Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 2, 26 février 2019, n° 17/00986

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, ch. soc.-sect. 2, 26 févr. 2019, n° 17/00986
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 17/00986
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Metz, 13 mars 2017, N° F15/01412
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n° 19/00031

26 Février 2019

---------------------

RG N° 17/00986 -

N° Portalis DBVS-V-B7B-EN2Z

-------------------------

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de METZ

14 Mars 2017

F 15/01412

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 2

ARRÊT DU

Vingt six février deux mille dix neuf

APPELANT

 :

Monsieur M-P X

[…]

[…]

Représenté par Me Agnès BIVER-PATE, avocat à la Cour d’Appel de METZ (bénéficie d’une Aide Juridictionnelle Totale N°17/3551 du 09/05/2017 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉES

 :

SARL DEVVA prise en la personne de Me Q I-J ès qualités de liquidateur judiciaire

[…]

[…]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat à la Cour d’Appel de METZ, avocat postulant et

Me Bertrand BECKER, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant

Maître E C ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL DEVVA

[…]

[…]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat à la Cour d’Appel de METZ, avocat postulant et Me Bertrand BECKER, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant

Association AGS-CGEA DE NANCY

[…]

[…]

[…]

Représentée par Me Guy REISS, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Véronique LE BERRE, Conseiller, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Véronique LE BERRE, Conseiller

Mme Laëtitia WELTER, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme F G

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été avisées du prorogé du délibéré, dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Madame Véronique LE BERRE, Conseiller en remplacement de Madame Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre empêchée, et par Monsieur Florian THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur M-P X a été embauché par la SARL DEVVA par contrat à durée indéterminée en date du 01/10/2009 en qualité de chef d’exploitation.

Par lettre en date du 02 novembre 2012, Monsieur X a fait l’objet d’une mise à pied conservatoire et a également été convoqué à un entretien préalable au licenciement.

Il a été licencié pour faute lourde le 22 novembre 2012.

Il lui est reproché :

• D’avoir omis de réaffecter M. H sur un autre chantier pour la journée du 29 octobre 2012 ;

• D’avoir le 29 octobre 2012, affecté trois salariés en contrat fixe et un intérimaire au déménagement de M. Y mais que l’intérimaire n’était pas présent sur le chantier le 30 octobre 2012 ;

• D’avoir présenté un véhicule pour contrôle technique le 16 octobre 2012 au lieu du 19 septembre 2012 ;

• D’avoir dépassé les dates de réalisation des vidanges de trois véhicules et des contrôles hydrauliques de trois montes-meubles ;

• De n’avoir pas délivré à l’une des équipes un formulaire d’attestation d’activités ;

• D’avoir pénétré dans l’enceinte de la Société durant la nuit du 5 au 6 novembre 2012 et d’avoir à cette occasion fait disparaître certains fichiers d’exploitation.

Par acte introductif d’instance enregistré au greffe le 22 juillet 2013, Monsieur X a saisi le Conseil de prud’hommes afin de voir dire et juger son licenciement abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse, et obtenir les sommes afférentes.

La SARL DEVVA quant à elle, demande à ce que le salarié soit débouté de l’ensemble de ses demandes.

Par jugement du 14 mars 2017, le Conseil de prud’hommes de METZ a statué ainsi qu’il suit :

• DIT que le licenciement de Monsieur X ne repose pas sur une faute lourde mais sur une faute grave

• FIXE la créance de Monsieur X sur la SARL DEVVA prise en la personne de son représentant légal Maître I J es qualité de mandataire judiciaire et Maître Z es qualité d’administrateur judiciaire aux sommes suivantes :

—  1473,70 euros bruts au titre des congés payés

—  500,00 euros nets au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

• ORDONNE la remise à Monsieur X de l’attestation POLE EMPLOI rectifiée au regard du présent jugement,

• ORDONNE pour ce faire une astreinte de 20€ par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification du présent jugement,

