Cour d'appel de Bordeaux, 21 décembre 2012, n° 11/07021

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 21 déc. 2012, n° 11/07021
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 11/07021
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bergerac, 13 octobre 2011, N° 2011F00023

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 21 DECEMBRE 2012

(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Présidente)

N° de rôle : 11/07021

Monsieur Y X

c/

SA BANQUE POPULAIRE CENTRE ATLANTIQUE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 octobre 2011 (R.G. 2011F00023) par le Tribunal de Commerce de BERGERAC suivant déclaration d’appel du 17 novembre 2011

APPELANT :

Monsieur Y X, demeurant Cabernat – XXX

représenté par la SCP LE BARAZER ET d’AMIENS, avocats au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Rose MARTINS DA SILVA, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

SA BANQUE POPULAIRE CENTRE ATLANTIQUE, prise en la personne de son représentant légal demeurant en cette qualité au siège social sis XXX – XXX

représentée par Maître Bérangère PAGEOT, avocat au barreau de BORDEAUX substituant la SCP BENICHOU, avocats au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 30 novembre 2012 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Henriette FILHOUSE, Présidente chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Henriette FILHOUSE, Président,

Monsieur Jean-François BANCAL, Conseiller,

Madame Christine ROUGER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé Goudot

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Monsieur X était gérant de la S.A.R.L VEAU DU PERIGORD.

A ce titre, il a ouvert, le 8 juillet 2000, pour le compte de la société un compte n° 18621902901, dans les livres de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE.

Le 21 juillet 2000, monsieur X s’est porté caution solidaire à concurrence de la somme de 152.400 € de tous les engagements de la société envers la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE.

Le 15 mars 2002, il a consenti à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE une caution solidaire complémentaire de 530.000 €.

Le 19 février 2010, la S.A.R.L VEAU DU PERIGORD a été placée sous sauvegarde de justice par le Tribunal de Commerce de BERGERAC.

La BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE a déclaré sa créance à hauteur de 696.051,76 € à titre chirographaire.

Par lettre recommandée avec accusé réception du 6 septembre 2010, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE a mis en demeure monsieur X d’honorer son engagement de caution.

Le 18 février 2011, la S.A.R.L VEAU DU PERIGORD a été placée en liquidation judiciaire.

Par acte du 15 mars 2011, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE a fait assigner monsieur X en paiement.

Par jugement du 14 octobre 2011, le Tribunal de Commerce de BERGERAC a

— jugé inopérant le défaut de la mention prévue à l’article L 341-2 du Code de la Consommation,

— dit en conséquence, que les engagements de caution donnés par monsieur X en date du 21.07.2000 et en date du 15.03.2002 doivent produire effet,

— dit que le caractère disproportionné de la caution n’est pas établi,

— condamné monsieur X à payer à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE en deniers ou quittance au titre des engagements solidaires de caution de la S.A.S VEAU DU PERIGORD – ÉTABLISSEMENTS X dont il était le Président, la somme de 682.449,02 €,

— dit qu’il n’y a lieu de déchoir la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE de son droit aux intérêts, et en conséquence dit que la condamnation en paiement sera assortie de droit aux intérêts au taux conventionnel à compter de la mise en demeure du 06.09.2010, valant sommation de payer,

— débouté monsieur X à payer à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE la somme de 2.631,20 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire,

— condamné monsieur X aux entiers dépens.

Le 17 novembre 2011, monsieur X a interjeté appel de cette décision

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2012.

En ses dernières écritures du 22 juin 2012 auxquelles il sera référé pour complet exposé, monsieur X au visa des articles 564 du Code de Procédure Civile, L 622-28 du Code du Commerce, des articles 1244-1, 1134, 1139, 1281 et 2013 du code civil, a poursuivi l’infirmation de la décision et conclu

— à la recevabilité de ses demandes fondées sur la non-exigibilité de ses engagements de caution, observant que le moyen nouveau tiré de l’inexigibilité de la créance tend à la même fin que les moyens soulevés devant le Tribunal de Commerce, le rejet de la demande en paiement,

— à titre principal, au rejet des demandes de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE en ce

* que la déchéance du terme n’a pas été prononcée à l’égard du débiteur principal, qu’elle n’a pas été valablement prononcée à son égard, faute de mise en demeure, au visa de l’article 1139 du Code Civil opposant que la lettre du 6 décembre 2010 ne vaut pas interpellation suffisante

