Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 5, 5 novembre 2015, n° 12/09512

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 5, 5 nov. 2015, n° 12/09512
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/09512
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Créteil, 20 octobre 2009, N° 09/00603
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
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Texte intégral

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 05 NOVEMBRE 2015

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/09512

Décisions déférées à la Cour : Ordonnance du Juge de la Mise en Etat du 21 Octobre 2009 – Tribunal de Grande Instance de CRETEIL – 4ème chambre civile – RG : 09/00603

Jugement du 30 Mars 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n° 10/01740

APPELANTS

Monsieur [Y] [Q], ès-qualités de dirigeant de l’entreprise individuelle [Y] [Q] GALLERY située [Adresse 5]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 6], de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

SARL GALERIE ENRICO NAVARRA

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 2]

prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

Représentés par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476

Assistés de Me Christian BEER, avocat au barreau de PARIS, toque : E0107

INTIMES

Madame [M] [T] [H] née [I], en sa qualité d’ayant droit de feu Monsieur [H] [H]

née le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 7], de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

Monsieur [L] [H], en sa qualité de tuteur de feu Monsieur [H] [H]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Assistée de Me Roger D’ALMEIDA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1816

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, chargée du rapport, et Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président

Madame Françoise LUCAT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Faits et procédure

Le 4 avril 2007, feu M. [H] [H] (ci-après M. [H]), artiste-peintre, a fait assigner la société Galerie Enrico Navarra (ci-après la société [Q]) sise à New York USA, devant le tribunal de grande instance de Paris, pour obtenir la résiliation judiciaire d’un contrat d’édition liant les parties et ayant eu pour objet la réalisation de séries de plats en céramique et leur commercialisation.

Fin 2008, à l’occasion d’une vente organisée à [Localité 5] par la société Christie’s, M. [H], a mis en cause la régularité et l’authenticité de plats en céramique qui lui étaient attribués et a fait paraître un communiqué dans le Journal des Arts n°288 du 3 au 16 mai 2008 faisant état de la procédure engagée, communiqué qui a été diffusé sur des sites internet à l’étranger notamment en Chine.

La société [Q] et M. [Q] ont engagé une procédure en diffamation à l’encontre de M.[H] qui a été relaxé.

La société [Q] et M. [Q] ont fait assigner M. [H] aux fins de voir ce dernier condamné à la réparation du préjudice qu’ils auraient subi du fait d’une campagne de dénigrement que M. [H] aurait dirigé à leur encontre.

C’est dans ces conditions que la société [Q] et M. [Q], agissant tant à titre personnel qu’en tant que dirigeant de la société, ont fait assigner M. [H] le 23 décembre 2008 devant le tribunal de grande instance de Créteil, en réparation du préjudice de dénigrement.

Par ordonnance du 21 octobre 2009, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Créteil a :

— rejeté l’incident tendant à la suppression des propos écrits au soutien de la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par M. [H].

Par ordonnance du 18 novembre 2009, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Créteil a :

— fait droit à une exception de connexité soulevée par M. [H], et acceptée par les demandeurs, a renvoyé l’affaire devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par un jugement rendu le 30 mars 2012, lui aussi pendant devant la cour d’appel de Paris, le tribunal de grande instance de Paris a :

— débouté M. [H] de sa demande en résiliation du contrat d’édition et de toutes les demandes en découlant,

— débouté la société [Q] de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,

— rejeté les demandes de M. [P] et de la société la Tuilerie du Chaillou de leur demande au titre de préjudice matériel,

— condamné M. [H] à payer à M. [P] la somme de 30.000 euros au titre de préjudice moral,

— débouté la société la Tuilerie du Chaillou de sa demande au titre de préjudice moral,

— débouté M. [P] et la société la Tuilerie du Chaillou de leur demande de condamnation sous astreinte de M. [H] de délivrance d’un certificat d’authenticité.