• SE RÉSERVE le droit de liquider l’astreinte

• DÉBOUTE Monsieur X du surplus de sa demande

• DIT que lesdites sommes seront inscrites sur l’état des créances déposé au greffe de la Chambre Commerciale auprès du Tribunal de Grande Instance de Metz conformément à l’article 625-6 du Code de commerce

• DIT que le présent jugement est opposable au CGEA de NANCY dans les limites prévues aux articles L3253-8 et suivants du Code du travail et de l’article L621-48 du Code de commerce,

• ORDONNE l’exécution du présent jugement sur le fondement de l’article R1454-28 du Code du travail et le salaire brut moyen de Monsieur X est de 2 526,67 euros bruts

• DÉBOUTE la partie défenderesse de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

• DIT que les dépens de l’instance et les frais d’exécution du présent jugement seront prélevés sur l’actif de la SARL DEVVA

Par déclaration formée par voie électronique au greffe le 30 mars 2017, Monsieur X a régulièrement interjeté appel dudit jugement qui lui a été notifié le 22 mars 2017 au vu de la copie de la minute du jugement.

Par jugement du 05 août 2016, le Tribunal de Grande Instance de Metz a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la SARL DEVVA, Maître I-J ayant été désignée Mandataire liquidateur.

Par ses dernières conclusions en date du 1er août 2017, notifiées par voie électronique le 02 août 2017, Monsieur X demande à la Cour de

• DIRE ET JUGER l’appel formé par M. X recevable et bien fondé,

En conséquence,

• INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de METZ le 14 mars 2017,

• DIRE ET JUGER que le licenciement de M. X est abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

• A la créance de M. X sur la SARL DEVVA, prise en la personne de Maître I J, mandataire judiciaire, et de son administrateur judiciaire désigné à :

—  1 116, 78 € à titre d’indemnité légale de licenciement,

—  5 154, 40 € brut à titre d’indemnité de préavis,

—  515, 44 € brut à titre de congés payés sur préavis

—  25 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif

—  1 942, 08 € brut à titre de rappels de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée

—  194, 20 € brut à titre de congés payés sur rappels de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée,

—  2 286, 31 € brut à titre de congés payés

• CONDAMNER le CGEA ' AGS à garantir le paiement desdites sommes,

• ORDONNER la remise par l’employeur des bulletins de salaire et de l’attestation ASSEDIC EMPLOYEUR correspondant aux sommes susvisées et ce, sous peine d’une astreinte de 20 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir,

• ORDONNER l’exécution par provision de la décision à intervenir,

• A, au besoin condamner la SARL DEVVA, prise en la personne de Maître I J, mandataire judiciaire, et de son administrateur judiciaire désigné, aux dépens, et à payer à M. X :

— La somme de 1 000€ sur le fondement de l’article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle pour l’instance devant le Conseil de Prud’hommes,

— La somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle pour l’instance devant la Cour d’Appel,

Par ses dernières conclusions en date du 05 septembre 2017, notifiées par voie électronique le même jour, La SCP I-J & B, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL DEVVA, demande à la Cour de :

• REJETER l’appel de Monsieur M-P X, le dire mal fondé

• RECEVOIR l’appel incident de la SELARL I-J & B, prise en la personne de Maître Q I-J, ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL DEVVA, et le dire bien fondé

• INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’Hommes de METZ le 14 mars 2017 en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau,

• DIRE ET JUGER que le licenciement pour faute lourde de Monsieur X est légitime et bien fondé

• DÉBOUTER Monsieur X de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions y compris celles formulées à hauteur d’appel

• CONDAMNER Monsieur X à payer à Maître I J, ès qualités, la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile

Par ses dernières conclusions en date du 21 septembre 2017, notifiées par voie électronique le même jour, le CGEA AGS de Nancy demande à la Cour de :

• Dire et juger l’appel mal fondé

En conséquence,

• Statuer ce que de droit sur la demande, par appel incident des organes de la procédure collective, de dire et juger que le licenciement est justement intervenu pour faute lourde

Subsidiairement :

• Confirmer le jugement en tant qu’il a été jugé que le licenciement est justement intervenu pour faute grave

• Débouter en conséquence Monsieur X de toutes ses demandes, fins et prétentions.

