Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 30 décembre 2020, n° 18/03783

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 30 déc. 2020, n° 18/03783
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 18/03783
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Saverne, 10 juin 2018
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

VB/SD

MINUTE N°

663/20

Copie exécutoire à

—  Me Joseph WETZEL

—  Me Frédérique DUBOIS

Le 30.12.2020

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 30 Décembre 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 18/03783 – N° Portalis DBVW-V-B7C-G3BY

Décision déférée à la Cour : 11 Juin 2018 par le PRESIDENT DU TGI DE SAVERNE

APPELANTE – INTIMEE INCIDEMMENT :

SCI ATHENA

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me AZEVEDO, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE – APPELANTE INCIDEMMENT :

SARL OPTIQUE DES THERMES

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Frédérique DUBOIS, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 modifié du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Novembre 2020, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller, et M. BARRE, Vice-Président placé, entendu en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

M. BARRE, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits, procédure et prétentions des parties :

La Sci Athéna est propriétaire d’un immeuble situé […] à Niederbronn les Bains abritant un local commercial dont le bail ainsi que le fonds de commerce ont été cédés à la Sarl Optique des Thermes le 7 janvier 2011.

La Sarl Optique des Thermes a demandé le renouvellement du bail par acte d’huissier signifié le 17 juillet 2015 à la Sci Athéna.

La Sci Athéna a fait signifier à la Sarl Optique des Thermes son refus de renouvellement sans paiement d’une indemnité d’éviction aux motifs qu’elle ne remplissait pas les conditions requises aux articles L 145-1 et L 145-8 du code de commerce le 15 octobre 2015 et lui a en conséquence donné congé pour le 31 janvier 2016 à minuit.

Par acte d’huissier délivré le 2 mai 2018 à la Sarl Optique des Thermes, la Sci Athéna a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Saverne aux fins de voir constater la résiliation du bail à compter du 31 janvier 2016, d’obtenir son évacuation des lieux et sa condamnation à lui payer une indemnité d’occupation.

Par ordonnance de référé du 11 juin 2018, le président du tribunal de grande instance de Saverne a :

— constaté la résiliation du bail commercial ayant lié les parties à compter du 30 juin 2016 par l’effet du congé signifié le 15 octobre 2015,

— condamné la Sarl Optique des Thermes à restituer les lieux dans les deux mois de la signification de la présente décision sous peine, passé ce délai, d’expulsion et de celle de tous occupants de son fait par les voies légales, au besoin par l’assistance de la force publique,

— condamné la Sarl Optique des Thermes à verser à la Sci Athéna une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 30 juin 2016 et ce jusqu’à la libération effective des lieux égale au montant d’un loyer soit 504,45 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision, sous déduction des loyers déjà réglés par la requise,

— condamné la Sci Athéna à verser à la Sarl Optique des Thermes la somme provisionnelle de 80 000 € au titre de l’indemnité d’éviction,

— rejeté la demande de condamnation de la Sci Athéna au versement de dommages et intérêts formée par la Sarl Optique des Thermes

— rejeté la demande de la Sci Athéna formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la Sarl Optique des Thermes aux dépens.

Sur la demande principale de la Sci Athéna, constatant que la Sarl Optique des Thermes n’avait pas saisi le tribunal dans le délai de deux ans à compter de la date à laquelle lui a été signifié le refus de renouvellement afin de contester le congé ou demander le paiement d’une indemnité d’éviction le président du tribunal de grande instance a jugé qu’il y avait lieu de constater la résiliation du bail à compter du 30 juin 2016, date correspondant aux dispositions de l’article L 145-9 du code de commerce, d’ordonner son expulsion et de fixer une indemnité d’occupation.

