Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 25 juin 2019, n° 17/02881

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Orléans, ch. civ., 25 juin 2019, n° 17/02881
Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
Numéro(s) : 17/02881
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Orléans, 5 septembre 2017
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 25/06/2019

Me LICOINE

CABINET LEROY & ASSOCIES

ARRÊT du : 25 JUIN 2019

N° : – N° RG 17/02881 -

N° Portalis DBVN-V-B7B-FROX

DÉCISION ENTREPRISE :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d’ORLEANS en date

du 06 Septembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 209632304558

Maître K E F

[…]

[…]

représenté par Me LICOINE, avocat au barreau d’ORLEANS

SCP K E-F, YVAN H, I J NOTAIRES ASSOCIÉS

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité à son siège

[…]

[…]

représentée par Me LICOINE, avocat au barreau d’ORLEANS

D’UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 208097864274

Monsieur A Y

né le […] à […]

[…]

[…]

représenté par la SCP CABINET LEROY & ASSOCIES, avocat au barreau d’ORLEANS

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL en date du : 25 Septembre 2017.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 05-03-2019

Dossier communiqué au Ministère Public le 29/10/2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats:

• Madame Sylvie GUYON-NEROT, président de chambre ,

• Monsieur Laurent SOUSA, conseiller.

Lors du délibéré :

• Madame Sylvie GUYON-NEROT, président de chambre ,

• Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, conseiller,

• Monsieur Laurent SOUSA, conseiller.

Greffier :

Mme Marie-Lyne EL BOUDALI, Greffier lors des débats et du prononcé.

DEBATS

A l’audience publique du 01 Avril 2019, à 14 heures, Madame Sylvie GUYON-NEROT, président de chambre, en son rapport, Monsieur Laurent SOUSA, conseiller, ont entendu les avocats des parties, en leur plaidoiries, avec leur accord, par application de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile.

Prononcé le 25 JUIN 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Monsieur C Y est décédé le […] alors qu’à la suite du prononcé de son divorce d’avec madame D X, selon arrêt confirmatif rendu le 13 décembre 2005, n’était pas liquidée la communauté ayant existé entre eux, s’agissant du régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale de la communauté dont l’adoption avait été homologuée par jugement du tribunal de grande instance d’Orléans rendu le 20 juin 1996.

Par testament authentique reçu le 06 mai 2008 monsieur C Y avait institué son neveu, monsieur A Y venant en représentation de son père prédécédé, comme légataire universel et révoqué les avantages matrimoniaux consentis à son épouse.

Suivant acte authentique dressé le 12 mars 2010, maître E F a procédé à la liquidation et au partage de la communauté ayant existé entre monsieur C Y et madame X. La déclaration de succession établie le 28 juin 2010 laissait ressortir la quote-part de monsieur A Y dans l’actif successoral pour un montant de 367.299,16 euros avec des droits de succession à hauteur de 197.714 euros.

Exposant qu’en raison de l’omission de récompenses dues par la communauté Y-X à monsieur C Y résultant en particulier de la vente de deux biens propres du défunt et des effets de la révocation précitée (à savoir le fait que les époux devaient être considérés comme ayant adopté le régime légal à compter de leur changement de régime matrimonial),

l’Administration fiscale a estimé que ses droits dans la succession auraient dû être de 739.410,33 euros et ceux dont il lui était redevable de 402.375 euros et qu’elle a donc opéré un redressement fiscal en lui adressant, le 17 juin 2013, un avis de mise en recouvrement suivi d’un commandement portant sur la somme de 204.661 euros (402.375 – 197.714 euros), monsieur A Y, imputant à faute au notaire ce redressement fiscal et le caractère lésionnaire du partage, a assigné au fond maître K E F et la SCP K E-F-G H-I J (ci-après la Scp de notaires) en responsabilité à l’effet d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices cumulant le redressement dont il a fait l’objet, les pénalités encourues et les droits perdus lors de ce partage, ceci par acte du 25 juillet 2014.

Il a obtenu du juge de la mise en état désigné l’allocation d’une provision d’un montant de 237.000 euros, selon ordonnance rendue le 17 juin 2015 qui lui allouait, de plus, une somme de 1.200 euros au titre de ses frais non répétibles, laquelle a été exécutée par le versement d’une somme de 238.200 euros en juillet 2015 avant infirmation de cette ordonnance suivant arrêt rendu par la présente cour d’appel le 06 février 2017.