— rejeté la demande de publication du jugement formée par M. [P] et la société la Tuilerie du Chaillou,

— débouté M. [H] et la société La Tuilerie du Chaillou des demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 30 mars 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

— débouté la société [Q] et M. [Q] de l’ensemble de leurs demandes ;

— rejeté la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

— débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

— condamné in solidum la société [Q] et M. [Q] à payer à M. [H] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu l’appel interjeté par la société [Q] et M. [Q] le 24 mai 2012 contre cette décision et contre l’ordonnance du 21 octobre 2009 :

M. [H] étant décédé en cours d’instance, Mme [H] [I] (ci-après Mme. [H]) a signifié le 4 novembre 2014 des conclusions de reprise d’instance en sa qualité d’ayant droit.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société [Q] et M. [Q] le 26 décembre 2014, par lesquelles il est demandé à la cour :

— d’infirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que M. [H] n’avait pas commis de faute et a débouté les appelants de leurs demandes.

Et en conséquence :

— juger que M. [H] a commis des fautes constituées notamment par l’envoi le 16 mai 2008 à la Christie’s [Localité 5] d’un email, par la publication d’un communiqué dans le Journal des Arts, par la mise en ligne sur des sites chinois d’extraits de ce communiqué, par l’envoi d’une lettre à la Galerie Dreyfus, ayant toutes pour objectif de dénigrer les céramiques éditées par la société [Q] ainsi que par le refus de faire paraître un démenti sur leur inauthenticité alléguée ;

— juger que ces fautes ont été commises au préjudice de la société [Q] et de M. [Q], agissant en tant que dirigeant de la société [Q] ;

— condamner Mme [H] à réparer les préjudices de la société [Q] et M. [Q], agissant en tant que dirigeant de la société [Q] ;

— condamner Mme [H] à payer à la société [Q] la somme de 4 089 127 euros à titre de dommages et intérêts ;

— condamner Mme [H] à payer à M. [Q] agissant en tant que dirigeant de la société [Q] la somme de 2 044 563 euros à titre de dommages et intérêts ;

débouter Mme [H] de ses demandes reconventionnelles sur :

* la communication de pièces que seul peut produire le fabriquant des céramiques en cause, absent de la présente instance et qui a fait l’objet, le 31 janvier 2014, d’une décision de rejet la Cour dans l’instance 12/08986 ;

* la condamnation solidaire des concluants à lui payer la somme de 1 500 000 euros à titre de dommages et intérêts et à publier l’arrêt intervenir ;

* la condamnation solidaire des concluants à lui payer la somme de 250 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

— condamner Mme [H] à payer tant à la société [Q] qu’à M. [Q] agissant en tant que dirigeant de la société [Q] la somme de 60 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l’appel de l’ordonnance du 21 octobre 2009 du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Créteil, il est demandé à la cour :

— d’infirmer l’ordonnance du 21 octobre 2009.

Et en conséquence :

— juger que les écrits suivants sont étrangers à la cause :

* Premier passage : « la juridiction de céans comprend bien instrumentalisation que la société [Q] ne cesse de faire du judiciaire à l’effet de convaincre un artiste très âgé, aujourd’hui très malade, de revenir à la table des négociations par tout moyen, la requérante pressentant en effet que les moyens sur lesquels se fonde sa défense dans le cadre du litige principal qui les oppose, n’ont guère de chance de prospérer ».

* Deuxième passage : « Le harcèlement que subit Monsieur [H] [H] depuis des mois est insupportable. Celui-ci résulte [notamment des pièces versées au débat par la requérante elle-même, c’est-à-dire] de la multiplication d’actes extrajudiciaires délivrés au Conseil du concluant et de courriers ».

* Troisième passage : « la poursuite en diffamation publique s’inscrit également dans le cadre de cette perpétuelle tentative d’intimidation de Monsieur [H] [H] [H] ».

— juger que les écrits visés aux termes des présentes contiennent des imputations susceptibles d’être qualifiées par la juridiction compétente, de diffamatoires à l’encontre de la société [Q] et de M. [Q], notamment les passages supra rappelés ;

— réserver l’action civile ou publique en diffamation de la société [Q] et de M. [Q] en jugeant que les faits visés sont étrangers au procès.

