Cour d'appel de Metz, 3ème chambre, 10 mars 2022, n° 20/01520

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 3e ch., 10 mars 2022, n° 20/01520
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 20/01520
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/01520 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FKP5

Minute n° 22/00115


Y, Y NÉE X


C/


A


Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THIONVILLE, décision attaquée en date du 04 Août 2020, enregistrée sous le n° 11-19-780

COUR D’APPEL DE METZ

3ème CHAMBRE – TI

ARRÊT DU 10 MARS 2022

APPELANTS :

Monsieur D Y

[…]

[…]


Représenté par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005950 du 21/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

Madame F Y née X

[…]

[…]


Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005949 du 21/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉE :

Madame C A

[…]
Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005999 du 21/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 13 janvier 2022 tenue par Madame


GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 10 mars 2022


GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :


PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre


ASSESSEURS : Madame BASTIDE, Conseiller

Monsieur MICHEL, Conseiller

FAITS ET PROCEDURE


Par acte sous seing privé du 1er août 2017, Mme C A a consenti un bail à M. D Y et

Mme F X épouse Y portant sur un local d’habitation meublé situé à Fameck moyennant un loyer mensuel de 600 euros.


Par acte d’huissier du 16 juillet 2019, elle a assigné M. Y devant le juge des contentieux de la protection du tribunal d’instance de Thionville et par acte du 22 novembre 2019 elle a appelé Mme F X épouse


Y en intervention forcée aux fins de voir prononcer la résiliation du bail, ordonner l’expulsion des locataires et les voir condamner solidairement à lui verser une somme au titre de l’arriéré locatif, une indemnité d’occupation jusqu’à libération effective des lieux, des dommages et intérêts pour préjudice moral et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme Y se sont opposés aux demandes et ont sollicité à titre reconventionnel des dommages et intérêts pour eux-mêmes et ès qualités de représentants de leurs enfants mineurs Z et H Y, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


Par jugement contradictoire du 4 août 2020, le tribunal a :


- prononcé la résiliation du bail


- ordonné l’expulsion de M. et Mme Y au besoin avec l’assistance de la force publique et dit qu’il sera procédé en tant que de besoin à l’enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux loués et à leur séquestration dans un garde meuble


- condamné solidairement M. et Mme Y à verser à Mme A la somme de 10.417,87 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 31 mai 2020 et les loyers échus du 1er juin 2020 jusqu’au jugement sur la base

d’un loyer mensuel de 700 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement


- condamné solidairement M. et Mme Y à verser à Mme A une indemnité d’occupation de 700 euros par mois jusqu’à libération des lieux


- débouté Mme A de sa demande de dommages et intérêts


- débouté M. et Mme Y de leur demande de dommages et intérêts
- condamné solidairement M. et Mme Y à verser à Mme A la somme de 600 euros au titre de

l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.


Par déclaration déposée au greffe de la cour le 25 août 2020, M. Y et Mme X épouse Y ont interjeté appel de l’ensemble des dispositions du jugement sauf celle ayant rejeté la demande de dommages et intérêts de Mme A.


Par ordonnance prononcée le 8 juillet 2021, le conseiller de la mise en état a débouté M. et Mme Y de leur exception d’irrecevabilité des conclusions d’incident de Mme A pour défaut de motivation, s’est déclaré incompétent pour dire que la cour n’est pas saisie de la demande d’indemnisation et pour connaître de la fin de non recevoir tendant à l’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts formée par M. et Mme


Y pour le compte de leurs enfants mineurs.


Aux termes de leurs dernières conclusions dont le dispositif doit être expurgé des mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, M. et Mme Y demandent à la cour d’infirmer le jugement et de :


- ordonner la suspension du paiement du loyer dans la période de mai 2019 au 30 juin 2021 date de la restitution des clés et la suppression de l’avance sur charges


- condamner Mme A à leur transmettre des quittances pour l’ensemble des loyers payés et un décompte des charges locatives comprenant l’ensemble des justificatifs, à compter du 1er août 2017 jusqu’au

30 juin 2021 sous astreinte de 50 euros par jour de retard un mois après la signification de l’arrêt à intervenir


- condamner Mme A à leur payer la somme de 2.000 euros au titre du remboursement des charges payées et de l’absence de quittance


- rejeter le moyen d’irrecevabilité invoqué par Mme A quant à leur demande formée pour leurs enfants mineurs


- condamner Mme A à leur payer à chacun la somme de 3.000 euros au titre de dommages et intérêts et la même somme en leur qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs Z et H Y, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt


- débouter Mme A de l’ensemble de ses demandes


- la condamner à leur payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel comprenant les frais d’huissier des 3 février 2020 et 31 août 2021.


