Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 27 avril 2021, n° 19/03398

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 5e ch. pole social, 27 avr. 2021, n° 19/03398
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 19/03398
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nîmes, 23 juillet 2019, N° 18/00329
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : N° RG 19/03398 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HO6J

EM/EB

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

24 juillet 2019

RG:18/00329

Y

C/

Association PARENTS ET AMIS DE PERSONNES EN SITUATION DE […]

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU GARD

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 27 AVRIL 2021

APPELANT :

Monsieur A Y

[…]

[…]

représenté par Me Serge DESMOTS de la SELEURL SERGE DESMOTS AVOCAT, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

Association PARENTS ET AMIS DE PERSONNES EN SITUATION DE […]

[…]

[…]

représentée par Me Diane MALLET-GRELLET de la SELAS PVB AVOCATS, avocat au barreau de NIMES

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU GARD

Département Affaires Juridiques – […]

[…]

représentée par M. B C en vertu d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne H, Conseillère faisant fonction de président spécialement désignée à cet effet, a entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Evelyne H, Conseillère

Madame Pascale BERTO, Vice-présidente placée à la cour

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l’audience publique du 16 Février 2021, où l’affaire a été mise en délibéré au 13 Avril 2021 prorogé à ce jour,

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Madame Evelyne H,Conseillère faisant fonction de président spécialement désignée à cet effet, le 27 Avril 2021, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS:

Le 19 juillet 2016, monsieur A Y, embauché par l’association départementale des parents et amis de personnes en situation de handicap 30 (ADAPEI), suivant contrat de travail à durée déterminée signé le 14 décembre 2015 et prenant fin le 03 janvier 2017 en qualité d’agent d’entretien, a été victime d’un accident du travail.

La déclaration d’accident du travail établie le 20 juillet 2016 mentionnait «réparation de la tringle à rideaux-salle de restauration- a chuté de l’échelle» et prescrivait un arrêt de travail jusqu’au 07 septembre 2016.

Le certificat médical initial établi le 20 juillet 2016 par le Docteur X mentionnait «fracture et luxation main droite- pied gauche».

Suivant courrier du 15 décembre 2016, la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Gard a notifié sa décision de prise en charge de l’accident au titre de la législation sur les risques

professionnels.

L’état de santé de monsieur A Y a été considéré consolidé au 15 janvier 2018, date confirmée par une expertise médicale technique.

Un taux d’incapacité permanente partielle de 0% a été fixé par le médecin conseil de la CPAM du Gard.

Par courrier du 30 août 2017, monsieur A Y a sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et a saisi la CPAM du Gard aux fins de mise en 'uvre de la procédure de conciliation. Après échec de cette procédure consacrée par un procès-verbal de non-conciliation du 23 octobre 2017, monsieur A Y a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard aux mêmes fins, lequel, suivant jugement du 24 juillet 2019, a:

— dit qu’aucune faute inexcusable ne peut être reprochée à l’Association des parents et amis de personnes en situation de handicap mental à l’origine de l’accident du travail survenu le 19 juillet 2016 à monsieur A Y,

— débouté monsieur A Y de la totalité de ses demandes,

— dit que les dépens nés avant le 01/01/2016 resteront à la charge de la CPAM du Gard.

Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 20 août 2020, monsieur A Y a régulièrement interjeté appel de cette décision.

L’affaire a été appelée à l’audience du 31 mars 2020, renvoyée à celle du 05 janvier 2021, puis à celle du 16 février 2021 à laquelle elle a été retenue.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, monsieur A Y demande à la cour de:

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Nîmes en ce qu’il a dit qu’aucune faute inexcusable ne peut être reprochée à l’employeur à l’origine de l’accident survenu le 19 juillet 2016 et en ce qu’il l’a débouté de la totalité de ses demandes,

Statuant à nouveau,

— reconnaître que l’accident dont il a été victime le 19 juillet 2016 est dû à la faute inexcusable de l’Association de parents et amis de personnes en situation de handicap mental,

— ordonner une expertise médicale et demander qu’il soit remis à l’expert par les parties tout élément relatif à l’évaluation des préjudices et notamment des préjudices extra-patrimoniaux temporaires avant consolidation, des souffrances endurées temporaires avant consolidation, du préjudice esthétique temporaire avant consolidation, du préjudice d’agrément, du préjudice sexuel et des préjudices à caractère personnel évolutifs.

