Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 10 mai 2021, n° 18/02328

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 10 mai 2021, n° 18/02328
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 18/02328
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 12 mars 2018, N° 15/11453
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 10 MAI 2021

(Rédacteur : Vincent BRAUD, conseiller,)

N° RG 18/02328 – N° Portalis DBVJ-V-B7C-KMXR

SAS CITYA IMMOBILIER ATLANTIS

c/

X Y

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 13 mars 2018 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 15/11453) suivant déclaration d’appel du 23 avril 2018

APPELANTE :

SAS CITYA IMMOBILIER ATLANTIS agissant poursuites et diligences de son Président domicilié en cette qualité au siège social sis […]

représentée par Maître Catherine LATAPIE-SAYO, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

X Y

né le […] à […]

de nationalité Française

demeurant […]

représenté par Maître E F, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Anne SANNIER, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 mars 2021 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Vincent BRAUD, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Béatrice PATRIE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

X Y est propriétaire d’un bien immobilier situé résidence Ginko, […], appartement […], à Bordeaux, dont la gestion a été confiée à la société Citya Immobilier Atlantis par un contrat de mandat rémunéré, signé le 23 mai 2013 et enregistré le 31 mai 2013 sous le numéro 2062.

Le même jour, X Y a adhéré au contrat d’assurance de groupe « Formule Quiétude » souscrit par l’administrateur de biens, par l’intermédiaire de la société Insor, courtier délégataire, auprès de l’Équité Assurance, garantissant les loyers impayés, les frais de procédure, les détériorations immobilières et la vacance locative, étant précisé que cette garantie était expressément prévue par le contrat de mandat (page 6/7).

En exécution de son mandat de gestion, la société Citya Immobilier Atlantis a conclu un bail d’habitation, le 15 novembre 2013, au bénéfice de A B et C D.

À la suite d’incidents de paiement de la part des locataires, un premier commandement de payer a été délivré le 16 février 2015, et une déclaration de sinistre adressée le 3 mars 2015 à la société Insor.

L’assureur de loyers impayés a opposé un refus de garantie au motif que l’avis d’imposition 2013 sur les revenus 2011 et 2010 de A B présentait des majorations et intérêts de retard qui laissaient présumer des difficultés financières.

À la suite d’une assignation en référé du 4 décembre 2015, le président du tribunal d’instance de Bordeaux, parordonnance en date du 18 mars 2016, a constaté la résiliation du bail à la date du 19 octobre 2015, fixé une indemnité d’occupation, et condamné les locataires au payement de l’arriéré de loyers et charges arrêté au 29 février 2016.

Par acte d’huissier du 20 novembre 2015, X Y a assigné la société Citya Immobilier Atlantis devant le tribunal de grande instance de Bordeaux afin de voir engager sa responsabilité contractuelle.

Par jugement contradictoire en date du 13 mars 2018, le tribunal a :

' Déclaré responsable la société Citya Immobilier Atlantis du préjudice subi par X

Y ;

En conséquence,

' Condamné la société Citya Immobilier Atlantis à payer à X Y la somme de 10 220, 87 euros au titre de la perte des loyers et charges, la somme de 1 926,80 euros au titre des frais de recouvrement, la somme de 184,40 euros au titre du remboursement des cotisations d’assurance ;

' Débouté X Y du surplus de ses demandes ;

' Condamné la société Citya Immobilier Atlantis à payer à X Y la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

' Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;

' Condamné la société Citya Immobilier Atlantis aux dépens.

Par déclaration du 23 avril 2018, la société Citya Immobilier Atlantis a interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 12 février 2021, la société par actions simplifiée Citya Immobilier Atlantis demande à la cour de :

' Déclarer recevable et bien fondé l’appel interjeté par la société Citya Immobilier Atlantis ;

' Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

' Par suite, voir rejeter l’intégralité des demandes présentées par X Y ;

' Le débouter de son appel incident comme étant infondé ;

À titre subsidiaire,

' Déclarer la société Citya Immobilier Atlantis subrogée dans les droits d’X Y à l’encontre de A B et C D, à due concurrence des condamnations prononcées à son encontre ;

En toute hypothèse,

' Condamner X Y à payer àla société Citya Immobilier Atlantis la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens qui comprendront ceux de première instance.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 25 février 2021, X Y demande à la cour de :

' Confirmer le jugement rendu le 13 mars 2018 par la 5e chambre civile près le tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu’il a déclaré responsable la société Citya Immobilier Atlantis du préjudice subi par X Y ;

' Confirmer ledit jugement en ce qu’il a condamné ladite société à payer à X Y la somme de 10 220,87 euros au titre de la perte des loyers et charges, la somme de 1 926,80 euros au titre des frais de recouvrement, la somme de 184,40 euros au titre du

remboursement des cotisations d’assurance ;

À titre subsidiaire, et si par extraordinaire la cour entendait minorer le préjudice équivalent à la perte des loyers impayés et des charges qui auraient dû être versés par la société Insor :

' Dire et juger que ce montant ne pourrait être inférieur à 80 % outre les intérêts légaux à compter du 20 novembre 2015 ;

En tout état de cause :

' Condamner la société Citya Immobilier Atlantis au paiement de la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi par X Y ;

' Condamner la société Citya Immobilier Atlantis à régler à X Y la somme de 7 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de maître E F, avocat, sur ses affirmations de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er mars 2021 et l’audience fixée au 15 mars 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité de l’agent immobilier :

Aux termes de l’article 1992 du code civil, le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion. Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire.