Les appelants exposent que l’appartement loué est situé au premier étage alors que la bailleresse occupe le rez-de-chaussée du même immeuble, que les factures d’eau sont contestées en l’absence de compteur individuel d’eau, qu’ils ont longtemps réglé une avance sur charges de 100 euros par mois sans justificatif ni quittance, que le 14 janvier 2019 la propriétaire a coupé l’alimentation en eau de l’appartement au motif qu’une facture n’aurait pas été réglée, qu’elle l’a rétablie le 17 janvier 2019 mais à très bas débit puis par la suite de manière irrégulière à débit normal et qu’elle a également coupé l’alimentation en électricité 13 août 2019 puis le gaz le 10 octobre 2019. Ils précisent que par ordonnance de référé du 7 octobre 2019, le président du tribunal d’instance de Thionville a condamné Mme A à rétablir l’alimentation en eau et en électricité, à leur délivrer une clé permettant la fermeture de l’appartement ainsi qu’à mettre à leur disposition une boîte aux lettres à leur usage exclusif et que la bailleresse a refusé d’exécuter cette décision.


Ils indiquent qu’en raison d’un chauffage insuffisant des moisissures sont apparues au plafond des différentes pièces de l’appartement et que le volet électrique du salon est resté en position fermée pendant plus d’un an et demi, que leur appartement n’est toujours pas alimenté en électricité, eau et gaz et qu’ils n’ont ni boîte aux lettres, ni sonnette, ni clé pour la porte d’entrée comme l’a constaté à plusieurs reprises un huissier de justice.


Ils en déduisent que leur appartement ne remplit pas les conditions légales d’un logement décent alors qu’ils vivent avec deux jeunes enfants de 14 et 11 ans.


Ils ajoutent avoir été expulsés en exécution du jugement dont appel, les clés ayant été remises à la bailleresse le 1er juillet 2021.


Les appelants exposent avoir cessé de payer leur loyer à compter du mois d’avril 2019 par application de

l’exception d’inexécution, faute par la bailleresse de respecter son obligation de leur délivrer un logement décent. Ils précisent avoir payé, entre août 2017 et avril 2019, 100 euros par mois au titre des charges, soit

2.000 euros au total sans jamais obtenir une quittance ou un justificatif de charges et sollicitent le remboursement de cette somme. Ils sollicitent également des dommages et intérêts pour le préjudice subi, précisant que le confinement au sein du logement insalubre a été éprouvant, que leurs enfants n’ont pu honorer les cours à distance faute d’électricité et qu’ils sont régulièrement malades et que leur préjudice a perduré après le jugement.


Ils ajoutent que le logement était très sale à l’entrée dans les lieux, que l’absence d’état des lieux procède de la responsabilité de la bailleresse, qu’ils ont réglé la somme de 800 euros à titre de dépôt de garantie, qu’ils ont tenté de restituer un logement propre malgré l’absence d’eau et d’électricité et qu’à leur départ l’huissier de justice qui a constaté la carence de la bailleresse, n’a relevé aucune dégradation. Ils prétendent que Mme


A a détérioré elle même les wc, le meuble de la salle de bains et les robinets de la cuisine pour leur en imputer la responsabilité, que le constat d’état des lieux dressé par huissier de justice le 16 juillet 2021 n’est pas contradictoire, qu’il ne leur est pas opposable et que le devis de réparation produit aux débats est de pure complaisance.


Les appelants soutiennent enfin que la demande de dommages et intérêts pour leurs enfants est recevable, que la déclaration d’appel indique expressément que le jugement est contesté en ce qu’ils les a déboutés de

l’ensemble de leurs demandes, lesquelles s’entendent de toutes les demandes qu’ils peuvent faire pour eux-mêmes et leurs enfants mineurs dont ils sont les seuls représentants légaux.

