Cour d'appel de Dijon, 1re chambre civile, 21 janvier 2020, n° 19/00513

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, 1re ch. civ., 21 janv. 2020, n° 19/00513
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 19/00513
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Dijon, 12 février 2019, N° 18/00513
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

MW/IC

SARL IC CONSEIL

C/

SCI MOULIN CHENOVE 2015

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

1re chambre civile

ARRÊT DU 21 JANVIER 2020

N° RG 19/00513 – N° Portalis DBVF-V-B7D-FHG6

MINUTE N° 20/

Décision déférée à la Cour : ordonnance de référé rendue le 13 février 2019,

par le Président du tribunal de grande instance de Dijon – RG : 18/00513

APPELANTE :

SARL IC CONSEIL représentée par son gérant domicilié au siège social sis :

[…]

[…]

assistée de Me François BLEYKASTEN, avocat associé de la SELARL LEXIO, avocat au barreau de STRASBOURG, plaidant, et représentée par Me Sophia BEKHEDDA, avocat au barreau de DIJON, postulant, vestiaire : 1

INTIMÉE :

SCI MOULIN CHENOVE 2015 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis :

[…]

[…]

représentée par Me Patrice CANNET, membre de la SARL CANNET – MIGNOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 81, postulant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 octobre 2019 en audience publique devant la cour composée de :

Michel PETIT, Président de chambre, Président,

Michel WACHTER, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,

Anne SEMELET-DENISSE, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 21 Janvier 2020,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Michel PETIT, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte authentique reçu le 26 avril 2018 par Me Y X, notaire, la SCI Moulin Chenôve 2015 a promis au bénéfice de la SARL IC Conseil la vente de parcelles sises à Chenôve, cadastrées section AT n° 40 et 41, formant le lot […] et Artisanal.

Cette promesse, stipulée valable jusqu’au 20 juillet 2018 à 16 h, comportait une condition suspensive tenant à l’obtention par l’acquéreur d’un ou plusieurs prêts d’un montant maximum de 560 000 €, au taux maximum de 3 % hors assurance et sur une durée de 15 ans maximum, qui devait être réalisée au plus tard le 22 juin 2018.

Elle prévoyait également le versement par la société IC Conseil d’une somme de 50 000 € à titre d’indemnité d’immobilisation, qui resterait acquise au vendeur à titre d’indemnité forfaitaire en cas de non réalisation de la vente promise.

Par exploit du 22 novembre 2018, la SCI Moulin Chenôve 2015 a fait assigner la société IC Conseil devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Dijon sur le fondement de l’article 1124 du code civil, en condamnation au paiement provisionnel de la somme de 50 000 €, et aux fins de voir Me X autorisé à lui remettre la somme de 10 000 € qu’il détenait en compte-séquestre à titre d’acompte sur la provision. La demanderesse a exposé à l’appui de ses prétentions que, par échange de courriers électroniques, les parties avaient convenu de modifier les dates retenues dans la promesse, en reportant au 31 juillet 2018 le délai pour l’obtention de l’accord définitif de prêt, et au 31 août 2018 la durée de validité de la promesse, mais que la société IC Conseil n’avait fait parvenir aucun justificatif de prêt, se bornant à solliciter vainement une nouvelle prorogation de délai de six à huit semaines, sans verser le solde de l’indemnité d’immobilisation. La SCI Moulin Chenôve 2015 a considéré que sa demande ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, l’acte signé par les parties étant clair quant à son caractère de promesse unilatérale de vente, et la défenderesse ne s’étant pas conformée à ses obligations.

La société IC Conseil a conclu à l’incompétence du juge des référés au profit du juge du fond, en raison de l’existence d’une contestation sérieuse, subsidiairement a réclamé la requalification de l’indemnité d’immobilisation en clause pénale et sa réduction à de plus justes proportions. Elle a soutenu avoir accepté par lettre du 27 mars 2018 une offre de prix faite par la SCI Moulin Chenôve 2015 le 22 mars 2018, de sorte qu’elle ne s’était pas réservé une option d’achat, mais que les parties étaient liées par une promesse synallagmatique d’achat sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt, qui ne pouvait ultérieurement être assortie d’une indemnité d’immobilisation. Elle en a déduit qu’il existait ainsi une contestation sérieuse tenant à la qualification de l’acte notarié. Subsidiairement, elle a fait valoir que l’indemnité stipulée ne visant pas à compenser une quelconque immobilisation, puisqu’elle avait d’ores et déjà pris l’engagement d’acheter, elle tendait uniquement à la contraindre à engager les démarches nécessaires à l’obtention du financement, de sorte

qu’il s’agissait donc d’une clause pénale réductible.