En l’espèce, la société Citya Immobilier Atlantis est le souscripteur du contrat d’assurance auquel a adhéré son mandant, X Y.

L’article 1.6.2.3 des dispositions spéciales du contrat d’assurance stipule : « Les majorations présument des difficultés financières du locataire ou de la caution. Dans ce cas, la garantie n’est pas acquise. »

Nonobstant cette clause dont elle avait connaissance, la société Citya Immobilier Atlantis a présenté à son mandant des locataires pour lesquels était exclue la garantie souscrite. En effet, l’avis d’imposition de 2013 de A B sur ses revenus de 2010 et de 2011 portait mention de majorations et intérêts de retard. Aussi est-ce par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, que le tribunal a retenu une faute à la charge du mandataire. Celui-ci aurait en effet dû écarter des locataires qui ne remplissaient pas les conditions de l’assurance souscrite, ou à tout le moins signaler le fait aux bailleurs. La société Citya Immobilier Atlantis se prévaut en vain de la solvabilité réelle des preneurs, puisque la faute qui lui est reprochée tient à l’absence de couverture du risque de loyers impayés, quelle que soit la cause de ces impayés. Le fait que la présomption énoncée par la police puisse être éventuellement combattue n’est pas davantage de nature à écarter la faute commise par le mandataire, qui a en connaissance de cause exposé son mandant à un refus prévisible de garantie.

Aux termes de l’article 1991 du code civil, le mandataire répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de l’inexécution du mandat.

À ce titre, X Y sollicite les indemnités suivantes :

' 10 220,87 euros au titre des loyers et charges impayés ;

' 1 926,80 euros au titre des frais contentieux ;

' 184,40 euros au titre des cotisations d’assurance ;

' 3 000 euros au titre du préjudice moral.

a) S’agissant des loyers, charges et frais contentieux, par ordonnance de référé du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 18 mars 2016, les locataires ont été condamnés à payer aux époux Y les sommes suivantes :

' 6 820,57 euros au titre des loyers et charges au 30 novembre 2015, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer ;

' 3 797,88 euros au titre des loyers et charges du 1er décembre 2015 au 29 février 2016, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer ;

' une indemnité d’occupation égale aux loyer et charges à compter du 1er mars 2016, soit 1 265,96 euros à leur départ le 6 avril 2016 ;

' aux dépens en ce compris le coût du commandement et de l’assignation, outre la somme de 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

X Y conteste que A B et C D se soient acquittés de leur dette locative. La société Citya Immobilier Atlantis justifie cependant,par le décompte de l’huissier de justice, que l’ordonnance de référé est exécutée en principal, intérêts et frais depuis le 19 octobre 2020. L’intimé ne soutient pas que ces sommes ne lui aient pas été reversées par la société Citya Immobilier Atlantis. Puisque sa créance est éteinte, il ne subit de ce chef aucun préjudice.

X Y étant débouté de sa demande afférente aux loyers impayés, il n’y a pas lieu de subroger dans ses droits la société Citya Immobilier Atlantis comme celle-ci le sollicite à titre subsidiaire.

b) S’agissant du solde des cotisations d’assurance, les bailleurs les ont acquittées en vain puisque la garantie était exclue dès la conclusion du bail. Cependant, l’intimé ne nie pas qu’il a pu les déduire fiscalement en vertu de l’article 31, paragraphe Ier, 1o, a bis, du code général des impôts, comme le fait valoir l’appelante, si bien qu’il n’a subi aucun préjudice de ce fait.

c) S’agissant du préjudice moral, il correspond selon X Y aux tracasseries occasionnées par le retard et au fait de n’avoir pu disposer d’un revenu locatif régulier permettant de couvrir les échéances de remboursement d’un prêt immobilier.

Faute de bénéficier de l’assurance souscrite, l’intimé a en effet été privé pendant plus de cinq ans du revenu locatif escompté. Les soucis et tracas causés par les difficultés de recouvrement justifient l’octroi d’une indemnité de 2 000 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelante en supportera donc la charge.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, la société Citya Immobilier Atlantis sera condamnée à payer la somme de 2 000 euros.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

Infirme partiellement le jugement en ce qu’il :

' Condamne la société Citya Immobilier Atlantis à payer à X Y la somme de 10 220, 87 euros au titre de la perte des loyers et charges, la somme de 1 926,80 euros au titre des frais de recouvrement, la somme de 184,40 euros au titre du remboursement des cotisations d’assurance ;

' Déboute X Y du surplus de ses demandes ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Condamne la société Citya Immobilier Atlantis à payer à X Y la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral ;

Déboute X Y du surplus de ses demandes ;

Confirme toutes les autres dispositions non contraires ;

Y ajoutant,

Condamne la société Citya Immobilier Atlantis à payer à X Y la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Citya Immobilier Atlantis aux dépens d’appel, dont distraction au profit de maître E F, avocat, sur ses affirmations de droit.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Vincent BRAUD, conseiller, en remplacement de Madame Béatrice PATRIE, président, légitimement empêchée, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 10 mai 2021, n° 18/02328