Mme A demande à la cour de débouter M. et Mme Y de l’ensemble de leurs demandes et de :


- constater que le rejet de la demande de dommages et intérêts faite par M. et Mme Y pour leurs enfants mineurs ne figure pas dans la déclaration d’appel et que la cour n’est pas saisie de ce chef du jugement


- déclarer la demande de dommages et intérêts faite par M. et Mme Y pour le compte de leurs enfants mineurs irrecevable


- confirmer le jugement en toutes ses dispositions


- condamner solidairement M. et Mme Y à lui payer la somme de 18.200 euros correspondant aux sommes dues pour la période du 1er juin 2019 au 1er juillet 2021 avec intérêts au taux légal à compter de la demande


- débouter M. et Mme Y de leur demande de remise sous astreinte des quittances de loyer


- les condamner aux dépens d’appel.


Elle soutient que M. et Mme Y ont interjeté appel du jugement uniquement en leur nom et pour leur compte et non en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs, de sorte que la demande de dommages et intérêts qu’ils forment à hauteur de cour pour le compte de leurs enfants mineurs n’est pas recevable.


Elle expose que le loyer a été fixé à 600 euros par mois, qu’il a été convenu qu’une somme de 100 euros par mois serait payée par les locataires au titre des charges récupérables, que le logement comporte une alimentation en eau, en gaz, en électricité et un système de chauffage en parfait état de fonctionnement mais que la difficulté réside dans la fourniture des consommables lesquels doivent être payés faute de quoi il n’y a plus de fourniture. Elle prétend avoir rétabli l’alimentation en eau et en électricité après l’ordonnance de référé du 7 octobre 2019 mais que postérieurement, l’absence de paiement par les locataire des loyers et charges l’a empêchée de faire face au paiement des factures de fourniture y compris pour elle-même.


L’intimée fait valoir que les appelants ne payent plus les loyers et l’avance sur charges depuis le mois d’avril

2019, qu’ils n’ont pas régularisé les charges pour l’année 2018 et qu’ils lui reprochent de ne pas les fournir à ses frais en eau, gaz et électricité. Elle rappelle que les locataires ont bénéficié à compter de la location de

l’appartement de cette fourniture, qu’ils ne peuvent soutenir avoir ignoré la teneur de la provision sur charges et que la somme de 2.000 euros qu’ils ont versée à ce titre n’est pas indue. Elle soutient que pour pouvoir solliciter valablement la remise des quittances de loyer M. et Mme Y doivent justifier du paiement des loyers et des charges, qu’ils sont les seuls responsables des troubles de jouissance qu’ils allèguent de sorte que leur demande de dommages et intérêts doit être rejetée. Elle indique enfin que la somme supplémentaire de

18.200 euros qu’elle sollicite correspond à l’indemnité d’occupation due pour la période du 1er juin 2019 au

1er juillet 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION :


Vu les écritures déposées le 15 novembre 2021 par Mme A et le 3 janvier 2022 par M. et Mme Y auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;


Vu l’ordonnance de clôture en date du 12 janvier 2022 ;

Sur la résiliation du bail


Il résulte des dispositions de l’article 7- a de la loi du 6 juillet 1989 que le locataire a notamment pour obligation principale de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.


Selon les articles 1719 du code civil et 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur a l’obligation de délivrer au preneur un logement décent, conforme à la destination convenue, en bon état d’usage et de lui en assurer la jouissance paisible. L’article 1219 du code civil dispose qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette obligation est suffisamment grave.


En l’espèce, le contrat de location prévoit un loyer de 600 euros hors charges 'à définir suivant la consommation des locataires’ et il est constant et établi par les pièces, que les parties sont convenues d’une provision sur charges de 100 euros par mois. Il est également constant qu’à compter du mois d’avril 2019, M. et Mme Y ont cessé de payer le loyer et la provision sur charges.


Les appelants ne peuvent valablement justifier l’inexécution de leur obligation de paiement des loyers et charges pendant de très nombreux mois par les coupures en alimentation d’eau, d’électricité et de gaz qu’ils allèguent. L’exception d’inexécution est conditionnée par la gravité du manquement du bailleur à son obligation de délivrance et donc à l’inhabitabilité des lieux, laquelle n’est pas démontrée. Il apparaît en effet que les coupures, dont la réalité est avérée à compter du mois de septembre 2019 soit cinq mois après que les locataires ont cessé d’exécuter leur obligation de paiement, ont été temporaires, l’avocat de M. et Mme Y indique notamment par courrier du 8 octobre 2019 que l’alimentation en gaz et en électricité a été rétablie et un procès-verbal de constat du 3 février 2020 qui évoque au contraire l’absence d’électricité et de gaz, fait état

d’alimentation en eau. En outre, il est relevé que des coupures en alimentation en eau (pièce n°12 intimée) et en gaz (pièce n°12 appelants) ont été initiées par les distributeurs, faute de règlement des factures auquel les locataires ont contribué en l’absence de paiement de leurs loyers et charges à la bailleresse qui justifie avoir été elle-même dans une situation précaire.
Le fait que les locataires n’ont pu disposer d’une boîte aux lettres individuelle ou encore d’une clé du logement

n’est pas davantage susceptible de légitimer l’exception d’inexécution du paiement du loyer, dès lors que ces manquements ne sont pas d’une gravité telle qu’ils remettent en cause l’habitabilité de l’appartement.


