Cour d'appel de Lyon, 4 décembre 2012, n° 12/00904

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 4 déc. 2012, n° 12/00904
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 12/00904
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lyon, 3 juin 2012, N° 12/00904

Texte intégral

R.G : 12/04614

Décision du

tribunal de grande instance de Lyon

Référé

du 04 juin 2012

RG : 12/00904

XXX

D

X

SARL CAPIME

C/

SAS AUTOMATION MECANISATION GESTION Y

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8e chambre

ARRÊT DU 04 Décembre 2012

APPELANTS :

Mme A D épouse X

née le XXX à ISBERGUES

XXX

XXX

représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON (toque 669) représentée par Me LAFANECHERE Albane

M. E X

né le XXX à ARRAS

XXX

XXX

représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON (toque 669) représentée par Me LAFANECHERE Albane

SARL CAPIME

représentée par ses dirigeants légaux

XXX

XXX

représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON (toque 669) représentée par Me LAFANECHERE Albane

INTIMÉE :

SAS AUTOMATION MECANISATION GESTION (Y)

représentée par ses dirigeants légaux en exercice

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP LAFFLY – WICKY, avocats au barreau de LYON (toque 938),

assistée de Me Maude REISMAN, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 17 Octobre 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Octobre 2012

Date de mise à disposition :04 Décembre 2012

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Pascal VENCENT, président

— G H, conseiller

— Catherine ZAGALA, conseiller

assistés pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier

A l’audience, G H a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Pascal VENCENT, président, et par Aurore JACQUET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

La SAS AUTOMATION MECANISATION GESTION (Y) et la SARL CAPIME sont des sociétés ayant une activité concurrente dans le domaine des solutions techniques d’impression.

Monsieur E X a été salarié V.R.P. de la société Y du le 3 juin 1996 au 4 novembre 2010.

La société Y ayant acquis la conviction qu’elle était victime d’actes de concurrence déloyale commis par la société CAPIME avec le concours de monsieur X et de son épouse a présenté le 21 septembre 2011 au président du tribunal de grande instance de LYON une requête aux fins de désignation d’un huissier de justice avec mission de se rendre dans les locaux de la société CAPIME, de prendre copie ou de se faire remettre divers documents et de procéder à diverses investigations.

Par ordonnance du 26 juillet 2011, le président du tribunal de grande instance a autorisé la société Y a mandaté tout huissier de justice de son choix avec mission de:

— se rendre dans les locaux de la SARL CAPIME, prendre copie ou se faire remettre tout document, papier à entête, carte de visite, publicité promotionnelle,

— prendre copie du fichier client de la SARL CAPIME, de tous devis, bons de commande, factures, courriers et documents comptables, commerciaux ou contractuels lui ayant été adressés par des clients de la société Y relevant du portefeuille de monsieur E X au sein de ladite société, dont la liste est jointe,

— si ces documents sont conservés sur un support informatique, se faire remettre une édition sur le support magnétique numérique, les personnes présentes ayant l’obligation de communiquer les mots de passe ou les codes d’accès et l’huissier pouvant en cas de refus de coopération procéder à la saisie des matériels informatiques,

— poser toutes questions aux personnes rencontrées sur place et faire toutes recherches utiles pour obtenir un descriptif précis des actes de concurrence déloyale commis par la SARL CAPIME, A J, E X ou toute société dans laquelle ils ont des intérêts, et obtenir tous renseignements utiles sur la nature et l’historique des liens juridiques, financiers et économiques entre eux, et se faire remettre les documents s’y rapportant,

— se faire accompagner par le commissaire de police ou un représentant de la force publique.

En exécution de cette ordonnance, l’huissier de justice s’est fait remettre divers documents.

Entre temps, le 20 juillet 2011, monsieur X a été assigné par la société Y devant le conseil des prud’hommes d’ARRAS motif pris de l’exécution déloyale de son contrat de travail, puis le 19 décembre 2011, la société Y a fait assigner madame A J épouse X et la société CAPIME devant le tribunal de grande instance de LYON pour les voir déclarer responsable d’actes de concurrence déloyale et parasitaire.

Le 28 mars 2012 la société CAPIME, monsieur E X et madame A X ont fait assigner la société Y devant le président du tribunal de grande instance de LYON statuant en référé pour voir rétracter l’ordonnance sur requête du 26 juillet 2011, pour voir déclarer nulles les opérations de l’huissier de justice et pour se voir remettre sous astreinte la clef USB, le DVD et les pièces recueillis par l’huissier et mentionnés dans son procès verbal.

Par ordonnance du 4 juin 2012 le juge des référés a :

— ordonné la rétractation de l’ordonnance du 26 juillet 2011 en ce qu’elle avait autorisé l’huissier mandaté par la SAS Y à :

* se faire remettre et prendre copie du fichier client de la SARL CAPIME et de tout document, papier à entête, carte de visite, publicité promotionnelle,

* procéder à la saisie des matériels informatiques en cas de refus des personnes présentes de faire fonctionner les ordinateurs et coopérer à la remise de l’édition des fichiers pertinents sur un support magnétique,

* poser toutes questions aux personnes rencontrées sur place et faire toutes recherches utiles pour obtenir un descriptif précis des actes de concurrence déloyale commis par la SARL CAPIME, E X et A X ou toute autre société dans laquelle ils ont des intérêts, ainsi que tous renseignements utiles sur la nature et l’historique des liens juridique, commerciaux ou contractuels existant entre eux,

* de se faire accompagner par le commissaire de police ou un représentant de la force publique.