Par jugement contradictoire rendu le 06 septembre 2017 le tribunal de grande instance d’Orléans a, en substance et sans assortir sa décision de l’exécution provisoire, visant l’article 1382 (ancien) du code civil, condamné in solidum maître K E F et la Scp de notaires à payer à monsieur A Y la somme indemnitaire de 423.954,17 euros en réparation de ses préjudices outre celle de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en leur faisant supporter les dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 27 février 2019 maître K E F et la SCP K E-F-G H-I J, appelants, demandent pour l’essentiel à la cour :

— d’infirmer le jugement en sa condamnation au paiement de la somme de 423.954,17 euros et, à titre principal, de débouter monsieur Y de l’intégralité de ses demandes, à titre subsidiaire, de dire que son préjudice correspond à la perte d’une chance d’avoir pu fixer ses droits dans l’actif successoral de son oncle à la somme complémentaire de 119.672 euros et de juger que cette perte de chance doit être indemnisée à concurrence de 30 % de cette somme, soit: 35.901,60 euros, ou à celle de 119.672 euros, plus subsidiairement, de limiter son préjudice au montant des droits redressés (soit la somme de 204.661 euros) et, en tout état de cause, d’ordonner la compensation entre ces sommes et celle de 282.200 euros versée à monsieur Y en exécution de l’ordonnance du juge de la mise en état du 17 juin 2015,

— de l’infirmer également en ses dispositions au titre des frais non répétibles et de débouter monsieur Y de ses chefs de demandes,

— de dire, enfin, que chacune des parties conservera la charge de ses entiers frais non répétibles et dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 22 mars 2018, monsieur A Y prie essentiellement la cour de confirmer la décision entreprise, de rejeter les entières prétentions des appelants en les condamnant in solidum à lui verser la somme de 6.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens d’appel.

Le Ministère public, à qui la procédure a été transmise a déclaré s’en rapporter, selon avis du 29 octobre 2018.

SUR CE,

Sur l’engagement de la responsabilité délictuelle du notaire :

Attendu que les appelants qui ne contestent pas l’analyse juridique de l’Administration fiscale, au demeurant approuvée par la consultation du Centre de Recherches d’informations notariales (ou Cridon) du 17 octobre 2013 (pièce 15) selon laquelle la révocation de l’avantage matrimonial résultant de l’adoption de la communauté universelle aboutit à considérer, pour le calcul de l’avantage, que les époux ont adopté la communauté légale à compter du changement de leur régime matrimonial et qu’en conséquence tout enrichissement de la communauté aux dépens du patrimoine propre de l’un des époux donne lieu à récompense, estiment que le tribunal s’est mépris en ce qu’il a jugé que monsieur A Y n’a pas reçu dans la succession de son oncle l’intégralité des droits auxquels il pouvait prétendre et qu’il a subi un préjudice équivalent au montant des droits qu’il n’a pas reçus, ceci par la faute du notaire;

Que contrairement à ce que retient le tribunal, soutiennent-ils, la question des récompenses dues par la communauté (s’agissant de la vente, aux prix de 132.630,64 euros et 106.714,31 euros, soit la somme de 167.450,17 euros nette d’impôts revenant à monsieur A Y, de deux biens propres de monsieur C Y situés à Epieds-en-Beauce et à Bricy) a bien été évoquée à tel point qu’elle constituait le point de blocage qui ne permettait pas de procéder au partage post-communautaire et qu’afin de mettre un terme au conflit entre le légataire (obligé de déposer sa déclaration de succession dans les délais légaux et de disposer de liquidités pour payer des droits de succession importants) et l’ex-épouse (qui soumettait sa signature à l’acte de partage à la condition qu’aucune récompense ne soit inscrite au passif de la communauté) est intervenu entre eux un accord transactionnel et forfaitaire ;

