Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 16 janvier 2012, n° 09/16044

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 2 - ch. 3, 16 janv. 2012, n° 09/16044
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 09/16044
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 5ème Chambre - 2ème section, 4 mars 2009, N° 07/07684

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 3

ARRET DU 16 JANVIER 2012

(n° 12/19, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 09/16044

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2009 – Tribunal de Grande Instance de PARIS, 5e Chambre – 2e section – RG n° 07/07684

APPELANTS

Madame B A

XXX

Monsieur D X agissant tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant légal de l’enfant Or X née le XXX

XXX

représentés par la SCP MIREILLE GARNIER, avoués à la Cour

assistés de Me Michèle ABECASSIS-GUIDICELLI, avocat au barreau de PARIS, Toque : D726

INTIMÉES

SA GREVIN & COMPAGNIE exerçant sous l’enseigne 'LE PARC ASTERIX’ dont le siège social est XXX

SA Z IARD prise en la personne de ses représentants légaux

dont le siège social est XXX

représentées par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour

assistées de Me Danielle GUEUGNOT de l’association FABRE GUEUGNOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R044

CAISSE DE SÉCURITÉ SOCIALE AMOSSAD LEBITOUAH LEOUMI prise en la personne de ses représentants légaux

dont le siège social est XXX

non assignée

CAISSE DE SANTÉ MACABI CHEROUTEI BRIOUT prise en la personne de ses représentants légaux

dont le siège social est XXX

non assignée

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 Novembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, Présidente

Madame H I-J, Conseillère

Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère, entendue en son rapport

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme F G

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, présidente et par Mme F G, greffière.

° ° °

Le 29 septembre 2001, Mme B A, de nationalité israélienne, en voyage touristique en France, s’est rendue au Parc ASTERIX en compagnie de son compagnon et de sa fille, et a participé à une attraction dénommée 'LA TRACE DU HOURRA', exploitée par la société GREVIN & Cie.

Dès la descente du manège, elle a été victime d’un malaise avec perte de connaissance puis d’un arrêt cardiaque. Elle a été hospitalisée et une hémorragie méningée due à une rupture d’anévrisme était diagnostiquée.

Par ordonnance de référé du 3 janvier 2005, le professeur Y, désigné pour effectuer une expertise médicale et dire s’il existe un lien de causalité entre la participation à l’attraction et la rupture d’anévrisme et, en cas de lien direct et certain, donner des éléments d’appréciation du préjudice corporel subi par Mme A, a déposé son rapport le 15 avril 2006, dans lequel il conclut :

1 ° qu’il existe un lien de causalité (une relation chronologique évidente et mécanique très vraisemblable) entre le voyage sur 'LA TRACE DU HOURRA’ et la rupture d’anévrisme,

2° Ce lien de causalité est indirect, ce type d’accident s’observe exclusivement chez les sujets présentant un état pathologique antérieur vasculaire.

Par actes des 20 avril et 25 mai 2007, Mme A a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société GREVIN & Cie, ayant pour enseigne 'LE PARC ASTERIX', propriétaire du manège, la société AGF, son assureur, une caisse de santé et une caisse de sécurité sociale israélienne, qui n’ont pas comparu.

M. D X, compagnon de Mme A, agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de sa fille, Or X, est intervenu volontairement à l’instance.

Mme A et M. X demandaient la condamnation des sociétés GREVIN & Cie et AGF à réparer intégralement leurs préjudices en invoquant :

— à titre principal, l’existence d’une obligation de sécurité de résultat fondée sur l’article 1147 du code civil,

— subsidiairement,

— la responsabilité du gardien en application de l’article 1384 du code civil,

— la faute résultant du défaut d’information et de précaution sur le fondement de l’article 1382,

— la responsabilité du fait des produits défectueux prévue à l’article 1386-7 du code civil

— enfin, la perte de chance de ne pas subir une rupture d’anévrisme.

Par jugement du 5 mars 2009, le tribunal a débouté Mme A et M. X de toutes leurs demandes.