— confirmé l’ordonnance du 26 juillet 2011 pour le surplus de ses dispositions,

— débouté la SARL CAPIME, A J et E X de leur demande de restitution de la clef USB contenant les documents recueillis par l’huissier lors de ses opérations du 13 septembre 2011.

Le 16 juin 2012 madame A J épouse X, monsieur E X et la SARL CAPIME ont interjeté appel de cette ordonnance.

Les appelants demandent à la cour .

— à titre principal, d’annuler l’ordonnance querellée du 4 juin 2012, celle-ci n’étant pas signée par le président qui l’a rendue,

— à titre subsidiaire, de réformer partiellement l’ordonnance du 4 juin 2012,

En tout état de cause, statuant à nouveau :

— de rétracter dans son entier l’ordonnance sur requête du 26 juillet 2011,

— de déclarer nulles et à eux inopposables les opérations diligentées par maître Z, huissier de justice, les 13 et 15 septembre 2011 ainsi que le procès-verbal de ses opérations,

— d’ordonner la restitution à la société CAPIME de la clef USB contenant les informations recueilles par l’huissier lors de ses opérations ainsi que du DVD non réinscriptible et de toutes pièces dont il est fait mention dans le procès-verbal, ce dans un délai de huit jours à compter de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 1.000 € par jour de retard,

— de se déclarer compétente pour liquider cette astreinte,

— de condamner la société Y aux dépens ainsi qu’au paiement à la SARL CAPIME, monsieur E X et madame A X, ensemble, la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile exposée en première instance et la somme de 3.000 € pour les frais irrepétibles exposés en appel.

Ils font valoir :

— que les mesures demandées par Y s’inscrivent nécessairement dans le cadre de l’article 145 du code de procédure civile mais que ni la requête du 21 juillet 2011 ni l’ordonnance du 26 juillet 2011 n’énonce de manière expresse les circonstances de nature à justifier la dérogation au principe de la contradiction et que le juge des référés a commis une erreur de droit en croyant pouvoir rechercher a posteriori l’existence de telles circonstances dans la requête,

— que les mesures d’instruction de l’article 145 de code de procédure civile ne peuvent être ordonnées que dans la perspective d’une action future devant les juges du fond, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisqu’à la date de la requête monsieur X était déjà assigné devant le conseil de prud’hommes,

— qu’il n’existe pas de motif légitime pour justifier la requête en ce qui concerne madame X, inscrite comme intermédiaire du commerce et dont le prétendu concours apporté à son mari dans la violation du contrat de travail n’est pas avéré,

— que les mesures autorisées sur requête ne sont pas légalement admissibles, la mission donnée à l’huissier de justice excédant les mesures de contrainte prévues par l’article 11 du code de procédure civile et lui conférant un véritable pouvoir d’enquête, incompatible avec l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice.

La SAS Y demande de son côté à la cour :

— de confirmer l’ordonnance du 4 juin 2012 en toutes ses dispositions et de débouter la SARL CAPIME, monsieur E X et madame A X de l’intégralité de leurs prétentions,

— de condamner la SARL CAPIME, monsieur E X et madame A X aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait d’abord valoir que l’ordonnance du 4 juin 2012, contrairement aux dires des appelants comporte bien la signature du président.

Elle fait valoir en second lieu que ni les article 812 et 813 du code civil, ni les articles 493 et suivants du même code n’imposent au requérant de faire apparaître clairement dans sa requête en quoi la mesure sollicitée exige une dérogation à la règle de la contradiction, ni au juge d’en faire état dans son ordonnance, que la seule condition imposée par le texte est l’existence de circonstances exigeant que la mesure ne soit pas prise contradictoirement et non leur démonstration dans le corps de la requête et de l’ordonnance subséquente, qu’il incombe seulement au requérant de rapporter la preuve de ces circonstances dans le cadre d’une éventuelle procédure de rétractation.

Elle affirme qu’en l’espèce, s’agissant d’une suspicion d’acte de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société CAPIME avec la complicité des époux X, il était indispensable que l’huissier puisse procéder aux mesures autorisées dans des conditions garantissant la préservation des pièces détenues par la société CAPIME sans en avertir préalablement cette société.

Elle indique en troisième lieu qu’aucune instance devant le juge du fond ne pouvait faire échec à la présentation de la requête, la procédure prud’homale engagée contre monsieur E X sur le fondement de l’exécution déloyale du contrat de travail n’ayant pas la même nature qu’une action éventuelle sur le fondement de la concurrence déloyale.

Elle soutient que la mise en cause de madame A D épouse X est justifiée, les circonstance de la cause permettant de présumer une participation de celle-ci aux actes de concurrence déloyale.