Que cet accord n’a pas été tenu pour inexistant par la cour d’appel d’Orléans réformant l’ordonnance du juge de la mise en état sus-évoqué et que sa réalité est attestée (en pièce 13) par maître Z, notaire de madame X qui l’assistait lors de ces opérations ; que, parfaitement valable entre les parties, il pouvait produire effet à leur égard sans pour autant être opposable aux tiers parmi lesquels l’Administration fiscale ;

Qu’ils en déduisent que monsieur Y ne peut prétendre à un complément de part dès lors que si l’état liquidatif de communauté avait reflété suffisamment cette transaction qui interdisait à monsieur Y de revendiquer un supplément de part, elle aurait été opposable à l’Administration fiscale en cela et que monsieur Y n’aurait pas eu à supporter le redressement fiscal en cause, son préjudice ne pouvant être constitué que du montant des droits redressés ;

Attendu, ceci étant exposé, que si l’acte établi le 12 mars 2010 par maître E F entre monsieur A Y, ès-qualité, et madame D X qui portait sur la liquidation et le partage amiable de la communauté ayant existé entre monsieur C Y et cette dernière mentionne bien qu’ont été révoqués les avantages matrimoniaux consentis et si y figure un compte de récompenses dues par la communauté à l’égard de l’époux duquel ces avoirs sont tombés en communauté, il est constant qu’ont été omises des récompenses dues par la communauté à monsieur C Y et spécialement les biens immobiliers situés à Epieds en Beauce et à Bricy vendus par la communauté universelle sans remploi des fonds encaissés alors qu’aux termes de l’article 1433 du code civil elles lui étaient dues ;

Que se défendant de toute omission mais d’un acte liquidatif traduisant l’accord des parties qui constituait un préalable nécessaire à la déclaration de succession du 28 juin 2010 (pièces 1 et 4 de monsieur Y), monsieur E F s’inscrit dans le droit fil des explications qu’il donnait, le 20 novembre 2013 (pièce 12 de l’intimé), à l’Administration fiscale dans le cadre de la réclamation pour la formalisation de laquelle monsieur A Y (exposant n’y connaître rien et ne pas comprendre grand chose / pièce 11) lui avait donné mandat ;

Qu’il expliquait alors qu’aux termes d’un accord transactionnel – permis, précisait-il, dans la mesure où lors d’un divorce, comme en l’espèce, aux torts partagés, l’article 267-1 (ancien) du code civil autorise une révocation qui peut n’être que partielle – les parties sont convenues de ne faire porter la révocation des avantages matrimoniaux que sur les biens se retrouvant en nature lors de la liquidation ;

Que pour démontrer l’existence de cette transaction, contestée par monsieur Y, les appelants peuvent, certes, invoquer le fait que l’écrit prévu à l’article 2044 alinéa 2 du code civil n’est pas exigé pour la validité du contrat de transaction et que la preuve peut en être rapportée par témoins et présomptions;

Que cet autre mode de preuve est toutefois admis lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit défini par l’article 1347 (ancien) du code civil comme 'tout acte par écrit émané de celui contre lequel la demande est formée ou de celui qu’il représente et qui rend vraisemblable le fait allégué' et qu’un tel écrit émanant de monsieur A Y fait défaut ;

Qu’à cet égard, il y a lieu de considérer que, professionnel du droit à l’instar de maître Z (qui se présente comme le notaire défendant les intérêts de madame X et évoque, dans un document qui ne peut être tenu pour une attestation au sens de l’article 202 du code de procédure civile, un accord transactionnel et forfaitaire en suite d’une consultation du Cridon non produite aux débats), maître E F ne pouvait ignorer le fait qu’une renonciation à récompense doit être prouvée de manière non équivoque, comme cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 1re, 1er février 2012, pourvoi n° 10-23601) ainsi que soutenu par monsieur Y et comme évoqué par l’Administration fiscale dans son rejet de réclamation qui lui a été notifié le 03 avril 2014 (pièce 14 de l’intimé) ;

Que les appelants ne peuvent davantage tirer argument des énonciations de l’arrêt rendu par la présente cour sur appel d’une ordonnance de référé qui s’est contentée d’énoncer que 'le fait que cette renonciation ne ressort pas clairement des termes de l’acte de partage ne suffit pas à la tenir pour inexistante’ et, dans une décision qui n’a pas au principal autorité de chose jugée, n’a fait que caractériser la contestation sérieuse la conduisant à statuer comme elle l’a fait;