Il s’ensuit que M. et Mme Y sont déboutés de leur demande tendant à la suspension des loyers pendant la période située entre le mois de mai 2019 et le 30 juin 2021.


L’article 1741 du code civil dispose que le contrat de louage se résout notamment par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements.


C’est à juste titre que le premier juge a prononcé la résiliation du contrat de location liant les parties. En effet, comme il a été précédemment exposé, à compter du mois d’avril 2019, M. et Mme Y se sont abstenus, sans motif légitime et sans décision judiciaire, de procéder au règlement de leur loyer. Cette inexécution durable et définitive d’une obligation essentielle est constitutive d’un manquement grave des locataires, de sorte que le jugement est confirmé, y compris en ce qu’il a ordonné l’expulsion de M. et Mme Y et de tous occupants de leur chef et dit qu’il sera procédé en tant que de besoin à l’enlèvement des meubles et biens mobiliers.

Sur les loyers, provisions sur charges et indemnités d’occupation


L’article 1353 du code civil, dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.


Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.


En l’espèce, aucun versement effectué au titre du loyer et des charges depuis le mois de mars 2019 n’est établi ou même allégué. Il apparaît ainsi qu’au titre des loyers dûs jusqu’au 4 août 2020, date du prononcé de la résiliation, M. et Mme Y sont redevables de la somme de 9.600 euros (600 x 16).


S’agissant des charges, il est justifié d’un solde de 617, 87 euros en faveur de la bailleresse selon un décompte arrêté au 31 décembre 2018. Pour les charges récupérables exposées à compter du 1er janvier 2019, il est produit aux débats la facture d’eau afférente au premier semestre de l’année 2019, d’un montant de 164,78 euros, dont 131,82 euros à la charge des locataires selon le mode de répartition appliqué. Il est également fourni la facture d’eau du 1er semestre 2020 s’élevant à 498,94 euros soit 399,15 euros à la charge des locataires et il n’est établi la réalité d’aucune coupure de l’alimentation en eau au cours de la même période, le procès-verbal de constat d’huissier du 3 février 2020 faisant au contraire état d’alimentation en eau du logement. Pour le reste, il n’est produit aucune pièce ni décompte, de sorte que les charges récupérables postérieures au 1er janvier 2019 dûment justifiées s’élèvent à la somme de 530,97 euros dont il convient de déduire la provision sur charges de 300 euros versée par les locataires au cours des trois premiers mois de

l’année, il existe donc un solde en faveur de la bailleresse de 230,97 euros.


Au total l’arriéré de loyers et charges arrêtés au 4 août 2020, date de la résiliation du bail, s’élève à 10.448,84 euros (9.600 + 617,87 + 230,97). Les appelants sont déboutés de leur demande en paiement de la somme de

2.000 euros en remboursement des charges payées qui sont dûment justifiées par la bailleresse.


En raison de la résiliation du contrat de location, M. et Mme Y sont devenus occupants sans droit ni titre de l’appartement. En application de l’article 1240 du code civil, ils sont redevables d’une indemnité mensuelle

d’occupation égale au montant du loyer prévu par le contrat de location qui s’élève à 600 euros pour la période du 4 août 2020 au 30 juin 2021, jour de la libération des lieux, soit 6.600 euros au total. Il n’y pas lieu

d’ajouter à cette somme des provisions sur charges qui ne sont étayées par aucun justificatif et ce d’autant moins, qu’au cours de la même période l’alimentation en eau, gaz et électricité a été plusieurs fois interrompue, que la consommation a été tout à fait réduite et ne peut être évaluée en fonction des exercices précédents.


Les sommes dues par les locataires au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation s’élèvent à 17.048,84 euros. Le jugement déféré est infirmé et M. et Mme Y sont condamnés solidairement au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. et Mme Y


Selon l’article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017,

l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si

l’objet du litige est indivisible.

