Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 12 septembre 2019, n° 17/00426

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Chronologie de l’affaire

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Cabinet Neu-Janicki · 12 septembre 2021

L'agent immobilier doit être indemnisé, par la société qui voulait acquérir les biens immobiliers, de la perte de chance de percevoir ses honoraires dès lors que le défaut de régularisation de l'acte réitératif de vente résulte de l'absence de réalisation de la condition suspensive d'obtention d'un prêt consécutive à la négligence de l'acquéreur. Pour mémoire: la Cour de Cassation considère que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut pas être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée (Cour de cassation, civile, …

 

Cabinet Neu-Janicki · 15 septembre 2019

Dans une récente décision, la cour d'appel de Lyon a considéré que l'acceptation verbale d'une offre d'achat d'un appartement avant celle d'autres tiers vaut vente parfaite, en vertu de l'article 1583 du Code civil et qu'il n'est pas possible d'y mettre fin de manière unilatérale, sans manquer à ses obligations, spécialement celle de signer la promesse de vente. En l'espèce, cette acceptation verbale a été corroborée par de nombreuses preuves indirectes. Plus précisément, selon contrat du 14 septembre 2013, Mme L-M X a donné mandat exclusif à l'agence immobilière ORPI de vendre son …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 1re ch. civ. a, 12 sept. 2019, n° 17/00426
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 17/00426
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lyon, 19 décembre 2016, N° 14/10971
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

RG : 17/00426

N° RG 17/00426 – N° Portalis DBVX-V-B7B-KZSY Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 20 décembre 2016

RG : 14/10971

Z

C/

X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1re chambre civile A

ARRET DU 12 Septembre 2019

APPELANT :

M. I J Z

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par la SELARL CABINET D’AVOCATS MICHAL ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Mme L-M X

née le […] à ISSOIRE (PUY-DE-DOME)

[…]

[…]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET B C, avocat au barreau de

LYON

Assistée de Me Joseph FERRARO, avocat au barreau de VIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 15 Mai 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Juin 2019

Date de mise à disposition : 12 Septembre 2019

Audience présidée par Vincent NICOLAS, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Marion COUSTAL, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

— Aude RACHOU, président

— Françoise CLEMENT, conseiller

— Vincent NICOLAS, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Aude RACHOU, président, et par Julie BOUVARD, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Selon contrat du 14 septembre 2013, Mme L-M X a donné mandat exclusif à l’agence immobilière ORPI de vendre son appartement sis […] à Lyon 7e au prix net vendeur de 187 000 euros.

Par avenant du 2 décembre 2013, le prix de vente a été ramené à 187 000 euros, honoraires compris.

Le 31 décembre 2013, Mme X a donné mandat non exclusif à la régie Limouzi de vendre le même appartement, moyennant le prix de 173 000 euros net vendeur (181 000 euros avec la commission de l’agence).

Le 9 janvier 2014, M. I J Z, par l’entremise de la société Limouzi, a signé une offre d’achat portant sur le bien de Mme X, au prix fixé dans le mandat de vente.

Le 13 janvier suivant, celle-ci a accepté l’offre d’achat portant sur son bien, émise par les époux Y, par l’entremise d’Orpi, moyennant le prix de 185 000 euros (180 000 euros net vendeur).

Aux motifs que Mme X avait accepté son offre avant d’accepter celle des époux Y et qu’elle avait commis une faute en annulant le rendez vous pris chez un notaire pour la signature du compromis de vente, M. Z l’a assignée le 4 juillet 2014 devant le tribunal de grande instance de Lyon en indemnisation de son préjudice.

Mme X a conclu au débouté de cette demande et reconventionnellement a sollicité des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Par jugement en date du 20 décembre 2016, le tribunal a :

• rejeté l’ensemble des demandes de M. Z,

• rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par Mme X,

• condamné M. Z à payer à Mme X une somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

• condamné M. Z aux dépens,

Par déclaration transmise au greffe de la cour d’appel de Lyon le 18 janvier 2017, M. Z a relevé appel de ce jugement.

Vu ses conclusions du 2 octobre 2017, déposées et notifiées, par lesquelles il demande à la cour, au visa des articles 1134 (anciens), 1142 et suivants (anciens) et 1152 et suivants (anciens) du code civil et les articles 1582 et suivants du code civil, de :

• dire et juger recevable et bien fondé son l’appel,

• réformer le jugement,

et statuant à nouveau :

• dire et juger recevable et bien fondée sa demande formée à l’encontre de Mme X,

en conséquence :

• condamner celle-ci à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

en tout état de cause :

• la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de la SELARL Cabinet d’avocats Michal et Associés.

