Cour d'appel de Dijon, 1ère chambre civile, 21 septembre 2010, n° 09/02080

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, 1re ch. civ., 21 sept. 2010, n° 09/02080
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 09/02080
Décision précédente : Tribunal de commerce de Dijon, 14 décembre 2009
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

XXX

SA BELVEDERE

S.A.S. C D ET Z H

SOCIETE SOBIESKI SP.ZO.O

SOCIÉTÉ SOBIESKI TRADE SP. ZO.O

XXX

SOCIETE XXX

XXX

SOCIETE FABRYKA WODEK 'POLMOS LANCUT’ SA

C/

B A MAITRE

B E F

I J

S.A. Y

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 21 Septembre 2010

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2010

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 09/02080

Décisions déférées à la Cour : Ordonnances du juge commissaire du Tribunal de Commerce de Dijon rendues le 15 Décembre 2009, 5 Janvier 2010, 19 Janvier 2010, 26 Janvier 2010, 2 Février 2010, 22 Février 2010, 2 Mars 2010, 9 Mars 2010

RG 1re instance : 09/5558, 09/8274,09/8757,09/7154, 09/8881, 09/7494, 09/8689, 09/8820

APPELANTES :

SA BELVÉDÈRE

XXX

XXX

SAS C D ET Z H

40 Quai U Compagnon et

19 Boulevard Paul Vaillant-Couturier

XXX

SOCIÉTÉ SOBIESKI SP.ZO.O

XXX

XXX

SOCIÉTÉ SOBIESKI TRADE SP. ZO.O

XXX

XXX

XXX

XXX

XXX

SOCIÉTÉ XXX

XXX

XXX

XXX

XXX

XXX

SOCIÉTÉ FABRYKA WODEK 'POLMOS LANCUT’ SA

XXX

XXX

représentées par la SCP ANDRE – GILLIS, avoués à la Cour

assistées de Me Alain RIBEYRE, avocat au barreau de LYON et de Me Valérie SPIGUELAIRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

B A B, ès qualités de mandataire judiciaire et de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde de :

la SA BELVÉDÈRE

la SAS C D et Z H

la SOCIÉTÉ SOBIESKI SP.ZO.O

la SOCIÉTÉ XXX

la XXX

la SOCIÉTÉ XXX

la XXX

la SOCIÉTÉ FABRYKA WODEK 'POLMOS’ LANCUT SA

XXX

XXX

représenté par Me A GERBAY, avoué à la Cour

assisté de Me Eric SEUTET, avocat au barreau de DIJON

I J représentée par B U-V W ès qualité d’adjoint au mandataire judiciaire, déjà nommé et de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde de

la SA BELVÉDÈRE

la SAS C D et Z H

la SOCIÉTÉ SOBIESKI SP.ZO.O

la SOCIÉTÉ SOBIESKI TRADE SP. ZO.O

la XXX

la SOCIÉTÉ XXX

la XXX

la SOCIÉTÉ FABRYKA WODEK 'POLMOS’ LANCUT SA

XXX

XXX

représentée par la SCP AVRIL & HANSSEN, avoués à la Cour

assistée de Me U-Paul PETRESCHI, avocat au barreau de PARIS

SA Y anciennement dénommée O P Q

XXX

XXX

représentée par la SCP BOURGEON-BOUDY, avoués à la Cour

assistée de Me Didier MALKA, avocat au barreau de PARIS

B E F, ès qualités d’administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de

la SA BELVÉDÈRE

la SAS C D ET Z H

la SOCIÉTÉ SOBIESKI SP.ZO.O

la SOCIÉTÉ SOBIESKI TRADE SP.ZO.O

la XXX

la SOCIÉTÉ XXX

la XXX

la SOCIÉTÉ FABRYKA WODEK 'POLMOS’ LANCUT SA

XXX

XXX

XXX

Non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Juin 2010 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame VIEILLARD, Conseiller, Président, ayant fait le rapport

Madame VAUTRAIN, Conseiller, assesseur,

Monsieur LECUYER, Conseiller, assesseur,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame ARIENTA, Greffier

L’affaire a été communiquée le 17 Mai 2010 au Ministère Public lequel a indiqué formuler un avis favorable aux ordonnances entreprises,

ARRET réputé contradictoire,

PRONONCE publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNE par Madame VIEILLARD, Conseiller, et par Madame ARIENTA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

En mai 2006, afin d’obtenir un financement, la SA BELVÉDÈRE a émis un emprunt de 375 000 000 euros en principal sous forme de bons ou notes dites Floating Rate Notes ou FRN, offertes dans le public et librement transmissibles, portant intérêts au taux annuel Euribor 3 mois + 3,25 % et remboursables en 2013.

Sept filiales de la SA BELVÉDÈRE se sont portées garantes des engagements pris à savoir :

— C D & Z H (MBRI) à hauteur de 92 700 000 euros

— six filiales polonaises qui sont Sobieski Sp Zo o, XXX

— Duke Street Capital France 2 SAS qui a ensuite été absorbée par la SA BELVÉDÈRE.