Mme A soutient vainement que la cour n’est pas saisie de la disposition du jugement déféré ayant rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par les locataires en leur qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs. En effet, tant dans ses motifs que dans son dispositif, le jugement rejette cette prétention sans faire de distinction entre les demandes présentées par M. et Mme Y en leur nom personnel et celles formées en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs, se rejet s’entendant donc globalement. L’acte d’appel qui reprend la formulation du dispositif à l’identique, critique expressément cette disposition globale et porte dès lors sur l’ensemble des demandes qui y sont relatives. Il s’en déduit que la cour est valablement saisie du rejet de la demande de dommages et intérêts présentée par M. et Mme Y en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs.


Par ailleurs, le fait de ne pas avoir expressément précisé dans l’acte d’appel que M. et Mme Y intervenaient comme représentants légaux de leurs enfants mineurs n’est pas de nature à les priver de la qualité

à agir en tant que tels au sens de l’article 122 du code de procédure civile. En effet, l’invocation de cette fin de non recevoir procède d’une interprétation restrictive de la déclaration d’appel alors qu’aucune de ses mentions

n’indique que les appelants exercent uniquement à titre personnel leur recours et le limitent à leurs demandes présentées à ce titre. Il est rappelé en outre qu’en application des articles 382 et suivants et 388-1 du code civil, M. et Mme Y sont les administrateurs légaux de leurs enfants mineurs et qu’ils ont dès lors qualité à les représenter dans les actes de la vie civile et en particulier dans les actions en justice. Ils sont donc déclarés recevables en leur demande de dommages et intérêts présentées pour le compte de leurs enfants mineurs.


Sur le fond, il résulte de l’article 1231-1 du code civil, que l’inexécution par le débiteur d’une obligation contractuelle donne lieu à l’allocation de dommages et intérêts lorsque ce manquement a causé un dommage à son cocontractant.


En l’espèce, comme il l’a été précédemment exposé, il ressort des pièces versées aux débats que Mme


A a failli à ses obligations de délivrance et d’assurer aux locataires une jouissance paisible des locaux telles que prévues par les articles 1719 du code civil et 6 de la loi du 6 juillet 1989. Il apparaît ainsi qu’à plusieurs reprises et indépendamment des interruptions initiés par les distributeurs, elle a de son propre chef coupé l’alimentation en énergies et eau de l’appartement loué, comme en attestent les procès-verbaux dressés par huissier de justice les 23 septembre 2019, 3 février 2020, 31 août 2020 et 30 juin 2020.


Le fait que M. et Mme Y se soient abstenus de payer leur loyer ne peut justifier la coupure volontaire par la bailleresse de l’alimentation du logement occupé par une famille. Il est également établi par les constats

d’huissier que les locataires n’ont bénéficié ni d’une boîte aux lettres à leur usage exclusif, ni d’une clé pour la porte d’entrée de leur appartement et ce malgré l’ordonnance du juge des référés du 7 octobre 2019 condamnant la bailleresse à mettre à leur disposition l’une et l’autre dans un délai de 15 jours. En revanche,

Mme A ne peut être valablement incriminée pour le blocage allégué du volet électrique du salon ou encore les traces de moisissures relevées dans l’appartement, les pièces figurant au dossier ne permettant pas de déterminer la cause de ces désordres et donc de les imputer à la bailleresse.


Les manquements de l’intimée ont nuit à la jouissance paisible des locaux qu’elle devait assurer à ses locataires, qui ont vécu avec leurs deux jeunes enfants sans pouvoir par moments se chauffer, cuisiner,

s’éclairer et dans des conditions sanitaires primaires, l’huissier de justice ayant notamment relevé la présence de jerricans d’eau dans la baignoire et de nombreux packs d’eau dans la salle de bains et la cuisine. Il appartient à la bailleresse de réparer le dommage ainsi causé aux locataires jusqu’au prononcé de la résiliation du contrat de location, soit le 4 août 2020, date à laquelle ils sont devenus occupants sans droit, ni titre.


Compte tenu des éléments dont dispose la cour, le préjudice subi par chacun des habitants de l’appartement peut être estimé à 2.000 euros.


Le jugement déféré est donc infirmé et Mme A est condamnée à payer à M. et Mme Y la somme de 2.000 euros à chacun d’eux et la somme de 2.000 euros pour chacun des enfants mineurs et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur la transmission de quittances et d’un décompte des charges


L’article 21 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le bailleur ou son mandataire est tenu de transmettre gratuitement une quittance au locataire qui en fait la demande.


