CA Paris du 24 novembre 2010 n° 09/06004 , Pôle 05 ch. 03

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 05 ch. 03, 24 nov. 2010, n° 09/06004
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 09/06004
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 28 janvier 2009, N° 02/5763
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3


ARRET DU 24 NOVEMBRE 2010

(n° , 27 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 09/06004

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2009 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 02/5763

APPELANTE

S. A.S AUDIOPROD représenté (e) par son Président

3 Avenue Jules J.

75116 PARIS

représentée par la SCP LAMARCHE BEQUET REGNIER AUBERT – REGNIER – MOISAN, avoués à la Cour

assistée de Me Marie Laurence MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : U.04

INTIME

Monsieur Ludovic L.

XXX

XXX

représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assisté de Me Jean Pierre BLATTER plaidant pour la SCP BLATTER RACLET et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P 441

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 29 septembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame IMBAUD CONTENT, Conseiller

Madame BLUM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame BASTIN.

Madame BARTHOLIN ayant préalablement été entendue en son rapport.


ARRÊT :

— contradictoire,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile

— signé par Madame BARTHOLIN, Présidente, et par Madame BASTIN, greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

Faits, procédure et prétentions de parties

Par acte sous seing privé en date du 17 juillet 1997, Madame Jacqueline D. , épouse L. aux droits de laquelle est venue l’indivision L. puis Monsieur Ludovic L. a donné à bail commercial à la société Audio Production aux droits de laquelle vient la société Audioprod , des locaux sis dans une voie privée, 3 avenue Jules J. , à Paris, 16e arrondissement pour une durée de neuf ans à compter du 1er juin 1992 pour se terminer le 31 mai 2001 moyennant un loyer initial de 175 730 F, soit 26 789, 86 € ;

La clause de destination du bail mentionne « le commerce d’auditorium , production, achat, vente de films et de programmes sonores et visuels ; édition, publicité , photos, exploitation de salles de projection et de montage pour usage exclusivement professionnel, à l’exclusion de tout autre » ;

Les locaux situés dans un hôtel particulier avec façade sur l’avenue Jules J. présentent une surface réelle de 339 m² et se composent de la manière suivante, selon la description du dernier avenant de renouvellement de bail du 17 juillet 1997 :

Un sous sol de 82 m² comprenant une installation de chauffage central, une grande salle de projection et quatre petites pièces desservies par un couloir ;

Un rez de chaussée de 88 m² comprenant un hall d’entrée, trois grandes pièces et lavabo, accès au jardin ;

Un 1er étage de 85 m² comprenant quatre pièces dont trois réunies en une seule et servant de salle de projection cinématographique, WC et toilettes ;

Un 2e étage de 84 m² comprenant quatre pièces dont trois réunies en une seule et servant actuellement de salle de projection cinématographique, WC ;

Par acte extra judiciaire en date du 28 novembre 2000, les membres de l’indivision L. ont donné congé avec refus de renouvellement et offre d’indemnité d’éviction pour le 31 mai 2001 à la société Audio Production aux droits de laquelle se trouve aujourd’hui la société Audioprod par l’effet d’un jugement du tribunal de commerce de Paris du 14 décembre 2000 ayant arrêté le plan de cession de la société Audio Production alors en redressement

judiciaire ;

Par acte extra judiciaire en date du 28 mars 2002, Monsieur Ludovic L. , aux droits de l’indivision L. a assigné la société Audioprod pour faire juger satisfactoire l’offre d’indemnité d’éviction de 20 000 € et subsidiairement pour voir désigner un expert judiciaire afin de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction ;

Par jugement avant dire droit du 8 janvier 2004, le Tribunal de Grande Instance de Paris a dit que le congé avec refus de renouvellement signifié le 28 novembre 2000 a mis fin au bail le 31 mai 2001 et ouvert le droit à une indemnité d’éviction et désigné Madame M. en tant qu’expert judiciaire pour déterminer l’indemnité d’éviction due à la société Audioprod et l’indemnité d’occupation due à Monsieur Ludovic L. ,

Suite au décès de Madame M. en cours d’expertise, Monsieur Xavier F. a été désigné comme nouvel expert judiciaire par ordonnance du 10 janvier 2005 ;

L’expert a déposé son rapport le 20 juin 2007 et a conclu au caractère transférable du fonds exploité et apprécié le montant de l’indemnité d’éviction totale à la somme de 502 805 € comprenant :

* une indemnité principale correspondant à la valeur du droit au bail de 297 000 € ;

* une indemnité de frais de remploi et frais d’honoraires et d’agence de 30 000 € ;

* une indemnité pour trouble commercial de 60 000 € ;

* une indemnité pour frais de réinstallation de 115 805 € ;

L’expert a en outre évalué l’indemnité d’occupation due par la société Audioprod à hauteur de 49 950 € par an à compter du 1er juin 2001, après réfaction pour cause de précarité ;

Par jugement du 29 janvier 2009, le Tribunal de Grande Instance de Paris a :

— dit que le fonds exploité par la SAS AUDIOPROD dans les locaux sis 3 avenue Jules J. à Paris 16e , peut être transféré sans perte majeure de clientèle ;

— débouté la SAS AUDIOPROD de sa demande de contre expertise ou de complément d’expertise afin de recueillir tous éléments en vue de déterminer la valeur du fonds ;

— dit que l’indemnité principale composant l’indemnité d’éviction est constituée par la valeur du droit au bail ;

— dit que les locaux exploités par la SAS AUDIOPROD ne sont pas à usage exclusif de bureaux ;

— dit que les frais de réinstallation ne sont admis qu’au titre des aménagements et installations existants à la date du refus de renouvellement ;

— dit que la SAS AUDIOPROD ne rapporte pas la preuve que les locaux bénéficiaient à la date du refus de renouvellement, d’un agrément de la société DOLBY ;

— débouté la SAS AUDIOPROD de sa demande de contre expertise ou de complément d’expertise afin d’entendre le représentant de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son et celui de la société DOLBY ;

— fixé à la somme de 521 000 € le montant de l’indemnité d’éviction toutes causes confondues due par Monsieur Ludovic L. à la SAS AUDIOPROD outre les frais de licenciements qui seront payés sur justificatifs ;

— fixé le montant l’indemnité d’occupation due par la SAS AUDIOPROD en application de l’article L 145-28 du Code de commerce à compter du 1er juin 2001 à la somme annuelle de 80 000 € ;

— débouté Monsieur Ludovic L. de sa demande tendant à voir indexer annuellement le montant de cette indemnité d’occupation ;

— dit que la compensation entre la créance de la SAS AUDIOPROD au titre de l’indemnité d’éviction et la créance de Monsieur Ludovic L. au titre de l’indemnité d’occupation s’opère de plein droit ;

— débouté Monsieur Ludovic L. de sa demande tendant à voir désigner un expert chargé de recueillir tous éléments en vue de déterminer le coût des réparations locatives imputables à la SAS AUDIOPROD ;

— désigné Monsieur l. de l’Ordre des Avocats au Barreau de Paris avec mission de recevoir le versement de l’indemnité d’éviction et de la remettre à la SAS AUDIOPROD après éventuelles compensations comme il est dit à l’article L 145-29 du Code de commerce ;

— condamné Monsieur Ludovic L. aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise et dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure civile ;

— dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire ;

La SAS AUDIOPROD a interjeté appel de cette décision;

Dans ses dernières conclusions signifiées le 3 septembre 2010, la SAS AUDIOPROD, appelante principale et intimée incidente, demande à la Cour de :

A titre principal :

Lui donner acte de ce qu’elle conteste tant l’étude que les conclusions de l’expert ;

