Cour d'appel de Paris, 5 octobre 2016, n° 15/02914

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 5 oct. 2016, n° 15/02914
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/02914
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 10 février 2015, N° 14/03785

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRÊT DU 05 Octobre 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 15/02914

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Février 2015 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS RG n° 14/03785

APPELANT

Monsieur B X

XXX

XXX

XXX

né le XXX à XXX

comparant en personne,

assisté de Me Ghislaine ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1575

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/016158 du 29/04/2015 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEES

SCP Y prise en la personne de Me A Stéphane en qualité de mandataire liquidateur de la SASU GARANCE PRODUCTION

XXX

XXX

ni comparant, ni représenté

AGS CGEA IDF OUEST

XXX

92309 LEVALLOIS-PERRET CEDEX

représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Marina DUCOTTET CHAREYRON, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, président de chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, conseiller

Madame Stéphanie ARNAUD, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 31 mars 2016

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Marjolaine MAUBERT, lors des débats

ARRET :

— réputé contradictoire.

— prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, présidente de chambre et par Madame Valérie LETOURNEUR, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

M. X a été engagé pour la journée du 2 novembre 2008 dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée par la SAS Garance Production.

Il a été victime d’un accident sur les lieux du travail le jour même de son engagement, le 2 novembre 2008.

Une déclaration d’accident a été établie le 2 janvier 2013 et a fait l’objet d’un refus de prise en charge par la caisse d’assurance-maladie de Paris le 21 janvier 2013.

Le tribunal de commerce a rendu une décision de placement liquidation judiciaire de la SA S garance le 14 janvier 2014. La SCP Z prise en la personne de Me Stéphane A a été désignée en qualité de liquidateur.

Le 17 mars 2014, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin de voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Garance production selon les modalités suivantes :

—  25 000 € à titre de dommages-intérêts pour déclaration tardive de la déclaration d’accident de travail et exécution de mauvaise foi du contrat de travail,

—  25 000 € à titre de dommages-intérêts spécifiques distincts pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat,

—  2000 € en application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

—  1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 11 février 2015, le conseil de prud’hommes de Paris a fixé la créance de M. X au passif de la liquidation judiciaire de la SA S garance production à la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour déclaration tardive d’un accident de travail.

Le conseil de prud’hommes a condamné le liquidateur à verser à M. X une indemnité de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Appelant de ce jugement, M. X demande à la cour de le réformer, statuant à nouveau, de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Garance Production aux sommes suivantes :

—  25 000 € à titre de dommages-intérêts pour déclaration tardive de la déclaration d’accident de travail et exécution de mauvaise foi du contrat de travail,

—  25 000 € à titre de dommages-intérêts spécifiques distincts pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat,

M. X demande également que le liquidateur soit condamné à verser 3500 € à son avocat en application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il réclame pour lui-même une indemnité de 1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Bien que régulièrement convoqué, le liquidateur ne s’est pas présenté, ni fait représenter.

Le CGEA AGS IDF Ouest a relevé appel incident du jugement déféré.

Il soulève la prescription des demandes formulées, par suite leur irrecevabilité.

En tout état de cause, il s’oppose aux demandes formulées.

En tant que de besoin, il rappelle les limites de sa garantie.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l’audience.

MOTIFS

Le CGEA AGS IDF Ouest estime que M. X est forclos en ses demandes de dommages-intérêts tant pour la déclaration tardive de l’accident du travail que pour la défaillance de l’employeur au regard de son obligation de sécurité de résultat.

Il fait en effet valoir que le fait générateur de ses deux demandes est l’accident survenu le 2 novembre 2008.

Le salarié réplique que le CGEA AGS IDF Ouest n’a soulevé in limine litis le moyen tiré de la prescription que pour la seule demande formulée au titre de la déclaration tardive de l’accident du travail.

Toutefois, après que l’article 122 du Code de procédure civile a défini une fin de non recevoir comme étant « un moyen de défense tendant à faire déclarer son adversaire, irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée », l’article 123 du même Code dispose que « Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt ».

Le CGEA AGS IDF Ouest peut donc soulever en tout état de cause et donc devant la cour d’appel la prescription pour les deux demandes et notamment pour la demande en lien avec l’inobservation par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat.

