Cour d'appel de Chambéry, Chambre civile, 10 juin 1997

  • President du conseil d'administration, défaut de pouvoir·
  • En outre, article 115 nouveau code de procédure civile·
  • En l'espece, sommes qualifiees expressement d'acompte·
  • Convention entre un professionnel et un consommateur·
  • Organe représentant, president directeur général·
  • Personne investie des pourvoirs les plus etendus·
  • Restitution des sommes percues sans contrepartie·
  • Article 114 nouveau code de procédure civile·
  • Article 648 nouveau code de procédure civile·
  • Défaut de mention de l'organe représentant

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, ch. civ., 10 juin 1997
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Référence INPI : B19970233
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Suivant acte sous seings prives que les parties s’accordent à considérer comme étant daté du 20 novembre 1992, le docteur P s’est engagé à établir les documents et à fournir les pièces nécessaires en vue du dépôt de brevets valables concernant des allergènes préparés pour un seul individu. Il s’est également engagé de façon irrévocable à céder à la SA MEDIBREVEX ou à toute personne morale s’y substituant ledit brevet moyennant le règlement par la SA MEDIBREVEX de 800.000, 00 francs le 25 novembre 1992 et de 50.000, 00 francs le 13 janvier 1993. Par acte d’huissier du 30 janvier 1996, la SA MEDIBREVEX a fait assigner le docteur P en référé pour qu’il soit condamné à lui verser la somme de 850.000, 00 francs à titre provisionnel à valoir sur le remboursèrent des sommes qui lui avaient été avancées, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 avril 1994, au motif qu’il n’avait pas exécuté ses engagements. Elle sollicitait également sa condamnation au paiement de la somme de 10.000, 00 francs en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens. Par ordonnance du 2 avril 1996 à laquelle il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, le Président du Tribunal de Grande Instance d’Annecy statuant en référé a rejeté les exceptions de nullité et d’irrecevabilité et a condamné le docteur P à payer à la SA MEDIBREVEX la somme de 850.000, 00 francs à titre provisionnel avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 1994, date de la première mise en demeure, outre la somme de 5.000, 00 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens. Le docteur P a relevé appel de cette ordonnance par déclaration au greffe de la Cour en date du 17 avril 1996. Il fait valoir :

- que l’assignation introductive d’instance ne mentionnait pas l’identité de l’organe représentant la SA MEDIBREVEX et que constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte le défaut de pouvoir d’une personne figurant au procès comme représentant une personne morale, que la nullité de l’acte est encourue sans qu’il y ait lieu de prouver l’existence d’un grief,
- qu’en outre une personne morale ne peut agir en justice que par l’intermédiaire de son représentant légal, régulièrement habilité pour ce faire,
- que pour statuer sur la demande, il est nécessaire d’examiner deux problèmes :

- celui de la qualification exacte du versement de 850.000, 00 francs par la SA MEDIBREVEX au docteur P,
- celui du respect ou du non respect par le docteur P de ses engagements,

— que l’emploi du terme « acompte » dans la convention ne préjuge pas de la nature juridique du versement anticipé, qu’au contraire la loi n° 92/60 du 18 janvier 1992, renforçant la protection des consommateurs, a retenu dans son article 3 que « sauf stipulation contraire du contrat, les sommes versées d’avance sont des arrhes, ce qui a pour effet que chacun des cocontractants peut revenir sur son engagement, le consommateur en perdant les arrhes, le professionnel en les restituant au double », qu’il existe donc une présomption en faveur des arrhes, qu’à défaut de stipulation dans la convention du 20 novembre 1992 concernant le sort de la somme versée en cas de non conclusion de la vente, le Juge doit se livrer à une interprétation de la volonté des parties qui excède la compétence du juge des référés, que contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, les deux parties ne sont pas des professionnelles de la vente,
- qu’il produit des pièces établissant qu’il a respecté ses engagements. Il demande à la Cour de réformer la décision entreprise, de constater la nullité de l’assignation, de déclarer l’action irrecevable, de renvoyer la SA MEDIBREVEX à mieux se pourvoir, de la condamner au paiement de la somme de 10.000, 00 francs en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens. La SA MEDIBREVEX fait observer :

