Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 30 septembre 2021, n° 21/00511

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. com., 30 sept. 2021, n° 21/00511
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 21/00511
Décision précédente : Tribunal de commerce de Vienne, 25 novembre 2020, N° 2019F01069
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 21/00511 -

N° RG 21/00512

N° RG 21/00513

N° Portalis DBVM-V-B7F-KXEI

LB

Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

la SCP PYRAMIDE AVOCATS

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 30 SEPTEMBRE 2021

Appel d’une décision (N° RG 2019F01069)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 26 novembre 2020

suivant déclaration d’appel du 27 janvier 2021

APPELANTE :

S.A.R.L. Z A

Société à Responsabilité Limitée au capital de 566.500 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BEAUVAIS sous le numéro 490 376 605, représentée par Monsieur B C et Madame D C, gérants,

[…]

[…]

représentée par Me Fabrice POSTA de la SCP PYRAMIDE AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE, postulant et par Me Pauline CARON, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES :

M. E X

de nationalité Française

[…]

[…]

défaillant

[…]

SELARL au capital de 6 001,00 ', immatriculé au RCS de VIENNE sous le n° 830 490 413, prise en la personne de Maître G Y, es qualité de liquidateur judiciaire de la société LSB, prise en la personnede Maître G Y et Maître Jean BLANCHARD es qualité de liquidateur judiciaire de la société LSB

[…]

[…]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Patricia GONZALEZ, Présidente de Chambre,

Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 30 juin 2021, M. Lionel BRUNO Conseiller, qui a fait rapport et, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère, assistés de Mme Alice RICHET, Greffière, ont entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.

Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.

Faits et procédure :

La société Z A a établi des relations commerciales avec la société LSB en lui donnant en location un véhicule de marque Mercedes à compter du 15 septembre 2017 moyennant un loyer mensuel de 6.000 euros.

Dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’encontre de la société LSB selon jugement du tribunal de commerce de Vienne du 15 mai 2018, la société Z A a déclaré auprès de l’administrateur, la Selarl AJ Partenaires une créance relative à la location de la balayeuse, qui a été admise intégralement à titre chirographaire par le juge-commissaire, pour un montant de 57.600 euros. Le contrat de location de la balayeuse liant les deux sociétés s’est poursuivi pendant la période d’observation à la demande de l’administrateur par courrier du 16 mai 2018.

Par courriers en dates des 17 juillet 2018 et 22 octobre 2018, la société Z A a demandé à l’administrateur judiciaire la résiliation du contrat de location de la balayeuse Mercedes. Ces demandes n’ont pas abouti.

Par jugement du 26 avril 2019, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société LSB et a désigné en qualité de liquidateur judiciaire la Selarl MJ Alpes.

*****

La société Z A a saisi le juge-commissaire d’une requête en revendication du véhicule Mercedes le 9 août 2019.

Par ordonnance du 1er octobre 2019, le juge commissaire a rejeté cette requête, aux motifs qu’à défaut de production par la société Z A des justificatifs de propriété sollicités par le mandataire judiciaire, la revendication invoquée dans la requête a été présentée plus de trois mois après la publication du 25 mai 2018 au Bodacc du jugement ouvrant la procédure.

Le 18 octobre 2019, la société Z A a formé opposition cette ordonnance.

Par jugement du 26 novembre 2020, le tribunal de commerce de Vienne a':

— déclaré mal fondé l’opposition de la société Z A';

— confirmé l’ordonnance du juge-commissaire en toutes ses dispositions';

— rejeté comme non fondés tous autres moyens';

— condamné la société Z A aux dépens.

La société Z A a interjeté appel de cette décision le 27 janvier 2021, dirigé également contre monsieur X, gérant de la société LSB. Ce dernier ne s’est pas constitué devant la cour, bien que la déclaration d’appel lui ait été signifiée à domicile le 17 février 2021. Cet appel a été enrôlé sous le numéro RG 21/511.

*****

En outre, par requête du 26 novembre 2020, la société MJ Alpes, ès-qualités de liquidateur de la société LSB, a sollicité du juge-commissaire l’autorisation de vendre aux enchères publiques la balayeuse Mercedes-Benz immatriculée CB-635-SA, apparaissant comme étant susceptible de revendication par la société Z A.