Sur la demande reconventionnelle de la Sarl Optique des Thermes, il a relevé que Sci Athéna ne produisait aucune pièce justifiant de l’absence d’exploitation d’un fonds de commerce dans les lieux alors que le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 7 novembre 2015 et l’arrêt de la cour d’appel de Colmar en date du 27 mai 2015 retenaient que la Sarl Optique des Thermes exerçait une activité commerciale dans les locaux à savoir l’exploitation d’un fonds de commerce d’optique-lunetterie et qu’au surplus, le congé sans indemnité signifié par la Sci Athéna était irrégulier en la forme, faute de mise en demeure préalable de mettre fin au manquement dénoncé.

Il a en conséquence jugé que le congé sans indemnité d’éviction était irrégulier en la forme et a fixé le montant de l’indemnité d’éviction due par la Sci Athéna à la Sarl Optique des Thermes.

Enfin, il a retenu que la Sarl Optique des Thermes ne rapportait pas la preuve d’un préjudice justifiant l’octroi de dommages et intérêts supplémentaires.

La Sci Athéna a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 30 août 2018.

Dans ses dernières conclusions du 24 novembre 2020, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, elle demande à la cour de dire et juger son appel recevable et bien fondé sur les chefs de demande critiqués, d’infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a condamné la Sci Athéna à verser à la Sarl Optique des Thermes la somme provisionnelle de 80 000 € au titre de l’indemnité d’éviction et a rejeté la demande de la Sci Athéna formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et statuant à nouveau :

— à titre principal, dire et juger que les demandes en nullité du congé délivré et en octroi d’une indemnité d’éviction formées par le preneur se trouvent prescrites en application des articles L 145-60 et L 145-9 alinéa 5 du Code de Commerce,

— à titre subsidiaire, dire et juger que le congé délivré par la Sci Athéna est valable et bien fondé,

— en conséquence, confirmer l’ordonnance en ses dispositions statuant sur la demande principale de la Sci Athéna et débouter la Sarl Optique des Thermes de l’ensemble de ses fins, moyens et conclusions tirés de sa demande reconventionnelle formulée oralement en première instance,

— à titre infiniment subsidiaire, dire et juger que la demande d’octroi d’une provision à valoir sur l’indemnité d’éviction échappe à la compétence du juge des référés en ce qu’elle constitue une demande sérieusement contestable conformément à l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile,

— par conséquent, débouter l’intimée de l’ensemble de ses demandes,

— condamner l’intimée à verser à la Sci Athéna la somme de 5000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens des deux instances.

A l’appui de ses demandes elle fait notamment valoir que :

— la Sarl Optique des Thermes n’a pas contesté les motifs du congé ou demander le paiement d’une indemnité d’éviction dans le délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été délivré, conformément à l’article L 145-60 du code de commerce,

— elle ne justifie d’aucun motif de nature à interrompre ou à suspendre le délai de prescription,

— elle-même n’a pas renoncé implicitement à la fin de non-recevoir tirée de la prescription, ayant clairement indiqué en première instance que n’ayant pas agi dans le délai de deux ans, l’action en paiement d’une indemnité d’éviction était prescrite,

— il est de jurisprudence constante que la règle selon laquelle l’exception de nullité est perpétuelle ne s’applique pas à l’égard d’une demande, même reconventionnelle, en indemnité d’éviction, laquelle constitue une action et non une exception,

— et qu’en conséquence la demande en paiement d’une indemnité d’éviction formée par la Sarl Optique des Thermes est prescrite.

Subsidiairement, sur la demande en nullité du congé, elle précise que :

— la demande est prescrite,

— la Sarl Optique des Thermes n’exploitait pas de fonds de commerce dans les lieux loués et en toute hypothèse, n’en a pas exploité un de manière effective et continue au cours des trois dernières années ayant précédé la date d’expiration du bail de sorte qu’elle ne remplissait pas les conditions prévues aux articles L 145-1 et L 145-8 du code de commerce lui permettant de demander une indemnité d’éviction,

— l’exigence de mise en demeure n’est pas nécessaire si le locataire ne remplit pas la condition de durée d’exploitation personnelle au cours des trois dernières années conformément à l’article L 145-8 du code de commerce.