Il soutient, principalement, que l’accident dont il a été victime a été causé par la faute inexcusable de l’employeur, dans la mesure où l’association avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance des dangers auquels il était exposé et n’a pris aucune mesure pour les prévenir.

Il ajoute que l’employeur avait pleinement connaissance de l’inadéquation entre la qualification du salarié et le travail confié, de la réalisation de travaux en hauteur et du caractère dangereux de tels travaux.

Il ajoute que l’employeur a manqué à son obligation générale de sécurité, qu’il a été affecté à un poste alors qu’il n’a bénéficié d’aucune information ou formation interne ou externe sur les règles d’hygiène et sécurité, alors qu’il était pourtant amené à respecter et faire respecter au vu de la fiche de son poste, et que le stage de deux jours dont il a bénéficié était manifestement insuffisant.

Il fait observer que l’association ne rapporte pas la preuve qu’elle lui aurait donné des consignes de sécurité, qu’elle avait mis à la disposition de ses salariés une échelle, que malgré ce que prétend l’association, lors de l’accident, il nettoyait une tringle et qu’un escabeau à trois marches ne permettait pas de l’atteindre, et que la présence d’échelle implique un risque de chute qui aurait dû être évalué. Il ajoute que l’association ne rapporte pas la preuve qu’elle aurait mis en place des mesures pour lui permettre d’exercer ses fonctions d’agent d’entretien.

S’agissant de la motivation retenue par les premiers juges, il indique qu’il est de jurisprudence constante qu’il importe peu que d’autres fautes aient concouru au dommage, et en particulier que la victime ait elle-même commis une imprudence, qu’il ne peut lui être reproché d’avoir utilisé une échelle que l’employeur avait mise à la disposition de ses salariés et que l’utilisation d’un escabeau à trois marches n’était prescrit par aucune formation ou information de l’employeur.

Enfin, s’agissant de la réparation des préjudices subis, il soutient que la production des pièces justifie d’ores et déjà l’indemnisation des préjudices extra patrimoniaux temporaires avant consolidation, les souffrances endurées temporaires avant consolidation, le préjudice esthétique avant consolidation, le préjudice d’agrément et le préjudice sexuel et les préjudices à caractère personnel évolutifs.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, l’association UNAPEI 30 demande à la cour de:

— confirmer dans son intégralité le jugement rendu le 24 juillet 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Nîmes,

— constater que monsieur A Y ne démontre pas l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur,

— débouter monsieur A Y de l’ensemble de ses demandes,

A titre reconventionnel,

— condamner monsieur A Y à lui payer la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir, essentiellement, après avoir rappelé les dispositions applicables et la jurisprudence en matière de faute inexcusable, que monsieur A Y ne fait aucune démonstration de la faute inexcusable de l’employeur et se contente de prétendre qu’il avait conscience et connaissance du danger auquel il était exposé.

Elle soutient, qu’au contraire, les éléments du dossier font apparaître qu’elle a pris l’ensemble des mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de son personnel, et notamment de monsieur Y, par la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés, des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation qui ont consisté en l’établissement d’un document unique d’évaluation des risques professionnels et une formation portant sur les habilitations électriques dispensée à monsieur Y.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, la CPAM du Gard demande à la cour de:

— lui donner acte de ce qu’elle déclare s’en remettre à justice sur le point de savoir si l’accident du travail en cause est dû à une faute inexcusable de l’employeur,

Si la cour retient la faute inexcusable,

— constater que monsieur Y ne bénéficie ni d’une rente ni d’une indemnité en capital,

limiter l’éventuelle mission de l’expert à celle habituellement confiée en matière de faute inexcusable et mettre les frais d’expertise à la charge de l’employeur,

— condamner l’employeur la rembourser dans le délai de quinzaine les sommes dont elle aura fait l’avance, assorties des intérêts légaux en cas de retard.

Elle fait valoir, après avoir rappelé les dispositions des articles L452-1,L452-2 et L452-3 du code de la sécurité sociale, qu’elle intervient dans la présente instance en tant que partie liée puisqu’il lui appartiendra, lorsque la cour se sera prononcée sur la reconnaissance de la faute inexcusable, de récupérer, le cas échéant, auprès de l’employeur, les sommes qu’elle sera amenée à verser à monsieur Y.