Par ordonnance du 21 janvier 2021, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Vienne a':

— autorisé la requérante, ès-qualités, à procéder à la vente aux enchères publiques de la balayeuse de marque Mercedes-Benz immatriculée CB-635-SD';

— commis pour y procéder la société 2C Partenaires située au […], […], laquelle, au préalable, aura procédé aux opérations de publication et fait sommation au débiteur d’avoir à assister à ladite vente aux enchères publiques, ainsi qu’effectuer toutes les démarches et vérifications nécessaires en vue de la préparation de ladite vente';

— précisé que les adjudications sont prononcées toutes taxes comprises et qu’en conséquence, le liquidateur judiciaire, ès-qualités, redevable de la TVA pour les opérations concernées par la vente aux enchères publiques, donne mandat à la société 2C Partenaires d’établir pour son compte les

factures mentionnant la TVA';

— dit que la vente aux enchères publiques de ces éléments mobiliers d’actif devra intervenir dans le délai d’un mois à compter de l’ordonnance';

— dit qu’il appartiendra à la société 2C Partenaires de transmettre sans délai le produit de la vente aux enchères publiques au mandataire judiciaire, afin d’éviter toute voie d’exécution de la part d’un créancier grevant ainsi le gage général de l’intégralité des créanciers';

— dit que l’ordonnance sera notifiée par les soins du greffier au débiteur ainsi qu’à la société Z A';

— mis les dépens en frais privilégiés de liquidation.

La société Z A a interjeté appel de cette ordonnance le 27 janvier 2021, appel également dirigé contre monsieur X, gérant de la société LSB. Ce dernier ne s’est pas constitué devant la cour, bien que la déclaration d’appel lui ait été signifiée à domicile le 16 février 2021. Cet appel a été enregistré sous le numéro 21/512.

*****

Enfin, une seconde ordonnance a été rendue le 21 janvier 2021 par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Vienne, concernant la requête présentée par le liquidateur afin d’être autorisé à vendre la balayeuse. La société Z A a également interjeté appel de cette ordonnance le 27 janvier 2021, appel également dirigé contre monsieur X, gérant de la société LSB. Ce dernier ne s’est pas constitué devant la cour, bien que la déclaration d’appel lui ait été signifiée à domicile le 16 février 2021. Cet appel a été enregistré sous le numéro 21/513.

L’instruction de ces procédures a été clôturée le 10 juin 2021.

A l’audience du 30 juin 2021, la cour a sollicité les observations des parties sur la jonction de ces trois procédures, les deux dernières étant afférentes à deux ordonnances rendues sur la même requête, et étant conditionnées par l’appel dirigé contre le jugement du 20 novembre 2020 ayant refusé la demande de restitution de l’appelante. Aucune des parties ne s’est opposée à cette jonction.

En raison de ces faits, il convient d’ordonner la jonction de ces trois procédures, qui se poursuivront sous le numéro 21/511.

Prétentions et moyens de la société Z A':

Concernant la procédure numéro RG 21/511, selon ses conclusions remises le 26 février 2021, elle demande, au visa des articles L624-9 et suivants, R624-13 du code de commerce':

— de déclarer son appel recevable en la forme et bien fondé;

— de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';

— statuant à nouveau, de réformer l’ordonnance rendue par le juge-commissaire le 1er octobre 2019;

— de dire qu’elle est propriétaire de la balayeuse de marque Mercedes-Benz immatriculée CB-635-SD;

— de dire que sa revendication est régulière';

— d’ordonner la restitution de ce matériel à compter de la décision à intervenir;

— de condamner la société LSB à lui payer 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre dépens.

