Cour d'appel de Paris, 13 avril 2016, n° 15/08425

  • Travail·
  • Salarié·
  • Salaire·
  • Titre·
  • Indemnités de licenciement·
  • Sociétés·
  • Contrôle·
  • Mise à pied·
  • Entretien·
  • Fiche

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, 13 avr. 2016, n° 15/08425
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/08425
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 5 juillet 2015, N° F14/00489

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRÊT DU 13 Avril 2016

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 15/08425 EMJ

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Juillet 2015 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL RG n° F14/00489

APPELANT

Monsieur N Z

XXX

XXX

né le XXX à Marseille

représenté par Me Clémentine LABATUT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1913

INTIMEE

SAS STUDEC

XXX

XXX

N° SIRET : 562 101 626 00504

représentée par Me Christophe CABANES D’AURIBEAU, avocat au barreau d’ALBI

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Mars 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Benoît DE CHARRY, Président

Madame J K, Conseillère

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Greffier : Mme Eva TACNET, greffière lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

— signé par Monsieur Benoît DE CHARRY, président et par Madame Eva TACNET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Monsieur N Z a été engagé par la société STUDEC par contrat de travail à durée indéterminée signé le 27 avril 2012 en qualité de technicien confirmé.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des Bureaux d’Etudes Techniques (Syntec).

Monsieur Z percevait une rémunération mensuelle moyenne de 2248,82 euros.

La SAS STUDEC occupait à titre habituel plus de onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par lettre en date du 13 décembre 2012, Monsieur Z a été convoqué à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2012. Suite à l’entretien préalable, Monsieur Z a été mis à pied à titre conservatoire.

Par lettre en date du 26 décembre 2013, Monsieur Z a été licencié pour faute grave.

Contestant notamment son licenciement, Monsieur Z a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil qui, par jugement en date du 6 juillet 2015 auquel la Cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a dit que le licenciement ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et a :

— Condamné la société SAS STUDEC à lui verser les sommes suivantes:

—  2248,82 euros au titre de préavis,

—  224,88 euros au titre de congés payés y afférents,

—  769,10 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

—  402,40 euros au titre de salaire des jours de mise à pied,

—  40,24 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents,

—  950,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Ordonné à la remise des documents sociaux conformes, bulletin de paie et attestation Pôle Emploi,

— Estimé qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement, celle-ci étant de droit en ce qui concerne les salaires, accessoires de salaire, l’indemnité de licenciement et la remise des documents sociaux en application des dispositions de l’article R 1454-28 du Code du Travail,

— Débouté Monsieur Z du surplus de ses demandes,

— Débouté la SAS STUDEC de sa demande reconventionnelle,

— Mis à la charge de la SAS STUDEC les dépens.

Monsieur Z a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 21 août 2015.

Monsieur Z fait valoir que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, il sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a :

— condamné de la société SAS STUDEC à lui payer :

—  2248,82 euros au titre de préavis,

—  224,88 euros au titre de congés payés y afférents,

—  769,10 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

—  402,40 euros au titre de salaire des jours de mise à pied,

—  40,24 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents,

—  950.00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté la SAS STUDEC de sa demande reconventionnelle,

— condamné la SAS STUDEC aux dépens,

Et que la cour infirme le jugement en ce qu’il a :

— dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse,

— débouté Monsieur Z du surplus de ses demandes,

Il demande que statuant à nouveau la cour :

— juge que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

— condamne la société STUDEC à lui payer les sommes suivantes :

*13 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*500 euros de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure,

*2 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonne à la société de lui remettre les documents sociaux modifiés conformes à la décision.

En réponse, la société STUDEC soutient que le licenciement de Monsieur Z repose sur une faute grave caractérisée et sollicite en conséquence l’infirmation du jugement en ce qu’il ne retient que l’existence d’une cause réelle et sérieuse et conclut au débouté du salarié de l’ensemble de ses demandes subséquentes en préavis, congés payés, rappels de salaires pendant la mise à pied, indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse et indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement.

Elle sollicite par ailleurs la condamnation de Monsieur Z au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud’hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l’audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement 26 décembre 2013 qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée:

'Par lettre recommandée en date du 13 décembre 2013, nous vous avons convoqué pour un entretien préalable avec Monsieur Philippe CHABALIER, Président de STUDEC, en vue d’une éventuelle mesure de licenciement engagée à votre encontre.