Le montage de l’opération a été principalement assuré par THE S OF NEW YORK sise à Londres avec le concours du CRÉDIT SUISSE. Les principales modalités du financement sont prévues par un contrat d’émission (Indenture) du 24 mai 2006 soumis au droit de l’Etat de New York dont les parties sont :

* la SA BELVÉDÈRE et ses sept filiales

* « THE S OF NEW YORK sise à Londres » en qualité de Trustee, Agent Payeur Principal, teneur de Comptes et Agent des Transferts

* deux P qualifiées d’ « agents des sûretés », soit la SA Y en France et la société R S T en Pologne.

Le CRÉDIT SUISSE a assuré la mise en place de l’emprunt et sa diffusion initiale auprès des souscripteurs.

Les FRN sont aujourd’hui cotées à la Bourse du Luxembourg et circulent librement sur le marché à des prix suivant les fluctuations du cours.

Les Notes sont matérialisées sous la forme de deux documents intitulés Global Notes pour un montant total de 375 000 000 euros.

Pour assurer la circulation de l’emprunt, le contrat d’émission prévoit un système par voie de participations ou intérêts dans les Global Notes dénommé Book Entry Interests qui sont des titres dématérialisés.

Afin d’assurer le lien entre ces titres dématérialisés et les deux Global Notes, il est prévu par le contrat que celles-ci soient remises à un Dépositaire Commun qui est THE S OF NEW XXX.

Par jugements en date du 16 juillet 2008, le tribunal de commerce de Beaune, auquel celui de Dijon est aujourd’hui substitué, a ouvert, à leur demande, une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales garantes.

La S OF NEW YORK Mellon (BNY Mellon), la SA Y et la société R S T (RBP) ont chacune déclaré une créance de 375 000 000 euros, outre les frais pénalités et autres accessoires, au passif de chacune des sociétés sous sauvegarde ; la société BNY Depositary et vingt-huit porteurs de Notes ou Noteholders ont eux-mêmes déclaré leur créance « propre », ces derniers faisant valoir qu’en qualité d’investisseurs et de bénéficiaires économiques ils sont créanciers directs de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales.

Aux termes de diverses ordonnances, le juge commissaire des procédures de sauvegarde a admis la créance de chacune des trois P à l’encontre de la SA BELVÉDÈRE et de chaque filiale, mais a rejeté les déclarations de créances des Notes Holders et de la société BNY Depositary.

Il a notamment admis la société Y P Q, à titre privilégié définitif spécial et à échoir, pour la somme de 375 000 000 euros outre les intérêts, frais et intérêts de retard contractuellement fixés :

* au passif de la SA BELVÉDÈRE, par ordonnance n° 2009 005558 du 15 décembre 2009

* au passif de la SAS C D ET Z H, par ordonnance n° 2009 008274 du 5 janvier 2010

* au passif de la société SOBIESKI SP.ZO.O, par ordonnance n° 2009 008757 du 19 janvier 2010

* au passif de la société SOBIESKI TRADE SP.ZO.0, par ordonnance n° 2009 007154 du 26 janvier 2010

* au passif de la société DOMAIN MENADA SP.ZO.0, par ordonnance n° 2009 008881 du 2 février 2010

* au passif de la SA DESTYLERNIA POLMOS W. KRAKOWIE (SEUR) par ordonnance n° 2009 008689 du 2 mars 2010

* au passif de la SA DESTYLERNIA SOBIESKI par ordonnance n° 2009 007494 du 22 février 2010

* au passif de la SA FABRYKA WODEK « POLMOS LANCUT » par ordonnance n° 2009 008820 du 9 mars 2010.

Le juge commissaire a considéré qu’il ressortait tant du contrat Indenture que de la Convention de Partage des Sûretés que la SA Y P Q, en qualité d’agent des sûretés françaises, était créancière de la SA BELVÉDÈRE et de ses filiales, à titre personnel, au titre de la Parallel Debt souscrite par ces sociétés, que cette créance correspondait à celle des porteurs de Notes à l’égard de la SA BELVÉDÈRE et de ses filiales que ces dernières s’étaient engagées à lui payer en sa qualité d’agent des sûretés françaises et que c’était cette créance que la société Y P Q avait déclarée ; qu’il s’agissait donc bien de sa propre créance au passif des sociétés et qu’elle entendait par là préserver ses intérêts conformément aux termes de la Convention de Partage des Sûretés.

La SA BELVÉDÈRE et ses filiales ont interjeté appel des ordonnances d’admission de créances susvisées.

Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 11 juin 2010, la SA BELVÉDÈRE demande à la cour de :

— infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions

— à titre principal, dire nulle et de nul effet la déclaration de créance déposée pour la société Y SA

— subsidiairement, dire irrecevable et non fondée cette déclaration de créance

— en tout état de cause la rejeter dans son intégralité

— débouter la société Y SA de toutes ses demandes

— à titre subsidiaire, dire que la créance ne peut pas être admise à titre privilégié mais seulement à titre chirographaire

— à titre très subsidiaire, dire qu’en toute hypothèse aucune sûreté n’est inscrite en Pologne par la société Y SA et qu’en conséquence sa créance ne peut en aucun cas être admise à titre privilégié sur les filiales polonaises de la société BELVÉDÈRE SA

— donner acte à la société Y SA de ce qu’elle renonce à demander l’admission de sa créance de frais et débours au passif

— en tout état de cause, condamner la société Y SA à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— la condamner aux dépens.