Qu’en outre, alors que monsieur Y fait valoir qu’il n’avait aucun intérêt à renoncer au droit à récompense et qu’il en a été lésé par cet acte dressé par maître E F, ce dernier ne peut, non plus, prétendre que cette renonciation lui était nécessaire et motivait sa renonciation du fait que sa qualité de professionnel tenu à une obligation d’information complète sur la fiscalité en matière de succession exclut qu’il ait pu ignorer le devoir qui était le sien de l’informer de la nécessité de souscrire une déclaration provisoire et de payer un acompte sur les droits sans toutefois que cela implique une acceptation de la succession (Cass civ 1re, 06 mars 1984, pourvoi n° 83-11445) ;

Que, par ailleurs, quand bien même monsieur Y aurait disposé d’une action en complément de part pour cause de lésion de partage à l’encontre de madame X – ce qui n’est pas le cas en l’espèce dès lors qu’aux termes de l’article 889 alinéa 2 du code civil cette action se prescrit par deux ans à compter du partage et que la proposition de rectification litigieuse lui a été adressée par lettre du 29 avril 2013 – le notaire ne peut tirer argument de son abstention à tenter de remédier lui-même à son préjudice par l’engagement d’une telle action dès lors que doit être réparé par le notaire qui a failli à son devoir d’assurer l’efficacité juridique de l’acte qu’il a reçu le dommage directement causé par sa faute (Cass civ 1re, 22 septembre 2016, pourvoi n° 15-13840) ;

Que l’Administration fiscale ayant considéré que le partage ressortant de l’acte du 12 mars 2010 ne pouvait être pris pour base de la liquidation des droits de succession dès lors que les

attributions faites à l’héritier sont inférieures à la part lui revenant, c’est à dire à ses droits dans l’actif net de succession déterminé notamment après liquidation de la communauté effectuée d’après les règles civiles et fiscales, le notaire qui a manqué à ses devoirs d’information et de conseil et n’a pas assuré l’efficacité de son acte, se doit de réparer non seulement le préjudice en relation causale avec le redressement fiscal résultant de l’omission d’introduire des récompenses dues par la communauté à monsieur C Y ;

Qu’il s’évince de ce qui précède que les appelants, ne démontrant pas l’existence d’un accord transactionnel et affirmant, par conséquent, à tort que le seul préjudice de l’intimé est constitué par le montant des droits redressés, ne sont pas fondés à soutenir, à titre principal, que le jugement doit être infirmé en ce qu’il énonce que monsieur Y n’a pas reçu dans la succession de son oncle l’intégralité des droits auxquels il pouvait prétendre, et ce par la faute du notaire ;

Sur la réparation du préjudice subi :

Attendu qu’alors que monsieur Y poursuit la confirmation du jugement qui a évalué son entier préjudice à la somme de 423.954,17 euros se décomposant en une somme de 167.450,17 euros (représentant le montant des droits perdus, nets d’impôt, de monsieur Y dans la succession de son oncle) et en celle de 256.504 euros [cumulant le montant du redressement fiscal de monsieur Y sur un actif successoral non perçu (soit : 204.661 euros), celui des pénalités (soit : 31.927 euros), celui des intérêts de retard (soit : 19.558 euros) et enfin les frais de mainlevée d’hypothèque (soit : 358 euros)], les appelants en poursuivent à titre subsidiaire la minoration ou, plus subsidiairement, son cantonnement au seul montant des droits redressés ;

Qu’ils font d’abord valoir que les droits de l’intimé doivent être recalculés en tenant compte du fait que les sommes réintégrées au compte de récompense viennent accroître le passif de communauté et en réduire l’actif si bien que les droits perdus s’en trouvent minorés à la somme de 119.672 euros ;

Qu’ils ajoutent, en second lieu, que le préjudice de monsieur Y s’analyse en une perte de chance évaluable à 30 % dès lors qu’il n’est pas acquis que celui-ci aurait signé un acte lui reconnaissant un droit à récompense et que la probabilité d’obtenir cette somme doit se mesurer à la difficulté qu’il aurait rencontrée à faire valoir son droit à récompense, amiablement ou en justice, du fait de la farouche opposition de madame X et du retard généré par une action judiciaire ;