Au cours de cet entretien qui s’est tenu le 20 décembre 2013 et auquel vous vous êtes fait accompagner d’un salarié de l’entreprise, Monsieur R S T, nous vous avons exposé les motifs qui nous amenaient à envisager la rupture de votre contrat de travail. De notre côté, nous avons pris note des explications que vous avez consenti à nous fournir. Celles-ci ne nous ont cependant pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Dans ces conditions, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave, pour les motifs suivants:

L’après midi du vendredi 29 novembre 2013, vous avez eu un comportement véhément et irrationnel avec vos collègues de travail, en particulier auprès de Monsieur P E et Madame L M. Ceux-ci ont alors constaté que vous étiez dans un état d’alcoolémie certain. Vous vous êtes ensuite endormi à votre poste de travail en précisant toutefois que l’on vous réveille 'au besoin'. Ce comportement n’est pas acceptable, compte tenu de votre position dans notre entreprise et de votre ancienneté de plus d’un an au sein de STUDEC.

Ce même après-midi, vous n’avez pas effectué le travail demandé par votre chef de projet alors qu’il s’agissait de la finalisation d’un projet important, et vous avez validé des travaux sans même les vérifier ni les contrôler au préalable. Votre attitude a nui au bon fonctionnement du service, a généré des erreurs identifiées lors du contrôle croisé préalable avant chacune des livraisons effectuées. Ainsi, les livraisons à nos clients risquent d’être faussées du fait de vos agissements.

De plus, votre attitude a un impact négatif sur votre équipe de travail, ainsi que sur leur motivation. Nous vous rappelons que si vous vous êtes plaint auprès de vos collègues de travail de votre salaire, celui-ci est conforme à celui défini dans votre contrat de travail et que vos souhaits d’augmentation ne sauraient en aucun cas justifier un tel comportement.

Vous n’avez pas respecté vos obligations découlant de votre contrat de travail et de vos relations de travail qui, par de leurs importances, rendent impossible votre maintien dans l’entreprise et nous ont donc contraints à vous notifier votre mise à pied conservatoire à la fin de votre entretien.

Compte tenu de la gravité de la faute, votre licenciement prendra effet à la date d’envoi de cette lettre soit le 26 décembre 2013. Nous vous adressons par prochain courrier les documents afférents à la rupture de votre contrat de travail, à savoir votre solde de tout compte, votre certificat de travail et l’attestation destinée au Pôle Emploi.'

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Si un doute subsiste il profite au salarié.

La lecture de la lettre de licenciement permet de retenir trois griefs imputés par l’employeur au salarié.

Sur le comportement irrationnel du 29 novembre 2013

La société fait grief au salarié de s’être présenté sur son lieu de travail en état d’alcoolémie certain, provoquant son comportement véhément et irrationnel avec ses collègues de travail, et se serait, par la suite, endormi.

Monsieur Z conteste la matérialité des faits.

Pour en justifier la société produit au dossier les attestations de Monsieur E, rédacteur technique et de Monsieur D directeur d’agence. Mais dans la mesure où Monsieur E explique qu’il a pu constater que lorsque Monsieur Z était entré dans son bureau, 'il sentait fortement l’alcool’ qu’il se serait apparemment endormi tout l’après midi alors qu’il devait faire un contrôle MASTER MRS, il en résulte qu’il n’a pas constaté lui même l’endormissement du salarié alors que ses constatations quant à l’importance de l’imprégnation alcoolique sont plutôt vagues.

L’attestation de Monsieur D est sans intérêt probant puisqu’il n’a pas été témoin des faits et qu’il répète les faits qui lui ont été rapportés par Monsieur E.

Au contraire il est intéressant de relever que plusieurs salariés dont Monsieur A qui livre régulièrement son travail à la voisine de Monsieur Z, Monsieur F, I, qui est en contact permanent avec l’ensemble du personnel de l’agence de Vitrolles et dont le bureau est 'mitoyen à celui de son chef et à proximité du sien et de surcroît avec une isolation phonique très mauvaise'» et Monsieur H qui précise dans une seconde attestation, en réponse aux allégations de la société prétextant d’une absence ce jour qu’il état bien présent le 29 novembre 2013, attestent tous que Monsieur Z ne s’est jamais présenté en état d’ébriété sur son lieu de travail, rajoutant pour Monsieur A que cette constatation s’appliquait à la journée du 29 novembre.

Monsieur Z fournit une analyse de sang effectuée par le salarié certes un mois et demi après les faits reprochés mais démontrant qu’il ne peut être qualifié d’alcoolique chronique.