La SA BELVÉDÈRE explique qu’aux termes du contrat d’émission, la société Y est qualifiée d’agent des sûretés pour les garanties prises en France, que son rôle est de gérer les diverses sûretés consenties dans ce pays et que R a été chargée d’un rôle semblable pour la Pologne ; qu’à cette fin, à titre d’accessoire au contrat d’émission, une convention dite de partage des sûretés (Collateral sharing agreement) a été signée entre BELVÉDÈRE et ses filiales garantes, THE S OF NEW YORK en qualité de trustee, O Banque Populaire (aujourd’hui Y) et R S T.

Elle indique que cette convention n’a nullement pour objet d’apporter un financement supplémentaire ou parallèle à la société BELVÉDÈRE, mais que sa fonction est d’organiser la mise en place et le suivi des garanties prévues par le contrat d’émission qui instaure la dette principale ou fondamentale ; que Y joue ainsi le rôle d’un trustee pour la gestion des garanties.

Elle conclut à la nullité et subsidiairement à l’irrecevabilité de la déclaration de créance « pour le compte des Noteholders » en soulignant les éléments suivants :

* en application de l’article 4§2 h) du Règlement CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, la loi de l’Etat d’ouverture (ici la loi française) détermine « les conditions d’ouverture… et notamment les règles concernant la production, la vérification et l’admission des créances » ; contrairement à ce qui est allégué, la Convention de Rome ne s’applique pas puisque l’article 1§2 g) exclut du champ d’application de la Convention les questions relatives « à la constitution des trusts, aux relations qu’ils créent envers les constituants, les trustees et les bénéficiaires »

* sur la nullité (article 117 du code de procédure civile) : la déclaration de créance équivaut à une demande en justice et lorsqu’elle est effectuée par un mandataire, celui-ci doit justifier d’un pouvoir spécial ; en l’espèce Monsieur X a déclaré non pas la créance de Y mais la créance de tiers qui sont les Noteholders, lesquels ne sont pas même identifiés ; il ne justifie d’aucun mandat de leur part et n’a jamais produit un mandat spécial écrit des titulaires de Notes ; le courrier de la société BNY Mellon du 24 septembre 2008 produit tardivement trois jours avant la clôture devant la cour et non joint à la déclaration de créance, ne vaut pas mandat à Monsieur X

* sur l’irrecevabilité (article 31 et 122 du code de procédure civile) : la règle « nul ne plaide par procureur » fait obstacle à ce qu’une action soit engagée sans que les véritables bénéficiaires soient identifiés ; l’intervention d’un tiers agissant aux lieu et place d’une autre personne rend la demande irrecevable pour défaut de qualité ou droit d’agir au sens des articles 31 et 122 du code de procédure civile ; Y n’a pas qualité à agir au lieu et place des porteurs de Notes ; contrairement à ce qu’elle affirme, la seule créance déclarée par la société Y dans les délais requis est celle des porteurs de Notes ; en conséquence la déclaration de créance effectuée « pour le compte » des porteurs de Notes est nulle et subsidiairement irrecevable ; les Notes ne sont pas des obligations de droit français et aucune disposition de ce droit n’étend les pouvoirs du représentant de la masse des obligataires, prévus par l’article L 228-86 du code de commerce, à un trustee ou à un security agent de droit américain.

La SA BELVÉDÈRE fait valoir à titre subsidiaire que la déclaration de créance de la société Y est en tout état de cause irrecevable en application de l’article 122 du code de procédure civile : les articles 3.1 (c) et 3.3 (b) du Contrat de Partage des Sûretés subordonnent clairement toute action en justice de l’Agent des Sûretés à une autorisation des Prêteurs que l’intimée ne démontre pas avoir reçue ; elle n’a donc aucun droit à agir et la lettre du 24 septembre 2008 qu’elle invoque ne répond pas aux exigences de l’article 3.1 (c) du Contrat de Partage des Sûretés en ce qu’elle n’excipe pas d’un accord des détenteurs de Notes représentant la majorité de la dette garantie.

Elle soutient à titre très subsidiaire que la créance déclarée par Y « en son nom » doit être rejetée :

— il apparaît que la fonction de la dette parallèle serait de donner à un agent des sûretés la possibilité de constituer et de gérer des sûretés en cas de financements transmissibles ; mais en France, ni le concept de trust, ni celui de dette parallèle n’existe ; la question qui se pose est celle de savoir si la créance « parallèle » constitue une créance susceptible de déclaration et d’admission au passif en tant que telle et de façon indépendante

— aux termes de l’article 4 § 2 h) du règlement CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, c’est la loi de l’état d’ouverture de la procédure qui est applicable, c’est à dire la loi française ; le présent litige porte sur le sort d’une créance déclarée au passif dans une procédure collective ; la procédure de vérification du passif ne peut aboutir à créer un passif parallèle, c’est à dire artificiel, aux seules fins de consacrer une garantie inscrite au profit d’un non créancier ; les règles de droit français gouvernant les procédures collectives sont d’ordre public interne et H, notamment le principe d’égalité des créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture ; lorsque le droit contractuel est incompatible avec l’ordre public français, le juge doit l’écarter au profit du droit français