Les appelants font valoir qu’ils sont fondés à agir puisque les agissements de M. [H] ont eu une incidence sur le fonds de commerce de la société [Q] et que M.[Q] l’a été en tant que dirigeant de l’entreprise individuelle [Y] [Q] New York.

Ils affirment que les actions entreprises par M. [H] doivent être qualifiées d’actes de dénigrement puisqu’il les a commises de mauvaise foi, sans aucune neutralité et dans le but d’échapper à ses obligations contractuelles pour favoriser le contrat de confection de céramiques, qu’il a conclu avec les sociétés concurrentes Marlorough Gallery et la Manufacture de Sèvre.

Ils soutiennent avoir droit à réparation de leurs préjudices pour dénigrement, sans que puisse leur être opposée l’autorité de la chose jugée de l’action en diffamation du 5 décembre 2008 dirigée contre la société Artclair Editions, éditrice du Journal des Arts.

Ils exposent que l’ensemble des actions de M. [H] sont constitutives de fautes puisqu’il a, grâce à plusieurs canaux de communication, diffusé et aggravé des informations mensongères alors même que le jugement du 30 mars 2012, sur le contrat d’édition, a établi judiciairement ces allégations mensongères.

Ils font en effet valoir que les fautes commises par M. [H] sont à l’origine même des dommages qu’ils ont subis, s’agissant, en premier lieu de l’atteinte considérable à la réputation professionnelle de M. [Q] et à celle de sa société et en second lieu aux conséquences économiques qui perdurent encore aujourd’hui et qui rendent impossible la vente des céramiques réalisées.

Ils soutiennent avoir fait l’objet d’une véritable stratégie de dénigrement orchestré par M. [X], ami de l’intimé, chargé de « récupérer les droits » de M. [H] et impliqué dans plusieurs procédures contentieuses de M. [H].

Ils exposent que les actes de dénigrement dont ils ont fait l’objet leur ont causé d’importants préjudices, s’agissant, en premier lieu de l’impossibilité de vendre les céramiques et des pertes liées à l’organisation d’événements autour de ladite vente et en second lieu, s’agissant, des conséquences financières sur la valeur du fonds de commerce et des emprunts qu’ils ont dû contracter.

Ils demandent que l’ordonnance du 21 octobre 2009 soit invalidée au motif que les éléments diffamatoires visés sont déclarés étrangers à la cause et qu’ils sont fondés en conséquence à réserver une action en diffamation.

Ils font valoir que Mme [H] ne pourra être que déboutée de ses demandes reconventionnelles au motif que les réalisations de céramiques concurrentes ont remarquablement prospéré et qu’elle tend à renverser la situation en alléguant l’obstination des requérants.

Vu les dernières conclusions signifiées par Mme [H] le 9 avril 2015, par lesquelles il est demandé à la cour :

— juger que Mme [H], qui vient aux droits de son époux défunt, l’artiste [H], recevable, tant en la forme qu’en toutes ses demandes, y compris reconventionnelles, ci-après exposées dès lors qu’intimée défendant sur une action en dénigrement, il ne saurait lui être opposé la règle selon laquelle l’action en dénigrement, qu’elle n’a pas originellement intentée, ne serait pas transmissible ;

— prononcer en vertu de l’article 443 du code civil qui est d’ordre public, la mise hors de cause de Mme [H] et de M. [H], ès-qualités de cotuteurs puisque, depuis le décès de l’artiste survenu le 24 mars 2014, la tutelle a pris fin ;

— constater que, n’étant plus gérant en exercice de la société [Q], aux termes de l’extrait Kbis de la société [Q] en date du 30 janvier 2014 et communiqué à la Cour par son avocat le 27 mai 2014 (pièce n° 165 versée aux débats par ladite galerie), Monsieur [Y] [Q] n’a plus la qualité d’appelant, n’ayant plus aucun intérêt ès-qualités à agir dans la présente instance, sa déclaration d’appel étant, de ce fait, affectée d’une irrégularité qui ne peut plus être couverte ;

— ordonner néanmoins le maintien de M. [Q] dans la cause, à titre personnel et à toutes fins utiles que de droit ;