- que le docteur P n’établit aucun grief, qu’elle a régularisé la situation comme l’y autorise l’article 115 du nouveau code de procédure civile, qu’il était précisé que la société était prise en la personne de son Président Directeur Général qui est Monsieur B DIT BON, que le docteur P qui invoque les dispositions de l’article 117 du nouveau code de procédure civile ne donne aucune explication convaincante et surtout ne remet pas en cause la régularisation,
- que le Président Directeur Général a toujours qualité pour agir au nom de la société et n’a pas à justifier d’un quelconque pouvoir pour engager une procédure en référé,
- que la loi 92/60 du 18 janvier 1992 n’a pas vocation à s’appliquer en l’espèce car il ne s’agit pas d’un contrat entre un professionnel et un consommateur mais entre deux professionnels, que le docteur P n’a jamais été un consommateur par rapport à la SA MEDIBREVEX, que les pièces produites en cause d’appel n’ont aucune valeur probante, qu’il n’est nullement établi que le docteur P a exécuté ou même commencé d’exécuter ses engagements. Elle demande à la Cour de confirmer l’ordonnance entreprise et de condamner le docteur P au paiement de la somme de 15.000, 00 francs en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

DECISION ATTENDU que l’assignation introductive d’instance devant le juge des référés a été délivrée à la requête de la Société MEDIBREVEX SA dont le siège social est […] à 74940 Annecy le Vieux ; qu’au mépris de l’article 648 du nouveau code de procédure civile, il n’y est pas précisé l’organe qui la représente légalement ; qu’il ne peut en être déduit que la personne qui la représente dans le cadre de l’introduction de la présente procédure n’a pas le pouvoir de la représenter ou n’est pas celle qui a le pouvoir de la représenter légalement et qu’il ne saurait être sérieusement contesté que le défaut de mention dont s’agit constitue un vice de forme au sens de l’article 114 du nouveau code de procédure civile et non une irrégularité de fond au sens de 1 ' article 117 du même code ; que la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu’à charge pour 1'adversaire qui 1'invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public (article 114 alinéa 2) ; que force est de constater que le docteur P qui a des liens étroits avec la Société MEDIBREVEX dans laquelle il est ou en tout cas a été associé et même administrateur n’établit ni même n’invoque aucun grief ; qu’en outre, en vertu de l’article 115 du nouveau code de procédure civile relatif aux vices de forme, la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de 1 ' acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief et que de surcroît, même en vertu de l’article 121 du même code relatif aux irrégularités de fond, dans le cas où elle est susceptible d’être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le Juge statue ; que devant le premier juge, la Société MEDIBREVEX SA a pris des conclusions pour préciser qu’elle est prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice, Monsieur B DIT BON et a valablement régularisé la situation à un moment où elle pouvait l’être de sorte que la cause de nullité a disparu ; que le premier juge a, à bon droit, rejeté l’exception de nullité tirée du défaut de mention dans l’assignation de l’organe représentant légalement la Société demanderesse ; ATTENDU qu’en vertu de l’article 113 de la loi du 24 juillet 1966, le président du conseil d’administration représente la société dans ses rapports avec les tiers et est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société ; qu’il n’a pas à justifier d’un pouvoir spécial pour agir en réféfé aux fins de recouvrement d’une somme d’argent dans l’intérêt de la société ; que l’exception de nullité pour défaut de pouvoir et d’irrecevabilité de l’action a été à juste titre rejetée ; ATTENDU que la convention intervenue entre le docteur P et la Société MEDIBREVEX ne peut s’analyser comme un contrat entre un professionnel de la vente ou de la prestation de service et un consommateur ; que le docteur P qui revendique d’ailleurs sa qualité d’allergologue et qui en 1 ' espèce est le cédant ne peut être considéré comme un vendeur ou un prestataire de service professionnel ni comme un consommateur à l’égard de la Société MEDIBREVEX SA ; qu’en outre, si selon l’article 3 de la loi susvisée, « sauf stipulation contraire du contrat, les sommes versées d’avance sont des arrhes, ce qui a pour effet que chacun des cocontractants peut revenir sur son engagement, le consommateur en perdant les arrhes, le professionnel en les restituant au double », les parties ont, en l’espèce, qualifié expressément d’acompte les 850.000, 00 francs versés au

docteur P à valoir sur le montant total de la vente ; qu’enfin, il ne s’agit pas pour l’une ou l’autre des parties de revenir sur son engagement mais bien d’inexécution par 1'une d’elles de ses obligations dont l’autre se prévaut pour solliciter la restitution des avances versées dans le cadre d’une résolution du contrat en application de l’article 1184 du code civil ; qu’il s’en suit que les dispositions de l’article 3 de la loi 92/60 du 18 janvier 1992 sont inapplicables et inopérantes dans le cadre du présent litige ; ATTENDU que le docteur P qui soutient avoir exécuté ses engagements produit pour l’établir pour la première fois en cause d’appel :