Elle rappelle que les préjudices qui sont déjà couverts totalement ou partiellement, forfaitairement ou avec limitation par le livre IV du code de la sécurité sociale, ne peuvent donner lieu à indemnisation complémentaire, que dans l’hypothèse où une expertise serait ordonnée, la mission de l’expert sera limitée à celle habituellement confiée en matière de faute inexcusable.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l’audience.

MOTIFS:

Sur la faute inexcusable:

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers ce dernier d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié, mais il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage.

La conscience du danger s’apprécie au moment ou pendant la période de l’exposition au risque.

Il incombe au salarié de prouver que son employeur, qui devait avoir conscience du danger auquel il était exposé, n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Par ailleurs, les articles L4121-1 et suivants du code du travail posent le principe d’une évaluation des risques par l’employeur et les articles R4121-1 et suivants du même code instituent une obligation d’établir un document unique d’évaluation des risques dont la finalité est d’adapter les mesures de prévention aux risques présentés par le chantier.

En l’espèce, les circonstances de l’accident de travail allégué par monsieur A Y peuvent être déterminées au vu des mentions figurant sur:

— la déclaration d’accident du travail établie le 20 juillet 2016 par l’ADAPEI30 laquelle indique un accident survenu le 19 juillet 2016 à 15h10, soit pendant les horaires de travail du salarié fixés ce jour de 14h00 à 17h00, sur son lieu habituel de travail, soit le foyer de vie les Agarrus à BAGNOLS SUR CEZE, l’activité de la victime lors de l’accident «réparation de la tringle à rideaux salle de restauration», la nature de l’accident «chute de l’échelle», la nature et le siège des lésions «plaie minime de la main droite, douleur cheville droite»; la déclaration ne mentionne aucun témoin et précise que l’employeur a été avisé le jour même, tandis que sur le questionnaire de la CPAM que l’employeur a renseigné le 12 août 2016, il est indiqué de façon manuscrite «la chute et la blessure ont été constatées par de nombreux témoins sur le lieu de travail»,

— la fiche d’enquête réalisée par l’ADAPEI30 renseignée le 21 juillet 2016 et sur laquelle il est précisé que l’accident est survenu dans la salle de restauration, que «Mr Y a chuté de l’échelle et Mme D E est venue constater et donner les premiers soins», que l’échelle utilisée par l’appelant est l’échelle de la «plonge»; l’analyse de l’accident conclut à «une mauvaise évaluation des matériels (par le salarié), un état fébrile de la personne depuis le matin en particulier», «de mauvais outils utilisés' et à «une installation trop rapide»; les mesures recommandées étaient les suivantes: «rappel des lieux de rangement des escabeaux, un escabeau plus adapté était disponible dans le même bâtiment»; le CHSCT a préconisé des suites de cet accident les mesures suivantes «re-sensibilisation du salarié au matériel à utiliser en sus de la remise des lieux de stockage du matériel de l’établissement».

Les constatations médicales relevées par le Docteur F X, le 20 juillet 2016, dans le certificat médical initial «fracture luxation columnaire divergente pied gauche» sont compatibles avec une chute en hauteur.

A l’appui de ses prétentions, monsieur A Y produit aux débats un document intitulé «document interne d’un poste à pourvoir» sur lequel sont mentionnées les missions principales du poste «veille technique et repérage des dysfonctionnements: proposer et oeuvrer pour les améliorations des dispositifs de sécurité, d’accueil et d’entretien, réaliser les travaux préparatoires aux interventions spécialisées, veiller au respect de la réglementation en hygiène et sécurité, lors des travaux, effectués en interne ou par une entreprise extérieure, accompagnement et réception des travaux effectués par l’entreprise extérieure, maintenance et entretien: conseiller sur l’utilisation des différents matériels, rééditer des notices d’utilisation quand cela s’avère nécessaire, réparer et/ou remplacer les installations et matériels défectueux, dans le respect des normes d’installation et de sécurité, assurer la maintenance et l’entretien des bâtiments, des espaces verts et des extérieurs et des véhicules de l’établissement, aider à la préparation matérielle des locaux, pour une activité diverse, prévention: veiller au bon fonctionnement de tout le matériel de protection contre l’incendie, surveiller les travaux de transformation, d’entretien et de nettoyage susceptible d’entraîner une gêne dans l’évacuation des personnes ou de créer des dangers d’extension de feu».

L’ADAPEI30 ne conteste pas que ces fonctions se rattachent au poste qui a été confié à monsieur A Y.