— déclarer la société [Q] et M. [Q] mal fondés en leur appel et les en débouter ;

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL Galerie ENRICO NAVARRA et M. [Q] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

— l’infirmer pour le surplus ;

— déclarer la concluante, qui vient aux droits du concluant qui y avait régulièrement procédé, recevable en son appel incident ;

— déclarer la concluante recevable en ses demandes reconventionnelles ;

Y faisant droit :

Statuant à nouveau :

— ordonner le présent litige – référencé RG 12/09512 – n’existant pas isolément du litige central pendant devant la Cour de céans et référencé RG 12/08986, le sursis à statuer dans l’attente du sort qui sera réservé, par la Cour de céans, à la demande de la concluante visant le prononcé du même sursis à statuer dans l’instance RG n° 12/08986 aux fins de la communication des pièces et informations ci-après listées, savoir :

* information relative au nombre d’exemplaires de plats en céramique fabriqués en cours d’exercice, de 2004 à 2007 inclusivement, puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* information relative à la date et l’importance des tirages de plats en céramique, puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* information relative au nombre d’exemplaires de plats en céramique en stock puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* l’état prévu par les dispositions légales précitées, qui devra mentionner également le nombre des exemplaires de plats en céramique respectivement vendus par les co-éditeurs que sont les co-intimés puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* l’état ci-dessus visé mentionnant le nombre des exemplaires de plats en céramique éventuellement inutilisables ou éventuellement détruits par cas fortuit ou force majeure, puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* le montant des redevances qui sont dues à l’artiste, et désormais la concluante, sur les ventes de plats en céramique réalisées à l’insu et confirmées par deux pièces au moins émanant, toutes les deux, de la société [Q] (pièces n° 3 et n° 7), puisqu’il n’en a toujours pas été justifié ;

* l’ensemble des bons à tirer présentés à M. [H] et signés par lui, entre 2004 et 2007 ;

* un état (tel que mentionné aux textes de Loi ci-dessus visés) précis et détaillé de l’ensemble des ventes des séries de plats en céramique en la possession de chacun des co-intimés (par ailleurs coéditeurs en l’espèce), ventes réalisées en France et/ou à l’étranger ;

* tous les éléments comptables et financiers, au titre des justifications prévues par l’article L 132-14 du Code de la propriété intellectuelle, ces éléments laissant apparaître le chiffre d’affaires exact qui a été réalisé respectivement par la société [Q] et par M. [P], ainsi que sa composition et sa ventilation, s’agissant de l’exploitation des céramiques depuis 2003 et conformément à l’article L 132-13 du Code de la propriété intellectuelle ;

* toutes informations justifiant de la fabrication des 40 séries de 24 céramiques sur les 40 prévues au contrat, puisque la « redistribution » des séries de céramiques qu’avaient décidée entre eux la société [Q] et M. [P] est inopposable à l’artiste dès lors qu’il ne s’agit pas d’un avenant au contrat litigieux ;

* toutes informations justifiant de ce que 9 séries seraient encore en la possession de la société [Q], comme l’écrivait son avocat dans sa lettre officielle du 30 novembre 2007 ;

* comme le prescrit l’article L 132-14 du code de la propriété intellectuelle, toutes justifications propres à établir l’exactitude des comptes présentés, puisqu’il n’en a toujours pas été justifié.

— ordonner que, dans le cadre de ce sursis à statuer, ces pièces et justificatifs ci-dessus listés soient, dans les exemplaires lui revenant s’agissant d’une communication à l’intimée et sous l’astreinte sollicitée ci-dessus, tenus à la disposition du Conseil de la concluante au Greffe de la Cour, à compter de telle date que fixera la Cour, dans un jeu dont la concluante conservera copie mais jeu dont, pour éviter toute difficulté ultérieure, le Greffe de la Cour établira un procès-verbal d’inventaire, en présence du Conseil de la concluante, aux fins de vérifier la conformité de la production à la décision à intervenir qui l’ordonnera.