Subsidiairement :

• Dire et juger que le CGEA n’est redevable que des seules garanties légales

• Dire et juger que le CGEA n’est redevable de sa garantie que dans les limites précises des dispositions légales des articles L3253-8 et suivants du Code du travail et de l’article L621-48 du Code de commerce

• Dire et juger que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l’article D3253-5 du Code du travail

• Dire et juger qu’au regard du principe de subsidiarité, le CGEA ne doit sa garantie qu’autant qu’il n’existe pas de fonds disponibles dans la procédure collective

• Dire et juger que le CGEA ne garantit que les montants strictement dus au titre de l’exécution du contrat de travail

• Débouter Monsieur X de sa demande formulée au titre de l’article 700 du CPC

• Dire et juger qu’en application de l’article L621-48 du Code de commerce, les intérêts cessent de courir à compter du jour de l’ouverture de la procédure collective

• Condamner Monsieur X aux éventuels frais et dépens

Par courrier du 28 août 2017, Maître E C demande sa mise hors de cause dans cette

affaire dans la mesure où ce dossier a été précédemment géré par Maître K Z ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL DEVVA, mais ne lui a pas été transféré. Il n’a donc pas qualité à intervenir dans cette procédure.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2018.

MOTIFS DE LA DECISION :

A titre liminaire, il sera relevé que par jugement en date du 5 août 2016, la chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de Metz a mis fin à la période d’observation et prononcé la liquidation judiciaire de la SARL DEVVA.

Ce tribunal a désigné la SELARL I J et B prise en la personne de Maître I J en qualité de liquidateur et a mis fin aux fonctions de Maître Z, administrateur judiciaire, étant précisé que suite au décès de Maître Z, la SCP C avait été désignée pour lui succéder en toutes ses fonctions.

Il y a lieu dès lors de mettre hors de cause Maître C, le Tribunal de Grande Instance de Metz ayant mis fin aux fonctions d’administrateur judiciaire de Maître Z avant son décès.

Par ailleurs, le liquidateur de la SARL DEVVA, Maître I J ainsi que le CGEA- AGS de Nancy ont été mis en cause et ont déposés des conclusions, de sorte que la procédure est régulière à leur encontre.

Cependant, aux termes de l’article L622-22 applicable à la liquidation judiciaire par l’article L641-3 du Code de Commerce, l’instance en cours ne peut tendre qu’à la constatation des créances et à la fixation de leur montant .

Sur la faute lourde :

A titre liminaire, il sera relevé que la faute lourde produit les mêmes effets que la faute grave du point de vue indemnitaire, les salariés licenciés pour faute lourde n’étant plus exclus du bénéfice de l’indemnité compensatrice de congés payés au titre de la période de référence en cours lors de la rupture du contrat de travail, par application de la décision du Conseil Constitutionnel QPC du 2 mars 2016, n°2015-523.

Par ailleurs, la faute lourde est celle qui, comme la faute grave, résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis.

Elle suppose, en outre, l’intention de nuire du salarié.

L’employeur qui invoque la faute lourde pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l’espèce, la lettre de licenciement du 22 novembre 2012 est ainsi rédigée :

« Vous aviez planifié initialement une équipe pour une tournée débutant le 29/10 pour un retour prévu le 02/11/2012, équipe constituée notamment de M. H, salarié en contrat à durée déterminée.

Au vu du terme de son contrat de travail au 31/10/2012, vous avez donc modifié le planning de cette tournée.

Cependant, après rectification, vous avez omis de réaffecter Mr H sur un autre chantier pour la journée du 29/10/2012 lui attribuant alors un jour de repos, sortant par conséquent de notre informatique le matricule du salarié de la liste du personnel disponible.

Or, à cette même date, nous avons été dans l’obligation de faire appel à du personnel intérimaire afin de combler notre planning, alors que Mr, H n’était ni occupé et n’avait pas encore réalisé son quota d’heures’au 27/10/2012 inclus (soit 146h52 du 01 au 27/10/2012), quota que vous nous avez pourtant confirmé avoir été atteint lors de notre entretien.