Elle fait valoir par ailleurs que les mesures autorisées et validées par le juge des référés sont légalement admissibles et que c’est à juste titre que ce magistrat n’a pas annulé l’ordonnance présidentielle en son entier.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu’il sera constaté au préalable que l’ordonnance querellée comporte bien la signature du magistrat qui l’a rendu ainsi que celle du greffier ;

Que le moyen principal de nullité soulevé par les appelants ne peut donc prospérer ;

Attendu qu’il résulte des article 145 et 812 du code de procédure civile que les mesures destinées à conserver ou établir, avant tout procès, la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution d’un litige ne peut être ordonnées sur requête que lorsque les circonstances exigent qu’elles ne le soient pas contradictoirement ;

Attendu que d’une part, il appartient au requérant d’expliquer dans sa demande les circonstances justifiant une dérogation au principe de la contradiction et de produire les pièces justifiant cette dérogation, que d’autre part ces mêmes circonstances doivent également résulter de l’ordonnance et ne peuvent se justifier a posteriori dans le cadre d’une procédure en rétractation ;

Attendu en l’espèce que la société Y explique dans sa requête que monsieur E X employé par son entreprise en qualité de technico-commercial a quitté la société le 4 novembre 2010 dans le cadre d’une rupture conventionnelle du contrat de travail, que plusieurs mois après elle a appris de l’un de ses clients la société SADOSKI que celle-ci avait été démarchée courant octobre 2010 par la société CAPIME, monsieur X alors son salarié, étant présent aux côtés des dirigeants de la société CAPIME, que la société CAPIME avait ensuite vendu à ses clients du matériel concurrent pour un prix inférieur d’environ 25 % au prix pratiqué par son entreprise, qu’ainsi monsieur X avait prospecté sa clientèle pour le compte d’une société concurrente, qu’elle avait toutes les raisons de penser que monsieur X soit directement soit indirectement au travers de son épouse madame A X inscrite comme intermédiaire de commerce et la société CAPIME s’étaient livrés à son détriment à des actes de concurrence déloyale;

Qu’elle a motivé sa demande en indiquant que dans la perspective d’une action en responsabilité pour concurrence déloyale à l’encontre de la société CAPIME et des époux X, elle avait le plus légitime intérêt à faire constater les actes de concurrence déloyale par voie d’huissier de justice et à déterminer de manière précise les liens juridiques financiers et économique entre la société CAPIME d’une part, monsieur X et son épouse ou tout autre société dans laquelle les époux X auraient des intérêts d’autre part, antérieurement et postérieurement au 4 novembre 2010 ;

Qu’elle n’a pas indiqué cependant le fondement juridique de sa demande ni aucune circonstance de nature à justifier la dérogation au principe du contradictoire ;

Que les neuf pièces produites à l’appui de la requête, y compris un courrier de la société SADOSKI en date du 7 juin 2011 relatant une visite du représentant de la société CAPIME accompagné de monsieur X et son bon de commande de matériel à la société SADOSKI sont insuffisantes pour caractériser de telles circonstances ;

Attendu que l’ordonnance sur requête du 26 juillet 2011, laquelle en l’absence de dispositions particulières est réputée avoir pris à son compte la motivation de la requête, a fait droit à cette requête sans non plus faire état de circonstances susceptibles de justifier une dérogation au principe de la contradiction ;

Attendu que le président du tribunal de grande instance de LYON saisi par la SARL CAPIME et les époux X d’une demande de rétractation complète de l’ordonnance sur requête n’en a modifié que certaines dispositions ;

Attendu qu’en l’absence de mentions tant dans la requête que dans l’ordonnance des circonstances pouvant caractériser une dérogation au principe de la contradiction l’ordonnance sur requête du 26 juillet 2011 ne peut qu’être rétractée dans son intégralité ;

Que la décision querellée doit en conséquence être infirmée;

Attendu que les mesures d’exécution de l’ordonnance étant privées d’effet il convient d’ordonner la restitution aux appelants des documents saisis sans qu’ils soient nécessaires de prononcer une astreinte ;

Attendu que la société Y supportera les entiers dépens ;

Qu’elle sera condamnée à payer aux appelants conjointement la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Dit l’appel recevable.

Infirme l’ordonnance querellée et statuant à nouveau.

Rétracte dans son intégralité l’ordonnance sur requête rendue par le président du tribunal de grande instance de LYON le 26 juillet 2011.

Dit que les mesures d’exécution de cette ordonnance sur requête sont privées d’effet.

Ordonne la restitution à la SARL CAPIME de la clef usb contenant les informations recueillies par l’huissier de justice lors de ses opérations, du DVD non réinscriptible et de toutes les pièces lui appartenant donc il est fait mention dans les procès-verbaux de l’huissier.

Dit n’y avoir lieu à astreinte.

Condamne la SAS AUTOMATION MECANISATION GESTION (Y) à payer à la SARL CAPIME, monsieur E X et madame A D épouse X, ensemble la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS AUTOMATION MECANISATION GESTION (Y) à payer à la SARL CAPIME, monsieur E X et madame A D épouse X aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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