Au fond :

— condamner solidairement ou, à défaut, in solidum la société [Q] et M. [Q] à payer, à la concluante, la somme de 1 500 000 euros à titre de dommages-intérêts, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil ;

— condamner solidairement ou, à défaut, in solidum la société [Q] et M. [Q] à publier l’arrêt à intervenir au fond mais également l’arrêt à intervenir prononçant le sursis à statuer à leurs frais et dans le « Journal des Arts » ainsi que dans le magazine « Beaux Arts », le tout sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de la signification à partie de l’arrêt à intervenir au fond mais également à compter de la signification à partie de l’arrêt à intervenir prononçant le sursis à statuer.

En tout état de cause :

— condamner solidairement ou, à défaut, in solidum la société [Q] et M. [Q] à payer, à la concluante, la somme de 250 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, s’agissant de frais irrépétibles de première instance comme d’instance d’appel, depuis février 2007, soit, à la date des présentes, depuis 7 années de procédures judiciaires diverses et variées initiées par les appelants, M. [H], aux droits de qui vient la concluante, n’étant à l’origine que d’une seule, bien légitime, savoir celle pendante devant la Cour de céans sous le numéro de RG 12/08986.

L’intimée soutient que la Cour doit surseoir à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir dans l’instance connexe, qui est le c’ur même du contentieux opposant les parties et dans laquelle sont sollicitées des pièces, notamment comptables, essentielles à la présente instance.

Elle fait valoir que l’artiste n’avait pas eu connaissance de tous les bons à tirer et que sa lettre à Christie’s [Localité 5] n’était qu’une démarche prudentielle licite, courante dans le monde des sociétés de vente.

Elle expose que c’est par des doutes légitimes que l’artiste a publié un communiqué dans le « Journal des Arts », que cette publication a été jugée, à deux reprises, licite, si bien que l’action en diffamation publique ayant déjà été exercée, ledit communiqué ne peut pas être poursuivi une deuxième fois sur un fondement différent.

Elle soutient que les actes qui lui sont reprochés n’ont été faits que dans un souci de protection des droits d’auteur et d’information des clients et qu’en l’absence de situation de concurrence entre l’artiste, la galerie et son gérant, aucun acte de dénigrement ne peut être retenu ; Elle expose que le contrat passé entre l’artiste et la Marlborought Gallery de 2007, n’avait pas le même objet que celui de la société [Q], le premier portait sur des céramiques en pièce unique alors que le second portait sur des céramiques en tirage multiple, et qu’en tout état de cause, le contrat d’édition signé par la société [Q] n’a prévu aucune forme de limitation de concurrence après 2006.

Elle souligne en outre, que les requérants n’apportent aucune preuve ni de l’implication de M. [H] dans la publication d’extraits du communiqué sur plusieurs sites internet chinois, ni de la qualité de futur client potentiel de la Galerie Dreyfus prétendument connue de l’artiste.

Elle soutient que le préjudice des requérants n’est pas avéré, puisqu’ils sont identiques à ceux réclamés dans l’affaire connexe, qu’il n’existe aucun frais d’immobilisation puisque plusieurs céramiques sont en vente sur internet et que l’estimation des préjudices, établi non contradictoirement, ne fait qu’augmenter au fil des instances.

Elle soutient faire l’objet d’un harcèlement de la part des requérants, tant en raison de la campagne judiciaire lancée contre son défunt mari que par les nombreux courriers adressés à l’artiste, à sa famille et à de nombreux tiers.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la mise en cause des tuteurs de M.[H]

Considérant que si de son vivant M.[H] avait été placé sous tutelle et que son épouse était présente dans la cause en cette qualité, il n’y a plus lieu de la mettre en cause en cette qualité pas plus que son fils ;

Considérant que Mme [H] est intervenue dans la procédure en qualité d’ayant droit de feu son époux et que c’est en cette seule qualité que la Cour la retiendra.