Concernant le déménagement de Mr Y L (Départ/Arrivée à Thionville), dossier n°21204168, a été programmé au devis, au chargement et à la livraison, 4 hommes pendant 4 heures pour chacune de ces interventions. Vous avez donc planifié le 29/10, trois salariés en contrat fixe et un intérimaire.

Cependant, le 30/10/2012, à l’arrivée de notre équipe sur le chantier, la personne en contrat intérimaire n’y était pas présente. Nous avons donc été dans l’obligation de procéder à une demande en personnel le matin même en toute urgence, entraînant du retard sur ce chantier. Lors de notre entretien, vous avez effectivement reconnu avoir oublié d’établir cette commande.

Nous avons également constaté que le contrôle Technique du véhicule immatriculé BV-968-CX devait être effectué avant le 19/09/2012. En effet, à la suite d’une vérification ponctuelle de la base de données par Mr M N O, votre Directeur, ce véhicule n’a été présenté que le 16/10/2012.

Ces faits vous ayant été exposés lors de notre entretien, vous nous avez précisé, à notre grand étonnement eu égard à votre ancienneté dans notre entreprise, que vous pensiez que ce type de contrôle était à réaliser tous les deux ans. Il est néanmoins de votre responsabilité en tant que «Chef d’exploitation de connaître, entre autre, la législation routière mais aussi d’assurer un suivi constant des échéances, le programme informatique mis à votre disposition le permettant aisément.

Vous deviez nécessairement en avoir connaissance puisque vous éditez chaque jour le «Planning Journalier» regroupant à la fois l’organisation par chantier des véhicules et équipes, que par ailleurs vous affichez pour consultation, mais également la liste des absences en personnel, la liste des échéances par véhicule des vidanges et contrôles techniques ainsi que la liste des échéances par salarié des visites médicales.

L’utilité que vous portez apparemment à ces listes semble être du recyclage puisque vous préférez, comme vous nous l’avez affirmé lors de notre entretien, vous en servir pour brouillons uniquement.

De surcroît, l’analyse des fichiers de gestion employés principalement par le service exploitation, le tableau de suivi des vidanges ainsi que des contrôles hydrauliques sur nos montes-meubles ont révélé plusieurs termes échus, définis comme suit :

» Vidanges dépassées pour les véhicules immatriculés :

- […]

- BE 161 RQ dépassement de 3.024 km

- BC O30 DT dépassement de 2.127 km

Contrôles hydrauliques .des montes-meubles immatriculés BE 161 RQ / BE 911RQ / BE 379 WC, devant être effectué avant le 05/06/2012 ne sont toujours pas réalisés à ce jour.

Vous nous avez pourtant affirmé l’avoir fait mais avoir oublié de mettre à jour ledit tableau.

Or, nous vous confirmons que ces contrôles n’ont toujours pas été effectués.

Au regard du règlement (CE) 561/2006, un formulaire d’attestation d’activité est à délivrer à chaque salarié avant ou au moment de la reprise de travail consécutivement à une absence (congés payés, maladie ou autre absence).

Or, après le départ d’une de nos équipes le lundi 05/11/2012 à 4h du matin, celle-ci se rendant à proximité de Dijon, a dû faire la demande pour réceptionner par fax à notre agence sur place, ledit document pour ainsi éviter toute amende y relative.

Malgré que cette charge de travail incombe à vos fonctions, nous constatons tout de même une absence dans vos responsabilités de Chef d’exploitation.

A vos dires, lors de notre entretien, ceux-ci ne sont remplis par vos soins que lorsque vous êtes présent le matin. Ce fait n’étant pas le cas, il est pourtant porté à votre connaissance, déjà la veille, de chaque reprise de travail afin d’établir le planning journalier du lendemain.

Ce formulaire, doit pour une meilleure gestion, être préparé automatiquement à ce moment précis. Nous trouvons tout de même que votre argumentation est relativement légère considérant que la permanence du samedi matin (c’est-à-dire le 03/11/2012) a été assurée par vos soins.