Les objections de la société qui conteste la validité des attestations apportées au dossier par le salarié au motif que Monsieur F, en arrêt maladie du 18 août 2011 au 5 novembre 2012 et Monsieur H, n’auraient pas été présents dans l’entreprise ou pas en contact avec Monsieur Z le 29 novembre, ne peuvent être retenues en ce que ces objections ne constituent que des allégations non prouvées ;

En outre il est surprenant que la hiérarchie en la personne de Monsieur D informée par Monsieur E de faits d’alcoolémie et d’endormissement qu’elle qualifie elle même de graves, ne démontre de l’existence d’aucune réaction immédiate et ne reproche ces faits à Monsieur Z que trois semaines plus tard au moment de l’entretien préalable au licenciement.

Ainsi les déclarations de Messieurs E et D, compte tenu du lien de subordination qui les lient à l’employeur, qui pour l’un n’a rien constaté à titre personnel et pour l’autre n’évoque qu’une haleine alcoolisée et qui ne sont pas corroborées par d’autres éléments objectifs, sont insuffisamment probantes pour apporter la preuve de la matérialité de ce premier grief.

Sur l’absence de travail de contrôle

La société soutient que le salarié a manqué à son travail de contrôle l’après-midi du 29 novembre 2013; qu’il devait contrôler de la documentation technique du super PUMA puis remplir une fiche MASTER et que dans le cadre du second contrôle par un autre salarié des erreurs ont été constatées; qu’il est ainsi démontré que le salarié a signé la fiche de contrôle sans faire son travail.

Le salarié fait valoir que le contrôle de la documentation est un contrôle croisé effectué d’abord par deux salariés puis par un rédacteur; que Monsieur Z est intervenu en qualité de premier contrôleur, puis que la fiche a été contrôlée par Monsieur X et qu’enfin elle a été transmise au rédacteur; que les erreurs éventuelles du document final, par ailleurs habituellement de l’ordre de 15%, ne lui sont de surcroît pas spécialement imputables ; qu’en outre la symétrie entre sa colonne de contrôle et celle de Monsieur X est normale puisque la fiche VER qu’il devait remplir ne peut être signée que si les deux salariés ont remplis leur colonne de la même façon.

Pour justifier de la matérialité de faits reprochés au salarié et donc de l’absence de travail effectué sur la fiche PUMA la société produit l’attestation de Monsieur E qui n’a pas de valeur probante en ce que, sans autre développement et utilisant le conditionnel, son auteur explique que « Monsieur Z sans même faire le contrôle master aurait signé la fiche juste avant de partir », d’autant qu’il affirme que le salarié aurait signé la fiche VER le 29 novembre 2013, juste avant de partir, alors que le dossier ne porte pas trace d’une fiche signée le 29 novembre et que dans ses conclusions page 17, la société explique que cette fiche n’a été signée que le 4 décembre 2013.

Elle produit également l’attestation de Monsieur X, rédacteur technique, développant « que Monsieur Z ne trouvait jamais d’erreur lors de ses contrôles, ce qui m’a amené à douter de la qualité de son contrôle. De plus, je l’ai surpris plusieurs fois en train de somnoler à son poste et il se vantait d’être bien payé pour le peu de travail qu’il faisait », ce qui se rapporte le cas échéant à une insuffisance professionnelle mais en tout cas ne démontre pas de la réalité du grief visé dans la lettre de licenciement selon lequel il a manqué à son travail de contrôle l’après-midi du 29 novembre 2013 dans la documentation technique du super PUMA et d’une absence totale de travail ce jour.

Compte tenu de l’organisation mise en place par la société, l’objectif visé était d’aboutir à ce que par l’intervention de contrôleurs croisés les salariés parviennent à des conclusions identiques de sorte que le salarié soutient à juste titre qu’il ne peut être tiré aucune conséquence sur une absence de travail qui lui serait reprochée du fait que les colonnes ont été remplies de manière identique par les deux contrôleurs.

En outre si des anomalies ont été constatées par la suite par leur rédacteur (ficher RK Anomalies Diffusion Finalisation 2014, pages manquantes dans le manuel et non traduction de la langue anglaise en française), ceci ne suffit pas à prouver que Monsieur Z n’a pas fait le travail de contrôle demandé, puisque l’organisation du travail mise en place ne permet pas d’imputer plus spécialement à l’un des salariés et donc à Monsieur Z plutôt qu’à son collègue, ces erreurs . De surcroît l’employeur reconnaît qu’il ne reproche pas au salarié des erreurs dans le document, mais l’absence de travail.

D’où il suit que le second grief invoqué dans la lettre de licenciement est non démontré.