Par ordonnance rendue le 13 février 2019, le juge des référés a relevé que l’acte notarié du 26 avril 2018 correspondait à la définition de la promesse unilatérale résultant de l’article 1124 du code civil. Il a ensuite énoncé que le terme 'promesse de vente' utilisé par la SCI Moulin Chenôve 2015 dans sa lettre du 22 mars 2018, à laquelle la société IC Conseil avait donné son accord, était susceptible de deux acceptions, à savoir soit une promesse unilatérale de vente, soit une promesse synallagmatique, mais qu’il n’était versé aux débats aucun élément objectif propre à établir que cette formule caractérisait l’existence d’une promesse synallagmatique de vente. Il a ajouté que la SCI Moulin Chenôve 2015 observait à juste titre qu’à supposer établie l’existence entre les parties d’une promesse synallagmatique, la signature postérieure de l’acte notarié, incompatible avec elle, révélait que les parties avaient entendu se placer dans un champ contractuel distinct en optant pour une promesse unilatérale de vente. Il a retenu à cet égard qu’en signant l’acte authentique en qualité de bénéficiaire, et au visa de l’article 1124 du code civil, en présence de son notaire, qui l’avait assisté et qui avait été destinataire du projet d’acte, qu’il avait donc pu étudier, la SARL IC Conseil ne s’était pas positionnée comme ayant donné son consentement à la vente. Le juge des référés en a déduit que le moyen tiré de ce qu’il y aurait lieu à requalification de l’acte authentique, dont il n’était ni soutenu ni démontré qu’une de ses clauses serait susceptible d’interprétation comme étant ambiguë, était donc dépourvu de caractère sérieux. Constatant que la promesse de vente était devenue caduque, et qu’il n’y avait pas lieu à requalification de l’indemnité, qui avait pour contrepartie l’immobilisation du bien et était en outre fixée à un taux de 10 % correspondant à la pratique habituelle, le juge des référés a fait droit à la demande provisionnelle. Il a en conséquence :

Vu l’article 809 du code de procédure civile,

— condamné la SARL IC Conseil à payer à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 50 000 € à titre provisionnel au titre de l’indemnité d’immobilisation ;

— autorisé Maître Y X, notaire associé à Dijon, à remettre à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 10 000 € dont il dispose en compte séquestre, à valoir sur l’exécution de la condamnation ;

— condamné la SARL IC Conseil à payer à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— l’a condamnée aux dépens.

La société IC Conseil a relevé appel de cette décision le 2 avril 2019.

Par conclusions notifiées le 14 octobre 2019, l’appelante demande à la cour :

Vu les articles 12 & 809 al. 2 du code de procédure civile,

Vu l’article 1231-5 du code civil

— d’infirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a :

* condamné la SARL IC Conseil à payer à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 50 000 € à titre provisionnel au titre de l’ indemnité d’ immobilisation ;

* autorisé Maître Y X, notaire associé à Dijon, à remettre à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 10 000 € dont il dispose en compte séquestre, à valoir sur l’exécution de la condamnation ;

* condamné la SARL IC Conseil à payer à la SCI Moulin de Chenôve 2015 la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la SARL IC Conseil aux dépens ;

Statuant à nouveau,

— de constater l’existence de contestations sérieuses ;

— de débouter la SCI Moulin Chenôve de l’ensemble de ses fins et conclusions ;

— de renvoyer la SCI Moulin Chenôve à se pouvoir devant les juges du fond ;

Subsidiairement,

— de requalifier la promesse unilatérale du 26 avril 2018 en promesse synallagmatique ;

— de requalifier la clause d’immobilisation en clause pénale ;

— de réduire celle-ci à juste mesure ;

En toute hypothèse ;

— de condamner la SCI Moulin Chenôve 2015 aux entiers frais et dépens de la procédure ;