Constater que l’expert n’a pas exécuté intégralement la mission qui lui était donnée, notamment en n’évaluant pas l’indemnité au cas de perte du fonds de commerce ;

Constater qu’elle était agréée Dolby depuis 1995 pour le deuxième auditorium et depuis 1999 pour le premier auditorium soit avant le 28 novembre 2000 ;

Constater que l’expert n’a pas tenu compte des impératifs spécifiques de l’activité exercée quant aux locaux à louer, notamment quant aux travaux très importants à y réaliser pour transformer des bureaux en deux auditoriums agréés par la société Dolby ;

Constater qu’il n’a retenu que des valeurs sans commune mesure avec le prix du marché et avec le standing de l’immeuble et du quartier pour fixer la valeur locative et la « situation commercialité » des locaux ;

Constater qu’il n’a retenu en ce qui concerne le trouble commercial que la capacité d’autofinancement sur la base du résultat d’exploitation 2005, sans tenir compte des

préconisations de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son, autorité en la matière qui, elle, retient 6 mois de chiffre d’affaires ;

En conséquence :

Ordonner une contre expertise ou, à titre extrêmement subsidiaire, un complément d’expertise ;

A titre subsidiaire :

Fixer le montant de l’indemnité d’éviction due par Monsieur Ludovic L. à une somme qui ne pourra être inférieure à la somme de 1 408 500 € ;

Lui donner acte de ce qu’elle accepte que les frais de déménagement et de réinstallation éventuelle, de frais salariaux soient pris en compte sur justificatifs ;

Dire et juger que Monsieur Ludovic L. devra supporter l’indemnité de double loyer ;

Lui donner acte qu’elle conteste le rapport du sapiteur qui n’a fait aucune mesure spécifique de bruit ;

Constater qu’il n’a auditionné aucun des intervenants consultés, l’Architecte en charge du projet, Monsieur D. , le représentant de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son, dont il reconnaît cependant que c’est l’autorité en la matière compte tenu de l’activité exercée, ni celui de la société Dolby sans l’accord de laquelle sur l’application de son cahier des charges, la société Audioprod ne peut continuer son activité ;

Constater la différence très importante existant entre les conclusions de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son et celles du sapiteur, et entre celles de Madame C. et du sapiteur ;

En conséquence :

Ordonner une contre expertise ou, à titre extrêmement subsidiaire, un complément d’expertise, avec pour mission notamment d’entendre le représentant de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son et celui de la société Dolby ;

Dire que Monsieur Ludovic L. devra fournir une caution bancaire de 1 850 000 € compte tenu de l’importance des travaux qui vont devoir être réalisés pour permettre à la société Audioprod de continuer à exercer l’activité qu’elle exerçait dans les locaux du 3 avenue Jules à 75 116 PARIS ;

Débouter Monsieur Ludovic L. de ses demandes, fins et conclusions, notamment en ce qui concerne celles portant sur d’éventuelles réparations locatives et les dépens ;

Condamner Monsieur Ludovic L. au paiement d’une somme de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Regnier Bequet Moisan avoués aux offres de droit en application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure civile ;

Dans ses dernières conclusions signifiées le 30 juillet 2010, Monsieur Ludovic L. , intimé principal, appelant incident, demande à la Cour de :

Confirmer le jugement en ses dispositions non critiquées ;

Débouter la société Audioprod de son appel ;

Le dire recevable et bien fondé en son appel incident ;

Juger que la société Audioprod n’a pas justifié de l’autorisation expresse et par écrit des bailleurs pour procéder aux travaux réalisés dans les lieux dont elle demande l’indemnisation ;

Juger qu’en tout état de cause la clause du bail prévoyant que tous travaux d’amélioration ou de modification deviendront à la fin du contrat la propriété du bailleur sans indemnité s’oppose à une indemnisation à ce titre et que, en toute hypothèse la consistance des locaux doit être appréciée à la date de délivrance du congé sans que puissent être invoqués des travaux postérieurs à cet acte et encore moins des prescriptions nouvelles des fournisseurs de matériel quant à leur utilisation ;

A titre principal, fixer l’indemnité devant revenir à la société Audioprod à la somme de 63 620 € , subsidiairement de 82 886 € et à titre plus subsidiaire encore de 218 786 € ;

Fixer l’indemnité d’occupation en valeur au 1er juin 2001, due par la société Audioprod à la somme annuelle de 97 125 € ;

Dire que cette indemnité sera indexée chaque année en fonction de l’évolution de l’indice du coût de la construction, l’indice de référence étant le dernier indice publié à la date du 1er juin 2001 ;

Dire que les compléments d’indemnité d’occupation par rapport aux sommes versées par la société Audioprod porteront intérêts au taux légal depuis chaque date d’exigibilité en application de l’article 1155 du Code civil et ordonner leur capitalisation en application de l’article 1154 du même code pour ceux dus depuis plus d’une année ;

Ordonner la compensation des dettes et créances respectives à concurrence de la plus faible d’entre elles ;

Donner acte au bailleur de ce qu’il entend obtenir la remise des lieux loués en leur état primitif aux frais du preneur conformément aux clauses du bail ;

Désigner un expert avec la mission de se rendre sur place, se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission, visiter les lieux, constater l’état général des locaux tant intérieurs qu’extérieurs, en particulier celui des façades, sur rue et sur cour ainsi que celui des menuiseries, des ferronneries et des parties métalliques ;

Donner son avis au regard des clauses du bail sur les travaux d’entretien et de remise des lieux en leur état primitif à la charge du locataire conformément aux clauses du bail et en chiffrer le coût ;

Dire que les dépens tant de première instance, en ce compris les frais et honoraires d’expertise que d’appel seront partagés par moitié entre les parties, qui pourront être directement recouvrés par la scp Hardouin , en application de l’article 699 du Code de procédure civile ;


MOTIFS

1- Sur l’indemnité d’éviction :

1-1- Situation locative et consistance des locaux loués :

L’expert a conclu que sur le plan de la commercialité, le situation des locaux pouvait être qualifiée de particulièrement bonne au regard de l’activité et du commerce considéré ;

Les locaux du rez de chaussée se composent d’une entrée, d’un dégagement et de cinq bureaux ;

Les locaux au 1er étage se composent d’un auditorium, d’une cabine de projection et de sanitaires ;

Les locaux du 2e étage se composent d’un auditorium, d’un local technique et de sanitaires ;

Les locaux en sous sol se composent d’une chaufferie, d’un bureau et d’un studio radio comprenant un dégagement, un cabinet « Speak », une cabine, deux pièces aménagées en local technique et deux débarras à la suite, l’expert soulignant dans son rapport que cette partie des locaux a fait l’objet d’une rénovation eu cours du 4e trimestre 2004 ;

L’expert a conclu dans son rapport qu’abstraction faite de la partie du sous sol qui a été rénovée à la fin de l’année 2004, les locaux présentent un état général vétuste ;

Comme l’a rappelé le premier juge, l’application du principe selon lequel la consistance du fonds doit être appréciée à la date d’effet du congé, soit le 31 mai 2001, conduit à devoir indemniser la société Audioprod au titre des seuls aménagements et installations caractéristiques de la consistance des locaux à cette date ;

Compte tenu des observations de l’expert, la transformation de « salles de projection » en « auditoriums » au 1er et au 2e étage ne constitue à l’évidence qu’un changement de dénomination ou, tout au plus, de modalité d’utilisation de locaux existants, si tant est qu’il existe d’ailleurs une véritable différence, conforme à la destination du bail, qui ne nécessitait aucune autorisation particulière en cours de bail compte tenu des clauses et conditions du bail ;