Vu les conclusions du 9 juin 2017 de Mme X, déposées et notifiées, par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1165 anciens du code civil, les articles 1354, 1355, 1583 et 1589 du même code, de :

• déclarer M. Z irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, et l’en débouter,

• confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

rejeté l’ensemble des demandes de M. Z,

condamné celui-ci à lui payer une somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné M. Z aux dépens,

• la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,

• infirmer la décision déférée en ce qu’elle a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

et statuant à nouveau :

• condamner M. Z à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant :

• le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

• le condamner aux entiers dépens,

• dire que, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, maître B C pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l’avance sans en avoir reçu provision.

Vu l’ordonnance de clôture du 15 mai 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité de Mme X

Pour conclure à cette responsabilité, M. Z fait valoir que :

— Mme X a accepté son offre d’achat le 9 janvier 2014 après en avoir pris connaissance le même jour ;

— elle a accepté son offre avant tout autre, dans la mesure où elle avait convenu d’un rendez vous avec le notaire pour régulariser le compromis de vente ;

— ayant accepté son offre avant même d’avoir connaissance de celle des époux Y, elle ne peut soutenir avoir eu pour seul choix d’accepter leur offre présentée par la société Orpi ;

— dès lors qu’elle a accepté son offre, la vente était parfaite et en refusant de signer avec lui le compromis de vente elle a commis une faute qui engage sa responsabilité ;

— il a perdu une chance de pouvoir acquérir un bien immobilier qui correspondait en tous points à ses critères, outre le fait d’avoir en vain consacré du temps pour visiter un bien immobilier, faire une offre et prendre attache avec un notaire.

Mme X soutient qu’elle n’a pas commis de faute, motifs pris que :

— le jour où elle a accepté l’offre d’achat des époux Y, le 13 janvier 2014, la société Limouzi ne lui avait pas encore présenté d’offre d’achat, et ne l’avait pas informée d’une visite de son bien ;

— le 9 janvier 2014, la société Limouzi lui a confirmé qu’elle n’avait effectué aucune démarche particulière en vue de présenter son bien à des acheteurs potentiels ;

— la société Limouzi a alors envisagé l’hypothèse d’un compromis et en a proposé la rédaction par son propre notaire, raison pour laquelle elle a accepté cette proposition de choisir un seul notaire, celui

de l’agence ;

— informée par elle-même de l’imminence d’une proposition d’achat émanant de la société Orpi, la société Limouzi lui a fait savoir qu’elle était en mesure de proposer un acquéreur et qu’un compromis pourrait être signé en l’étude de Me F, notaire ;

— cependant, l’offre d’achat qu’elle produit n’a jamais été portée à sa connaissance et elle ne lui a présenté aucune offre ferme et certaine, avant celle qui lui a été présentée par l’entremise de la société Orpi

— son seul choix a donc été d’accepter la première proposition ferme présentée par la société Orpi.

Mme X conteste ensuite l’existence du préjudice de M. Z, au motif qu’il n’établit pas que l’appartement correspondait à ses critères, alors qu’il n’est pas prouvé qu’il l’a visité.

Elle considère que la perte de chance alléguée par M. Z est hypothétique, dans la mesure où la société Limouzi, professionnelle de la vente immobilière, ne pouvait ignorer qu’en cas de concours d’offres, l’exclusivité dont bénéficiait la société Orpi l’aurait empêchée de réaliser la vente par son intermédiaire.

Elle soutient aussi que la faute qui lui est reprochée n’a pas de lien de causalité avec le préjudice allégué, dès lors que ce lien a été rompu par la carence de la société Limouzi qui n’a pas exécuté son mandat en ne portant pas à sa connaissance l’offre d’achat de M. Z.

****

Sur ce :

M. Z produit une attestation rédigée par Mme D A, ancienne salariée de la société Limouzi, aux termes de laquelle celle-ci déclare qu’il a fait une offre le 9 janvier 2014 qui a été acceptée sans condition par Mme X.

Il produit aussi un procès-verbal de constat établi par un huissier de justice le 28 janvier 2014 à la demande de la société Limouzi aux termes desquelles l’huissier a relevé des messages SMS entre Mme X et Mme A enregistrés dans le téléphone de celle-ci. Il ressort de deux messages du 9 janvier 2014 que Mme A propose à 18h26 à Mme X de choisir comme notaire celui de l’agence et que celle-ci lui donne son accord quelques minutes plus tard.

M. Z fournit ensuite une attestation du notaire choisi pour établir la promesse de vente, M. E F. Il ressort de cette attestation que celui-ci a été contacté le 10 janvier 2014 par Mme A en vue de la fixation d’un rendez-vous pour la signature d’un compromis de vente entre Mme X et M. Z.