Elle expose':

— qu’elle a fait connaître sa qualité de propriétaire dudit véhicule auprès des organes de la procédure afin d’en obtenir la restitution le 2 mai 2018, mais que la Selarl AJ Partenaires, tout en reconnaissant sa qualité de propriétaire de la balayeuse, a souhaité que le contrat de location se poursuive pendant la procédure de redressement et qu’il n’y avait en conséquence pas lieu à restitution à ce stade, par courrier du 16 mai 2018'; que la concluante a déclaré sa créance le 7 juin 2018 pour 57.600 euros, correspondant aux loyers dus par la société LSB pour la location de la balayeuse, en sa qualité de propriétaire'; que le juge-commissaire a admis sa créance en reconnaissant sa qualité de propriétaire'; que suite à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le contrat de location s’est poursuivi, sans que la société LSB respecte ses obligations et sans régler les loyers, en violation avec l’article L622-17 du code de commerce, de sorte que la créance s’est chiffrée le 15 juillet 2018 à 14.400 euros et qu’elle a alerté le 17 juillet 2018 l’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire que le montant des créances à devoir ne cessait d’augmenter'; qu’au 15 octobre 2018, la société LSB devait la somme de 28.800 euros, de sorte qu’une nouvelle alerte a été faite auprès des organes de la procédure, ce qui n’a cependant pas empêché le tribunal de proroger la période d’observation par jugement du 23 octobre 2018'; que les loyers n’ont toujours pas été réglés, alors que la société LSB a commis des infractions au code de la route et au code pénal, entraînant la mise en recouvrement d’amendes que la concluante a été contrainte de régler, ce qui a augmenté la dette'; qu’elle a mis en demeure la société LSB de lui remettre le véhicule afin de faire réaliser le contrôle technique obligatoire et en a avisé l’administrateur et le mandataire le 16 avril 2019; que le tribunal a finalement prononcé la liquidation judiciaire de la société LSB le 26 avril 2019, publiée au Bodacc du 3 mai 2019'; que le concluante a déclaré une créance pour la période allant du 15 mai 2018 au 26 avril 2019 de 57.600 euros le 1er juillet 2019'; que suite à sa demande de restitution de son véhicule suivant courrier du 18 juin 2019, la Selarl MJ Alpes lui a demandé le 24 juin 2019 de communiquer tout justificatif de la revendication de propriété lors de l’ouverture de la procédure collective entre les mains de l’administrateur, et la reconnaissance du droit de propriété par ce dernier';

— que le jugement déféré a retenu que son recours contre l’ordonnance rendue le 1er octobre 2019 n’était pas fondé'; que si l’article L624-9 du code de commerce dispose que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure, cette action n’a pas à être exercée lorsque l’administrateur opte pour la poursuite d’un contrat, cette poursuite impliquant la reconnaissance du droit de propriété du bailleur sur le matériel loué';

— que le juge-commissaire n’a pu la débouter de sa demande de revendication aux motifs qu’à défaut de production des justificatifs de propriété sollicités par le mandataire judiciaire, la revendication invoquée dans la requête a été présentée plus de trois mois après la publication au Bodacc du jugement ouvrant la procédure, puisque la concluante a bien revendiqué le matériel dans les délais et a fait connaître au cours de la procédure de redressement judiciaire sa qualité de propriétaire'; que la demande de poursuite du contrat de la Selarl AJ Partenaires du 16 mai 2018 pendant la période d’observation valait reconnaissance du droit de propriété de la concluante'; que sa seconde revendication effectuée le 18 juin 2019 a été faite dans les délais, puisque le liquidateur reconnaît expressément dans ses écritures du 19 février 2020 que la concluante avait jusqu’au 26 juillet 2019 pour revendiquer la propriété de son matériel'; qu’elle a adressé l’ensemble des documents demandés par le liquidateur ainsi qu’il le reconnaît';

— que la Selarl MJ Alpes n’ayant pas répondu au dernier courrier de la concluante du 15 juillet 2019, elle avait alors un mois pour saisir le juge-commissaire en application de l’article R624-13 du code

de commerce, ce qu’elle a fait le 11 août 2019'; qu’elle a ainsi formé son action en revendication dans les délais impartis tant au cours de la procédure de redressement qu’au cours de la procédure de liquidation judiciaires, alors qu’à aucun moment, suite à ses nombreux courriers, son droit de propriété n’a été contesté par les organes de la procédure.