Cette distinction terminologique est d’autant plus indifférente que, comme il sera exposé dans les développements relatifs à la date d’obtention de l’agrément Dolby , le consultant officiel de la société Dolby en France a attesté (pièce Audioprod n°48) que ces « auditoriums » 1 et 2 étaient agréés Dolby depuis 1999 et 1995 respectivement, à une date où le renouvellement de bail de 1997 les désignait comme salles de projection, ce qui tend à démontrer qu’au delà des différences de dénomination, les potentialités d’utilisation des locaux sont restées identiques ;

L’aménagement du studio d’enregistrement en sous sol en lieu et place de la salle de projection / auditorium au cours de l’année 2004 a en revanche modifié la consistance des locaux loués et ne peut en conséquence être pris en compte au titre de l’indemnisation ;

L’expert se limitant à parler de simple rénovation s’agissant du sous sol, son rapport ne permet pas en revanche de conclure avec certitude à un changement de distribution des locaux ;

Ce seront donc bien trois auditoriums / salles de projection qui seront pris comme consistance de référence à la date d’effet du congé avec refus de renouvellement le 31 mai 2001 ;

1-2- Sur la nature des locaux loués :

Dans ses dernières conclusions, Monsieur Ludovic L. estime que le régime juridique qui doit être appliqué aux locaux est celui des locaux à usage exclusif de bureaux en ce que l’activité autorisée dans les locaux loués serait une activité exclusivement d’ordre intellectuel qui ne comporterait ni manipulation, ni stockage, ni vente de marchandises.

Selon Monsieur Ludovic L. , le loyer du bail s’il avait été renouvelé aurait ainsi été fixé à la valeur locative en application de l’article R 145-11 du Code de commerce et il n’existerait aucun différentiel de loyer susceptible de justifier une valeur de droit au bail ;

Néanmoins, comme l’a à juste titre relevé le premier juge, la clause de destination du bail vise explicitement « le commerce d’auditorium, production, achat, vente de films et de programmes sonores et visuels ; édition, publicité, photos, exploitation de salles de projection et de montage pour usage exclusivement professionnel, à l’exclusion de tout autre » qui peut se résumer en une activité de post production cinématographique télévisuelle ou radiophonique ou encore une production sonore et visuelle destinée au secteur de la publicité ;

L’activité exercée est donc bien distincte d’une activité purement administrative et intellectuelle , de sorte que les locaux ne peuvent s’apparenter à des locaux à usage exclusif de bureaux mais bien plus à des locaux à usage d’ateliers commerciaux et de locaux d’activité de production sonore et visuelle comme en attestent la présence du studio d’enregistrement, du cabinet « Speak », de la console de mixage et des salles de projection destinés à accueillir tant les producteurs clients de la société Audioprod que les artistes impliqués dans les activités de post production ;

Le premier juge en a ainsi justement conclu que loyer du bail, s’il avait été renouvelé, n’aurait pas été fixé à la valeur locative estimée comme en matière de baux à usage exclusif de bureaux:

Le jugement sera confirmé sur ce point ;

1-3- Sur l’indemnité principale :

Dans son rapport, l’expert a conclu que, compte tenu de l’activité exercée par la société Audioprod, une réinstallation sans perte importante de clientèle apparaît parfaitement réalisable et n’a ainsi calculé qu’une indemnité d’éviction de transfert de fonds de commerce dans des locaux équivalents, l’hypothèse d’une indemnité d’éviction avec perte de fonds de commerce étant écartée ;

Dans ses dernières conclusions, la société Audioprod soutient cependant que l’expert n’a pas pris en compte la spécificité de son activité qui nécessiterait d’être exercée dans les 8e, 16e ou 17e arrondissements de Paris afin que la situation géographique de la société Audioprod soit aussi proche que possible de la situation géographique des maisons de distribution situées pour la plupart dans l’ouest parisien et au plus près des Champs Elysées à Paris ;

Selon la société Audioprod , des locaux similaires n’existeraient ni dans le 16e arrondissement ni dans les arrondissements limitrophes, présentant les mêmes caractéristiques de standing et, s’ils existaient, il n’est pas certain que les propriétaires acceptent qu’ils soient entièrement aménagés pour accueillir les trois auditoriums insonorisés ;

Or, comme l’a justement relevé le premier juge, la clientèle de la société Audioprod est composée exclusivement de professionnels qui s’adressent à cette dernière en raison de son

expertise en matière de post production cinématographique et télévisuelle, indépendamment de la localisation de ses locaux comme en atteste la faible commercialité et le caractère confidentiel de l’avenue Jules J. ;

Et s’il est indéniable que la spécificité de la branche d’activité cinématographique de la société Audioprod requiert une réinstallation à proximité des distributeurs et producteurs localisés dans l’Ouest Parisien et sa proche banlieue, la recherche de nouveaux locaux dans les seuls 8e, 16e ou 17e arrondissement, si tant est qu’elle soit impossible, ce qui n’est pas démontré, apparaît trop restrictive, la zone géographique d’implantation des clients de la société Audioprod , comme en atteste le plan de localisation des clients fourni par la société Audioprod elle même, étant suffisamment vaste pour lui permettre d’y retrouver des locaux, aussi spécifiques soient ils, avec ou sans les aménagements nécessaires ;

L’expert a donc valablement pu se contenter de calculer une indemnité d’éviction au seul cas du transfert possible du fonds commerce en ne calculant pas l’indemnité de remplacement du fonds de commerce compte tenu de l’activité de la société Audioprod ;

Le premier juge a ainsi à juste titre écarté la demande de contre expertise formulée par la société Audioprod pour voir calculer une indemnité d’éviction de remplacement de fonds de commerce ;

L’indemnité d’éviction principale de transfert de fonds est égale à la valeur du droit au bail qui s’exprime par la différence existant entre :

— d’une part le loyer qui devrait être acquitté pour un local comparable dans le quartier, au prix du marché ;

— d’autre part, le montant du loyer si le bail avait été renouvelé ;

Il s’agit donc de l’économie de loyer capitalisée par un coefficient multiplicateur fondé sur l’analyse du marché ;

1-3-1-- Sur le loyer de renouvellement :

Compte tenu des valeurs locatives de référence retenues par l’expert et datant de 2004 et 2005, il y a lieu également pour apprécier le montant du loyer renouvelé de se référer au loyer révisé en 2004, comme l’a fait l’expert dans son rapport du 15 juin 2007 puis le premier juge ;

Comme rappelé dans le rapport de l’expert, en l’absence de motif de déplafonnement, le loyer plafonné du bail renouvelé au 1er juin 2001 aurait été de 30 132,03 € et le loyer révisé au 1er juin 2004 de 33 518,25 € arrondi à 33 158 euros ;

1-3-2- Sur la pondération des surfaces :

La surface réelle de 339 m² n’est pas contestée par les parties ;

En revanche, si l’expert retient un coefficient de pondération de 1 pour l’ensemble des surfaces au rez de chaussée, au premier étage et au deuxième étage, il pondère les 82 m² de surface réelle en sous sol avec un coefficient de 0,25 pour une surface pondérée en sous sol de 20,50 m² ;

Pour écarter cette pondération et retenir la surface réelle sur l’intégralité des locaux, le premier juge a relevé que la partie la plus moderne des locaux se situe au sous sol et ne subit aucune nuisance du fait de l’absence d’éclairage naturel ; la preuve étant que les fenêtres des étages supérieurs accueillant les auditoriums son obstruées comme en attestent les photographies du rapport de l’expert ;