— à titre subsidiaire, Y ne prouve pas sa qualité de créancier même en application du droit de New York : la note du Cabinet Curtis Mallet Prévost qu’elle produit aux débats se fonde sur le fait que la société BELVÉDÈRE serait en défaut en application de l’article 6.013 (a) (9), ce qui n’est pas le cas, la mise sous sauvegarde ne rendant pas exigibles les créances non échues ; le Cabinet Curtis n’a pas examiné l’hypothèse d’un ordre public étranger qui ferait obstacle à l’application du contrat et d’ailleurs sa consultation est réservée à l’hypothèse d’une procédure collective ouverte aux Etats Unis ; la société R a déclaré une « créance parallèle » propre mais soutient aujourd’hui qu’elle représente le Trustee et les porteurs de Notes ; Y, qui a au contraire déclaré une créance au nom et pour le compte des porteurs de notes, indique désormais agir au titre d’une prétendue créance parallèle ; cette incohérence traduit que le mécanisme de la « dette parallèle » ne peut être transposé en droit français ; les comparaisons effectuées par Y confirment quelle n’est pas créancière : la solidarité active s’applique entre personnes qui sont préalablement et personnellement créancières et qui se répartissent ensuite les fonds en proportion de leurs droits de créance et l’article 2328-1 du code civil n’était pas en vigueur à la date de la signature du contrat d’émission et ne donne pas, en tout état de cause, pouvoir à l’agent des sûretés de déclarer une créance ; la dette parallèle n’est pas une créance mais un accessoire ; l’article 3.8 (b) (3) de la Convention de Partage des Sûretés stipule que la société BELVÉDÈRE ne peut encourir une dette supplémentaire ; il en résulte qu’aucune créance supplémentaire ne peut être inscrite au passif ; la dette parallèle n’a aucune existence propre, ce qui implique d’une part qu’elle n’existe pas sans la dette principale et qu’elle ne peut donner lieu à admission au passif ; la dette parallèle n’est jamais que celle des porteurs de Notes, ce qui imposait à la société Y de détenir un mandat valable de ces derniers pour déclarer une créance ; admettre la créance de Y aboutirait à violer les règles d’ordre public applicables aux déclarations de créances et à détruire l’égalité des créanciers ; en toute hypothèse et à titre subsidiaire, la cour retiendra qu’aucune sûreté n’est inscrite en Pologne au nom de Y, agent des sûretés en France, et la créance de Y ne peut donc être admise à titre privilégié sur les filiales polonaises.

Par conclusions déposées à la même date, les sept sociétés filiales de la SA BELVÉDÈRE adoptent des conclusions identiques à celle-ci ; la SAS C D ET Z H fait valoir toutefois, à titre infiniment subsidiaire, qu’il résulte du contrat d’émission que son engagement est limité à la somme de 92 700 000 euros ; elle demande donc à la cour de constater que la créance admise à son passif ne peut dépasser ce montant à titre conjoint et non solidaire.

Par conclusions déposées le 14 juin 2010, la société Y demande à la cour, dans chacune des procédures,

— de confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions

— de débouter la société appelante de l’ensemble de ses demandes

— de la condamner à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— de la condamner aux dépens.

Elle rappelle que la société BELVÉDÈRE et ses filiales ont consenti diverses sûretés de droit français et de droit polonais en garantie du remboursement des obligations souscrites selon le contrat du 24 mai 2006 et qu’aux termes de l’article 8.24 de la Convention de Partage des Sûretés, elles ont pris l’engagement de payer directement à chaque agent des sûretés les sommes correspondant à tout montant dû aux créanciers au titre de la documentation financière (mécanisme de la Parallel Debt).

Elle fait valoir :

— sur la nullité de la déclaration de créance :

* qu’elle a déclaré sa propre créance et non celle des Porteurs de Notes : conformément à la Convention de Partage des Sûretés, elle dispose en effet en sa qualité d’agent des sûretés françaises d’une créance qui lui est propre à l’encontre de la Société ; aux termes de l’article 8.24 susvisé, la Société s’est engagée à payer à chaque agent de sûreté, « en qualité de créancier et en son nom propre » des sommes dues aux prêteurs ; il s’agit là d’une application du mécanisme de droit anglo-saxon de la Parallel Debt qui consiste à dédoubler la créance du débiteur à l’égard des créanciers pour faire naître au profit de l’agent des sûretés une créance miroir de façon à ce qu’ils puissent bénéficier des sûretés, ce qui en facilite la constitution et la réalisation

* qu’elle a bien sollicité l’admission de « sa » créance et qu’elle n’avait donc pas à justifier d’un mandat spécial

* que si dans la lettre d’accompagnement elle se réfère à sa qualité d’agent des sûretés, agissant au nom et pour le compte des porteurs de Notes, c’est parce que sa créance personnelle procède de cette qualité (qu’elle tient des porteurs de Notes eux-mêmes) et que cette créance est parallèle et identique à la leur

— sur l’irrecevabilité :