A titre infiniment subsidiaire, elle expose que le juge des référés n’est pas compétent pour fixer une indemnité d’éviction sur le fondement de l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile.

La Sarl Optique des Thermes s’est constituée intimée le 26 septembre 2018.

Dans ses dernières conclusions du 18 novembre 2020, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, elle demande à la cour de déclarer la Sci Athéna mal fondée en son appel, de l’en débouter ainsi que de l’intégralité de ses fins, moyens et prétentions, sur appel incident de la Sarl Optique des Thermes, de :

— dire et juger que le congé délivré par la Sci Athéna est nul,

— dire et juger que les griefs invoqués par la Sci Athéna pour refuser le paiement de l’indemnité d’éviction ne sont pas fondés,

— confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné la Sci Athéna à payer une indemnité d’éviction provisionnelle à la Sarl Optique des Thermes mais sur appel incident porter cette somme à 100 000 €,

— condamner la Sci Athéna à verser à la Sarl Optique des Thermes la somme provisionnelle de 50 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

— condamner la Sci Athéna à verser à la Sarl Optique des Thermes la somme de 3 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens.

A l’appui de ses demandes elle fait notamment valoir que l’effet extinctif de la prescription est limité en matière de nullité des actes juridiques, une cause de nullité pouvant être invoquée en défense alors même que la prescription de l’action empêcherait de faire valoir le même fait à l’appui d’une demande en annulation. Elle indique qu’en tout état de cause, la Sci Athéna a implicitement renoncé à se prévaloir de la prescription, n’invoquant pas ce moyen en première instance et en continuant de percevoir le loyer.

Elle expose que le congé qui lui a été notifié le 15 octobre 2015 n’a pas de motif de sorte qu’il est nul. Elle relève que le bail est soumis au statut des baux commerciaux comme l’ont jugé le tribunal de grande instance de Strasbourg le 7 novembre 2013 et la cour d’appel de Colmar le 27 mai 2015 et que la Sci Athéna ne peut de bonne foi l’existence d’une activité commerciale, en l’occurrence l’exploitation d’un fonds de commerce d’optique-lunetterie, alors qu’il a également été jugé que les lieux loués avaient été affectés à l’exploitation d’un fonds de commerce.

Elle précise également que le refus de la Sci Athéna de payer une indemnité d’éviction n’est pas justifié par un motif grave et légitime et au surplus qu’aucune mise en demeure conformément à L 145-1 7 I 1° du code de commerce ne lui a été notifiée.

Elle indique que le refus de renouvellement du bail entraîne la disparition du fonds de commerce du locataire et qu’en conséquence l’indemnité d’éviction doit en principe être égale à la valeur marchande du fonds.

Enfin, elle fait état d’un préjudice moral que lui causent le non-renouvellement de son bail et les circonstances procédurales dans lesquelles il intervient, caractérisant un trouble de jouissance manifeste.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de chacune des parties, il conviendra de se référer à leurs conclusions respectives.

L’affaire a été fixée à l’audience du 19 février 2020 par ordonnance de fixation du 28 juin 2019, puis renvoyée à l’audience du 25 novembre 2020, à laquelle les parties ont développé leur argumentation.

Motifs :

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l’article L 145-60 du code du commerce formée par la Sci Athéna :

La Sci Athéna expose que Sarl Optique des Thermes est irrecevable à invoquer la nullité du congé et par voie de conséquence à demander une indemnité d’éviction, cette action se prescrivant par deux ans.

Il résulte de l’article L 145-60 du code de commerce que toutes les actions exercées en vertu d’un bail commercial se prescrivent par deux ans.

Cependant, le moyen tiré de la nullité du congé soulevé par la Sarl Optique des Thermes n’a pas été exercé à titre principal mais comme moyen de défense pour faire échec à la demande tendant à ce que la résiliation du bail, fondée sur ce congé, soit constatée et que l’expulsion du preneur soit ordonnée.

Cette exception de nullité constitue dès lors un moyen de défense au fond qui est imprescriptible.