Le premier juge a par ailleurs retenu qu’une telle pondération n’était pas justifiée et que la surface réelle devait être retenue comme il est d’usage pour les locaux d’activité ;

Monsieur Ludovic L. demande à la cour d’infirmer le jugement sur ce point et fait valoir qu’il ne peut être tenu compte de l’état du sous sol dans sa configuration actuelle de studio radio alors que les travaux d’aménagement n’ont été menés que postérieurement à la délivrance du refus de renouvellement ;

Néanmoins, il doit être observé que l’acte de renouvellement de bail daté du 17 juillet 1997 mentionne explicitement dans la désignation du sous sol la présence d’une grande salle de projection et quatre pièces, soit une distribution semblable à celle des premier et deuxième étage de sorte que, déjà en 1997, les locaux en sous sol étaient en réalité des locaux d’activité ayant un usage comparable aux locaux en étage appelés par l’expert « auditoriums », justifiant l’absence de pondération ;

Le jugement, qui a retenu les surfaces réelles sans pondération pour le calcul de la valeur locative, sera ainsi confirmé sur ce point ;

1-3-3- Sur la valeur locative :

Monsieur Ludovic L. sollicite de retenir, comme l’a fait le premier juge, la valeur locative en prix de marché des locaux, à la date d’évaluation par l’expert, soit au prix de 300 € par m² ;

Pour retenir cette valeur, l’expert a tenu compte des caractéristiques des locaux, notamment leur surface et de leur état général vétuste, abstraction faite du sous sol rénové, des clauses et conditions du bail comportant notamment la charge de l’impôt foncier au preneur et des termes de comparaison recensés ;

Il résulte des quatre références recensées par l’expert datant de 2004 à 2006 que la moyenne des références locatives est de 333,75 € avec une fourchette allant de 300 à 355 € ;

La société Audioprod reproche à l’expert d’ignorer le prix du marché et fournit la valeur locative d’un hôtel particulier du 16e arrondissement de 473 m² sur le marché locatif en novembre 2007 pour une valeur locative de 528,54 € .

La société Audioprod invoque également les nouvelles normes Dolby de 2008 qui imposeraient en pratique une hauteur sous plafond de 5 mètres impliquant de louer le double de surfaces pour pouvoir aménager les mêmes auditoriums ;

Néanmoins, si l’incidence des nouvelles normes Dolby doit être examinée, en tant que contrainte de réinstallation pour le calcul des frais de réaménagement et de réinstallation, elle ne saurait avoir une quelconque incidence sur la valeur locative de marché des locaux objet de l’éviction d’autant que la société Audioprod est toujours dans les locaux ;

Compte tenu de la vétusté générale des locaux, la fourchette basse absolue de 300 € /m² proposée par l’expert et retenue par le premier juge est justifiée de sorte que la valeur locative globale s’établit selon le calcul suivant :

339 m² x 300 € = 101 700 euros

D’où un différentiel de loyer entre le loyer plafonné et la valeur locative de 68 181 euros (101 700 -33 518 )

Le jugement déféré sera ainsi confirmé sur ce point .

1-3-4- Sur le coefficient multiplicateur de situation:

Le premier juge a retenu que l’absence de commercialité de l’avenue Jules J. et l’utilisation des locaux qui s’apparente à un usage dit d’activités conduisaient à considérer que le coefficient multiplicateur de situation de 6 retenu par l’expert, qui correspond à celui habituellement retenu pour les très bonnes situations commerciales en matière de boutique, était excessif et qu’il devait être retenu un coefficient de 5 ;

Monsieur Ludovic L. estime qu’en présence de locaux se situant dans cette voie privée résidentielle qu’est l’avenue Jules J. , on ne saurait pas même appliquer le coefficient de 5 mais un coefficient qui ne saurait être supérieur à 3 en ce que la commercialité de l’emplacement ne présenterait aucun intérêt pour l’activité de la société Audioprod ;

La société Audioprod retient au contraire que la situation des locaux est particulièrement favorable à l’activité exercée par la société Audioprod en ce qu’ils sont situés au c’ur du 16e arrondissement, faciles d’accès, et à proximité immédiate des distributeurs, réalisateurs et comédiens implantés dans le quartier , sollicitant compte tenu de ce paramètre, l’application d’un coefficient de 9 ;

Néanmoins, si comme l’a rappelé l’expert dans son rapport, la situation des locaux est particulièrement bonne au regard de l’activité exercée, il est d’usage, en matière d’ateliers et de locaux d’activité, comme c’est le cas pour les locaux de la société Audioprod, de déterminer le coefficient multiplicateur, faute de marché, selon une approche, non de valeur vénale, mais simplement indemnitaire dans une fourchette comprise entre 2 et 5 ;

La rareté de ce type de locaux pour la post production cinématographique et télévisuelle ainsi que les contraintes techniques de réinstallation qui réduisent la liberté de réinstallation de la société Audioprod , amènent ainsi à retenir un coefficient de 5 comme l’a justement retenu le premier juge ;

Le jugement déféré sera ainsi confirmé sur ce point ;

La valeur du droit au bail doit par conséquent être estimée à la somme de 340 905 (68 181 € x 5).

2-1-- Sur les indemnités accessoires :

La société Audioprod consacre dans les motifs de ses conclusions de longs développements au coût des frais de réaménagement et de réinstallation, reprenant notamment à son compte le chiffre cité dans un rapport d’expertise amiable de Madame C. architecte expert prés la cour d’appel de Paris mais elle n’ a pas chiffré les indemnités accessoires dans le dispositif de ses conclusions, fut ce à titre subsidiaire au cas où sa demande principale de contre expertise ou de complément d’expertise ne serait pas accueillie ;

Il convient toutefois de considérer, comme l’a fait le premier juge, que la cour est saisie de telles demandes accessoires contenues dans les motifs des conclusions ;

2-1-1- Sur les frais de remploi :

L’indemnité pour frais de remploi vise à couvrir les frais d’acquisition du nouveau droit au bail et comprend généralement les coûts fiscaux, les commissions d’intermédiaires et les honoraires juridiques que le locataire devra débourser pour la conclusion d’un bail portant sur des locaux équivalents à ceux dont il est évincé ;

Les parties s’accordant sur une indemnité forfaitaire égale à 10% de l’indemnité d’éviction principale, les frais de emploi seront ainsi fixés à la somme de 34 090, 50 € ;

Le jugement sera confirmé sur ce point ;

2-1-2- Sur les frais de déménagement et de réinstallation :

L’indemnité compensatrice des frais de réinstallation et de déménagement vise à réparer le préjudice subi du fait du coût afférent aux opérations et travaux indispensables à l’adaptation des nouveaux locaux à l’activité du locataire (CA Paris, 16e A 24 avril 1984, Transports Izard c/ SEEM, Rev. Loyers 1984, p.371) ;

* La consistance des locaux loués à prendre en compte pour les frais de réinstallation et la conséquence de l’agrément Dolby:

L’indemnité d’éviction a pour rôle de réparer le préjudice subi du fait du non renouvellement du bail, lequel se concrétise à la date d’effet du refus du renouvellement, impliquant l’évaluation à cette date de la consistance du fonds apprécié ;

Compte tenu des de la description des locaux selon les constatations de l’expert, l’aménagement du studio d’enregistrement en sous sol ne sera pas pris en compte et ce sont donc bien trois auditoriums / salles de projection qui seront retenus comme consistance de référence à la date d’effet du congé avec refus de renouvellement le 31 mai 2001 ;

Monsieur Ludovic L. allègue cependant que la société Audioprod ne justifie pas avoir bénéficié de l’autorisation expresse et par écrit du bailleur pour procéder aux différents aménagements ;