* qu’il n’est pas justifié d’une créance échue à l’égard du débiteur principal ou de lui-même,

* que la lettre sus indiquée est intervenue en période de suspension des poursuites

— à titre subsidiaire, en nullité des cautionnements en raison de leur caractère disproportionné, contestant d’une part avoir organisé son insolvabilité en faisant donation d’une partie de son patrimoine à sa fille, près de trois ans avant le placement sous sauvegarde de justice de sa société, d’autre part l’importance de son patrimoine telle qu’évaluée par le Tribunal de Commerce, faisant valoir que depuis la mise en liquidation de sa société, il ne perçoit plus de salaire, il est en instance de divorce, et se trouve en situation patrimoniale précaire.

— à titre superfétatoire, à l’octroi des plus larges délais avec déduction des intérêts,

— en tout état de cause, à la condamnation de l’intimée à lui payer la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

La BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE, en ses dernières conclusions du 31 juillet 2012 auxquelles il sera référé pour plus ample développement, a poursuivi

— l’irrecevabilité de la demande principale comme étant une demande nouvelle, en ce qu’elle a pour objet la poursuite des contrats de cautionnement alors qu’en première instance, les demandes tendaient à leur nullité,

— la confirmation de la décision déférée, observant

* que la mise en demeure du débiteur principal n’est pas utile du fait de la défaillance par sa mise en faillite, le jugement prononçant la liquidation judiciaire rendant exigibles les créances non échues,

* que l’article L 622-28 du Code du Commerce a pour effet de suspendre toute action en justice à l’égard des coobligés et non d’interdire leur mise en demeure,

* que dans les contrats de cautionnement, la caution s’est interdite de subordonner l’exécution de ses engagements à une mise en demeure préalable du débiteur principal,

* que la lettre du 06.09.2011 remplit les conditions de l’article 1139 du Code Civil,

* que les cautions dirigeantes ne sont pas fondées à rechercher la responsabilité de la banque pour disproportion d’un cautionnement, sauf à prouver qu’elle disposait d’informations qu’eux-mêmes auraient ignorées, que les fiches patrimoniales établies par monsieur X démontrent qu’au jour de la souscription des engagements de caution, le patrimoine, en considération des dettes déclarées, était suffisant, que par l’acte de donation faite à sa fille il s’est départi d’une part importante de son patrimoine malgré les engagements pris,

* que la demande de délais se heurte à la mauvaise foi de monsieur X et au fait qu’il a déjà bénéficié de fait de larges délais,

— le rejet de la demande de délais,

— la condamnation à lui payer la somme de 13.525 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

SUR QUOI

Sur la fin de non recevoir tirée du caractère nouveau de la demande principale présentée par monsieur X :

Aux termes de l’article 564 du Code de Procédure Civile «à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.»

Selon ce texte, les parties peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions pour faire écarter les prétentions adverses

Tel est le cas en l’espèce. Monsieur X dont le moyen tiré de la nullité a été écarté par le Tribunal de Commerce soulève devant la Cour d’Appel l’inexigibilité de la créance.

Ce nouveau moyen de défense ne saurait être irrecevable au regard du texte susvisé.

Sur le moyen tiré de l’inexigibilité de la créance :

Sur la lettre du 6 septembre 2011 :

Monsieur X dénie à cette lettre la valeur d’une mise en demeure.

Aux termes de l’article 1139 du Code Civil, le débiteur est constitué en demeure, soit par une sommation ou par autre acte équivalent, «telle une lettre missive lorsqu’il ressort de ses termes une interpellation suffisante,» soit par l’effet de la convention, lorsqu’elle porte que, sans qu’il soit besoin d’acte et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure.

La lettre du 6 septembre 2010 est adressée par le service contentieux de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE, elle fait référence à la qualité de monsieur X de caution solidaire des concours consentis à la S.A.S VEAU DU PERIGORD. Elle mentionne le montant de la dette principale et les limites de l’engagement de caution. Elle invite monsieur X à honorer ces engagements de caution sous 8 jours à peine d’engagement d’une action judiciaire à son encontre.