Dans le cadre des procédures numéros RG 21/512 et RG 21/513, selon ses conclusions remises le 26 février 2021, l’appelante demande, au visa des articles L642-18, L642-19 et suivants, R642-37-1 du code de commerce':

— de déclarer son appel recevable en la forme et bien fondé;

— de réformer les ordonnances entreprises en toutes leurs dispositions';

— de condamner la société LSB à lui payer 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre dépens.

Elle expose qu’il convient de réformer l’ordonnance n° 2020 JC 01278 ainsi que l’ordonnance n°2020 JC 1301 rendues par le juge-commissaire le 21 janvier 2021 autorisant la vente aux enchères du véhicule, puisque ce bien est la propriété de la concluante, ce qu’elle a toujours indiqué aux organes de la procédure, alors que l’appel est pendant concernant le jugement la déboutant de sa demande de restitution'; que l’ordonnance déférée porte atteinte à son droit de propriété alors que si la vente est maintenue, elle perdra tous ses droits sur la balayeuse.

Prétentions et moyens de la Selarl MJ Alpes ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société LSB':

Selon ses conclusions remises le 24 mars 2021, elle demande, dans le cadre de la procédure RG 21/511:

— de débouter l’appelante de l’intégralité de ses demandes';

— de confirmer le jugement déféré';

— de condamner l’appelante à lui payer 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la Selarl Lexavoué Grenoble, représentée par maître Grimaud avocat.

Elle soutient':

— que si l’article L624-9 du code de commerce dispose que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure, l’article R624-13 précise que la demande en revendication d’un bien est adressée dans le délai prévu à l’article L624-9 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à l’administrateur s’il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur, le demandeur en adressant une copie au mandataire judiciaire'; que cet article ajoute qu’à défaut d’acquiescement dans le délai d’un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d’un mois à compter de l’expiration du délai de réponse';

— qu’en l’absence de revendication dans le délai de trois mois, le droit de propriété de l’intéressé devient inopposable à la procédure collective selon arrêts de la chambre commerciale de la Cour de Cassation des 4 janvier 2000, 15 décembre 2015 et 3 avril 2019'; qu’il résulte de l’inopposabilité du droit de propriété la possibilité pour le mandataire judiciaire de vendre le bien litigieux, qui devient le gage des créanciers';

— qu’en la cause, le jugement de redressement judiciaire de la société LSB du 15 mai 2018 a fait l’objet d’une publication au Bodacc le 25 mai 2018, de sorte que le délai de revendication expirait le 28 août 2018, alors que l’appelante a présenté sa requête en revendication auprès du juge-commissaire le 9 août 2019'; que cette demande est ainsi manifestement tardive'; qu’il en résulte que l’éventuel droit de propriété de l’appelante est inopposable à la liquidation judiciaire';

— que si l’appelante allègue qu’en poursuivant le contrat de location, l’administrateur judiciaire aurait implicitement reconnu sa propriété du matériel, elle se fonde sur une jurisprudence ancienne, tirée de l’article 115 de la loi du 25 janvier 1985, texte qui ne s’applique pas au cas d’espèce'; que par arrêt du 12 mars 2013, la Cour de cassation a retenu que la lettre de mise en demeure d’avoir à se prononcer sur la continuation du contrat et qui n’invitait pas son destinataire à se prononcer sur le droit de propriété, ne valait donc pas revendication'; que par arrêt du 16 septembre 2014, elle a confirmé ce principe en indiquant que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de 3 mois suivant la publication du jugement d’ouverture, le bien revendiqué fut-il l’objet d’un contrat en cours'; qu’elle a ajouté le 12 janvier 2016 que la poursuite d’un contrat en cours ne vaut pas acquiescement à la demande de revendication, et ne dispense pas le propriétaire de saisir le juge-commissaire d’une demande en revendication';

— qu’aucune pièce ne démontre que l’administrateur judiciaire a acquiescé au droit de propriété de l’appelante'; que si le juge-commissaire a reconnu sa qualité de créancière, il n’a pas reconnu sa qualité de propriétaire, de même que le liquidateur judiciaire, précisant dans son courrier du 16 juillet 2019 que l’autorisation de poursuite du contrat donné par l’administrateur à l’ouverture de la procédure collective ne constitue en aucun cas une reconnaissance de droit de propriété.

