Cour d'appel de Paris, 14 octobre 2016, n° 16/05636

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 14 oct. 2016, n° 16/05636
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/05636
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 14 mai 2012, N° 11/10847

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRÊT DU 14 Octobre 2016

(n° 807 , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 16/05636

Décision déférée à la Cour :
jugement rendu le 15 Mai 2012 par le Conseil de Prud’hommes -
Formation paritaire de PARIS RG n° 11/10847

APPELANTE

SAS ISS PROPRETE

XXX

XXX

N° SIRET : 542 016 951

comparante en personne, assistée de Me Catherine
LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0223

substitué par Me Ivan HECHT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0369

INTIMEE

Madame X Y épouse Z

XXX

XXX

représentée par Me Elodie PUISSANT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0372

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame A B,
Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

— Madame A B, Présidente,

— Madame C D, Conseillère,

— Monsieur Christophe CARBONNIER,
Conseiller,

Qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur E
F, lors des débats

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, prorogé ce jour,

— signé par Madame A
B, Présidente et par Madame Cécile DUCHE-BALLU,
Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES
PARTIES

Mme Z a été engagée par la société S.A.S. ISS PROPRETE par plusieurs contrats à durée déterminée à temps partiel dans le cadre de remplacements de salariés absents, depuis le 8 mars 2004, en qualité d’agent de propreté.

Mme Z a ensuite été engagée par la société S.A.S. ISS PROPRETE par contrat à durée indéterminée à temps partiel du 1er juillet 2007, pour un horaire mensuel de 108,33 heures, avec reprise de son ancienneté au 22 décembre 2006.

Sa rémunération mensuelle brute moyenne était de 1.003,31 euros.

Le contrat de travail était soumis à la convention collective nationale des entreprises de propreté.

L’effectif de la société S.A.S. ISS PROPRETE s’élevait à plus de 11 salariés, et la salariée avait plus de 4 ans d’ancienneté au jour de son licenciement.

Par lettre RAR du 10 mars 2011, Mme Z a été convoquée à un entretien préalable fixé au 21 mars 2011, en vue d’un éventuel licenciement.

Par lettre RAR en date du 24 mars 2011, M. G H a notifié à Mme Z son licenciement pour faute grave. La lettre énonce un ensemble de griefs. Elle mentionne notamment :

«'Madame

Vous n’avez pas répondu à la convocation que nous vous avons adressée par courrier en date du 10 mars 2011 pour un entretien le 21 mars 2011, dans le cadre de la procédure de licenciement engagée à votre encontre.

Après réexamen de votre dossier, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, cette mesure prendra effet dès la présentation de ce courrier et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans préavis ni indemnité de licenciement. Cette décision est motivée par les faits suivants :

Votre absence injustifiée depuis le 17 janvier 2011 sur le chantier France Télécom Massena, 57/63 rue Albert – 75013 PARIS et ce, sans nous en avoir averti, ni fourni de justificatif.

Cette absence injustifiée perturbe l’organisation du travail et nuit aux bonnes relations commerciales que nous entretenons avec notre client.

Nous vous prions de bien vouloir prendre contact avec notre service administratif au 01.53.02.49.80, afin de retirer votre solde de tout compte, votre certificat de travail et l’attestation destinée à Pôle
Emploi.

Par ailleurs, afin que vous puissiez faire valoir la portabilité de votre droit individuel à la formation, nous vous informons que vous avez acquis, à la date de ce présent courrier, 44,73 heures non utilisées à ce titre. (') »

Estimant son licenciement infondé, Mme Z a saisi le Conseil des prud’hommes de Paris qui, par décision en date du 15 mai 2012, a jugé que la rupture était intervenue en l’absence de cause réelle et sérieuse.

Le Conseil des prud’hommes de Paris a condamné la société S.A.S. ISS PROPRETE à verser à Mme Z les sommes suivant est :

—  899,33 à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

—  89,33 à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférents au préavis ;

avec intérêts au taux légal de ces sommes à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation.

—  5.395,00 au titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

avec intérêts au taux légal de cette somme à compter de la date de prononcé du jugement.

—  700,00 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Le Conseil des prud’hommes de Paris a ordonné la remise des documents sociaux conformes au jugement, et condamné la société S.A.S. ISS PROPRETE aux entiers dépens. Le Conseil a également rappelé que sont exécutoires de droit les jugements ordonnant la délivrance de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer en application de l’article R.1454-28 du Code du travail ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées aux articles R.1454-28 et R.1454-14 du Code du travail dans la limite de neuf mensualités.