Cette lettre qui au demeurant mentionne la jonction d’un décompte est une interpellation suffisante caractéristique de la mise en demeure.

Il sera constaté qu’à réception de cette lettre, monsieur X n’a pas contesté l’éventuelle absence du décompte annoncé comme joint. Par ailleurs, il avait reçu régulièrement en début d’année l’information due à la caution. Enfin, en sa qualité de gérant, il était parfaitement informé de l’état de la dette de sa société.

Sur le moyen tiré de la suspension des poursuites édictée par l’article 622-28 alinéa 2 du Code du Commerce :

En vertu de l’article L. 622-28 du Code du Commerce relatif à la mise sous sauvegarde de justice «Le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu’il ne s’agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d’un paiement différé d’un an ou plus «Les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie» peuvent se prévaloir des dispositions du présent alinéa.

«Le jugement d’ouverture suspend jusqu’au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti» une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie». Le tribunal peut ensuite leur accorder des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans.

Les créanciers bénéficiaires de ces garanties peuvent prendre des mesures conservatoires.

Monsieur X invoque le fait que la lettre est antérieure au prononcé de la liquidation judiciaire et celui selon lequel, la mise en demeure ne pouvait pas être mise en oeuvre valablement à son encontre.

Or le texte sus visé n’interdit pas au créancier de mettre en demeure le coobligé mais interdit uniquement l’engagement de toute action en justice tendant au paiement de la dette principale.

Sur l’absence d’exigibilité de la créance à l’égard du débiteur principal :

Aux termes de l’article 2313 du Code Civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette.

Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.

L’exigibilité du cautionnement dépend directement de celle de l’obligation principale

Or le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigible les créances non échues, conformément à l’article L 643-1 du code de commerce.

Quant à l’absence de mise en demeure du débiteur principal, il sera rappelé que monsieur X a par contrat renoncé à 'subordonner’ l’exécution de son engagement à une mise en demeure préalable du débiteur principal, l’exigibilité des créances de cette dernière à l’égard du débiteur principal entraînant de plein droit l’exigibilité de sa dette de caution et les écritures de la banque lui étant à cet égard opposables.

Sur le moyen subsidiaire tiré de la nullité du cautionnement du fait de son caractère disproportionné :

Monsieur X invoque les dispositions de l’article L 341-4 du Code de la Consommation.

Ces dispositions ne s’appliquent uniquement qu’aux contrats souscrits après la loi du 1er août 2003.

Les cautionnements sont antérieurs à cette loi.

La disproportion s’apprécie lors de la conclusion de l’engagement au regard du montant de l’engagement et des biens et revenus de la caution.

Il résulte des fiches patrimoniales établies par monsieur X et des pièces produites que ce dernier disposait d’un patrimoine suffisant tant courant 2000 que courant 2002, années de ses engagements.

Ainsi courant 2.000, il déclarait un patrimoine déduction des emprunts déclarés en cours à hauteur de plus de 670.000 € et en 2002, de plus de 770.000 €

Il ne démontre pas le caractère disproportionné de ses engagements.

Sur la demande de délai :

Aux termes de l’article 1244-1 du Code Civil, compte tenu de la situation du débiteur de bonne foi et en considération des besoins du créancier, le juge peut reporter ou échelonner la dette dans la limite de deux années.

Monsieur X ne saurait invoquer sa bonne foi alors qu’il est constant qu’en 2007, alors qu’il ne pouvait pas ignorer les engagements pris à l’égard de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE et la nécessité, en cas de besoin d’engager son patrimoine pour y faire face, il a fait donation d’une part importante de son patrimoine.

Il sera débouté de sa demande.

Sur les demandes annexes :

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, au vu des factures produites qui concernent principalement les frais engagés à l’égard de la société de monsieur X, à hauteur de 3. 946,80 €

Les dépens seront mis à la charge de monsieur X.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant par décision contradictoire en dernier ressort par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable la demande nouvelle de monsieur X tirée de l’inexigibilité de la créance.

Au fond l’en déboute.

Confirme la décision déférée.

Y ajoutant,

Condamne monsieur X à payer à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE CENTRE ATLANTIQUE la somme de 3. 946,80 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile

Condamne monsieur X aux entiers dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Henriette FILHOUSE, présidente, et par Hervé Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

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