Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 2, 22 septembre 2017, n° 16/14377

  • Atteinte à la valeur patrimoniale du brevet·
  • Cessation de l'exploitation du brevet·
  • Demande en liquidation de l'astreinte·
  • Bénéfices tirés des actes incriminés·
  • Capacité commerciale ou industrielle·
  • Application de la loi dans le temps·
  • Loi de lutte contre la contrefaçon·
  • Absence d'exploitation du brevet·
  • Liquidation de l'astreinte·
  • Condamnation in solidum

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La période sujette à réparation ayant couru du 1er avril 2007 au 7 septembre 2012, il y a lieu de distinguer les règles applicables avant et après la loi du 29 octobre 2007 qui a introduit dans le Code de la propriété intellectuelle l’article L. 615-7 relatif à la détermination des dommages-intérêts en matière de contrefaçon. Avant cette loi le principe de la réparation reposait sur l’article 1382 du Code civil et son calcul sur l’article 1149 au terme duquel étaient pris en considération, d’une part, la perte subie, d’autre part, le gain manqué. Le titulaire prétend avoir eu le projet de reprendre la fabrication de casques de vélo pourvus du dispositif breveté, en avoir été empêché par les actes de contrefaçon dont il a fait à nouveau l’objet, et avoir dès lors subi un manque à gagner. Cependant, sur cette première période, il n’avait engagé aucun investissement en matériel et en hommes pour mettre en ¿uvre une fabrication. De plus, si le loisir du vélo a connu un développement important, les produits y afférents dont les casques se trouvent soumis à une forte concurrence. En conséquence, la cour fixe à 6% le taux de la redevance indemnitaire, tenant compte de la majoration par rapport à un taux qui aurait été librement négocié entre les parties. Concernant la période postérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 29 octobre 2007, il convient de relever que l’article L. 615-7 du CPI n’introduit pas de mesures punitives ayant pour résultat la confiscation des bénéfices au profit de la victime mais introduit des éléments à prendre en considération par le juge pour l’évaluation du préjudice ou la possibilité pour la victime d’opter pour une évaluation forfaitaire au moins égale à la redevance qu’elle aurait pu obtenir par l’exploitation de son brevet. En l’espèce, le titulaire du brevet avait manifesté son intention de reprendre la fabrication de casques et avait même investi dans un bail commercial de sorte qu’il disposait de locaux adaptés à cette fin outre son savoir-faire antérieur. Pour autant, il existait alors une offre importante de casques de vélo dont la plupart comprenait un réglage occipital via un système de molette ou de serrage distinct du dispositif breveté, d’autres étant munis de son propre système puisqu’il avait consenti une licence dans le cadre d’une transaction. Ceci a créé une situation de concurrence de nature à expliquer l’abandon de son projet de fabrication. Le titulaire du brevet ne démontre ainsi pas l’existence d’un projet abouti de relance de son activité antérieure qui aurait été interrompu par des actes de contrefaçon imputables notamment aux sociétés poursuivies. Il n’empêche qu’aux termes de l’article L. 615-7 du CPI, doivent être pris en compte les bénéfices réalisés par les contrefacteurs pour évaluer les dommages-intérêts à lui allouer. Si le système breveté n’est pas détachable des casques sur lesquels il est intégré et qu’il s’agit dès lors d’un tout fabriqué par l’un des contrefacteurs et commercialisé par l’autre, en revanche le titulaire, qui n’est pas fabriquant, ne peut revendiquer à son profit ce tout commercial. En conséquence il y aura lieu en tout état de cause de pondérer le montant des bénéfices réalisés par le contrefacteur, la contrefaçon ne portant que sur un élément des casques.

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Written on 25 May 2021 Les sociétés Décathlon France (distributeur) et Knauer (fabricant allemand) avaient été assignées en 2012 par la société Time Sport, qui leur reprochait d'avoir contrefait son brevet portant sur la « fixation occipitale » d'un casque de vélo. 10 ans plus tard, et après une quinzaine de jugements et arrêts intermédiaires, la Cour de cassation s'est récemment prononcée sur les modalités d'indemnisation du breveté. Elle casse ainsi l'arrêt d'appel, estimant que les magistrats de la Cour d'appel de Paris étaient allés à l'encontre de la demande de Time Sport à cet …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 2, 22 sept. 2017, n° 16/14377
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/14377
Importance : Inédit
Publication : PIBD 2017, 1081, IIIB-715
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 9 juin 2016, N° 10/05487
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 7 septembre 2012, 2010/05487
  • Tribunal de grande instance de Paris, ordonnance du juge de la mise en état, 13 septembre 2013, 2010/05487
  • Cour d'appel de Paris, 16 décembre 2014, 2012/18548
  • Tribunal de grande instance de Paris, 22 mai 2015,2012/06654
  • Tribunal de grande instance de Paris, 10 juin 2016, 2010/05487
  • Cour de cassation, 22 novembre 2016, E/2015/16647
  • Tribunal de grande instance de Paris, ordonnance du juge de la mise en état, 27 janvier 2017, 2015/15954
  • Tribunal de grande instance de Paris, ordonnance du juge de la mise en état, 8 juin 2018, 2015/15954 . Cour d'appel de Paris, 30 novembre 2018, 2018/17539
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : EP06882885 ; FR9406014
Titre du brevet : Dispositif de fixation occipitale d'un casque
Classification internationale des marques : A42B
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Référence INPI : B20170145
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2017