Dans le cadre des procédures numéro RG 21/512 et RG 21/513 , selon ses conclusions remises le 24 mars 2021, cette intimée demande:

— d’ordonner la jonction des deux déclarations d’appel enregistrées sous les numéros RG n° 21-513 et RG n° 21-512 et de statuer par une seule et unique décision concernant l’autorisation donnée à la concluante agissant par Maître Y en qualité de liquidateur judiciaire de la société LSB, de vendre aux enchères la balayeuse de marque Mercedes-Benz immatriculée CB-635-SD';

— de débouter l’appelante de l’intégralité de ses demandes';

— de confirmer les ordonnances déférées;

— de condamner l’appelante à lui payer 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la Selarl Lexavoué Grenoble, représentée par maître Grimaud avocat.

Elle soutient':

— qu’elle a présenté une seule requête auprès du juge-commissaire afin d’être autorisée à procéder à la vente aux enchères de la balayeuse, mais que pour une raison incompréhensible, le juge-commissaire a rendu deux ordonnances le 21 janvier 2021 (RG n°2020 JC 1278 et RG n° 2020 JC 1301), d’autorisation de vente'; que ces deux ordonnances font doublon ce qui implique la jonction des déclarations d’appel';

— sur le fond, qu’il résulte de l’article L624-9 du code de commerce que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure'; que selon trois arrêts de la Cour de Cassation des 4 janvier 2000, 15 décembre 2015 et 3 avril 2019, l’absence de revendication dans le délai de trois mois a pour effet de rendre le droit de propriété de l’intéressé inopposable à la procédure collective'; qu’il résulte de cette inopposabilité la possibilité pour le mandataire judiciaire de vendre le bien litigieux, qui devient le gage des créanciers

selon l’arrêt du 3 décembre 2003';

— qu’en l’espèce, l’appelante a interjeté appel des ordonnances rendues le 21 janvier 2021 au seul motif qu’elle serait propriétaire du véhicule, alors que le jugement de redressement judiciaire de la société LSB du 15 mai 2018 a fait l’objet d’une publication au BODACC le 25 mai 2018'; que le délai de revendication expirait le 28 août 2018'; que l’appelante a cependant présenté sa requête en revendication auprès du juge-commissaire le 9 août 2019, soit plus de trois mois avant l’expiration de ce délai'; qu’ainsi, son droit de propriété est inopposable à la liquidation judiciaire'; qu’elle ne peut en conséquence s’opposer à l’autorisation de vendre ce bien.

*****

Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

Motifs':

Il résulte de l’article L624-9 du code de commerce que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure.

Selon l’article L624-10-1, lorsque le droit à restitution a été reconnu dans les conditions prévues aux articles L624-9 et que le bien fait l’objet d’un contrat en cours au jour de l’ouverture de la procédure, la restitution effective intervient au jour de la résiliation ou du terme du contrat.

L’article L641-14 prévoit que ces dispositions relatives à la détermination du patrimoine du débiteur, s’appliquent à la procédure de liquidation judiciaire.

Selon l’article L641-14-1, le liquidateur, avec l’accord de l’administrateur, s’il en a été désigné, peut acquiescer à la demande en revendication ou en restitution. A défaut d’accord entre eux ou en cas de contestation, la demande est portée devant le juge-commissaire qui statue au vu des observations du demandeur, du débiteur, du liquidateur et, le cas échéant, de l’administrateur.

L’article R624-13 précise que la demande en revendication est adressée dans le délai prévu à l’article L624-9 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à l’administrateur s’il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire. A défaut d’acquiescement dans le délai d’un mois à compter de la réception de la

demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d’un mois à compter de l’expiration du délai de réponse. La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution.

Ces dispositions sont applicables à la procédure de redressement et de liquidation judiciaire par l’effet des articles R631-31 et R641-31 du code de commerce. En matière de liquidation judiciaire, la demande est adressée au liquidateur.

Enfin, selon l’article R641-32, le bien qui ne fait pas l’objet d’une demande en restitution peut être vendu à l’expiration d’un délai d’un mois après l’envoi d’une mise en demeure au propriétaire.