Sur l’attitude de Monsieur Z ayant un impact négatif sur l’équipe de travail

La société soutient que l’attitude du salarié a un impact négatif sur son équipe de travail, ainsi que sur sa motivation en ce qu’il s’est plaint auprès de ses collègues de travail de son salaire, alors que celui-ci est conforme à celui défini dans son contrat de travail et que ses souhaits d’augmentation ne sauraient en aucun cas justifier un tel comportement; que Monsieur Z avait déjà contesté son salaire lors de son entretien d’intégration le 27 septembre 2012 et qu’il lui avait été proposée une formation qualifiante afin d’évoluer dans l’entreprise, ce que le salarié avait refusé puisqu’il souhaitait une augmentation de salaire immédiate.

Monsieur Z fait valoir en retour qu’en réponse à sa demande d’augmentation, Madame G lui a proposé une formation qui lui aurait permis de travailler sur un autre projet mais avec un salaire net qui n’aurait pas atteint la somme de 1750 euros. Pour éviter un accroissement considérable de sa charge de travail et une augmentation de salaire minime, le salarié a ainsi refusé cette formation. S’il a pu discuter du montant du salaire dans le cadre d’entretiens, Monsieur Z ne s’est jamais vanté de son manque d’investissement; que de plus, l’insatisfaction salariale était répandue chez STUDEC.

Pour justifier de la matérialité des faits reprochés la société produit l’entretien annuel de 2013 dans lequel la responsable de l’entretien, Madame Y, retient que Monsieur Z est 'bridé par un salaire qui ne convient pas, qu’il a perdu toute motivation dans son travail et n’est plus investi. » mais reconnait aussi un fort potentiel. Surtout l’entretien annuel est l’endroit prévu pour faire toutes observations et revendications salariales de sorte qu’elles sont sans incidences sur le climat dans l’entreprise.

Si Madame G, directeur de région Sud Est, atteste alors que 'son manque d’implication et d’investissement a été de plus en plus remarqué par l’ensemble de l’équipe', Monsieur E, rédacteur technique, que Monsieur Z 'se vante de son ratio travail/salaire, zéro travail/1800 euros par mois, moins j’en fais, mieux je me porte’ , par Monsieur D, directeur d’agence et par Madame B, chargée de recrutement, qui a constaté « qu’il ne travaillait pas et qu’en plus il était affalé sur son fauteuil, les pieds sur le bureau occupé par des activités non professionnelles (jeux) sans aucune culpabilité ni gêne devant ses collègues de travail et devant moi » leurs constatations ne sont pas datées, pas précises, et émanent d’une hiérarchie qui procède par voie d’allégations et elles sont contestées par les attestations produites par le salarié dont Monsieur C, traducteur technique, qui vante ses qualités professionnelles évidentes, Monsieur F, I qui rapporte que « Monsieur Z était apprécié des collègues de son service et se rendait disponible pour apporter son aide »et de Monsieur H, dessinateur industriel qui le décrit comme une personne joviale, attentionnée et qui aime le partage.

Il est intéressant de relever le climat général dans l’entreprise décrit dans le rapport du CHSCT des risques psychosociaux de mars 2012 dans lequel est noté que 68% des répondants de la région Sud Est estiment ne pas avoir un salaire satisfaisant.

Le lien entre l’attitude du salarié et l’impact négatif sur l’équipe de travail et sa motivation, évoqué dans la lettre de licenciement, n’apparaît donc pas.

D’où il suit que le troisième grief n’est pas établi.

En conséquence le licenciement de Monsieur Z est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes subséquentes

— Sur le préavis et l’indemnité de licenciement et le rappel de salaire afférent à la mise à pied

Monsieur Z demande un montant de 2248,82 euros outre congés payés afférents au titre de l’indemnité compensatrice de préavis qui est conforme aux dispositions de l’article 15 de la convention collective SYNTEC qui prévoit une durée de préavis de un an lorsque le salarié bénéficie d’une ancienneté inférieure à deux ans et à son dernier au Monsieur Z moyen de 2248,82 euros et qui n’est pas contesté quant à son calcul par la société.

Il sollicite en outre une indemnité de licenciement d’un montant de 769,10 euros qui n’est pas plus contesté par la société et qui est conforme aux dispositions de l’article L1234-9 du code du travail au regard de son ancienneté et de son salaire moyen sur les 12 derniers mois.

Par ailleurs la faute grave n’ayant pas été retenue le salarié est fondé à demander le rappel de Monsieur Z couvrant la période de mise à pied conservatoire de 402,40 euros outre congés payés afférents.

En conséquence le jugement du conseil de prud’hommes est confirmé quant à la condamnation de la société à payer à Monsieur Z les montants indiqués à titre d’indemnités de licenciement et de préavis et de rappel de salaire afférent à la mise à pied et les congés payés afférents.

— Sur l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

La société STUDEC emploie plus de 400 salariés et Monsieur Z bénéficiait d’une ancienneté de 20 mois et demi lors de son licenciement.