Sur la recevabilité de M.[Q]

Considérant que les appelants font valoir qu’ils sont fondés à agir puisque les agissements de M. [H] ont eu une incidence sur le fonds de commerce de la société [Q] et que M. [Q] a été directement affecté par la santé financière de la société à laquelle est attaché son nom ;

Considérant que M.[Q] indique par ailleurs agir en tant que dirigeant de l’entreprise individuelle [Y] [Q] New York et fait valoir que celle-ci a en 2008 acquis 290 lithographies de M.[H] pour les commercialiser simultanément avec les céramiques ;

Considérant que, si le KBIS de la société [Q] mentionne un siège social à [Localité 6] et mentionne comme seul dirigeant M.[Z] [V], cette circonstance ne démontre pas que M.[Q] n’exerce pas à titre individuel à l’étranger ce qui au demeurant n’est pas contesté, Mme [H] demandant à la Cour d’ordonner le maintien de M. [Q] dans la cause, à titre personnel et à toutes fins utiles ;

Qu’en conséquence M.[Q] démontre son intérêt à agir du fait d’une possession personnelle d’oeuvres de M.[H] non contestée et de l’association de son nom à la Galerie parisienne.

Au fond

Sur l’appel du jugement du 30 mars 2012

Considérant que M.[H] est d’abord intervenu auprès de la société Chistie’s de [Localité 5] afin de faire retirer de la vente une série de 12 céramiques comme étant concernées par une instance pendante devant le Tribunal de grande instance de Paris ;

Qu’à son initiative le Journal des Arts n°288 du 3 au 16 mai 2008 a ensuite publié sous le titre « mise en garde de M.[H] » un communiqué de ce dernier qui indiquait notamment « Monsieur [H] [H] [H], artiste français, a été conduit à intenter une procédure à l’encontre de la galerie [Q], pendante devant le Tribunal de grande instance de Paris. Un des motifs essentiels de cette initiative judiciaire tient au fait qu’ont été fabriquées, distribuées, commercialisées et présentées à la vente différentes éditions de céramiques sans que Monsieur [H] [H] n’ait signé pour chacune d’entre elles de bon à tirer… » ;

Considérant que ce communiqué a été reproduit et diffusé notamment sur des sites internet chinois ;

Considérant que, si par constat d’huissier effectué à l’Atelier de la Tuilerie il a été constaté la présence de 24 plats revêtus en langue française et chinoise de la mention « bon à tirer », il n’en résultait pas pour autant que les plats mis en vente à [Localité 5] et comportant la marque galerie Navarra correspondaient aux séries éditées à partir de ces bons à tirer ; que M.[P] est intervenu auprès de la société Christie’s et a sommé M.[H] de le faire aussi ce que celui-ci a refusé sans qu’il puisse lui être fait grief d’avoir voulu préserver ses droits d’autant qu’aujourd’hui il n’est produit aucune pièce démontrant que les pièces en cause correspondaient effectivement aux bons à tirer présents à l’Atelier de la Tuilerie ; que le courrier adressé à la société Christie’s par le conseil de M. [H] indiquait qu’il « formule les réserves les plus expresses quant à l’authenticité des céramiques actuellement en circulation qui ont été produites par l’atelier [R] [P] et qui portent la marque Galerie Navarra » et recommande « la prudence de retirer les céramiques de la vente qui doit avoir lieu le 23 mai 2008 » ;

Considérant que, le 17 novembre 2008 M.[H] a répondu à la galerie Dreyfus qui avait acheté deux séries de céramiques qu’au vu de leur photographie, celles-ci entraient dans le cadre du litige en cours ce qui ne remettait pas en cause leur authenticité ; qu’il lui précisait que le communiqué paru dans le Journal des Arts avait été rédigé à titre conservatoire afin de protéger de futurs acquéreurs potentiels ce qui ne traduit aucune mauvaise foi ;

Considérant que s’agissant de l’article paru dans le Journal de L’Art, la galerie [Q] a, d’une part, fait usage de son droit de réponse, d’autre part, engagé une action en diffamation à l’encontre de M.[H] lequel a bénéficié d’une décision de relaxe ;

Considérant qu’elle fait valoir que l’action en diffamation vise l’atteinte à une personne et qu’en l’espèce elle se fonde sur des actes de dénigrement lesquels portent sur des objets en ce que par ses propos M.[H] a mis en doute l’authenticité des céramiques commercialisées par la galerie ; qu’il s’agit de faits distincts de ceux qualifiés de diffamation ;