* pour défaut de qualité à agir : que la règle « nul ne plaide par procureur » ne peut avoir d’application en l’espèce puisque c’est sa créance personnelle qu’elle déclare

* pour défaut d’instruction des prêteurs : que l’instruction visée par l’article 3.1 de la Convention de Partage des Sûretés concerne uniquement les recours, actions en saisie et procédures portant sur les Actifs de Garantie, c’est à dire les actifs sur lesquels des sûretés ont été consenties ; qu’or la déclaration de créance ne répond pas à cette définition mais constitue une action en paiement au titre de la Parallel Debt ; qu’en outre l’article 3.1 susvisé écarte expressément l’exigence d’instruction dans les cas où l’action est « nécessaire afin d’établir, de protéger ou de sauvegarder les Privilèges » (c’est à dire les sûretés) ; qu’or sa déclaration de créance vise notamment à sauvegarder les sûretés consenties par la société ; qu’en tout état de cause, elle a reçu instruction du Trustee par lettre du 24 septembre 2008.

Elle soutient que la créance qu’elle a déclarée doit être admise au passif de la Société pour les motifs suivants :

— l’existence de la créance doit être appréciée au regard du droit de l’Etat de New York : l’appréciation de l’existence de la créance relève de la loi désignée par la règle de conflit applicable, en l’espèce la loi du contrat, c’est à dire la loi de l’Etat de New York selon l’article 3.1 de la Convention de Partage des Sûretés qui ne vise ni à constituer un trust, ni à gérer les relations des parties à un trust et la Parallel Debt confère la qualité de créancier en application du droit de l’Etat de New York ; le mémorandum produit par la Société appelante est inopérant dès lors qu’il résulte sans équivoque de la rédaction de l’article 8.24 (a) de la Convention de Partage des Sûretés que c’est en leur qualité de créancier et en leur nom propre que la société s’est engagée à payer à chaque agent de sûreté des sommes dues aux prêteurs au titre de la documentation financière, la qualification de créancier a été choisie par les parties et ne peut être ignorée ; la consultation produite par un cabinet d’avocats américains qu’elle verse aux débats confirme d’ailleurs cette analyse ; la question de l’exigibilité de la créance est sans incidence sur le point de savoir si elle dispose d’une créance personnelle au titre de la Parallel Debt

— le mécanisme de la Parallel Debt n’est pas incompatible avec le droit français : l’existence de la créance déclarée ne doit pas être examinée au regard de ce droit, mais en tout état de cause rien n’interdit en droit français au débiteur d’une créance de s’en reconnaître débiteur à l’égard d’une personne dénommée ; le mécanisme de la Parallel Debt se rapproche de celui de la solidarité active prévu à l’article 1197 du code civil ; au cas d’espèce, comme en matière de solidarité active, les paiements faits par le débiteur entre les mains de l’agent des sûretés au titre de la Parallel Debt s’imputent sur les sommes dues aux autres créanciers ; il n’existe donc aucun risque de double paiement des créances des porteurs de Notes ; l’article 2328-1 du code civil permet ainsi à l’agent des sûretés de constituer, gérer et réaliser des sûretés directement en son nom, alors même qu’il n’est pas titulaire de la créance des prêteurs ; la créance qu’elle a déclarée n’est donc pas incompatible avec le droit français

— la Parallel Debt est une créance en soi et non un accessoire : il s’agit d’une créance qu’elle détient à titre personnel à l’encontre de la Société qui s’est engagée, aux termes de l’article 8.24 de la Convention de Partage des Sûretés à lui payer directement « en qualité de créancier en son nom propre » des sommes égales à celles dues aux Porteurs de Notes ; il s’agit donc d’une créance en soi et non d’un accessoire de la créance de ceux-ci et cette créance doit être admise au passif de la Société.

Enfin la société Y allègue :

— que la créance doit être admise à titre privilégié : la demande de la Société tendant à ce que la créance de la concluante soit admise à titre chirographaire seulement pour les filiales polonaises est nouvelle devant la cour et donc irrecevable

— les frais et débours qu’elle a engagés dans le cadre de sa mission constituent des créances postérieures qui ne sont pas soumises à déclaration

— si le montant des frais et coûts qu"elle a déclarés n’a effectivement pu être chiffré de manière précise et définitive à la date de la déclaration de créance, elle en a donné des éléments d’évaluation en renvoyant aux clauses du Contrat d’Emission y afférentes ; les conditions dans lesquelles ces frais et coûts pouvaient être engagés ont été expressément acceptés par la Société ; la créance de frais et coûts afférents au Contrat d’Emission doit donc être admise au passif de la Société.

Par conclusions déposées le 4 mai 2010, B A B, en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde de la SA BELVÉDÈRE et de chacune de ses sept filiales, demande à la cour de lui donner acte de ce qu’il s’en rapporte à sa sagesse.

Par conclusions déposées le 12 mai 2010, la I M. J.A, représentée par B U-V W, agissant en qualité d’adjoint au mandataire judiciaire déjà nommé et de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde de la SA BELVÉDÈRE et de chacune de ses sept filiales, indique que la cour ne pourra que confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Bien que régulièrement assigné à sa personne par actes d’huissier de justice en date des 16 avril et 1er juin 2010, B E F, en qualité d’administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de la SA BELVÉDÈRE et de chacune de ses sept filiales, n’a pas constitué avoué.