La demande formée par la Sarl Optique des Thermes est en conséquence recevable.

Sur la demande de nullité du congé formée par la Sarl Optique des Thermes :

La Sarl Optique des Thermes expose que le congé comportant refus de renouvellement qui lui a été signifié le 15 octobre 2015 est nul pour défaut de motif, la Sci Athéna étant mal fondée à contester la nature du bail commercial et la condition tenant à l’absence d’exploitation d’un fonds de commerce de manière effective et continue au cours des trois dernières années ayant précédé la date d’expiration du bail en cours.

La Sci Athéna fait valoir que le juge des référés est incompétent pour statuer sur la validité du congé, subsidiairement que la mise en demeure de l’article L 145-17 du code de commerce n’était pas nécessaire et que le refus d’octroi d’une indemnité d’éviction est fondé et régulier.

Selon l’article L 145-8 du code de commerce, le droit au renouvellement du bail ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux.

Le fonds transformé, le cas échéant, dans les conditions prévues à la section 8 du présent chapitre, doit, sauf motifs légitimes, avoir fait l’objet d’une exploitation effective au cours des trois années qui ont précédé la date d’expiration du bail ou de sa prolongation telle qu’elle est prévue à l’article L 145-9, cette dernière date étant soit la date pour laquelle le congé a été donné, soit, si une demande de renouvellement a été faite, le premier jour du trimestre civil qui suit cette demande.

Conformément à l’article L 145-17 du code de commerce, le refus de renouveler le bail fondé sur une infraction contractuelle doit, à peine de nullité, être précédé d’une mise en demeure

d’avoir à la faire cesser dans le délai d’un mois passé lequel, si l’infraction dénoncée se poursuit, le congé peut être donné sans obligation de payer une indemnité d’éviction. Cette mise en demeure préalable n’est toutefois pas nécessaire si ladite infraction a créé une situation préjudiciable et irréversible.

Il est constant qu’à défaut de mise en demeure préalable ou en l’absence de motifs ou pour des motifs équivoques ou en raison de l’insuffisante gravité des motifs invoqués, le congé n’est pas nul mais empêche le bailleur de se prévaloir du motif légitime invoqué dans l’acte donnant congé. Le congé reste valable et produit les effets d’un congé avec refus de renouvellement, il met fin au bail et ouvre droit pour le preneur à une indemnité d’éviction.

En l’espèce, la Sarl Optique des Thermes remet en cause les motifs invoqués par la Sci Athéna pour refuser le renouvellement du bail sans être tenue au paiement d’aucune indemnité et fait valoir l’absence de mise en demeure.

En conséquence, il n’y a pas lieu à annuler le congé et l’ordonnance déférée sera confirmée en ce que, par l’effet du congé signifié le 15 octobre 2015, la résiliation du bail commercial ayant lié les parties a été constatée à compter du 30 juin 2016, en ce que la Sarl Optique des Thermes a été condamnée à restituer les lieux dans les deux mois de la signification de l’ordonnance sous peine, passé ce délai, d’expulsion et de celle de tous occupants de son fait par les voies légales, au besoin par l’assistance de la force publique et en ce qu’elle a été condamnée à verser à la Sci Athéna une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 30 juin 2016 et ce jusqu’à la libération effective des lieux, égale au montant d’un loyer soit la somme de 504,45 €, ce montant n’étant contesté ni par la Sarl Optique des Thermes, ni par la Sci Athéna.

Sur la demande de provision au titre de l’indemnité d’éviction formée par la Sarl Optique des Thermes :

La Sarl Optique des Thermes fait valoir que les motifs invoqués par la Sci Athéna dans le refus de renouvellement sans paiement d’une indemnité d’éviction notifié le 15 octobre 2015 sont sans fondement et invoque le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg du 7 novembre 2013 et l’arrêt de la cour d’appel de céans du 27 mai 2015 pour justifier de l’exploitation continue du fonds de commerce d’optique-lunetterie. Elle demande que la Sci Athéna soit condamnée à lui payer une indemnité d’éviction provisionnelle d’un montant de 100 000 €.