Aux termes de l’article L.1235-5 du code du travail, applicable au licenciement de salarié bénéficiant d’une ancienneté inférieure à 2 ans, le salarié peut prétendre en cas de licenciement abusif à une indemnité correspondant au préjudice subi.

En l’espèce Monsieur Z explique que le licenciement est intervenu pendant les périodes de fêtes de fin d’années alors même qu’aucun reproche ne lui avait été fait antérieurement, qu’il a souffert d’une déprime ayant justifié l’administration d’anxiolytiques et de somnifères pendant plusieurs mois, qu’il n’a pu retrouver un emploi qu’au mois de mars 2016 et qu’il rencontre des difficultés financières suite à la perte d’emploi l’ayant contraint à solliciter un prêt de 8000 euros à sa banque.

La société STUDEC répond à juste titre qu’aucun lien de causalité n’est établi entre la conclusion du prêt et la prise de médicaments et le licenciement et qu’il convient de tenir compte des indemnités de chômage perçues par le salarié.

Compte tenu notamment de tous ces éléments, du montant de la rémunération versée à Monsieur Z, de son âge, de son ancienneté, de son retour à l’emploi en mars 2016, il y a lieu de lui allouer, une somme de 8 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement abusif.

Sur l’irrégularité de la procédure

Les irrégularités de procédure sont passibles de sanctions et visent toutes les inobservations ou irrégularités concernant un élément quelconque de la procédure.

Le non-respect de la procédure de licenciement entraine nécessairement un préjudice pour le salarié.

Monsieur Z soutient que l’entretien préalable au licenciement ne peut avoir lieu mois de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce puisque l’entretien préalable s’est déroulé le quatrième jour ouvrable suivant la réception de la lettre; que s’en est suivi un préjudice moral dont il réclame réparation à hauteur de la somme de 500 euros.

En l’espèce la lettre de convocation est datée du vendredi 13 décembre 2013 ce qui permet de retenir une date de réception au plus tôt du 14 décembre 2013 en l’absence de preuve par le salarié d’une date postérieure de sorte que le délai de 5 jours, en application des règles posées à l’article 641 du code de procédure civile et considérant que le 15 décembre est un dimanche , jour non ouvrable, le délai de 5 jours ouvrables , a commencé à courir le 16 décembre et expirait le 20 décembre.

Or l’entretien s’est déroulé le vendredi 20 décembre 2013.

En conséquence une irrégularité de procédure est constatée et le jugement du conseil de prud’hommes est infirmé sur ce point.

Considérant le retard de 1 jour retenu, l’assistance à l’entretien du salarié par un conseiller, le préjudice subi sera fixé à la somme de 500 euros.

Sur le cours des intérêts

Conformément aux dispositions des articles 1153 et 1153-1 du code civil, l’indemnité de licenciement, les rappels de salaire sur mise à pied, l’indemnité compensatrice de préavis et l’indemnité de congés-payés seront assorties d’intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes soit le 6 juillet 2015, et les dommages et intérêts alloués seront assortis d’intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur la remise de documents

Il sera ordonné à la SAS STUDEC de remettre à Monsieur Z un certificat de travail, une attestation POLE EMPLOI et des bulletins de salaire conformes à la présente décision.

Aucune circonstance de l’espèce ne conduit à assortir cette disposition d’une mesure d’astreinte.

Sur les frais irrépétibles

C’est à juste titre que la société a été condamnée à payer à Monsieur Z la somme de 950 euros au tire de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est pas inéquitable de la condamner à ce titre au même montant pour la procédure d’appel.

Sur les dépens

Partie succombante, la SAS STUDEC sera condamnée au paiement des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu’il a :

— Condamné la société SAS STUDEC à verser à Monsieur Z les sommes suivantes:

—  2248,82 euros au titre de préavis,

—  224,88 euros au titre de congés payés y afférents,

—  769,10 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

—  402,40 euros au titre de salaire des jours de mise à pied,

—  40,24 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents,

—  950 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau:

— Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

— Condamne la société STUDEC à payer à Monsieur Z les sommes :

*de 8 000 euros à titre d’indemnité de licenciement abusif,

*de 500 euros de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure,

avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2015 pour les créances salariales, et pour les dommages et intérêts alloués à compter de la présente décision.

— Déboute Monsieur Z du surplus de ses demandes,

— Ordonne la remise de documents sociaux modifiés selon les termes de la décision,

— Condamne la société STUDEC à payer à Monsieur Z la somme de 950 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

— Condamne la société STUDEC aux entiers dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, 13 avril 2016, n° 15/08425