Le dossier de la procédure a été communiqué au ministère public qui a été avisé de la date de l’audience.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 juin 2010.

Par conclusions d’incident déposées le 14 juin 2010, la société Y demande à la cour d’ordonner le rejet des conclusions de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales en date du 11 juin 2010.

Par conclusions du même jour les appelantes s’opposent à cette demande au motif que leurs conclusions n°4 ne contiennent aucune prétention nouvelle.

Motifs de la décision

Sur la jonction

Attendu que l’intérêt d’une bonne justice commande que compte tenu du lien existant entre elles, s’agissant d’une même créance déclarée au passif de la société mère et de ses filiales garantes, soit ordonnée la jonction des affaires inscrites au rôle de la cour sous les numéros suivants : 09/02080, 10/00079, 10/00201, XXX, XXX, XXX, XXX

Sur la procédure

Attendu que la société Y sollicite le rejet des conclusions n°4 déposées le 11 juin 2010 par la société BELVÉDÈRE et ses filiales ; que s’il est vrai qu’à la faveur de ces écritures les appelantes ont demandé pour la première fois à la cour, à titre très subsidiaire, de dire qu’en toute hypothèse, aucune sûreté n’était inscrite en Pologne par l’intimée et qu’en conséquence sa créance ne pouvait être admise à titre privilégié sur les filiales polonaises, la société Y a toutefois disposé du temps nécessaire jusqu’à la clôture prononcée le 14 juin 2010 afin de répondre à cet argument de défense ;

Que le principe du contradictoire, qui a été respecté, n’impose donc pas que les conclusions déposées le 11 juin 2010 soient rejetées ;

Sur le fond

Attendu que les sociétés appelantes ne contestent pas le principe de leur dette ; que sont d’ailleurs produites aux débats les deux Globals Notes d’un montant respectif de 319 840 000 euros et 55 160 000 euros aux termes desquelles la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes s’engagent à payer ces sommes à THE S OF NEW YORK Depositary Limited ;

Que la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes s’opposent toutefois à l’admission des créances déclarées par la société Y en opposant des moyens d’irrecevabilité et des moyens au fond ;

Attendu que l’article L 622-24 du code de commerce dispose : « A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans les délais fixés par décret en conseil d’Etat… La déclaration de créance peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix… » ;

Qu’il ressort des pièces versées aux débats que la société Y a effectué une déclaration de créance au passif de la société BELVÉDÈRE et de chacune de ses filiales par lettres remises en main propre le 27 septembre 2008 ; que si elle indique dans la lettre d’accompagnement de chacune de ces déclarations « en conséquence, vous trouverez ci-après les éléments détaillés justifiant de la créance des Noteholders, que Y déclare en qualité d’agents des Sûretés Françaises agissant au nom et pour le compte des Noteholders, ainsi que des garanties et sûretés attachées à cette créance, qui lui sont également directement consenties, dont elle sollicite l’admission au passif à titre privilégié », elle demande néanmoins, aux termes du bordereau de déclaration, l’admission de sa propre créance au passif de chacune des sociétés et non celle des porteurs de Notes ; que l’argumentation des appelantes relative à la nullité ou à l’irrecevabilité de la déclaration de créance pour défaut de pouvoir du déclarant est donc sans emport en l’espèce ; que la seule question qui se pose est celle de savoir si la société Y peut se voir reconnaître la qualité de créancière de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales garantes ; qu’il ne peut être interdit à l’intimée, sous prétexte que le délai de déclaration de créance serait dépassé, de modifier le fondement juridique de sa demande initiale d’admission ;

Attendu que l’article 8.24 du contrat de partage des sûretés conclu le 24 mai 2006 entre la société BELVÉDÈRE, ses filiales garantes et les sociétés THE S OF NEW YORK, en qualité de Trustee, O P Q, en qualité d’Agent Principal des Sûretés et R S T S.A en qualité d’Agent Secondaire des Sûretés, régi par le droit interne de l’Etat de New York selon son article 8.14, mentionne sous l’intitulé « dette parallèle » : « a) La Société Mère et chaque Débiteur Gagiste s’engage à titre irrévocable et inconditionnel à payer à chaque Agent des Sûretés, agissant en qualité de créancier en son nom propre et non en qualité de représentant des autres Parties Privilégiées, des sommes égales, dans la devise concernée, aux sommes dues par la Société Mère et/ou par les Débiteurs Gagistes à chacune des parties Privilégiées en vertu de chacun des Documents de Dette Garantie par voie d’un extrait de reconnaissance de dette (la »Dette Parallèle« ). A toutes fins utiles, il est précisé que le montant total de la Dette due par la Société Mère et/ou les Débiteurs Gagistes à chacune des parties Privilégiées en vertu de chacun des Documents de Dette Garantie ne sera pas modifié par l’application de la présente clause 8.24… c) Toute somme due ou à payer par la Société Mère ou par tout Débiteur Gagiste en faveur d’un Agent des Sûretés en vertu de la présente Clause 8.24 sera réduite dans la mesure où les autres Parties Privilégiées auront perçu (et seront en mesure de conserver) le règlement intégral du montant correspondant en vertu des autres dispositions des Documents de la Dette Garantie, et toute somme due ou à payer par la Société Mère et/ou par les Débiteurs Gagistes aux autres Parties Privilégiées en vertu de ces dispositions sera réduite dans la mesure où un Agent des Sûretés a perçu (et est en mesure de conserver) le règlement intégral du montant correspondant en vertu de la Clause 8.24… » ;