Or, Monsieur Ludovic L. , qui n’a pas tiré de conséquence légale du défaut d’autorisation des travaux au cours du bail ou au cours de la présente procédure, ne justifie pas que les aménagements opérés par la société Audioprod entrent dans le champ de la clause d’autorisation des travaux du bail de 1997 qui vise seulement les changements de distribution, les démolitions aux constructions et les percements de mur ou de voûte et les constructions ;

Le rapport d’expertise mentionne seulement une rénovation du sous sol et ne permet pas conclure avec certitude à un changement de distribution des locaux au vu de la description des locaux actuels faite par l’expert d’une part, et des plans d’origine des locaux d’autre part ;

En outre, la clause d’accession gratuite invoquée par Monsieur Ludovic L. dans ses conclusions, interdisant au locataire de solliciter quelque indemnité que ce soit au titre des travaux d’amélioration ou de modification en cours de bail, ne saurait avoir pour effet d’écarter le droit pour le locataire à une indemnité d’éviction et ses accessoires, en ce compris les frais de réinstallation de ces améliorations et aménagements éventuels, l’indemnité d’éviction étant une indemnité d’ordre public et la jurisprudence excluant uniquement, en cas de clause d’accession en fin de bail, l’indemnisation de la perte de travaux non encore amortis, ce que ne demande pas la société Audioprod (Cass, 3e , 1er juillet 2003, n°02-13083) ;

Enfin, Monsieur Ludovic L. se prévaut tant de la description contractuelle des locaux que de la clause de destination du bail pour affirmer que l’activité de traitement du son et de studio d’enregistrement , tout comme l’agrément de la société Dolby ne seraient pas visés au bail, étant rappelé que la clause de destination prévoit « le commerce d’auditorium, production, achat, vente de films et de programmes sonores et visuels ; édition, publicité, photos, exploitation de salles de projection et de montage pour usage exclusivement professionnel, à l’exclusion de tout autre ».

Monsieur Ludovic L. soutient notamment qu’il n’a pas été donné à bail des locaux bénéficiant d’un agrément quelconque ni destinés ou susceptibles de recevoir un tel agrément , se fondant sur une jurisprudence selon laquelle il doit être fait abstraction d’un mode particulier de gestion non visé dans la clause de destination du bail ;

Or, l’activité de traitement du son est à l’évidence une activité nécessaire à la « production ['] de films et de programmes sonores et visuels » ; elle est ainsi incluse dans la destination du bail et il résulte de la situation de fait de quasi monopole de la société Dolby que l’activité de post production cinématographique sous agrément Dolby ne constitue pas un mode de gestion particulière mais bien au contraire une norme qui s’est imposée à tous les acteurs de ce marché, l’activité de production et de montage de films prévue au bail présupposant nécessairement ce type d’agrément ;

Comme l’a exposé l’importateur de la société EUPHONIX (producteur de consoles de mixage son), dans son attestation datée du 4 juin 2010, « Dolby a le quasi monopole sur le marché mondial avec plus de 80% de films produits et dupliqués. Tous les auditoriums de mixage film ['] qui produisent des bandes sonores pour le long métrage sont obligatoirement équipés Dolby ».

« A l’inverse que le mixage soit fait avec une Euphonix, une Neve ou une Digidesign ne changera en rien l’obligation pour tout auditorium de disposer d’un traitement acoustique et des équipements Dolby pour écouter et vérifier la bande sonore en cours de mixage puis de créer avec les équipements Dolby l’enregistrement du master optique final. »

« Les équipements DOLBY sont aussi présents dans plus de 80% des salles de cinéma dans le monde et ce fabricant détient le quasi monopole du standard audio sur les supports vidéos diffusés comme le DVD »

« Dolby est donc de facto le standard minimum obligatoire à posséder pour que « [la SAS AUDIOPROD] puisse répondre à toute proposition commerciale ».

La société GAUMONT, en tant que producteur distributeur de films pour le cinéma a d’ailleurs confirmé dans son courrier daté du 20 octobre 2008 qu’elle ne pourrait plus travailler avec la société Audioprod dans le cas où celle ci perdait son agrément Dolby ;

Ce qui est corroboré par la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son qui mentionne dans son rapport d’expertise que « Les métiers de la post production doivent répondre à au moins deux aspects « administratifs » liés à la spécificité de leur métier :

* l’obtention de l’autorisation d’exercice auprès du service compétent du Centre National de la Cinématographie ;

* l’obtention de l’homologation Dolby pour pouvoir finaliser les mixages pour un retour vers film et exploitation sous licence Dolby (80% des films long métrage aujourd’hui) »

C’est donc à tort que Monsieur Ludovic L. soutient que l’activité de la société

Audioprod ne serait pas dépendante de l’agrément de la société Dolby qui ne serait pas la seule à fournir de matériel audio phonique, les pièces produites par la société Audioprod démontrant que la solution technique matérielle de mixage est indifférente pour l’obtention d’un agrément Dolby qui se trouve en situation de quasi monopole ;

C’est à juste titre que le premier juge en a conclu qu’en raison de la notoriété acquise par la société Dolby et de la situation de quasi monopole qui en découle, la société Audioprod peut être suivie lorsqu’elle soutient que la pratique des mixages pour des longs métrages de cinéma ou des bandes annonces suppose un agrément préalablement donné par cette société ;

Reprenant les arguments du premier juge, Monsieur Ludovic L. soutient cependant que les locaux loués ne bénéficiaient pas encore à la date d’effet du congé de l’agrément Dolby ;

Selon Monsieur Ludovic L. , s’appuyant sur le jugement du tribunal de Commerce de Paris du 14 décembre 2000 ayant arrêté le plan de cession de la société Audio Production , une des raisons de son choix de retenir l’offre de reprise présentée par la société TEST pour le compte d’une société à constituer par elle, devenue la société Audioprod, aurait été sa volonté d’intégrer à l’activité alors exercée le traitement du son qui aurait été jusqu’alors sous traitée à l’extérieur ;

Monsieur Ludovic L. s’appuie également sur une longue missive en langue anglaise du 11 juillet 2002 produite par la société Audioprod qui lui aurait été adressée par la société Dolby et se terminant par les termes « we hope that the preceding pages have given you a a clear insight into the procedures that we will require you to follow if you wish your studio to be added to our published list of Dolby Approved Studios » pour en déduire que les locaux ne bénéficiaient pas, à la date du refus de renouvellement, de l’agrément Dolby ;

Il s’agit d’un document intitulé « Studio Approval Requirements for Mixing Feature Films in Dolby Formats » que la société Audioprod a d’ailleurs spontanément produit en première instance qui fait état des spécifications techniques requises par Dolby en 2002 ;

Or, d’une part, l’imprécision des termes du jugement ordonnant la cession des actifs de la société Audio Production , en ce qui concerne précisément l’activité son alors sous traitée ne permet pas d’affirmer que la société Audio Production , à la date de la cession du fonds, n’exerçait pas à cette date une activité de production sonore pour le cinéma conformément à la clause destination du bail en renouvellement au 17 juillet 1997 et aux extraits K Bis fournis par la société Audioprod décrivant l’activité de la société Audio Production ;

D’autre part, la comparaison du document courrier produit par la société Audioprod avec le document « Studio Approval Requirements for Mixing All Dolby Theatrical Formats » datant de novembre 2008 produit par Monsieur Ludovic L. dont les cinq premiers paragraphes sont quasiment identiques au mot près et ont pour but de présenter à toute société intéressée les normes en vigueur pour obtenir l’agrément Dolby pour tout nouvel auditorium, atteste du caractère générique et impersonnel de ce premier document ;