(n°137,13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/14377

Jonction avec le dossier 16/15754

Décision déférée à la Cour : jugement du 10 juin 2016 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3ème chambre 3ème section – RG n°10/05487

APPELANTE

S.A.S. TIME SPORT INTERNATIONAL, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Immatriculée au rcs de la Vienne sous le numéro 339 730 996

Représentée par Me Anne-Marie OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque B 653

Assistée de Me Françoise FAURIE plaidant pour la SELARL F. FAURIE & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE PROVOQUEE

S.A.R.L. D-H-G- KNAUER GmbH, société de droit allemand, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Adresse 2]

ALLEMAGNE

Représentée par Me Virginie DOMAIN, avocat au barreau de PARIS, toque C 2440

Assistée de Me Vanina VEDEL plaidant pour le Cabinet EPP & KUHL, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE AU PRINCIPAL et INTIMEE PROVOQUEE

S.A.S. DECATHLON FRANCE, prise en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Immatriculée au rcs de Lille Métropole sous le numéro 500 569 405

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP JEANNE BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque L 0034

Assistée de Me Sophie HAVARD-DUCLOS, avocat au barreau de PARIS, toque R 144

INTIMEE

S.A. DECATHLON, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Non assignée et n’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 mai 2017, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Colette PERRIN, Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mme Colette PERRIN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Colette PERRIN, Présidente

Mme Véronique RENARD, Conseillère

Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère, désignée pour compléter la Cour

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Par défaut

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à qui la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

La société Time Sport International a pour activité la fabrication d’articles de sport dans le domaine du vélo.

Elle a été placée sous sauvegade par jugement du 19 octobre 2010 et a bénéficié d’une homologation de son plan par jugement du 19 avril 2012 ; à la suite du décès de son dirigeant survenu à la fin de l’année 2014, elle a été reprise par la société Mont Blanc Sport Group Holding.

Elle est titulaire d’un brevet Européen EP 0682885 déposé le 9 mai 1995 et délivré le 25 août 1999 sous priorité du brevet français n°9406014 du 10 mai 1994 portant sur un dispositif de fixation occipitale de casque de vélo.

Elle a été victime de plusieurs contrefaçons de son brevet entre les années 2000 et 2007, obtenant la condamnation des contrefacteurs et concluant un accord transactionnel avec l’un d’eux, la société Bell.

La société Décathlon France, filiale de la société Decathlon SA est spécialisée dans la conception, la fabrication et la distribution d’articles sportifs en France à travers une chaîne de magasins.

La société D-H-G Knauer GmbH (ci-après, Knauer) a pour objet la fabrication et la distribution d’articles d’équipements dans le domaine du cycle, notamment des casques pour vélos, sous la marque « Ked ».

Le 27 janvier 2010, la société Time Sport International a fait procéder à un constat d’huissier de justice dans les locaux de la société Decathlon puis le 11 mars 2010, dûment autorisée par ordonnance du tribunal de grande instance de Paris, à une saisie-contrefaçon.

Suivant acte délivré le 1er avril 2010, elle a assigné la société Décathlon France SAS et la société Knauer en contrefaçon visant, d’une part, des casques de marque « B’Twin », et d’autre part, des casques de marque « Ked » fabriqués et fournis par la société Knauer.

Par jugement en date du 7 septembre 2012 le tribunal de grande instance de Paris a, en substance :

— donné acte à Maître [C], commissaire à l’exécution du plan de la société Time Sport International de son intervention ;

— débouté la société Décathlon de ses demandes en nullité de la revendication n°1 du brevet européen n°0682885 dont la société Time Sport International est titulaire ;

— dit qu’en fabricant, fournissant et commercialisant des modèles de casque Ked Joker et Ked Meggy reproduisant les caractéristiques essentielles de la revendication n°1 du brevet européen n°0682885 dont la société Time Sport International est titulaire, la société Knauer et la société Décathlon ont commis des actes de contreafçon à l’égard de celle-ci ;

— dit qu’en commercialisant des modèles de casque B’Twin Mix et B’Twin Urban Helmet reproduisant les caractéristiques essentielles de la revendication n°1 du brevet européen n°0682885 dont la société Time Sport International est titulaire, la société Décathlon a commis des actes de contrefaçon à l’égard de celle-ci ;

— condamné in solidum la société Décathlon et la société Knauer à payer à la société Time Sport International la somme de 300.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive résultant des actes de contrefaçon du fait de la commercialisation des casques Ked ;

— condamné la société Décathlon à payer à la société Time Sport International la somme de 300.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive résultant des actes de contrefaçon du fait de la commercialisation des casques B’Twin ;

— fait interdiction à la société Décathlon, sous astreinte de 150€ par infraction constatée, de commercialiser tous casques Ked ou B’Twin équipés d’un dispositif contrefaisant ;

— ordonné sous contrôle de la société Time Sport International et d’un huissier choisi par elle, la destruction de l’ensemble des stocks de casques B Twin et Ked au sein de la société Decathlon aux seuls frais de cette dernière sous astreinte de 300 euros par jour de etard à l’expiration d’un délai de 1 mpis à compter du jour où la décision sera définitive et dit que l’astreinte courrapendant un délai de 3 mois ;

Avant dire droit

— ordonné une expertise confiée à [Y] [Q].