L’argument développé par l’appelant selon lequel le poste de «chauffeur et agent d’entretien» que lui a confié l’ADAPEI30 est en inadéquation avec les diplômes d’ébéniste et de sculpteur qu’il avait acquis est inopérant, dans la mesure où, d’une part, il a acquiescé à ces fonctions en signant le contrat de travail qui l’a lié à l’association le 18 décembre 2015, d’autre part, où il disposait des aptitudes exigées pour la réalisation des tâches polyvalentes prévues dans son contrat de travail qui ne nécessitaient pas de compétence particulière «travaux d’entretien, entretien des espaces verts et nettoyage des locaux et des véhicules» et où, enfin, l’ADAPEI30 justifie avoir proposé à monsieur A Y une formation professionnelle d’une durée de 14 heures se rapportant à l’ «habilitation

électrique HOBO-BS-BE man’uvre» qu’il a suivie du 20 mai au 03 juin 2016.

Par contre, dans la mesure où monsieur A Y était amené à effectuer des travaux en hauteur, notamment pour procéder au nettoyage des vitres, l’employeur ne pouvait pas ignorer les risques de chute du salarié, étant rappelé que le risque de chute est inhérent à toute situation de travail en élévation et le danger qu’il représente pour la santé et la sécurité du salarié impose une évaluation des risques et des mesures de prévention et d’organisation du travail appropriées.

L’ADAPEI30 prétend avoir pris toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité de monsieur A Y et produit aux débats, à l’appui de ses prétentions:

— une attestation rédigée par madame G H le 28 avril 2020 qui certifie «avoir été déléguée du personnel au foyer de vie les Agarrus du 26 novembre 2013 au 22 novembre 2018" et reconnaît «que le document unique d’évaluation des risques professionnels a été revu en 2015 par le Directeur présent, M Z, et affiché dans l’établissement»,

— un document unique d’évaluation des risques professionnels daté du 27 septembre 2018,

la fiche d’enquête effectuée par l’employeur sur laquelle sont mentionnées les préconisations du CHSCT.

L’ADAPEI 30 prétend avoir:

— mis en place une organisation de travail et des moyens adaptés aux risques professionnels et indique que l’association est équipée d’escabeaux placés à proximité du lieu d’intervention de monsieur Y, dont l’utilisation aurait permis d’éviter la chute de ce dernier, et soutient que l’appelant a méconnu les consignes de sécurité en la matière; or, il convient d’une part, de constater que l’association ne rapporte pas la preuve que du matériel fiable, en l’espèce des escabeaux à trois marches étaient effectivement à la disposition du salarié pour accomplir la tâche de réparation de tringle, et que ce dernier avait connaissance de son existence et de son emplacement, la fiche d’analyse de l’accident émanant de l’ADAPEI30 étant manifestement insuffisante pour constituer une telle preuve, tout comme les préconisations faites par le CHSCT qui ne mentionne pas expressément parmi le matériel à utiliser un ou plusieurs escabeaux à trois marches,

— réalisé des actions de prévention des risques professionnels, d’information et de formation: l’employeur évoque des consignes de sécurité, or, l’ADAPEI30 ne justifie pas que des consignes de sécurité se rapportant aux travaux en hauteur et des instructions nécessaires à l’exercice sûr de ses fonctions aient été transmises à monsieur A Y; par ailleurs, l’association produit aux débats un DUE qui a été établi plus de deux ans après la date de l’accident du travail litigieux, de sorte que ses affirmations, sur ce point, ne sont pas étayées; l’attestation de madame G H est manifestement insuffisante pour établir l’existence et l’affichage du DUE modifié en 2015 et l’employeur n’apportant aucune explication sur l’absence de communication aux débats d’un DUE contemporain de l’accident, et ce, en contrariété avec l’article L4121-2 du code du travail qui prévoit notamment que l’employeur doit éviter les risques, les évaluer lorsqu’ils ne peuvent pas être évalués et aux dispositions de l’article L4121-1 du même code qui exige que l’employeur prenne les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Ainsi, contrairement à ce que prétend l’ADAPEI30, l’association qui avait nécessairement conscience du danger auquel elle exposait son salarié, plus particulièrement des risques de chute en raison de travaux réalisés en hauteur, ne rapporte pas la preuve qu’elle ait pris toutes les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Au vu de l’ensemble de ces considérations, il apparaît que c’est à tort que les premiers juges ont dit que monsieur A Y ne démontrait pas que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé, en raison de la nature même des tâches réalisées en hauteur, et que le salarié s’était exposé volontairement, sans raison valable, au danger de chute en utilisant d’une échelle au lieu de se munir d’un escabeau adapté au travail, alors que l’association ne rapporte la preuve de l’existence de ce type de matériel à proximité du lieu de travail du salarié.