Sur le moyen tiré de la prescription pour déclaration tardive de l’accident du travail

Selon l’article 411-1 code de la sécurité sociale « Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ».

Le salarié dispose d’un délai de 24 heures pour déclarer à l’employeur qu’il a été victime d’un accident du travail, sauf force majeure.

L’employeur doit ensuite déclarer l’accident du travail dans le délai de 48 heures après avoir été informé de la survenance du dit accident.

Si l’employeur n’a pas envoyé la déclaration à la CPAM, le salarié, victime de l’accident du travail, peut faire la démarche lui-même en envoyant une déclaration à la caisse d’assurance maladie.

Le délai de prescription pour cette démarche est de deux ans à compter de la date de l’accident du travail.

Dans le cas présent, l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de déclarer l’accident dans les 48 heures après sa survenance.

Ni l’employeur, ni le salarié n’ont procédé à la déclaration d’accident dans le délai de prescription de deux années.

Dans la mesure où il incombait en premier lieu à l’employeur de procéder à cette déclaration d’accident dans le délai de 24 heures, le point de départ du délai de prescription de l’action engagée par le salarié à l’encontre de l’employeur en réparation du préjudice subi du fait de la déclaration tardive correspond au terme du délai au cours duquel la déclaration devait intervenir soit dans le délai de deux ans à compter de l’accident, soit en l’espèce à compter du 3 novembre 2010.

La loi de sécurité de l’emploi du 14 juin 2013 a effectivement réduit le délai de prescription de cinq à deux années. Toutefois, les dispositions nouvelles ne s’appliquent aux prescriptions en cours qu’à compter de la promulgation de la loi sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée totale prévue par la loi intérieure.

Dans ces conditions, le salarié pouvait agir jusqu’au 17 juin 2015.

Or, il a saisi le conseil de prud’hommes le 17 mars 2014. Il n’était donc pas forclos en son action.

Ainsi que cela a été rappelé précédemment, l’employeur doit procéder à la déclaration de l’accident du travail subi par un salarié auprès de la CPAM dans un délai de 48 heures après qu’il a été informé de l’accident.

En cas de défaillance de l’employeur, le salarié peut procéder lui-même à cette déclaration dans le délai de prescription de deux années.

Dans le cas présent, M. X n’a pas lui-même procédé à cette déclaration dans ledit délai.

Bien qu’il ait ainsi par sa négligence lui même contribué à son dommage, la cour relève que la carence de l’employeur à qui il incombait au premier chef de procéder à la dite déclaration est à l’origine d’une perte de chance pour le salarié d’obtenir l’indemnisation de son préjudice en application des dispositions spécifiques en matière de l’accident de travail.

Les premiers juges ont procédé à une juste évaluation de ce préjudice résultant de la perte de chance de bénéficier d’une telle indemnisation.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le moyen tiré de la prescription de l’action en réparation du dommage en lien avec le non respect par l’employeur de l’obligation de sécurité de résultat

Le salarié demande réparation du préjudice résultant du non respect par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat faisant le constat qu’il a subi un accident de travail.

Dans le cas d’espèce, sous couvert d’une action en responsabilité contre l’employeur pour manquement à son obligation de sécurité, le salarié demande en réalité la réparation d’un préjudice né de l’accident du travail dont il avait été victime relevant de la compétence exclusive du tribunal des affaires de la sécurité sociale devant être saisi dans le délai de deux années à compter de l’accident.

Si la cour d’appel qui a plénitude de juridiction dès lors qu’elle est tout à la fois juridiction d’appel du conseil de prud’hommes et du Tass pourrait connaître de la demande, il apparaît M. X est forclos en sa demande dès lors que le point de départ pour saisir le TASS pour connaître de cette demande est la date de la survenance de l’accident .

Sur les demandes au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement ayant alloué au salarié une indemnité de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure sera confirmé, mais des raisons tenant à l’équité commandent de débouter le conseil de M. X comme M. X des demandes formulées pour les frais exposés devant la cour d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par un arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déclare M. X forclos en sa demande de dommages et intérêts en réparation du dommage en lien avec le non respect par l’employeur de l’obligation de sécurité de résultat,

Déboute M. X et son conseil des demandes formulées au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X aux dépens qui seront recouvrés conformément aux règles applicables en matière d’aide juridictionnelle.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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