Le comportement le plus stupéfiant de votre part est le fait d’avoir pénétré dans l’enceinte de notre société durant la nuit du 5 au 6 novembre 2012 sachant que votre contrat de travail était suspendu par la mise à pied conservatoire notifiée a votre encontre le 02/11/2012 par courrier recommandé et qui plus est par un certificat d’arrêt de travail.

Courant de la journée du 06/11/2012, nous avons découvert la disparition de certains fichiers d’exploitation. Nous avons donc contacté la société ONYX Informatique, notre prestataire, qui est intervenue et qui a procédé le 08/11/2012 à des recherches. Au recueil de leur diagnostic, nous avons alors demandé à la société SERVIATEC d’examiner les contrôles d’accès informatisés de nos bâtiments. Leur analyse du 09/11/2012 a démontré que le badge n°7, vous étant attribué, a servi à ouvrir la porte du garde-meubles, la partie d’accès au bureau par le garde meubles et la porte du bâtiment du service exploitation, respectivement à 23h37, 23h38 et 0h03. Après rapprochement, ces horaires correspondent aux heures de manipulation et destruction des fichiers en question.

Au cours de notre entretien, vous nous avez avoué vous être introduit la nuit du 5 au 6 novembre 2012 dans nos locaux afin de déplacer et de récupérer des fichiers sur votre clé de stockage personnelle (dite USB) mais que celle-ci ne contenait que des dossiers « personnels ».

Néanmoins, le rapport établi par la société ONYX Informatique démontre à la fois des déplacements et des destructions de dossiers et fichiers ainsi que la suppression de données dans d’autres fichiers. Ceux-ci, utilisés principalement par le service exploitation, sont situés dans le dossier « Partage exploitation du lecteur; réseau « D: », dont le détail est repris dans le rapport de la société ONYX Informatique.

Ce qui est encore le plus surprenant dans vos agissements a été de vous être servi, pour réaliser ces méfaits, du « login d’un ancien salarié de la société (ayant assuré les fonctions de Chef d’exploitation), login connu par vous pour l’avoir utilisé par le passé au moment de votre embauche et dans l’attente de recevoir votre login personnel, afin de vous connecter à notre système informatique. Ces faits relèvent d’un caractère volontaire d’usurpation d’identité.

Nous vous avons tout de même précisé que s’introduire à cette heure tardive au regard de la procédure à votre encontre, s’apparentait à un comportement singulier, malhonnête et orchestré à des fins malveillantes. Pourtant selon vous, ce type de procédé serait normal pour avoir déjà agi de la sorte à plusieurs reprises sans pour autant en avoir avisé votre Directeur, Monsieur O M-N, qui n’a d’ailleurs pas souvenance, ni eu connaissance de vos précédentes interventions nocturnes. Quoi qu’il en soit celles-ci ne relevaient en rien d’un quelconque caractère professionnel ou pour des besoins de service, mais bien pour votre compte personnel.

Nous vous avons également rappelé les limites dans l’usage du matériel professionnel à des fins personnelles et privées.

Ces faits constituent une faute lourde. »

Le conseil de prud’hommes a qualifié de faute grave le fait pour Monsieur M-P X d’avoir pénétré dans l’entreprise sans autorisation pendant une mise à pied conservatoire mais non de faute lourde, en l’absence de preuve d’usurpation d’identité par le salarié dans l’accès au fichier informatique puisque selon les relevés de la société SERVIATEC, une autre personne que Monsieur M-P X, soit Monsieur D, a pénétré dans les locaux de l’entreprise à 23h50 ce même jour, sans qu’il soit possible de déterminer l’heure de sortie.

Il doit être rappelé que la faute lourde est celle qui révèle une intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif.

L’intention de nuire ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise.

Autrement dit, la faute commise par le salarié doit avoir pour but recherché, et non simplement pour effet, de causer un dommage à l’employeur.

L’acte doit être volontaire et prémédité.