Il est d’ailleurs à noter que la phrase conclusive« we hope that the preceding pages have given you a a clear insight into the procedures that we will require you to follow if your wish your studio to be added to our published list of Dolby Approved Studios » est reproduite à l’identique sur les deux documents à six années d’intervalle à deux sociétés différentes ;

L’existence d’activité de mixage sonore aux normes Dolby à la date d’effet du refus du renouvellement le 31 mai 2001 est au contraire confirmée par le fax adressé le 11 janvier 2001 par la société Dolby à la société Audioprod sur son numéro de fax correspondant aux locaux de l’avenue Jules J. , qui mentionne :

« Our agreement formalities have been completed by Folimage for the short films Zodiac and Le Nez à La Fenêtre, which I understand are scheduled to be mixed in Dolby SR at your facility from 24 January. I confirm these Dolby mixes can take place. »

Ce document produit pour la première fois en cause d’appel permet ainsi d’affirmer, qu’au moins à la date d’effet du congé avec refus de renouvellement, la société Audioprod disposait d’un agrément de la société Dolby pour les locaux dont la société Audioprod est évincée ;

Par ailleurs, dans l’inventaire détaillé annexé à l’acte de cession du 7 mars 2001 figure la présence d’un matériel Dolby DS4 alors en dépôt, dont la valeur n’a pas été mentionnée et listé « pour mémoire » ;

La société Audio prod explique la présence de ce matériel Dolby en dépôt dans les locaux en ce qu’il ne pouvait être vendu, ayant été placé par la société Dolby dans les studios ayant reçu son agrément ;

Cette affirmation est corroborée par le document du 11 juillet 2002 (censé apporté la preuve du non agrément des auditoriums par la société Dolby à cette date) qui mentionne en page 2 « Once we are happy that a studio is sufficiently equipped for the preparation of « Printing Masters », our DS4E, DS10, SEU4- EX, cinema encoder units, or, alternatively a DMU (Digital Mastring Unit) will be provided by us on a loan basis » ;

Explication qui est d’ailleurs réaffirmée par le consultant officiel de la société Dolby en France dans un courrier électronique adressé à la société Audioprod le 2 septembre 2010 (pièce Audioprod n°56) ;

Ainsi, la présence dans les locaux de cet encodeur Dolby DS4 à la date de l’acte de cession du 7 mars 2001 conduit à conclure qu’elle disposait déjà à cette date de l’agrément Dolby puisque la mise à disposition par la société Dolby de ce matériel est conditionnée à la mise aux normes suffisante des auditoriums et studios, et donc à l’agrément Dolby ;

Au surplus, Monsieur Francis P. , en sa qualité de consultant officiel de la société Dolby pour la France et dûment reconnu par la société Dolby dans sa documentation de présentation officielle a confirmé par un courrier daté du 16 mars 2009 produit pour la première fois en cause d’appel que :

« L’Auditorium 1 du studio Piste Rouge est approuvé par Dolby Laboratories pour le mixage des formats audio Dolby destinés au cinéma depuis 1999 au nom de la société Audio Production ;

L’Auditorium 2 du studio Piste Rouge est approuvé par Dolby Laboratories pour le mixage des formats audio Dolby destinés au cinéma depuis 1995 au nom de la société Audio Production » ;

L’authenticité de cette pièce n’ayant pas été contestée par Monsieur Ludovic L. dans ses dernières conclusions, il résulte de l’ensemble des éléments précités que la société Audioprod bénéficiait bien de l’agrément Dolby à la date d’effet du refus de renouvellement le 31 mai 2001 ;

* Sur le montant de l’indemnité pour frais de réinstallation et de déménagement

Monsieur Ludovic L. invoque que les nouvelles normes Dolby de 2008 pour l’installation de nouveaux auditoriums ne sauraient lui être opposables en ce que les normes alléguées seraient postérieures à la date d’effet du congé, l’indemnité d’éviction ayant pour

objet de réparer le préjudice subi par le défaut de renouvellement et non de rembourser au locataire le coût de sa réinstallation, au delà des frais normaux de réinstallation ;

Monsieur Ludovic L. sollicite subsidiairement un abattement pour vétusté de l’ordre de 80 à 90 % compte tenu des aménagements acoustiques remontant au début des années 1980 ;

Néanmoins, en application du principe indemnitaire, toutes les dépenses qui sont la conséquence de l’éviction doivent être prises en compte pour le calcul de l’indemnité et il est indispensable pour la société Audioprod d’adapter ses nouveaux locaux à son activité, aussi spécialisée soit elle, de sorte que Monsieur Ludovic L. devra supporter au moins une partie de ces travaux d’aménagement ;

Il ressort à ce sujet clairement du courrier en date du 30 septembre 2008 adressé à la société Audioprod par le consultant officiel de la société Dolby que les nouvelles normes Dolby en date du 1er juin 2008 n’imposent pas, en vertu d’une règle d’antériorité, une mise aux normes des installations existantes mais sont en revanche obligatoires pour « toute nouvelle installation, création ou transfert ['] sous peine d’un refus catégorique de l’agrément ['] des studios » ;

Il convient à ce titre de relever que l’indemnité pour frais de réinstallation et de déménagement retenu par l’expert ne tient compte que des seuls frais d’isolation et de correction acoustique évalués par le sapiteur ;

Aux termes de sa note définitive en date du 28 août 2006, Monsieur Thierry M. , sapiteur acousticien, a actualisé son estimation des frais d’isolation et de correction acoustique au montant de 115 805 € , y compris les honoraires de maîtrise d''uvre ;

La société Audioprod critique cette note au motif que le sapiteur n’a effectué aucune audition ni procédé à des mesures acoustiques ;

Or Monsieur M. qui est architecte expert en acoustique était chargé de donner son avis à l’expert sur les frais de réinstallation des auditorium en référence aux aménagements existants ; il n’avait donc pas à solliciter lui même un avis technique ni à procéder à des mesures de bruit ;

Elle critique également son évaluation chiffrée en produisant tant un courrier du consultant officiel de la société Dolby que le rapport amiable de Madame Pauline C. en sa qualité d’expert, celle ci mentionnant que « cette somme est totalement sous évaluée et ne prend en compte que la mise en place d’une isolation de base d’un local nécessitant une isolation particulière et non de locaux où se déroule une activité spécifique »;

La société Audioprod produit un rapport de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son (pièce n°26) suivant lequel il y lieu de retenir un montant total H. de 1 040 000 € détaillé comme suit :

Travaux de gros uvre et d aménagement de base : 50 000 € ;

Traitement acoustique des locaux : 700 000 € ;

Câblage Technique : 200 000 € ;

Traitements techniques spécifiques : 30 000 € ;

Déménagement : 60 000 € ;

Madame Pauline C. retient, dans son rapport d’expertise amiable (pièce n°40) les postes suivants pour un montant total de 1 800 000 € :

Travaux préparatoires à l’installation pour obtenir le volume nécessaire : 300 000 € ;

Travaux de reprise de gros uvre et cloisonnement : 100 000 € ;

Traitement spécifique acoustique des locaux : 600 000 € ;

Câblage Technique, informatique, climatisation : 100 000 € ;

Embellissements, travaux de décoration : 80 000 € ;

Aménagement des extérieurs : 10 000 € ;

Divers honoraires de maîtrise d’oeuvre : 270 000 € ;

Déménagement : 30 000 € ;

Plus value pour respect des normes DOLBY 2008 compte tenu des volumes supplémentaires nécessaires : 250 000 € ;

Frais attachés aux intervenants externes : 30 000 € ;

