du comité d’entreprise les réunions de cet organisme, aucun élément ne permet en revanche d’attribuer à cette dernière la signature 'pour ordre’ apposée par une personne non identifiée sur l’ordre du jour de la réunion du comité d’entreprise du 12 mars 2009, ce qui suffit à vicier la procédure de consultation de cette institution représentative du personnel et justifie l’allocation au salarié d’une indemnité, en fonction du préjudice subi, dont le montant sera précisé ci-après ;

Attendu qu’il convient de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur du salarié et d’allouer à celui-ci, pour l’ensemble de la procédure de première instance et d’appel, une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de l’arrêt ;

Que la demande indemnitaire présentée sur le même fondement par la société employeur, qui succombe pour l’essentiel, sera en revanche rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris

Statuant à nouveau:

Condamne la SA Magnetto Wheels France ( MW France) à payer à Monsieur A X les sommes suivantes:

—  40 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L 1235-11 du code du travail,

—  1500 € à titre d’indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement collectif,

—  2 500 € à titre d’indemnité par application de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires;

Condamne la société Magnetto Wheeels France ( MW France) aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT.

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