En l’espèce, Monsieur M-P X s’est introduit de nuit, avec son badge dans les locaux de l’entreprise alors qu’il était en congés de maladie et en mise à pied conservatoire, de sorte que son intrusion, au mépris de la sanction disciplinaire prise par l’employeur constitue une faute grave.

Cependant, si Monsieur M-P X reconnaît avoir pénétré dans l’entreprise, il explique sa présence par sa volonté de récupérer ses documents et papiers personnels (CV, lettre de motivation, etc.) et conteste avoir utilisé le nom de son collègue pour ouvrir une session et effacer des fichiers informatiques de partage.

Par ailleurs, l’employeur s’il prouve une intrusion dans ses fichiers informatiques à l’heure exacte où Monsieur M-P X se trouvait dans l’entreprise, soit le 6 novembre 2012 entre 0h03 et 0h08, ne rapporte cependant pas la preuve de ce que cet effacement des fichiers ait été réalisé dans le but de lui causer un dommage et non dans le but de détruire les fichiers qui servent de support au licenciement de Monsieur M-P X, s’agissant selon le rapport ONYX, de la modification des fichiers« Chauffeurs + parc, », « planning congés 2012 », « planning congés 2013 » et « suivi vidange alerte ».

L’intention de nuire à l’entreprise n’étant pas rapportée par l’employeur, il y a lieu de requalifier le licenciement de Monsieur M-P X en licenciement pour faute grave.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera dès lors confirmé sur ce point.

Monsieur M-P X a sollicité la somme de 2 286, 31 € brut à titre de congés payés.

Le montant alloué par le conseil de prud’hommes à ce titre soit 1473,70 € correspond à la fraction de

congés payés que Monsieur M-P X n’a pu prendre soit 12 jours 90.

Il y a lieu de confirmer également sur ce point le jugement entrepris.

Sur la remise des documents :

Il sera fait droit à la demande de Monsieur M-P X tendant à la remise de l’attestation POLE EMPLOI conforme à la présente décision mais sans assortir d’ores et déjà cette remise d’une astreinte.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera dès lors infirmé sur ce dernier point.

Sur la garantie de l'UNEDIC, délégation CGEA AGS de Nancy

La créance de Monsieur M-P X étant née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective concernant la SARL DEVVA, l’UNEDIC, délégation CGEA-AGS de NANCY, devra sa garantie, dans les conditions et limites prévues par les lois et règlements applicables en matière de garantie des salaires.

Sur les dépens :

Monsieur M-P X, partie qui succombe à hauteur d’appel, sera condamné aux dépens d’appel.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera confirmé en ce qu’il a mis les dépens de première instance à la charge de la SARL DEVVA, partie qui succombe en première instance

Ces dépens de première instance seront traités en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL DEVVA.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

L’équité n’impose pas de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile à hauteur de Cour au profit de la SARL DEVVA, en liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort,

MET HORS DE CAUSE Maître E C,

CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Metz du 14 mars 2017 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a assorti la remise de l’attestation POLE EMPLOI à Monsieur M-P X d’une astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 15e jour suivant la notification du jugement,

INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes sur ce seul point,

Et Statuant à nouveau,

ORDONNE à la SARL DEVVA, prise en la personne de son liquidateur, Maître Q I-J, de remettre à Monsieur M-P X l’attestation POLE EMPLOI en conformité avec le présent arrêt,

DIT n’y avoir lieu à assortir cette remise d’ores et déjà d’une astreinte,

Y ajoutant,

Dit que la garantie de l’UNEDIC ' délégation AGS CGEA de Nancy- n’a vocation à s’appliquer que dans les conditions fixées par les articles L.3253-8 et suivants du code du travail et conformément à l’article L.622-28 du code de commerce, à l’exclusion des sommes dues en application de l’article 700 du code de procédure civile et au titre de la liquidation d’astreinte

Dit n’y avoir lieu à condamnation, à hauteur d’appel, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de la SARL DEVVA, prise en la personne de son liquidateur, Maître Q I-J,

CONDAMNE Monsieur M-P X aux dépens d’appel.

Le Greffier, Le Conseiller,

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