— de condamner la SCI Moulin Chenôve 2015 à verser à la SARL IC Conseil une somme de 2 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 21 octobre 2019, la SCI Moulin Chenôve 2015 demande à la cour :

Vu l’article 1104 du code civil,

— de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

* condamné la société IC Conseil à verser, à titre de provision, à la société Moulin Chenôve 2015 une somme de 50 000 € ;

* autorisé Maître Y X, notaire associé de la SELAS Didier Nourissat ' Yvan Striffling ' Y X ' Marjolaine Nourissat-Gonthier ' Z A, à remettre à la société Moulin Chenôve 2015 une somme de 10 000 € dont ils disposent en compte séquestre en titre d’acompte sur la provision à laquelle sera condamnée la société IC Conseil ;

— condamné la société IC Conseil à verser à la société Moulin Chenôve 2015 une somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la société IC Conseil aux entiers dépens ;

Y ajoutant,

— de dire que la promesse unilatérale de vente est caduque ;

— de condamner la société IC Conseil à verser à la société Moulin Chenôve 2015 une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en voie d’appel ;

— de condamner la même aux entiers dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 22 octobre 2019.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Pour poursuivre l’infirmation de l’ordonnance déférée, et obtenir le rejet des prétentions de la SCI Moulin Chenôve 2015, la société IC Conseil reprend son argumentation de première instance consistant à soutenir que la demande de provision se heurte à l’existence d’une contestation sérieuse tenant à la qualification de promesse unilatérale de vente de l’acte fondant la demande de versement d’une indemnité d’immobilisation.

L’appelante fait valoir, en se référant à un échange de courriers antérieur à l’acte notarié du 26 avril 2018, qu’elle s’était à cette date d’ores et déjà engagée à acheter le bien appartenant à la SCI Moulin Chenôve 2015, de sorte que les parties étaient liées, non pas par une promesse unilatérale, mais par une promesse synallagmatique de vente, qui, à défaut d’option possible pour le candidat à l’acquisition, rendait sans objet la stipulation d’une indemnité d’immobilisation.

D’une part, le juge des référés a pertinemment observé à l’examen des documents produits par la société IC Conseil qu’une certaine ambiguïté subsistait quant au caractère synallagmatique ou unilatéral de la promesse de vente évoquée dans l’échange de courrier de mars 2018. D’autre part, et à supposer qu’il doive être considéré que les parties avaient dans un premier temps envisagé de contracter dans le cadre d’une promesse synallagmatique de vente, il n’en demeure pas moins qu’elles restaient parfaitement libres de se raviser, et de placer en définitive leurs relations dans un champ contractuel distinct.

Or, il résulte clairement de la lecture de l’acte notarié du 26 avril 2018 que les parties ont contracté dans le cadre précis d’une promesse unilatérale de vente. La société IC Conseil ne peut pas sérieusement prétendre avoir pu se méprendre à ce sujet, alors que l’acte est dépourvu de toute ambiguïté, et que l’appelante avait pris soin de s’entourer du conseil de son propre notaire, qui avait pu étudier le projet d’acte avant signature, ainsi que d’un professionnel des transactions immobilières en la personne de M. B C.

C’est ainsi à bon droit que le premier juge a retenu que la contestation du caractère unilatéral de la promesse de vente était dénuée de tout caractère sérieux, et qu’il n’y avait pas lieu à requalification.

Constatant par ailleurs que cette promesse unilatérale était devenue caduque dès lors que la société IC Conseil n’avait pas manifesté son intention d’acheter dans le délai fixé à l’acte, ce qui n’est ni contesté, ni contestable, il a en conséquence considéré que la SCI Moulin Chenôve 2015 était en droit de prétendre à l’attribution de l’indemnité d’immobilisation contractuellement convenue.

C’est encore à juste titre qu’il a écarté la demande subsidiaire de réduction de l’indemnité, analysée sous l’angle de la clause pénale, en relevant qu’elle était fixée à un pourcentage du prix correspondant en tous points aux pratiques habituelles en la matière.

La décision déférée devra donc être confirmée en toutes ses dispositions.

La société IC Conseil sera condamnée, outre aux dépens d’appel, à payer à la SCI moulin Chenôve 2015 la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 13 février 2019 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Dijon ;

Y ajoutant :

Condamne la société IC Conseil à payer à la SCI Moulin Chenôve 2015 la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société IC Conseil aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

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