Considérant que le dénigrement d’un produit consiste à le dévaloriser par rapport à un autre avec lequel il est en concurrence ; que lors de cette publication, M.[H] avait noué des relations avec une autre galerie, la Marlborough Galery pour la commercialisation de 57 vases édité par la manufacture de [Localité 8], lui-même recevant à titre de rémunération des épreuves d’artiste, la galerie [Q] en déduisant une situation de concurrence ; que pour autant les actes de dénigrement avancés portent sur des oeuvres qui sont toutes de M.[H], quand bien même les vases sont des oeuvres uniques alors que les plats sont des céramiques tirées en série, de sorte qu’elles ne sont pas en concurrence les unes avec les autres ; que si M.[H] a mis en cause à tort la galerie [Q] notamment en faisant référence à une instance en cours, pour autant il ne peut lui être reproché un acte de dénigrement ; que c’est à bon droit que la galerie [Q] a été déboutée de sa demande ;

Sur l’appel de l’ordonnance du 21 octobre 2009

Considérant que la galerie [Q] expose que le 10 juin 2009, Me William Bourdon, avocat de M.[H], a signifié des conclusions comportant trois passages qui, selon elle, contiendrait des propos diffamatoires ; que par ordonnance du 21 octobre 2009, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de réservation de l’action en diffamation au motif que les propos avaient été écrits au soutien d’une demande reconventionnelle ;

Considérant que la galerie [Q] conteste cette décision et fait valoir que ces passages contiennent des propos étrangers à la cause car excédant les limites du droit à la défense et portent atteinte à l’honneur et à la considération de la galerie [Q] ce qui n’était d’aucune utilité pour la défense de M.[H] ;

Considérant que, si le premier passage en cause figure dans la partie 5 des écritures qui vise à contester les préjudices moral et patrimonial de la galerie [Q], il fait référence à l’âge de M. [H] et reproche à la galerie [Q] une instrumentalisation du judiciaire pour le faire revenir à la table des négociations ce qui a trait à la manière dont la galerie entendait régler les différends existant et par là même le préjudice invoqué ;

Considérant que le deuxième paragraphe évoquant le harcèlement que subirait M.[H] se trouve dans les demandes pour procédure abusive ; que ce fait n’est pas étranger à une telle demande pas plus que le paragraphe suivant qui accuse la galerie de « perpétuelle tentative d’intimidation de M.[H] » ; que ces propos sont fondés notamment sur l’engagement de l’action en diffamation à l’occasion de laquelle M.[H] a été relaxé ; que ces propos sont ainsi en lien direct avec la cause ; que dès lors c’est à bon droit que le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de ma galerie [Q].

Sur l’appel incident de Mme [H]

Considérant que Mme [H] demande à la Cour de prononcer un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Cour dans l’instance qui l’oppose à la galerie [Q] et à M.[P], demande à laquelle la galerie [Q] ne s’oppose pas ;

Considérant que cette autre instance concerne l’exécution du contrat passé entre M.[H] et, d’une part, la galerie [Q], d’autre part, M.[P], Mme [H] invoquant l’inexécution de leurs obligations contractuelles par la galerie [Q] et par M.[P] en leur qualité d’éditeurs de séries de céramiques créées par M.[H] ; qu’en conséquence il s’agit d’un contentieux ayant un fondement distinct, la résolution de l’un n’étant pas liée à celle de l’autre ;

Considérant que la Cour a examiné les propos dénoncés par la galerie [Q] comme constitutifs de dénigrement et a écarté cette qualification sans qu’il soit nécessaire de prononcer un sursis à statuer ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant que Mme [H] a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qui concerne la recevabilité de M.[Q].

REÇOIT M.[Q].

CONDAMNE in solidum la société [Q] et M. [Q] à payer à Mme [H], la somme de 15 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

REJETTE toute autre demande, fin ou conclusion plus ample ou contraire.

CONDAMNE la société [Q] et M. [Q] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

B.REITZERC.PERRIN

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 5, 5 novembre 2015, n° 12/09512