- un rapport sur le principe des APSI solides,
- une note du docteur D en date du 14 décembre 1994 sur les méthodes de préparation des sphéroïdes chargés en principes actifs,
- un courrier du cabinet Germain et Moreau à la Société MEDIBREVEX SA en date du 17 juin 1994 où 11 écrivait à celle-ci : « Nous faisons suite au projet de brevet ayant été adressé le 18 mars 1994, et à notre courrier du 22 avril vous ayant demandé votre accord sur le texte proposé, la désignation du ou des inventeurs et le règlement de notre facture de la même date. Nonobstant notre rappel du 5 mal dernier, nous sommes toujours dans l’attente de ces éléments. A défaut de réponse de votre part d’ici au 23 juin prochain, nous considérerons que ce dossier est de votre côté sans suite……. » ; Que le rapport sur la description du principe des APSI solides qui porte certes en en-tête le cachet du docteur P n’est ni daté ni signé ; que cette pièce ne peut constituer en elle- même une preuve de 1 ' exécution par le docteur P de ses engagements ; que le sort et la destination de la note du docteur D ne sont ni établis ni même explicités ; que le courrier du 17 juin 1994 ne peut être détaché des autres courriers échangés entre les parties ; qu’à cet égard par lettre recommandée en date du 20 avril 1994 dont le docteur P a accusé réception le 22 avril suivant, la Société MEDIBREVEX SA lui écrivait notamment : « Enfin, moyennant une avance de 850.000, 00 francs, vous vous êtes engagé par écrit le 20 novembre 1992 à apporter à MEDIBREVEX une invention brevetable dénommée BREVET DES APSI. A ce jour, malgré de multiples relances et alors que sur ma demande expresse, Monsieur G, notre agent de brevet, a rédigé l’essentiel du texte, il vous reste en collaboration avec Monsieur D, professeur de galénique à Genève, à terminer ce travail. Je vous invite à vous exécuter avant le 2 mai à venir. Passé ce délai, 1 ' avance qui vous a été consentie sera immédiatement exigible……………….. » ; qu’elle lui faisait écrire par lettre du 16 mai 1995 dont il a accusé réception le 17 mai : "Je vous rappelle que dès novembre 1992, vous vous étiez engagé par écrit à livrer à MEDIBREVEX au plus tard le 29 janvier 1993, le texte d’un brevet nouveau concernant la technologie dite des APSI. Je vous rappelle par ailleurs que la Société MEDIBREVEX a été amenée à vous faire l’avance d’une somme de 850.000, 00 francs en principal, pour les travaux auxquels vous vous étiez engagé ; A ce jour et malgré de multiples relances, vous ne vous êtes toujours pas exécuté

……..Aussi je vous mets par la présente en demeure d’avoir à procéder sans délai…………….

- à la délivrance à la Société MEDIBREVEX, conformément à vos engagements,
- des résultats des travaux des professeurs STANGALINI et SERRANO concernant les produits « BEMINAE » et « OVIX »,
- des documents relatifs au brevet des APSI……….." ; que le 8 décembre 1995, le cabinet GERMAIN et MAUREAU relatait par écrit à la direction des services fiscaux la chronologie de ses relations avec le docteur P indiquant qu’il n’avait jamais pu obtenir de celui-ci les éléments matériels et techniques complémentaires nécessaires à la rédaction d’un brevet ; qu’ainsi, non seulement le docteur P ne rapporte pas la preuve dont la charge lui incombe en application de l’article 1315 alinéa 2 du code civil qu’il a exécuté ses engagements mais que les courriers des 20 avril 1994 et 16 mai 1995 qui ne paraissent pas avoir suscité de réaction de sa part puisqu’il ne fait état et ne justifie d’aucune réponse et le courrier du 8 décembre 1995 démontrent leur inexécution ; qu’en conséquence, il n’est pas sérieusement contestable que le docteur P qui a perçu à titre d’avance la somme de 850.000, 00 francs sans fournir la contrepartie convenue doit la restituer ; qu’à bon droit, le juge des référés l’a condamné à cette restitution avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 1994, date de la première mise en demeure, puisque son obligation à ce titre n’est pas sérieusement contestable ; ATTENDU qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la Société MEDIBREVEX l’intégralité des frais irrépétibles que lui a occasionnés le présent appel ; que le docteur P qui succombe en cet appel et au fond sera tenu de lui verser la somme de 5.000, 00 francs en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale au titre des frais irrépétibles d’appel en sus de celle de même montant allouée par le premier juge au titre des frais irrépétibles de première instance ; qu’il supportera quant à lui l’intégralité de ses propres frais irrépétibles et outre les dépens de première instance, ceux d’appel ; PAR CES MOTIFS LA COUR ; Statuant publiquement et contradictoirement, DECLARE l’appel du docteur P recevable en la forme, Au fond,

CONFIRME l’ordonnance entreprise, Y ajoutant, CONDAMNE le docteur P à verser à la Société MEDIBREVEX la somme de 5.000, 00 francs (CINQ MILLE FRANCS) en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel, DEBOUTE les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires, CONDAMNE le docteur P aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP VASSEUR-BOLLOMJEON-ARNAUD, Avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

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