La Sci Athéna s’oppose à la demande de la Sarl Optique des Thermes au motif notamment que le juge des référés n’est pas compétent pour fixer une indemnité d’éviction

Selon le deuxième alinéa de l’article 873 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

La cour relève en premier lieu que le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg du 7 novembre 2013 n’est pas produit et que l’arrêt de la cour d’appel du 27 mai 2015 est incomplet, la page 2 étant manquante.

Si l’arrêt de la cour d’appel du 27 mai 2015 a jugé que le contrat du 31 janvier 1989 devait être qualifié de bail commercial, que les lieux loués avaient été affectés à l’exploitation d’un commerce d’optique-lunetterie-photo, que Monsieur X, locataire initial, avait exploité un fonds de commerce dans deux locaux séparés, que la Sarl Optique des Thermes, qui exerçait une activité d’opticien et avait acquis les éléments corporels et incorporels de ce

fonds, dont la clientèle, était le successeur de Monsieur X, que la cession du bail portant sur les locaux situés 4, rue du docteur Munsch était régulière et opposable à la Sci Athéna, cet arrêt ne permet pas de démontrer l’exploitation effective au cours des trois années qui ont précédé la date d’expiration du bail en 2016, soit postérieurement aux décisions invoquées.

L’examen de l’existence et de la nature du manquement invoqué par la Sci Athéna nécessite un débat devant le juge du fond qui seul peut apprécier si, au cours des trois dernières années précédant la date d’expiration du bail, la Sarl Optique des Thermes exploitait de manière effective et continue le fonds de commerce.

La cour ajoute au surplus que la fixation d’une provision au titre d’une indemnité d’éviction échappe au pouvoir juridictionnel du juge des référés, juge de l’évidence, étant observé que la Sarl Optique des Thermes ne produit aucune pièce financière ou comptable.

L’ordonnance de référé sera dès lors infirmée et il sera jugé qu’il n’y a pas lieu à référé.

Sur la demande de provision à titre de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice moral formée par la Sarl Optique des Thermes :

La Sarl Optique des Thermes demande l’allocation de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral que lui causent le non-renouvellement du bail et les circonstances procédurales dans lesquelles il intervient, ces circonstances caractérisant un trouble de jouissance manifeste, outre les actes de malveillance qu’elle a subis.

La Sci Athéna s’oppose à cette demande.

Conformément au deuxième alinéa de l’article 873 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Il ne relève pas du pouvoir juridictionnel du juge de référé, juge de l’évidence, de caractériser un engagement de responsabilité, c’est-à-dire en l’espèce d’apprécier les fautes reprochées à la Sci Athéna et le préjudice allégué tant dans son principe que dans son quantum.

Il sera en conséquence jugé qu’il n’y a pas lieu à référé.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

La Sarl Optique des Thermes, qui succombe sera condamnée aux dépens d’appel conformément à l’article 696 du code de procédure civile, outre confirmation de l’ordonnance déférée sur cette question.

L’équité commande de mettre à la charge de la Sarl Optique des Thermes une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 1 500 € au profit de la Sci Athéna.

Il n’y a par ailleurs pas lieu de faire application de ce texte au profit de la Sarl Optique des Thermes.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Saverne du 11 juin 2018 sauf en ce que la Sci Athéna a été condamnée à verser à la Sarl Optique des Thermes la somme provisionnelle de 80 000 € au titre de l’indemnité d’éviction et en ce que la demande de dommages et intérêts formée par la Sarl Optique des Thermes a été rejetée,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit n’y avoir lieu à référé,

Renvoie les parties à mieux se pourvoir,

Y ajoutant,

Condamne la Sarl Optique des Thermes aux dépens d’appel,

Condamne la Sarl Optique des Thermes à payer à la Sci Athéna la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la Sarl Optique des Thermes.

La Greffière : la Présidente :

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