Il résulte des développements qui précèdent que M. et Mme Y se sont acquittés des loyers et provisions sur charges pour la période du 1er août 2017 au 31 mars 2019. Il n’est pas justifié de la délivrance de quittances pour la même période, de sorte que Mme A doit être condamnée à leur délivrer les quittances de loyers et provisions sur charges relatives à cette période dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte de 15 euros par jour de retard passé ce délai et pendant une période de trois mois.


S’agissant des charges, Mme A a produit les justificatifs et un décompte des charges récupérables du

1er août 2017 au 31 décembre 2018. Pour la période postérieure, il est rappelé qu’il n’a été fait droit à la demande de la bailleresse au titre des charges que dans la limite des justificatifs produits, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de production de justificatifs et d’un décompte pour des charges auxquelles les intimés ne sont pas condamnés.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens


Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

M. et Mme Y, partie perdante, sont condamnés aux dépens d’appel. Pour des raisons d’équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

DÉCLARE M. D Y et Mme F X épouse Y recevables en leur demande de dommages et intérêts présentées pour le compte de leurs enfants mineurs, Z et I Y ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :


- prononcé la résiliation du bail


- ordonné l’expulsion de M. D Y et Mme F X épouse Y et de tous occupants de leur chef ainsi que de tous biens, et dit qu’à défaut de départ volontaire, la partie défenderesse pourra y être contrainte par tous moyens de droit à la suite d’un délai légal de deux mois suivant le commandement délivré par huissier de justice d’avoir à quitter les lieux


- dit qu’il sera procédé en tant que de besoin à l’enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux et à leur séquestration dans un garde meubles aux frais, risques et péril de la partie défenderesse
- condamné solidairement M. D Y et Mme F X épouse Y à payer à Mme C


A une somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile


- condamné in solidum M. D Y et Mme F X épouse Y aux dépens lesquels comprendront les frais de constat d’huissier du 3 février 2020 ;

L’INFIRME en ce qu’il a :


- condamné solidairement M. D Y et Mme F X épouse Y à payer à Mme C


A la somme de 10.417,87 euros représentant les loyers et charges impayés échus au 31 mai 2020 et les loyers échus du 1er juin 2020 jusqu’au prononcé du jugement sur la base d’un montant mensuel de 700 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement


- fixé l’indemnité d’occupation au montant des loyers et charges en cours et condamné solidairement M.


D Y et Mme F X épouse Y à son paiement au profit de Mme C A jusqu’à libération effective des lieux, soit la somme de 700 euros.


- débouté M. D Y et Mme F X épouse Y de leur demande de dommages et intérêts,


Statuant à nouveau,

CONDAMNE solidairement M. D Y et Mme F X épouse Y à payer à Mme C


A la somme de 17.048,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE Mme C A à payer à titre de dommages et intérêts à M. D Y et Mme


F X épouse Y la somme de 2.000 euros à chacun d’eux avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE Mme C A à payer à titre de dommages et intérêts à M. D Y et Mme


F X épouse Y en leur qualité de représentants légaux de Z et I Y, la somme de 2.000 euros pour chacun des enfants mineurs avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;


Y ajoutant,

DÉBOUTE M. D Y et Mme F X épouse Y de leur demande tendant à la suspension des loyers pendant la période située entre le mois de mai 2019 et le 30 juin 2021 ;

DÉBOUTE M. D Y et Mme F X épouse Y de leur demande de condamnation de

Mme C A à leur payer la somme de 2.000 euros au titre du remboursement des charges payées ;

CONDAMNE Mme C A à délivrer à M. D Y et Mme F X épouse Y les quittances de loyers et provisions sur charges pour la période du 1er août 2017 au 31 mars 2019, dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision sous astreinte de 15 euros par jour de retard passé ce délai et durant une période de trois mois ;

DÉBOUTE M. D Y et Mme F X épouse Y de leur demande tendant à la condamnation de Mme C A à leur transmettre un décompte des charges locatives comprenant

l’ensemble des justificatifs à compter du 1er août 2017 jusqu’au 30 juin 2021 ;

DÉBOUTE les parties de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. D Y et Mme F X épouse Y aux dépens d’appel.


Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de chambre à la Cour d’Appel de METZ et par Madame GUIMARAES, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LE GREFFIER LE PRESIDENT 1. J K L M

[…]
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Cour d'appel de Metz, 3ème chambre, 10 mars 2022, n° 20/01520