Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 2 février 2021, n° 18/02463

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, ch. com., 2 févr. 2021, n° 18/02463
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 18/02463
Décision précédente : Tribunal de commerce de Perpignan, 16 avril 2018, N° 2017j201
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 02 FEVRIER 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/02463 – N° Portalis DBVK-V-B7C-NU6P

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 AVRIL 2018

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN

N° RG 2017j201

APPELANTE :

SCI JACARANDAS

[…]

[…]

Représentée par Me Patrick DAHAN de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL- CALVET-REY, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

Assisté de Me VUEZ-JAUBERT, avocat au barreau des Pyrénées-Orientales, avocat plaidant

INTIMEE :

EURL X gérant : Monsieur X Y

[…]

[…]

Représentée par Me Sylvie ROUZE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

Assistée de Me Fanny LAPORTE, avocat au barreau de Montpellier, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 24 Novembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 DECEMBRE 2020, en audience publique, Madame Z-A B ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Z-A B, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, Greffier.

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES':

Selon marché de travaux visant à la construction de l’école Maso (devenue Neosup) à Perpignan, en date du 30 janvier 2014, la SCI les Jacarandas, maître d’ouvrage, a confié à l’EURL X (devenue SASU Y X) le lot n°4 – menuiseries bois pour un montant de 87 250,20 euros TTC.

Un procès-verbal de réception de travaux a été signé entre les parties le 21 juillet 2014 au terme duquel figurent des réserves relatives au lot n°4 :

«- généralité : poser les béquilles + canons sur portes

- local technique : manque plinthe

- salle P5/G4 : reprise porte entre les 2 salles

- analyse optique : reprendre coupe à l’onglet des plinthes

- magasin : reprendre coupe à l’onglet des plinthes

- P1/analyse optique : compenser plinthe.»

En septembre 2014, des désordres (phénomène de tuilage) sont apparus sur le parquet. La société X a, le 24 octobre 2014, adressé une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société d’assurances Axa, qui a organisé par le biais du cabinet Saretec, une expertise amiable au contradictoire du maître d’ouvrage ; le rapport a été terminé le 20 février 2015.

Par courrier du 9 mars 2015, la société d’assurances Axa a dénié sa garantie en l’absence de désordres de nature décennale.

Par lettre recommandée du 17 mai 2015 (avis de réception non produit), la société X a adressé à la SCI les Jacarandas une mise en demeure d’avoir à lui régler la somme de 25 562,45 euros TTC correspondant à une situation, en date du 26 novembre 2014, d’un montant de 9 395,22 euros TTC et à une situation, en date du 30 juillet 2014, d’un montant de 17 512,62 euros TTC.

Le 2 juillet 2015, la SCI les Jacarandas a procédé au règlement d’une somme de 13 286,99 euros et le 13 novembre 2015, au paiement d’une somme complémentaire de 6 493,25 euros.

Par lettre recommandée du 9 juin 2016 (avis de réception non produit), la société X a sollicité le versement de la somme de 8 308,86 euros TTC, déduction faite du coût des seuils de porte, auquel la SCI les Jacarandas s’est opposée par courrier en réponse du 17 juin 2016.

Saisi par acte d’huissier du 22 mai 2017 délivré par la société X aux fins de paiement, le tribunal de commerce de Perpignan a, par jugement du 17 avril 2018,

'- (…) débouté la SCI les Jacarandas de l’ensemble de ses demandes,

- condamné la SCI les Jacarandas à payer à l’EURL X la somme de 8'308,84 euros en règlement du solde dudit marché, avec intérêts au taux légal, à compter du 9 janvier 2016, date de la mise en demeure,

- condamné la SCI les Jacarandas à payer à l’EURL X la somme de 1'500 euros à titre de dommages-intérêts,

- ordonné l’exécution provisoire de la décision,

- (…) alloué à l’EURL X la somme de 1 500 euros qui lui sera versée par la SCI les Jacarandas sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI les Jacarandas aux dépens de l’instance

Par déclaration reçue le 11 mai 2018, la SCI les Jacarandas a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Elle demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 31 juillet 2018, de

«- (…) infirmer en toutes ses dispositions le jugement (…),

- statuant à nouveau, constater que l’EURL X a engagé sa responsabilité contractuelle et était tenue d’une obligation de résultat consistant à livrer un ouvrage exempt de vices et de désordres.

- faire droit dés lors à l’exception d’inexécution, dire que la SCI les Jacarandas est déchargée de son obligation en paiement en l’absence de respect de sa propre obligation par son cocontractant,

- en tout état de cause, débouter l’EURL X de ses entières prétentions,

- la condamner à une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que

— l’entrepreneur est tenu d’une obligation de résultat et doit livrer un ouvrage exempt de vices,

— aucune réception n’est intervenue,

— les désordres (présence de désaffleurs) n’entrent pas dans le champ de garantie décennale, mais engagent la responsabilité contractuelle de droit commun de l’entrepreneur,

— la société X, même si elle conteste sa responsabilité, a proposé d’intervenir pour remédier aux désordres et elle n’est finalement jamais intervenue justifiant dès lors que lui soit opposée l’exception d’inexécution,

— l’intervention d’une entreprise extérieure ne concerne que la pose et la fourniture de seuils de porte.