Il convient donc de retenir la faute inexcusable à l’encontre de l’ADAPEI30.

Le jugement déféré sera donc infirmé.

Sur les conséquences financières et action récursoire de la caisse:

Il convient de rappeler que lorsque l’accident du travail est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ses préposés, l’employeur doit rembourser la caisse de sécurité sociale de la totalité des sommes dues à la victime en vertu de la reconnaissance de la faute inexcusable.

La CPAM du Gard récupérera donc auprès de l’ADAPEI 30 le montant des frais d’expertise ainsi que des sommes dues en remboursement des indemnisations complémentaires prévues par la loi découlant de la reconnaissance de la faute inexcusable.

Sur la demande d’expertise:

Les pièces communiquées par l’appelant justifient qu’il soit fait droit à sa demande d’expertise médicale aux fins d’évaluation des préjudices subis non couverts par le Livre IV du code de la sécurité sociale dont il peut prétendre réparation conformément aux articles L452-2 à L452-5 du même code.

PAR CES MOTIFS:

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Infirme le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard le 24 juillet 2019 en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau sur le tout,

Dit que monsieur A Y a été victime d’un accident du travail le 19 juillet 2016 dû à la faute inexcusable de l’ADAPEI 30,

Dit que monsieur A Y peut prétendre à une indemnisation complémentaire dans les conditions prévues aux articles L452-2 à L452-5 du code de la sécurité sociale,

Ordonne, avant dire droit, une expertise médicale confiée au Docteur I J, […] : 04 66 36 29 59 – Port. : 06 60 48 27 91 Mèl : vprangere@orange.fr) avec pour mission de:

— examiner monsieur A Y, demeurant […], […],

— décrire les lésions initiales subies en lien direct avec l’accident du travail dont monsieur A Y a été victime le 19 juillet 2016,

— évaluer les préjudices personnels que monsieur A Y a subis, non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, soit:

* recours à une tierce personne à titre temporaire

* le déficit fonctionnel temporaire

* les préjudices esthétiques temporaire et permanent,

* les souffrances physiques et morales endurées,

* les frais de logement adapté,

* les frais de véhicule adapté,

* la perte de chance d’une promotion professionnelle,

* le préjudice sexuel

* le préjudice d’établissement,

* le préjudice d’agrément,

* le préjudice permanent exceptionnel,

Dit que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions de l’article 232 et 248 et 263 à 284 du code de procédure civile, qu’il pourra en particulier recueillir les déclarations de toutes personnes informées, en présence des parties ou elles dûment convoquées, en leurs observations et explications et y répondre,

Dit que l’expert se fera remettre tous documents, recueillera toutes informations et procédera à toutes constatations de nature à éclairer les questions à examiner,

Ordonne la consignation par la Caisse primaire d’assurance maladie de Vaucluse auprès du régisseur de la cour dans les deux mois de la notification du présent arrêt de la somme de 600 euros à valoir sur la rémunération de l’expert,

Dit que l’expert déposera son rapport dans les quatre mois de sa saisine au greffe de la cour d’appel de Nîmes’et au plus tard le 30 août 2021 et en transmettra copie à chacune des parties,

Désigne Monsieur LE GALLO, président ou son délégataire en qualité de magistrat chargé du contrôle de l’expertise,

Dit que la Caisse primaire d’assurance maladie du Gard versera directement à monsieur A Y cette indemnité,

Ordonne, dans l’attente du dépôt par l’expert de son rapport, le retrait de l’affaire du rôle et dit qu’elle pourra être ensuite réinscrite à la demande de la partie la plus diligente,

Rappelle que la Caisse primaire d’assurance maladie du Gard avancera l’ensemble des sommes allouées à la victime et en récupérera le montant auprès de l’ADAPEI 30,

Surseoit à statuer sur les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties des demandes plus amples ou contraires,

Déclare le présent arrêt commun et opposable à la CPAM du Gard,

Surseoit à statuer sur les dépens.

Arrêt signé par Madame H, Conseillère et par Madame BERGERAS, Greffière.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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