Suite à la notification de cette décision le 25 mai 2012, la société S.A.S. ISS PROPRETE a interjeté appel de ce jugement par déclaration d’appel faite au greffe le 27 juin 2012.

Lors de l’audience du 16 juin 2016, aux termes des conclusions soutenues oralement par son conseil et visées par le greffier, société S.A.S. ISS
PROPRETE a demandé l’infirmation du jugement du 15 mai 2012 dans l’ensemble de ses dispositions, en demandant à la Cour d’appel :

— d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement du
Conseil des prud’hommes de Paris du 15 mai 2012 ;

— de constater que Mme Z a réceptionné la lettre de licenciement datée du 24 mars 2011 et présentée le 26 mars 2011 ;

— de juger que le licenciement pour faute grave de Mme Z est fondé ;

— de débouter Mme Z de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

— d’ordonner le remboursement de la somme versée à Mme Z au titre du préavis et congés payés afférents, soit 775,97 euros nets au titre des condamnations prononcées par le Conseil des prud’hommes de Paris ;

— de condamner Mme Z au paiement de la somme de 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— de condamner Mme Z aux entiers dépens.

Lors de cette même audience, aux termes des conclusions soutenues oralement par son conseil et visées par le greffier, Mme Z a demandé à la Cour d’appel de :

dire et juger la société S.A.S. ISS PROPRETE mal fondée en son appel ;

— confirmer le jugement du Conseil des prud’hommes de Paris du 15 mai 2012 en ce qu’il – a dit que le licenciement de Mme Z ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse ;

— de condamner la société S.A.S. ISS PROPRETE au versement des sommes suivants :

—  11.420,00 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  705,30 euros à titre de rappel de salaire au titre de la période du 1er janvier au 24 mars 2011;

—  70,53 euros au titre des congés payés y afférents ;

—  2.006,62 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

—  200,66 euros au titre des congés payés y afférents ;

—  842,78 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;

— -de condamner la société S.A.S. ISS PROPRETE au paiement de la somme de 2.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— de condamner la société S.A.S. ISS PROPRETE aux entiers dépens d’instance et d’appel.

SUR CE LA COUR :

SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL DE MADAME X Z :

Sur la cause et le bien-fondé du licenciement de Madame X Z.

La société S.A.S. ISS PROPRETE soutient que Mme Z a cessé de respecter certaines obligations contractuelles mises à sa charge, à savoir qu’elle serait en absence injustifiée depuis le 17 janvier 2011, date de sa nouvelle affectation sur le site de France
Télécom Massena. La société
S.A.S. ISS PROPRETE relate que cette absence injustifiée l’a conduite à licencier Mme Z pour faute grave.

Mme Z rétorque que la preuve de la faute invoquée n’est pas rapportée par la société S.A.S.
ISS PROPRETE.

Il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du Code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n’a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement ;

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ;

La lettre de licenciement fixant les limites du litige, il y a lieu d’examiner les griefs articulés à l’encontre de Mme Z ;

Sur l’absence injustifiée de Mme Z à son poste de travail depuis le 17 janvier 2011.

Aux termes de la lettre de licenciement du 24 mars 2011, la société S.A.S. ISS PROPRETE reproche à Mme Z une absence injustifiée depuis le 17 janvier 2011. A ce titre, elle indique que cette absence injustifiée fait suite au changement d’affectation de la salariée, affectée depuis cette date sur le site de France Télécom Massena.

Mme Z soutient que la société S.A.S. ISS PROPRETE ne fournit aucun élément probant de nature à justifier la réalité, la matérialité et la gravité du grief ayant entraîné la rupture immédiate de son contrat de travail.

Elle affirme que les deux demandes de justification d’absences émises par l’employeur, sont en réalité datées du même jour, le 21 février 2011. Elle indique n’avoir reçu aucun courrier d’affectation temporaire de la part de la société S.A.S. ISS PROPRETE, et que le courrier du 7 janvier 2011 est produit pour les besoins de la cause.

Il ressort des éléments versés aux débats, que la société S.A.S. ISS PROPRETE produit effectivement deux courriers de mise en demeure pour absence injustifiée en date des 7 et 21 février 2011 (Pièces n°5 et 6 S.A.S. ISS PROPRETE ) ; Cependant, les cachets de la poste faisant foi, il est constaté que ces deux courriers ont été envoyés le même jour, le 21 février 2011, et sont donc en réalité concomitants. En conséquence, le second courrier irrégulier, est inopérant pour fonder une seconde mise en demeure de Mme Z ;

Par ailleurs, il convient de constater que si l’employeur produit aux débats une lettre simple datée du 7 janvier 2011, notifiant à Mme Z sa nouvelle affectation temporaire sur le site de France
Télécom Massena, il ne produit aucun élément permettant de constater la réalité matérielle de l’envoi effectif ou de la date de réception de ce courrier (Pièce n°3 S.A.S. ISS PROPRETE).