La société X sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 10 octobre 2018, confirmer en toutes ses dispositions le jugement, débouter la SCI les Jacarandas de l’ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de 1'artic1e 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elle expose en substance que

— la quasi-totalité du parquet était posée au moment de la réception des travaux, à l’exception de 20 m² (parquet subtilisé sur le chantier),

— elle est intervenue, et suite à son intervention, aucun désordre ne subsiste (désordres peu importants dus à une présence d’humidité qui ne lui est pas imputable) ainsi que cela ressort du rapport d’expertise amiable du 20 février 2015,

— l’expert désigné par la société appelante est intervenu plus de trois ans après la pose du parquet (et même après le jugement de première instance).

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 24 novembre 2020.

MOTIFS de la DECISION :

Selon l’article 1353 (anciennement 1315) du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il résulte du rapport d’expertise amiable du 20 février 2015, contradictoire entre les parties, que le phénomène de tuilage du parquet au rez-de-chaussée de l’école, est survenu en septembre 2014, que le parquet n’était pas intégralement posé lors du procès-verbal de réception du 21 juillet 2014 et qu’une réserve complémentaire, concernant la reprise de la pose des lames de parquet tuilées, a été émise à ce titre le 11 septembre 2014.

Ce rapport d’expertise, qui, diligenté par l’assureur décennal de la société X, n’avait pour objet que de rechercher si la garantie décennale pouvait être engagée, constate la présence de très légers désaffleurs en extrémité des lames de parquet dans le sens de la largeur. Il retient que ce désordre est peu important (visible en lumière rasante à contre-jour) et qu’il est consécutif à la présence d’humidité, dont l’origine est indéterminée : «pose sur une chape encore humide ou accident de chantier ou lavage à grande eau…»

Sans qu’il y ait lieu de rechercher si la réception des travaux de pose du parquet a été prononcée et si les réserves complémentaires relatives au tuilage ont été levées, il résulte de ce rapport d’expertise, que conforte, celui, non contradictoire en date du 12 juillet 2018, produit par la SCI les Jacarandas, que le parquet est affecté de désordres qui, s’ils ne relèvent pas de la garantie décennale, à défaut de porter atteinte à la solidité de l’ouvrage ou de le rendre impropre à sa destination, relèvent de la responsabilité de droit commun de l’entrepreneur.

Outre les désaffleurs initialement constatés, le second rapport relève des dégradations très limitées du parquet lui-même (rupture des angles).

Si le rapport d’expertise amiable ne détermine pas la cause des désordres, contrairement à ce que soutient la société intimée, il n’exclut pas sa responsabilité en retenant parmi les causes évoquées l’existence d’une chape trop humide, qu’il lui incombait, le cas échéant, de contrôler avant d’effectuer la pose.

Le rapport d’expertise non contradictoire, dont les constatations et conclusions techniques ne sont pas contestées (à l’inverse de ses préconisations quant à la réparation des désordres tenant à une réfection totale), retient une mauvaise mise en oeuvre en l’absence de dilatation suffisante à l’origine d’une mise en compression du parquet (celui-ci étant disposé contre les huisseries – non respect des règles de l’art et du DTU 51.11), qu’un taux d’humidité excessif a pu accentuer.

La SCI les Jacarandas a contesté dès l’origine la qualité de la pose du parquet (indépendamment du problème affectant les seuils de porte).

Ainsi, ces désordres résultent d’une mauvaise exécution par la société X de ses obligations contractuelles envers le maître de l’ouvrage et sont à l’origine d’un préjudice de nature esthétique.

En application des dispositions de l’ancien article 1147 (devenu 1231-1) du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

La SCI les Jaracandas sollicite, à titre de réparation des désordres, le non-paiement du solde des travaux facturés par la société X, (déduction faite du coût de l’intervention d’une société tierce
-1 099,16 euros-) à hauteur de la somme de 8 308,84 euros. Toutefois, au regard du coût global de la pose du parquet correspondant à 140 mètres carrés, à savoir 7 448 euros HT alors que la superficie du couloir, seul affecté des désordres, n’est pas définie et qu’aucune des mesures expertales n’a déterminé le montant des travaux de réfection ou reprise nécessaires, la réparation intégrale de son préjudice sera fixée à la somme de 1 500 euros, qui sera déduite du montant réclamé.

Le rapport d’expertise contradictoire (page 3/9) indique que la société X est intervenue pour «recouper certaines lames et créer des dilatations dans le couloir» tandis que la SCI les Jacarandas a conservé, pendant plusieurs mois, un solde du marché supérieur au coût de la pose de l’intégralité du parquet, ce qui justifie l’indemnisation retenue à ce titre par le premier juge, qui n’est, au demeurant, pas contestée.

En conséquence, le jugement sera infirmé quant à la responsabilité contractuelle de la société X et amendé, par voie de conséquence, sur le montant de la condamnation de la SCI les Jacarandas, qui sera fixée à la somme de 6 808,84 euros et portera intérêts au taux légal à compter du 9 juin (et non, suite à une erreur de plume, janvier) 2016.

Succombant partiellement sur son appel, la SCI les Jacarandas sera condamnée aux dépens.

Ni l’équité, ni aucune considération d’ordre économique ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la présente instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Réforme le jugement du tribunal de commerce de Perpignan en date du 17 avril 2018, mais seulement en ce qu’il a débouté la SCI les Jacarandas de l’ensemble de ses demandes et a condamné la SCI les Jacarandas à payer à l’EURL X la somme de 8 308,84 euros en règlement du solde dudit marché, avec intérêts au taux légal, à compter du 9 janvier 2016, date de la mise en demeure,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que la SASU Y X est responsable des désordres affectant le parquet sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun,

Condamne la SCI les Jacarandas à payer à la SASU Y X la somme de 6 808,84 euros en règlement du solde du marché du 30 janvier 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2016,

Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions ;

Dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI les Jacarandas aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

ACB

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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