En l’espèce, le contrat de location a été conclu le 10 novembre 2017. Le certificat d’immatriculation est resté au nom du bailleur. Le 15 mai 2018, le tribunal de commerce a ouvert la procédure de redressement judiciaire concernant la société LSB et par courrier du 16 mai 2018, l’administrateur a informé le bailleur de la poursuite du contrat de location pendant la période d’observation. Le 7 juin 2018, le bailleur a déclaré sa créance, sans cependant solliciter de restitution. Si par courrier du 17 juillet 2018 il a avisé l’administrateur du défaut de paiement des loyers et a demandé le bénéfice de

l’article L622-17 du code de commerce et la résiliation du contrat, il n’a pas plus demandé la restitution du véhicule. Il en est de même concernant son courrier du 22 octobre 2018.

La période d’observation a été prolongée par jugement du 23 octobre 2018. Par courrier du 16 avril 2019, la société Z A a demandé la restitution du véhicule à la société LSB, non en raison de loyers impayés, mais afin de pouvoir réaliser le contrôle technique. Cette demande n’a pas été présentée à l’administrateur, même si une copie de ce courrier lui a été adressée. Il ne résulte pas de cette demande que le bailleur ait ainsi demandé la restitution définitive du bien loué et qu’il l’ai ainsi revendiqué.

La société LSB a été placée en liquidation judiciaire le 26 avril 2019, et le jugement ouvrant cette procédure a été publié au Bodacc du 3 mai 2019. Le 18 juin 2019, la société Z A a demandé au liquidateur à pouvoir reprendre le véhicule loué.

La reconnaissance par le liquidateur du droit de propriété ne dispense pas le propriétaire du bien détenu par le débiteur d’agir en revendication. La décision de l’administrateur de poursuivre un contrat en cours portant sur les biens faisant l’objet d’une requête en revendication ne vaut pas acquiescement. La sanction de l’absence de revendication dans le délai légal n’est pas le transfert du droit de propriété au profit du débiteur, mais son inopposabilité à la procédure collective.

Il en ressort que la revendication doit être exercée pendant la période d’observation, même si entre-temps, le débiteur a été placé en liquidation judiciaire. Si le bien fait l’objet d’un contrat en cours, la restitution effective n’interviendra qu’au jour de la résiliation ou au terme du contrat. La demande en restitution doit quand même être faite dans le délai de trois mois.

Il en résulte que la demande de revendication est tardive, au visa des textes et principes précités, aucune revendication n’ayant été formulée dans les trois mois suivants l’ouverture du redressement judiciaire, peu important la poursuite du bail à la demande de l’administrateur.

De ce fait, le juge-commissaire a exactement rejeté la demande de revendication pour ce motif, ce qu’a également retenu le tribunal de commerce statuant sur opposition de l’appelante. En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

En outre, du fait de l’absence de demande de revendication valable, le juge-commissaire a pu autoriser le liquidateur à procéder à la vente aux enchères publiques du véhicule Mercedes-Benz, selon les ordonnances entreprises faisant suite à la requête de la Selarl MJ Alpes. Ces ordonnances seront également confirmées en toutes leurs dispositions.

Succombant en ses appels, la société Z A sera condamnée à payer à la Selarl MJ Alpes, ès-qualités de liquidateur de la société LSB, la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, par application de l’article 696 du code de procédure civile, avec distraction au profit de la Selarl Lexavoué Grenoble, représentée par maître Grimaud, avocat.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par défaut et mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles L624-9 et suivants, L641-14 et suivants, R624-13, R631-31, R641-31 et suivants du code de commerce';

Ordonne la jonction des procédures numéros RG 21/511, RG 21/512 et RG 21/513 et dit qu’elles

seront poursuives sous le numéro RG 21/511';

Confirme le jugement déféré ainsi que les ordonnances entreprises en toutes leurs dispositions';

Condamne la société Z A à payer à la Selarl MJ Alpes, ès-qualités de liquidateur de la société LSB, la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile';

Condamne la société Z A aux dépens, avec distraction au profit de la Selarl Lexavoué Grenoble, représentée par maître Grimaud, avocat';

SIGNE par M. BRUNO, Conseiller, pour la Présidente empêchée et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Conseiller

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Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 30 septembre 2021, n° 21/00511