Compte tenu de l’ensemble des éléments dont elle dispose, la Cour s’estime suffisamment informée pour déterminer les montants de l indemnité de déménagement et de réinstallation, sans avoir à recourir à la contre expertise demandée par Audioprod et qui serait sans intérêt pour la solution du litige ;

Les frais de câblage sont comptés pour 200 000 euros par la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son, pour 100 000 euros par Madame C. et la société Audioprod produit également des devis non actualisés établis en 2002 pour un montant de 188 814, 50 euros ttc ;

Le traitement spécifique de l’acoustique est chiffré à 700 000 euros par la Commission de l’image et du son et à 600 000 euros par l’expert amiable ;

Toutefois, ce dernier poste traitement de l’acoustique n’est justifié par aucun devis émanant d’une entreprise spécialisée alors qu’il aurait été aisé à la société Audioprod qui a fait procéder à l’aménagement d’un studio d’enregistrement en 2004 et qui a disposé ou dispose encore d’autres locaux qu’elle a fait aménager en studios de production sonore et visuel soit pour la télévision soit pour le cinéma avec les mêmes contraintes pour ces derniers que celles évoquées concernant la norme Dolby , de produire des factures de travaux alors et surtout que les studios qu’elle a aménagés à Angoulême sont de facture récente ;

Enfin, les travaux de gros oeuvre et d’aménagement de base sont simplement éventuels dés lors qu’ils dépendent de la qualité des locaux de remplacement qui peuvent avoir été conçus pour des studios d’enregistrement ou auditorium sans nécessité, dans ces conditions, de travaux de gros oeuvre ou d’aménagement de base ;

Les autres travaux d’embellissement et d’aménagement extérieur visés dans le rapport de Madame C. ne constituent pas des frais de réinstallation nécessaires à l’activité exercée et doivent être écartés ;

Dans ces conditions, il ne sera tenu compte ni d’un surcoût du à des travaux de gros oeuvre ou d’aménagement de base simplement éventuels ni des travaux d’embellissement ;les frais de câblage et de raccordement seront comptés pour 188 814, 50 euros suivant devis produits et les frais d’acoustique spécifiques seront chiffrés au coût évalué par l’expert soit 100 700 euros majoré de 15 % pour tenir compte des normes Dolby datant de 2008 portant cette somme à 115 805 € ,(hors honoraires de maîtrise d''uvre de 15%) ;

Hors frais de déménagement, il sera ajouté un forfait de 15%, comme retenu par le sapiteur Monsieur M. pour les divers de honoraires de maîtrise d''uvre soit :

188 814, 50 +15 % = 217 136, 67 euros

115 805 + 15 % = 133 175, 75 euros

Il sera en revanche retenu un abattement de 50 % pour tenir compte de l’amortissement prévisible sur les travaux de câblage divers et les travaux acoustiques ;

Les frais de déménagement seront retenus comme l’a fait le premier juge pour un montant total de 27 980 € selon les devis CAP déménagements de juin 2002 (pour le déménagement des meubles) et Solid State Logic de juin 2002 (pour la console SSL OMNI MIX) ;

Poste de frais Coût H. Frais de déménagement 27 980 € Câblage et raccordement (dont maîtrise d''uvre de 15%) 217 136, 67 Isolation et correction acoustique (dont maîtrise d''uvre de 15%) 133175, 75 Abattement de 50% sur les travaux pour vétusté, hors frais de déménagement 175 156, 21 TOTAL 203 136, 21 €

L’indemnité totale pour déménagement et frais de réinstallation s’élève ainsi à la somme de 203 136, 21 € ;

2-1-3- Sur l’indemnité pour trouble commercial :

L’indemnité pour trouble commercial a pour objet de réparer le préjudice causé par la perturbation dans l’exploitation du fonds due au non renouvellement du bail ;

L’expert a évalué cette indemnité sur la base de 3 mois de la capacité d’autofinancement pour l’exercice 2005 de la société Audioprod, soit une indemnité arrondie à 60 000 € ;

La société Audioprod se fonde sur l’estimation de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son pour demander une indemnité équivalent à 6 mois de chiffre d’affaires ;

Monsieur Ludovic L. fait valoir que cette indemnité estimée à 60 000 € par l’expert doit être réduite pour tenir compte d’un sur profit réalisé par l’entreprise, compte tenu d’un loyer qu’il estime particulièrement faible ;

La proposition de l’expert de calculer l’indemnité sur la base de 3 mois de capacité d’autofinancement est néanmoins conforme aux usages, d’autant que l’estimation économique de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son n’a qu’une valeur informative

au regard de l’expertise judiciaire, et la société Audioprod ne justifie d’aucun élément exceptionnel pouvant majorer cette indemnité ;

Par ailleurs, comme l’a estimé le premier juge, il n’y pas lieu, comme le demande Monsieur Ludovic L. de pratiquer une réfaction au motif que le loyer payé par la société Audioprod serait anormalement bas par rapport au prix du marché puisque l’indemnité pour trouble commercial en cas d’éviction a exactement pour but de dédommager le préjudice subi par l’activité commerciale résultant de l’obligation de quitter des locaux loués ;

Comme l’a précisé l’expert dans son rapport la société Audioprod a dégagé une capacité d’autofinancement de 236 058 € pour l’exercice 2005, qui, rapportée à une durée de 3 mois, s’élève à la somme de 59 014 € , arrondie à 60 000 € ;

2-1-4- Sur les frais de licenciement :

La société Audioprod demande à la Cour de confirmer la décision du premier juge qui a précisé que le coût des licenciements qui pourraient intervenir suite à l’éviction des locaux de l’avenue Jules J. seront payés par Monsieur Ludovic L. sur justificatifs ;

Ce point n’étant pas contesté par Monsieur Ludovic L. , le jugement sera confirmé sur ce point ;

2-1-5- Sur l’indemnité de double loyer :

La société Audioprod demande à la Cour de dire et juger que Monsieur Ludovic L. devra supporter l’indemnité de double loyer ;

Celle ci sera évaluée forfaitairement selon l’usage à 2 mois de la valeur locative annuelle des locaux objet de l’éviction, soit la somme de 18 080 € (108 480 € x 1/6) ;

L’indemnité d’éviction totale (hors frais de licenciements sur justificatifs) sera ainsi de 656 211, 71 € arrondis à 656 212 € , selon la décomposition suivante :

Indemnité d’éviction principale 340 905 € Frais de remploi 34 090, 50 € Frais de déménagement et de réinstallation 203 136, 21 € Trouble commercial 60 000 € Double Loyer 18 080 € TOTAL 656 211, 71 €

Le jugement sera réformé sur ce point ;

2- Sur l’indemnité d’occupation:

Aux termes de l’article L145-28 du Code de commerce, le locataire évincé qui se maintient dans les lieux est redevable d’une indemnité d’occupation jusqu’à ce qu’il perçoive une indemnité d’éviction et quitte en conséquence les locaux loués ;

Cette indemnité d’éviction est calculée en fonction de la valeur locative des locaux dont il est évincé ;

Bien que la société Audioprod n’ait formé dans le dispositif de ses conclusions aucune demande spécifique à ce titre, elle demande dans le corps de ses écritures en cause d’appel de

voir retenir le montant de l’indemnité d’occupation fixée par l’expert, à savoir 49 950 € par an au 1er juin 2001 après abattement pour précarité ;

Cette indemnité d’occupation a été appréciée à hauteur de 55 000 € par l’expert avant abattement pour précarité au prix de 200 euros /m² pondéré ;