Qu’il résulte de ces dispositions que les sociétés appelantes se sont engagées à payer la dette garantie à la société O « agissant en qualité de créancier en son nom propre et non en qualité de représentant des autres parties privilégiées » ; que cette société, en sa qualité d’agent des sûretés, dispose donc d’une créance qui lui est propre à l’encontre de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales garantes ;

Attendu toutefois que les appelantes soutiennent que l’existence de la créance déclarée par la société Y doit s’apprécier au regard du droit français qui ne reconnaît pas le mécanisme de la dette parallèle ; mais que s’il est constant que les conditions procédurales de production, de vérification et d’admission des créances relèvent du droit de l’Etat d’ouverture de la sauvegarde, conformément à l’article 4 du Règlement CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, la société Y affirme à bon droit que la détermination de l’existence et des caractéristiques d’une créance déclarée ressort quant à elle de la loi désignée par la règle de conflit applicable, c’est à dire en l’espèce le droit de l’Etat de New York qui régit le contrat ; que la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes ne sauraient à cet égard invoquer l’article 1.2 g) de la Convention de Rome, qui exclut de son champ d’application la constitution des trusts et les relations qu’ils créent entre les constituants, les trustees et les bénéficiaires puisque, comme le souligne à juste titre la société Y, la convention de Partage des Sûretés ne vise ni à constituer un trust, ni à gérer les relations des parties à un trust ;

Qu’en outre, contrairement à ce qu’allèguent les sociétés appelantes, le droit choisi par les parties aux contrats, et plus particulièrement le concept de dette parallèle, n’est pas incompatible avec l’ordre public interne ou H et spécialement le principe d’égalité des créanciers ; qu’en effet il se rapproche du mécanisme de la solidarité active qui, en présence de plusieurs détenteurs d’une même créance, confère le droit à chacun d’eux de demander le paiement du total de la créance, et en conséquence de la déclarer en totalité au passif de la procédure collective du débiteur, le paiement fait à l’un libérant le débiteur à l’égard des autres ; qu’en l’espèce l’article 8.24 c) de la convention de Partage des Sûretés prévoit bien que les paiements faits par le débiteur entre les mains de l’agent des sûretés au titre de la dette parallèle s’imputent sur les sommes dues aux autres créanciers tandis que l’article 8.24 e) indique que chaque agent des sûretés « confirme par les présentes que l’ensemble des produits perçus et détenus par lui au titre de la présente clause 8.24 sont perçus et détenus par lui en fidéicommis pour les Parties Privilégiées concernées et seront imputés conformément aux dispositions du présent contrat » ; qu’il n’existe ainsi ni création d’un passif artificiel, ni risque de double paiement des créances ;

Que la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes critiquent la note du Cabinet Curtis Mallet Prévost produite par la société Y au soutien de son analyse du contrat en observant que cette consultation se fonde sur le fait qu’elles seraient en défaut en application de l’article 6.01(a)(9), c’est à dire en raison de leur mise sous sauvegarde, ce qui aurait entraîné l’exigibilité immédiate de la créance, alors qu’en application de l’article L 622-29 du code de commerce qui est d’ordre public, le jugement d’ouverture ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé ; mais que d’une part la déclaration de créance est fondée sur l’article 8.24 du contrat de partage des sûretés qui reconnaît en toutes circonstances un droit de créance aux agents des sûretés et qu’en toute hypothèse l’article 6.01 du contrat d’émission cite expressément comme événement constitutif de défaillance, au numéro (9)(C)(ii)d, le cas où l’Emetteur ou tout garant établi en France fait l’objet, à son initiative ou à celle d’un tiers, d’une procédure de sauvegarde ou de conciliation « en vertu des articles L 620- 4 et suivants du code de commerce » ; qu’il importe peu que contrairement à la loi de l’Etat de New York la loi française prévoit que l’ouverture d’une procédure de sauvegarde n’entraîne pas l’exigibilité de la créance puisque dans ce cas, selon la loi française, la créance est déclarée et admise comme étant « à échoir » ; que cet argument est donc vain ;

Attendu enfin que les sociétés appelantes se fondent sur l’article 3.1 (c) de la convention de partage des sûretés pour prétendre que la déclaration de créance ne serait pas recevable pour défaut d’instruction des prêteurs ; mais que la société Y observe justement que le texte visé écarte expressément l’exigence d’instruction de la part du Trustee dans les cas où l’action est « nécessaire afin d’établir, de protéger ou de sauvegarder les Privilèges » (c’est à dire les sûretés consenties en garantie des Notes) ; qu’or sa déclaration de créance vise notamment à sauvegarder les sûretés consenties par la Société ; qu’en tout état de cause il est justifié que par lettre du 24 septembre 2008, THE S OF NEW YORK Mellon a demandé à Y d’ « adresser une déclaration de créance au mandataire judiciaire, B A B » ; que le moyen d’irrecevabilité de la déclaration de créance n’est donc pas fondé ;