Ce notaire précise aussi dans son attestation que suite à un échange téléphonique avec le vendeur et l’acquéreur, le rendez-vous a été fixé au 14 janvier à 17 h en son étude.

M. Z fournit aussi le projet de promesse de vente établi par ce notaire dans lequel il est désigné comme étant l’acquéreur.

Il ressort par ailleurs d’un mail adressé par Mme X à Mme A le 13 janvier 2014 à 9h49, et de quatre messages relevés par l’huissier de justice dans le téléphone portable de Mme A envoyés le 13 janvier à 10h26, 10h32, 10h33 et 10h39 que Mme X a transmis à la régie Limouzi le diagnostic amiante de son appartement et qu’elle a demandé à Mme A l’adresse de l’étude notariale.

Enfin, Mme X produit un courrier de Mme G H, de l’agence Orpi, en date du 25 février 2014, duquel il ressort que cette personne a pris contact le 13 janvier 2014 avec elle pour un rendez vous l’après midi à 14 h en vue de la présentation de la proposition d’achat des époux Y émise le 8 janvier précédent.

Il résulte de tous ces éléments que Mme X avait accepté l’offre de M. Z avant de signer le 13 janvier 2014 à 14 h l’offre des époux Y, puisque dès le 9 janvier 2013 elle avait convenu d’un rendez-vous, fixé au 14 janvier 2013 avec le notaire choisi pour signer le compromis, que celui-ci avait établi un projet d’acte et qu’elle avait confirmé son accord dans la matinée du 13 janvier en demandant le lieu du rendez-vous.

Par ailleurs, Mme X a envoyé un mail le 13 janvier 2014 à 15 h 30 à la société Limouzi, soit après avoir accepté l’offre des époux Y, mail ayant pour objet l’annulation du compromis et rédigé comme suit : 'je fais suite à mon appel téléphonique de ce jour. Je vous ai laissé un message, concernant la signature du compromis de demain, que j’annule. Je vous remercie sincèrement du travail effectué pour moi, et je suis sincèrement désolé de vous faire faux bond'.

Ce courrier confirme ainsi que Mme X avait bien conscience de son engagement envers M. Z.

Dans ces conditions, dès lors qu’elle a accepté verbalement l’offre d’achat de M. Z avant celle des époux Y, la vente portant sur son appartement était parfaite, en vertu de l’article 1583 du code civil et elle ne pouvait y mettre fin de manière unilatérale, sans manquer à ses obligations, spécialement celle de signer la promesse de vente.

Elle a donc commis une faute contractuelle à l’égard de M. Z qui a un lien de causalité direct et certain avec le dommage allégué par celui-ci.

A ce sujet, les éléments du dossier établissant que la société Limouzi a présenté l’offre d’achat de M. Z à Mme X, le moyen invoqué par celle-ci pour conclure à l’absence de lien de causalité entre la faute qui lui est reprochée et le dommage allégué est inopérant.

Contrairement à ce qu’elle soutient, M. Z, ainsi qu’il en justifie en produisant le témoignage de son père et de sa soeur, avait visité son appartement avant de présenter son offre d’achat. La faute qu’elle a commise a fait perdre à l’appelant d’une manière certaine une chance réelle et sérieuse d’être propriétaire de ce bien, aucun élément du dossier, et notamment les conditions suspensives stipulées dans le projet de promesse de vente, ne mettant en effet en évidence la présence d’éléments rendant probable une impossibilité de réitération de la vente par acte authentique.

Le fait que l’exclusivité accordée à la société Orpi empêchait Mme X de vendre son bien par l’intermédiaire de la société Limouzi n’a pas pour conséquence de rendre hypothétique la perte de chance, l’existence de celle-ci ne dépendant pas en effet du comportement de Mme X à l’égard de l’un de ses mandants.

Au vu des éléments du dossier, la perte de chance doit être évaluée à 80 %. S’y ajoute le préjudice causé à M. Z par les démarches effectuées qu’il a effectuées en pure perte en vue de l’acquisition du bien.

Il y a donc lieu de réparer son dommage par l’allocation d’une indemnité de 6 000 euros qui portera intérêts à compter du jugement à titre de dommages et intérêts complémentaires.

Sur la demande de dommages-intérêts de Mme X pour procédure abusive

Dès lors que Mme X est partie perdante, M. Z n’a pu faire dégénérer en abus son

droit d’agir en justice.

Il convient par suite de confirmer le jugement en ce qu’il la déboute de ce chef de sa demande.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement, sauf en ce qu’il déboute Mme X de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Déclare Mme X responsable du dommage causé à M. Z ;

En conséquence, la condamne à lui payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts, avec les intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016, date du jugement ;

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X et la condamne à payer à M. Z la somme de 2 000 euros ;

La condamne aux dépens de première instance et d’appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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