Mme A et M. X ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions, signifiées le 23 novembre 2009, les appelants demandent :

— que le jugement soit infirmé,

— que la société GREVIN & CIE soit déclarée tenue d’indemniser l’intégralité des dommages subis par Mme A consécutivement à l’accident dont elle a été victime au PARC ASTERIX le 29 SEPTEMBRE 2001, sur le fondement de l’article 1147 du code civil et subsidiairement sur le fondement de l’article 1384 du code civil, encore plus subsidiairement sur le fondement de l’article 1382 du code civil, encore plus subsidiairement sur le fondement de l’article 1386-7 du code civil, encore plus subsidiairement sur le fondement de la perte de chance ;

— que la société GREVIN & CIE et son assureur AGF soient condamnés in solidum à payer et porter à Mme A les sommes de :

—  37.823,99 euros au titre des dépenses de santé non remboursées par ses organismes sociaux,

—  147 627 euros au titre de la perte de gains professionnels pendant la période d’incapacité temporaire totale,

—  23.067 euros au titre de la perte de gains professionnels pendant la période d’incapacité temporaire partielle,

-10.000 euros au titre des frais divers,

-1.125 000 euros au titre de l’inaptitude à sa profession antérieure d’architecte,

—  500.000 euros au titre de la tierce personne,

—  23 200 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, subsidiairement 19200 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total et 3000 euros au titre du déficit temporaire partiel,

—  30 000 euros au titre des souffrances endurées,

—  264 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

-15 000 euros au titre du préjudice esthétique,

—  30 000 euros au titre du préjudice d’agrément,

—  30.000 euros au titre du préjudice sexuel,

— qu’il soit donné acte à Mme A de ce qu’elle se réserve de réclamer ses dépenses de santé futures ;

— que M. X soit reçu en son intervention volontaire tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure, Or X

— que la société GREVIN & CIE et son assureur AGF soient condamnés in solidum à payer et porter à M. X la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 50.000 euros en réparation du préjudice moral de l’enfant Or X ;

— que la société GREVIN & CIE et son assureur AGF soient condamnés in solidum à payer et porter à Mme A, la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour ne s’estimait pas suffisamment informée pour entrer en voie de condamnation,

— que soit ordonnée une mesure d’expertise correspondant au complément de mission qu’avait prévu le juge des référés du tribunal de grande instance de PARIS dans son ordonnance du 3 janvier 2005,

— que les frais de ce complément de mission soient avancés par la société GREVIN & CIE et son assureur AGF.

Dans leurs dernières conclusions, signifiées le 7 juin 2010, la société GREVIN & Cie et son assureur devenu la société Z, sollicitent :

— que le jugement soit confirmé en ce qu’il a débouté Mme A et M. X, agissant tant en son nom propre qu’es qualités de représentant légal de sa fille, Or X, de l’intégralité de leurs demandes et les a condamnés aux dépens,

Sur l’action fondée sur l’article 1147 du Code civil :

— qu’il soit jugé qu’en l’espèce la société GREVIN & Cie était tenue d’une obligation de sécurité de moyens puisque l’accident est survenu alors que le manège était arrêté,

— qu’il soit jugé que Mme A ne justifie pas de l’existence d’une faute commise par la société GREVIN & Cie présentant un lien causal certain et direct avec son préjudice,

SUBSIDIAIREMENT,

— qu’il soit jugé que Mme A et M. X n’apportent pas la preuve qui leur incombe de l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre l’attraction 'LA TRACE DU HOURRA’ et la rupture d’anévrisme,

XXX

— qu’il soit jugé que la malformation dont était porteuse Mme A était constitutive d’une cause étrangère exonératoire de toute responsabilité de la société GREVIN & Cie

Sur l’action fondée sur l’article 1384 du Code civil :

— qu’il soit jugé que le rôle matériel de l’attraction n’est pas certain et, qu’en tout état de cause, elle n’a joué aucun rôle actif dans la survenue du dommage,

— qu’il soit jugé que la rupture d’anévrisme est due à une cause étrangère exonératoire de responsabilité de la société GREVIN & Cie,

Sur le prétendu défaut d’information :

— qu’il soit jugé que la société GREVIN & Cie a respecté l’obligation d’information et de précaution qui lui incombait,

Sur l’action fondée sur les produits défectueux :

— qu’il soit jugé que Mme A et M. X ne sont pas fondés à agir contre la société GREVIN & Cie dès lors qu’ils ont été informés, dans les délais impartis, de l’identité du producteur du manège,

EN CONSÉQUENCE,

— que Mme A et M. X soient déboutés de l’ensemble de leurs demandes,

— qu’ils soient condamnés au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