Qu’ils soutiennent, en troisième lieu, que les droits redressés ne constituent pas un préjudice indemnisable dès lors qu’ils étaient dus en tout état de cause, de même que le montant des intérêts de retard puisque l’intimé a pu avoir la jouissance et la disposition des sommes non versées au Trésor public et qu’il ne démontre pas qu’il aurait bénéficié d’un profit inférieur au montant des intérêts de retard pratiqués ;

Que la limitation de son préjudice au seul montant du redressement fiscal pourrait enfin se justifier, estiment-ils, si la cour devait juger que la rédaction insuffisante de l’acte n’a pas permis de rendre la transaction opposable à l’Administration fiscale ;

Attendu, ceci étant exposé, qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de considérer que les différentes fautes commises par le notaire l’ont conduit à rédiger un acte dont les effets juridiques préjudicient aux intérêts de monsieur A Y puisqu’elle le prive des récompenses incontestablement dues par la communauté à monsieur C Y, et que la situation en résultant ne peut s’analyser en une simple perte de chance, comme le soutiennent les appelants en s’appuyant sur des éléments qui auraient pu priver monsieur A Y de

la potentialité de bénéficier de ces récompenses qui ne sont qu’hypothétiques ; que son préjudice, du fait de sa certitude, doit être intégralement réparé ;

Que, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de la reconstitution des masses opérée par les appelants qui s’affranchissent des éléments retenus par l’Administration fiscale, il échet de considérer que le préjudice de monsieur Y à ce titre doit être évalué en considération de la proposition de rectification qui lui a été adressée le 29 avril 2013 par cette administration, consécutivement à l’établissement par le notaire d’une déclaration de succession défectueuse afin de le remettre dans la situation, conforme aux convention et droit applicables, dans laquelle il se serait trouvé, n’eussent été ses défaillances, et d’en fixer le montant à la somme de 341.356,11 euros désignée par l’Administration fiscale comme étant l’excédant de récompenses dont monsieur C Y était créancier envers la communauté et qui doit être réintégré à l’actif de succession en application de l’article 750 ter du code général des impôts (pièce 5 de l’intimé, page 7) ;

Que les intimés sont, en revanche, fondés à prétendre que le paiement d’un impôt légalement dû ne constitue pas un préjudice indemnisable de sorte que la demande de monsieur Y au titre du redressement dont il a fait l’objet (soit la somme de 204.661 euros / pièce 5 page 13) ne peut prospérer et que le tribunal ne peut être approuvé en ce qu’il en décide autrement ;

Que, cela étant, si la déclaration de succession avait été établie sans donner lieu à redressement, monsieur Y, qui fait justement valoir que ne peut lui être opposé le profit tiré de sommes non perçues, n’aurait pas été redevable des intérêts et frais qu’il a dû acquitter constituant un préjudice certain en lien direct avec les défaillances du notaire ; que son préjudice à ce titre doit être évalué à la somme de 51.843 euros (soit : 31.927 + 19.558 + 358 euros) ;

Qu’en conséquence, les appelants seront condamnés à verser à monsieur A Y, en deniers ou quittances prenant en compte la provision versée, la somme globale de 393.199,11 euros (341.356,11 + 51.843 euros) ;

Sur les autres demandes :

Attendu que l’équité ne conduit par à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties au litige pas plus qu’elle ne commande de réformer le jugement de ce chef ;

Que chacune d’elles conservera la charge de ses propres dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf en son évaluation de l’indemnisation du préjudice subi par monsieur A Y et, statuant à nouveau en y ajoutant ;

Condamne in solidum maître K E F et la SCP K E-F-G H-I J à verser à monsieur A Y, en deniers ou quittances, la somme totale de 393.199,11 euros en réparation des préjudices résultant des fautes commises par le notaire en charge de la liquidation et du partage de la communauté ayant existé entre monsieur C Y et madame X puis de l’établissement de la déclaration de succession;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit que chacune des parties au litige conservera la charge de ses propres dépens d’appel.

Arrêt signé par Madame Sylvie GUYON-NEROT, président de chambre , et Madame Marie-Lyne EL BOUDALI , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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