Ainsi, la société S.A.S. ISS PROPRETE impute à Mme Z des absences injustifiées depuis le 17 janvier 2011, sans produire aucun élément permettant d’attester de la réalité de ces absences injustifiées ni surtout de la réception effective par Mme Z de son affectation temporaire sur le site de France Télécom Massena.

Dès lors, les faits reprochés ne sont donc pas établis ;

Le motif tiré de la faute articulé dans la lettre de licenciement n’est donc pas fondé ;

En conséquence c’est à juste titre que le conseil des prud’hommes de Paris a jugé le licenciement de Mme Z sans cause réelle et sérieuse, la décision est confirmée de ce chef.

Sur les conséquences financières de la rupture de la rupture du contrat de travail.

Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, il est admis par les parties au litige que la rémunération brute mensuelle moyenne de Mme Z était de 1.003,31 euros.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme Z, de son ancienneté de plus de quatre ans, ainsi que des conséquences du licenciement à son égard, il convient en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse de lui allouer des dommages et intérêts à hauteur de 8.500,00 euros.

Le jugement est donc infirmé sur le quantum.

Indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents.

Aux termes de l’article L.1234-1 du Code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis de deux mois, s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans ;

Aux termes de l’article L.1234-5 du Code du travail, le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice ; L’inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l’employeur, n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise ; L’indemnité compensatrice de préavis se cumule avec l’indemnité de licenciement et avec l’indemnité prévue à l’article
L. 1235-2 du Code du travail ;

Le licenciement de Mme Z étant sans cause réelle et sérieuse, celle-ci est fondée à obtenir le paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents.

Dès lors, le montant de l’indemnité allouée à Mme Z est de :

1.003,31 euros x 2 mois = 2.006,62 euros.

En conséquences, la somme de 200,66 euros au titre des congés payés y afférents.

Dès lors, le jugement doit être infirmé quant à son quantum.

Indemnité légale de licenciement.

Aux termes de l’article L.1234-9 du Code du travail, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement, calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait avant la rupture du contrat de travail.'

Le licenciement de Mme Z reposant sur une cause réelle et sérieuse, celle-ci est fondé à obtenir le paiement d’une indemnité de licenciement ;'

Dès lors, le montant de l’indemnité due à Mme Z correspond à un mois de salaire; la somme due est donc de 1.003,31 euros bruts.

Le jugement est infirmé sur ce point.

Sur le rappel de salaire au titre de la période du 1er janvier au 24 mars 2011 et les congés payés y afférents.

Mme Z sollicite le paiement de 705,30 euros à titre de rappel de salaire au titre de la période du 1er janvier au 24 mars 2011, ainsi que le paiement de 70,53 euros au titre des congés payés y afférents.

Il ressort des éléments versés aux débats que, Mme Z a effectivement été privée de salaires

du 1er janvier au 24 mars 2011 au motif d’absences injustifiées, ayant conduit à l’engagement d’une procédure de licenciement pour faute grave ;

Ce licenciement ayant été jugé non-fondé, il convient de faire droit à la demande de Mme Z au titre des salaires pour la période du 1er janvier au 24 mars 2011, ainsi que des congés payés y afférents ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens.

La société S.A.S. ISS PROPRETE succombant en son appel, sa demande formée en application de l’article 700 du Code de procédure civile est rejetée, il sera fait droit à celle formée par Mme Z à hauteur de 2.000,00 euros.

La société S.A.S. ISS PROPRETE qui succombe dans la présente instance est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

INFIRME partiellement le jugement du Conseil des prud’hommes de Paris du 15 mai 2012.

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société S.A.S. ISS PROPRETE à verser à Madame X
Z les sommes suivantes :

—  8.500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  2.006,62 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

—  200,66 euros au titre des congés payés y afférents ;

—  1.003,31 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;

—  705,30 euros à titre de rappel de salaire au titre de la période du 1er janvier au 24 mars 2011 ;

—  70,53 euros au titre des congés payés y afférents ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société S.A.S. ISS PROPRETE à verser à Madame X
Z la somme de 2.000,00 en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

REJETTE toute autre demande formée devant la
Cour.

CONDAMNE la société S.A.S. ISS PROPRETE aux entiers dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

C. DUCHE BALLU M-I B

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