A DÉFAUT,

— qu’il soit jugé que l’indemnisation de Mme A et de ses proches se fera sur la base d’une perte de chance dont le taux ne saurait être supérieur à 10 %,

— que Mme A soit indemnisée, avant application du taux de perte de chance, comme suit :

XXX

Préjudices patrimoniaux temporaires :

' dépenses de santé : Débouté

' pertes de gains professionnels :

* perte de gains professionnels durant la période d’ITT 43 137,10 €

* perte de gains professionnels durant la période d’ITP de 75 % 16 335,03 €

' frais divers : Débouté

Préjudices patrimoniaux permanents ;

' dépenses de santé futures : Débouté

' incidence professionnelle: Débouté

' tierce personne : 217 047,60 €

PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX :

préjudices extrapatrimoniaux temporaires

' déficit fonctionnel durant la période d’ITT : 12 000 €

' déficit fonctionnel temporaire durant la période d’ ITP à 75 % : 1 875 €

' souffrances endurées : 8 000 €

préjudices extrapatrimoniaux permanents

' déficit fonctionnel permanent : 66 000 €

' préjudice esthétique : 5 000 €

' préjudice d’agrément : 5 000 €

' préjudice sexuel : Débouté

— que M. X soit débouté de sa demande ès nom et ès qualités ,

SUBSIDIAIREMENT,

— qu’il soit jugé satisfactoire d’indemniser M. X ès nom à hauteur de 5.000 €,

et ès qualités à hauteur de 7,000 €,

— que soit ramenée à de plus justes proportions la somme sollicitée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— qu’il soit jugé que les frais d’expertise seront remboursés sur justificatifs,

— que Mme A et M. X, ès nom et ès qualités, soient déboutés du surplus de leurs demandes.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur la responsabilité :

L’exploitant d’une attraction foraine est tenu d’une obligation de sécurité de résultat envers son client durant la prestation ainsi que pendant la montée et la descente du manège. En dehors de ces périodes, il n’est tenu que d’une obligation de sécurité de moyens et sa responsabilité ne peut être retenue qu’en cas de faute prouvée.

Aucun document n’est produit permettant de connaître précisément l’endroit et le moment où Mme A s’est trouvée mal. Selon ses déclarations, peu précises, elle a été prise de malaise 'immédiatement à la descente du manège’ (déclaration rapportée par l’expert judiciaire p.16), 'l’accident cérébral est apparu immédiatement après la descente de l’attraction’ (rapport d’expertise p. 10), 'dès la descente, au moment même où le manège s’arrêtant, elle posait pied à terre mais se trouvait toujours dans l’enceinte du manège’ (conclusions p. 2), 'à la descente du manège ' (lettre de son conseil du 14 mai 2004 à AGF).

Il apparaît ainsi que Mme A a été victime d’un malaise après que le manège se soit arrêté et qu’elle en soit descendue, dès lors même si le malaise s’est produit dans l’enceinte réservée à l’attraction, l’exploitant n’est tenu que d’une obligation de sécurité de moyens.

Il n’est pas contesté que l’attraction s’est déroulée normalement et le tribunal a exactement retenu qu’aucun défaut de précaution ou d’information n’est imputable à la société GREVIN & Cie, d’autant que Mme A ignorait elle-même être porteuse d’un anévrisme et se considérait comme étant en parfaite santé.

En l’absence de faute, la responsabilité de la société GREVIN & Cie ne peut être engagée.

En application du principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, Mme A ne peut rechercher la responsabilité de son cocontractant sur le terrain délictuel.

La responsabilité de la société GREVIN &Cie ne peut être recherchée sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du code civil, dès lors que par lettre du 3 novembre 2008 cette société, répondant à la demande qui lui était faite pour la première fois dans des conclusions signifiées le 29 septembre 2008, a communiqué le nom et l’adresse du fournisseur de l’attraction.

Mme A sollicite la réparation de sa perte de chance d’éviter la rupture de l’anévrisme artériel dont elle était porteuse. Cependant, la responsabilité de la société GREVIN & Cie n’étant pas retenue, il n’y a pas lieu à condamner cette société à réparer le préjudice résultant d’une perte de chance, ni à discuter les conclusions du rapport d’expertise.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement et de débouter les appelants de toutes leurs demandes.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement ;

Et y ajoutant :

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne B A et M. D X aux dépens d’appel et dit qu’ils seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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