Attendu qu’il découle de ce qui précède que la société Y a pu valablement déclarer sa créance au passif des sociétés BELVÉDÈRE et de ses filiales garantes ; que cette créance sera admise à titre définitif, spécial et à échoir pour la somme de 375 000 000 euros, qui n’est pas contestée, outre les intérêts, frais et intérêts de retard contractuellement fixés à l’état de vérification du passif ; qu’en vue d’une plus grande clarté, il conviendra toutefois de constater que la SA Y est admise au passif de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales garantes solidairement avec les sociétés THE S OF NEW YORK Mellon et R S T ;

Attendu néanmoins, s’agissant de la SAS MAIRE D & Z H, qu’il résulte de l’article 12.02 du contrat d’émission que ses obligations sont limitées à la somme de 92 700 000 euros ; que l’ordonnance rendue à l’encontre de cette société sera donc réformée en ce sens que la créance de la société Y ne sera admise qu’à hauteur de ce montant en principal, outre les intérêts, frais et intérêts de retard contractuels ;

Attendu par ailleurs que les sociétés appelantes demandent à la cour, aux termes de leurs dernières écritures, de dire qu’en toute hypothèse, aucune sûreté n’est inscrite en Pologne par la société Y SA et qu’en conséquence sa créance ne peut en aucun cas être admise à titre privilégié sur les filiales polonaises de la SA BELVÉDÈRE ;

Que la société Y conclut à l’irrecevabilité de cette « demande », sur le fondement des articles 564 et 565 du code de procédure civile, au motif qu’il s’agit d’une prétention nouvelle ;

Mais que les appelantes font valoir à bon droit qu’elles ne formulent pas une demande mais se bornent à opposer un moyen de défense aux prétentions adverses ; que le moyen d’irrecevabilité doit être écarté ; qu’il convient d’observer sur le fond qu’il ressort de la propre déclaration de créance effectuée par la société Y que seule la société R S T a la qualité d’agent des sûretés à l’égard des filiales polonaises garantes de la société BELVÉDÈRE qui n’ont consenti de garanties qu’au bénéfice de cette banque ; qu’ainsi que le soutiennent les appelantes, la créance de la société Y ne peut donc être admise à l’égard des filiales polonaises à titre privilégié, mais seulement chirographaire ;

Attendu enfin qu’il y a lieu de constater que la société Y considère que les frais et débours dont la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes lui seraient redevables en application de l’article 8.9 de la convention de partage des sûretés constituent des créances postérieures, non soumises à déclaration et qu’elle ne formule aucune demande à ce titre ;

Par ces motifs :

Ordonne la jonction entre les procédures inscrites au rôle de la cour sous les numéros 09/2080, 10/00079, 10/00201, XXX, XXX, XXX, XXX

Dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les conclusions n° 4 déposées le 11 juin 2010 par la société BELVÉDÈRE et ses filiales garantes ;

Réforme l’ordonnance portant le numéro 2009 008274 rendue le 5 janvier 2010 à l’encontre de la SAS C D ET Z H ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Admet la SA Y au passif de la SAS C D ET Z H, à titre privilégié définitif spécial et à échoir pour la somme de 92 700 000 euros outre les intérêts, frais et intérêts de retard contractuellement fixés, à savoir :

* la somme correspondant aux intérêts calculés sur la base de Euribor 3 mois plus 3,25 % pour la période du 15 août 2008 au 15 mai 2013

* la somme correspondant aux intérêts de retard calculés à compter du 15 août 2008 jusqu’au 15 mai 2013 sur la base de Euribor 3 mois plus 4,25 % appliqués sur le principal et les intérêts contractuels

* divers frais et coûts au titre du contrat d’émission calculés selon les modalités visées notamment aux articles 2.16, 3, 4.15, 4.16, 4.19 et 6.03 ;

Confirme les autres ordonnances ;

Dit toutefois que la société Y n’est admise au passif des filiales polonaises de la société BELVÉDÈRE, c’est à dire des sociétés SOBIESKI SP.ZO.O, XXX; XXX, XXX, XXX’ LANCUT SA qu’à titre chirographaire et non privilégié ;

Ajoutant,

Constate que la société Y considère que les frais et débours dont les sociétés appelantes lui seraient redevables en application de l’article 8.9 de la convention de partage des sûretés constituent des créances postérieures non soumises à déclaration et ne formule aucune demande à ce titre ;

Constate que la SA Y est admise solidairement avec les sociétés THE S OF NEW YORK Mellon et R S T au passif de la société BELVÉDÈRE et de ses filiales ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne les sociétés appelantes à payer la somme globale de 15 000 euros à la SA Y sur le fondement de ce texte ;

Rejette toutes autres demandes ;

Ordonne l’emploi des dépens en frais de procédure collective et autorise la SCP BOURGEON-BOUDY à les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

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Cour d'appel de Dijon, 1ère chambre civile, 21 septembre 2010, n° 09/02080