Monsieur L. demande de retenir la même valeur de 300 euros /m² qui correspond à la valeur locative de marché alors que l’expert a très justement souligné que l’indemnité d’occupation ne correspond pas à la valeur locative de marché mais à la valeur locative de renouvellement déplafonnée fixée en application de l’article L 145-28 compte tenu de tous les éléments d’appréciation au nombre desquels la vétusté des locaux ;

Il convient en conséquence de retenir le prix de 200 euros /m² proposé par l’expert , ce qui compte tenu de la surface pondérée retenue par la cour , correspond à une indemnité de 67 800 euros par an à compter du 1° juin 2001;

La société Audioprod soutient qu’un abattement doit être pratiqué , le premier juge ayant retenu à tort qu’elle avait pris à bail de nouveaux locaux dans le 15e arrondissement et ne justifierait de fait d’aucun motif de précarité, alors que ces locaux dont elle a été expulsée le 31 juillet 2009 et pour lesquels elle ne disposait que d’une sous location commerciale, ne pouvaient accueillir que son activité télévisuelle, faute d’agrément Dolby pour cet auditorium ;

Or en ce qu’il a retenu que la société Audioprod savait dés son entrée dans les locaux qu’un congé avec refus de renouvellement venait d’être délivré à la société Audio Production, aux droits de laquelle elle est venue et en ce que ce congé n’a nullement nui au développement de ses activités illustré notamment par le réaménagement du sous sol, le jugement qui n’a pratiqué aucun abattement sur l’indemnité d’occupation sera confirmé ;

Enfin, compte tenu de la durée du maintien dans les lieux depuis le 1er juin 2001, et alors que le bail prévoit une indexation annuelle du prix du loyer , il convient d’indexer annuellement l’ indemnité d’occupation en fonction de l’indice INSEE du coût de la construction, l’indice de référence étant le dernier indice publié au 1er juin 2001 ;

Par ailleurs, Monsieur Ludovic L. sollicite que les compléments d’indemnité d’occupation par rapport aux sommes versées par la société Audioprod portent intérêts au taux légal depuis chaque date d’exigibilité en application de l’article 1155 du Code civil et que soit ordonnée leur capitalisation en application de l’article 1154 du même code pour ceux dus depuis plus d’une année ;

Or, s’agissant d’intérêts moratoires, ils supposent même pour des compléments d’indemnité d’occupation échue, que cette indemnité soit déterminée dans son montant, le retard ne pouvant dans le cas contraire être caractérisé ;

Tel n’est pas le cas en l’espèce de sorte que les intérêts sur les compléments dus après fixation de l’indemnité d’occupation ne peuvent courir qu’à compter de cette fixation ;

La société Audioprod sera ainsi condamnée à payer, conformément à l’article 1155 du Code civil, les intérêts au taux légal à compter de la fixation judiciaire de cette indemnité, soit à compter du prononcé du présent arrêt de la Cour, avec capitalisation en application de l’article 1154 du même code pour ceux dus depuis plus d’une année ;

3- Sur les autres demandes :

La demande de Monsieur Ludovic L. tendant à ce qu’il lui soit donné acte qu’il entend obtenir la remise des locaux loués en leur état primitif aux frais de la société Audioprod conformément aux clauses du bail est dépourvu de tout effet juridique et il n’y a pas lieu d’y faire droit ;

Monsieur L. sollicite également la désignation d’un expert aux fins de décrire et chiffrer le montant des réparations locatives à la charge du locataire ; il invoque un mauvais état d’entretien général des locaux sans cependant caractériser aucune infraction précise de la société Audioprod à son obligation d’entretien des locaux loués ;

Or, l’aléa de l’exercice par Monsieur L. de son droit de repentir qu’il tient de l’article L 145-58 du Code de commerce tout comme l’incertitude de la date de restitution éventuelle rendent sa demande d’expertise prématurée, étant observé que les parties auront la faculté de dresser en fin d’occupation un état contradictoire de sortie permettant de vérifier précisément l’état des lieux et les manquements éventuels du locataire à son obligation d’entretien .

Monsieur Ludovic L. sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a désigné Monsieur l. de l’Ordre des Avocats au Barreau de Paris avec mission de recevoir le versement de l’indemnité d’éviction et de la remettre à la société Audioprod après compensations comme il est dit à l’article L 145-29 du Code de commerce, ;

Le jugement sera confirmé sur ce point, ce qui permet au demeurant à Monsieur Ludovic L. de sauvegarder ses droits au titre des réparations locatives;

Monsieur Ludovic L. et la société Audioprod étant réciproquement débiteur et créancier l’un de l’autre, la compensation s’opérera de plein droit ;

Compte tenu de la compensation à venir, du montant de l’indemnité d’éviction et de la désignation d’un séquestre, la demande de la société Audoprod tendant à ce que Monsieur Ludovic L. fournisse une caution bancaire sera rejetée ;

Le jugement en ce qu’il a dit que Monsieur Ludovic L. supportera les entiers dépens de première instance, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire, sera confirmé ;

Chacune des parties succombant partiellement en cause d’appel, supportera les dépens qu’elle a exposés .

Il n’y a pas lieu à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel ;


PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a dit que la société Audioprod ne rapportait pas la preuve que les locaux bénéficiaient à la date du refus de renouvellement d’un agrément de la société Dolby, en ce qu’il a fixé à la somme de 521 000 euros le montant de l’indemnité d’éviction due par Monsieur L. à la société Audioprod, en ce qu’il a fixé le montant de l’indemnité d’occupation due par la société Audioprod à compter du 10 juin 2001 à la somme annuelle de 80 000 euros ,

Reformant, statuant à nouveau sur ces dispositions réformées et ajoutant,

Dit que Monsieur Ludovic L. ne rapporte pas la preuve que les aménagements opérés par la société Audioprod pour le studio d’enregistrement du sous sol et pour les auditoriums entrait dans le champ de la clause d’autorisation des travaux du bail qui vise seulement les changements de distribution, les démolitions aux constructions et les percements de mur ou

de voûte et les constructions ;

Dit que la société Audioprod rapporte la preuve que les locaux bénéficiaient à la date de signification du congé avec refus de renouvellement tout comme à sa date d’effet, d’un agrément de la société Dolby pour les auditoriums du 1er et du 2e étage ;

Déboute la société Audioprod de ses demandes d’expertise ou contre expertise,

Fixe à la somme de 656 212 € , (six cent cinquante six mille deux cent onze euros soixante et onze cts ) le montant de l’indemnité d’éviction toutes causes confondues due par Monsieur Ludovic L. à la société Audioprod outre les frais de licenciements qui seront payés sur justificatifs ;

Fixe le montant l’indemnité d’occupation due par la société Audioprod en application de l’article L 145-28 du Code de commerce à compter du 1er juin 2001 à la somme annuelle de 67 800 € (soixante sept mille huit cent euros) qui sera indexée annuellement en fonction de l’indice INSEE du coût de la construction, l’indice de référence étant le dernier indice publié au 1er juin 2001 ;

Dit que les compléments d’indemnité d’occupation par rapport aux sommes versées par la société Audioprod porteront intérêt au taux légal, conformément à l’article 1155 du Code civil, à compter de la fixation judiciaire de cette indemnité, soit à compter du prononcé du présent arrêt, avec capitalisation en application de l’article 1154 du même code pour ceux dus depuis plus d’une année ;

Rejette la demande de la société Audioprod tendant à ce que Monsieur Ludovic L. fournisse une caution bancaire ;

Dit chacune des parties supportera les dépens d’appel à concurrence de ceux exposés ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile ;

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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CA Paris du 24 novembre 2010 n° 09/06004 , Pôle 05 ch. 03