La société Décathlon a interjeté appel, et par arrêt en date du 16 décembre 2014, la Cour d’appel de Paris a :

— confirmé le jugement, sauf en ce qu’il a annulé le procès-verbal de constat d’achat du 27 janvier 2010 et écarté des débats le procès-verbal ainsi annulé et toutes les pièces annexées,

statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

— annulé partiellement le procès-verbal de constat d’achat du 27 janvier 2010 dans sa partie contenant la description détaillée des produits achetés,

— écarté des débats la partie du procès-verbal ainsi annulée,

— rejeté les autres demandes de la société Time sport,

— rejeté la demande reconventionnelle de la société Décathlon,

sur l’article 700 du Code de procédure civile, rejeté la demande de la société Décathlon, et l’a condamnée à payer à la société Time sport la somme de 50 000 €, rejeté la demande de la société Time sport à l’encontre de la société Knauer,

— condamné la société Décathlon aux dépens d’appel,

La société Decathlon a formé un pourvoi en cassation qui a été rejeté par arrêt du 22 novembre 2016 ;

Par jugement du 22 mai 2014, le tribunal a :

— dit la société Knauer tenue de garantir la société Décathlon France SAS des sommes mises à sa charge et réglées par elle en application des décisions exécutoires rendues dans la procédure engagée pour contrefaçon du brevet EP0682885 par la société Time Sport International à l’encontre des sociétés D-H-G Knauer GmbH et Décathlon France SAS relativement à la vente des casques de marque 'Ked’ ;

— condamné celle-ci à payer à la société Décathlon France SAS:

la somme de 155.000 euros laissée à sa charge en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 7 septembre 2012, résultant des faits de commercialisation des casques de marque 'Ked’ ;

la somme de 100.000 euros correspondant à la moitié des sommes réglées par la société Décahtlon France SAS au cabinet Laude Esquier Champey, avocat l’assistant dans le cadre de l’action engagée à son encontre par la société Time Sport International.

— sursis à statuer dans l’attente de la fixation définitive des condamnations et frais que la société Décathlon France SAS aura eu à régler du fait de l’action en contrefaçon de brevet engagée par la société Time Sport International à son encontre, en ce qu’elle vise des casques de marque 'Ked'

Le rapport d’expertise a été déposé le 7 novembre 2014.

Par jugement contradictoire en date du 10 juin 2016, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris a :

— condamné la société Décathlon France SAS à payer à la société Time Sport International, en réparation des actes de contrefaçon commis à son préjudice et résultant de la commercialisation des casques B’Twin et Ked, la somme de 998.458 euros au titre de la période du 1er novembre 2007 au 8 septembre 2012 ;

— condamné la société D-H-G Knauer à payer à la société Time Sport International, en réparation des actes de contrefaçon commis à son préjudice et résultant de la commercialisation de casques Ked, la somme de 350.896,6 au titre de la période du 1er novembre 2007 au 8 septembre 2012 ;

— condamné la société D-H-G Knauer in solidum avec la société Décathlon France SAS à payer à la société Time Sport International, en réparation des actes de contrefaçon commis à son préjudice et résultant de la commercialisation des casque Ked, la somme de 64.681,44 euros au titre de la période du 2 avril au 30 octobre 2007 ;

— rejeté la demande présentée par la société Time Sport International au titre de la liquidation d’astreinte ;

— condamné in solidum les sociétés Décathlon France SAS et Knauer à payer à la société Time Sport International une somme de 50.000€ au titre du préjudice moral résultant des actes de contrefaçon commis à son encontre

— condamné in solidum les sociétés Décathlon France SAS et Knauer à payer à la société Time Sport International une somme de 60.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société Time Sport International a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe en date du 19 juillet 2016.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique en date du 27 avril 2017, la société Time Sport International demande à la Cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a :

retenu l’indemnisation de la société Time Sport International, pour la période du 1er novembre 2007 au 8 septembre 2012 sur la base des bénéfices de contrefacteurs.

retenu que ce bénéfice devait être calculé sur la base de la marge brute telle que déterminée par l’expert.

condamné in solidum la société Decathlon France et la société Knauer à payer à la société Time Sport International une somme de 60 000 €au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile

— l’infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :

— condamner la société Decathlon France à lui payer en réparation de son préjudice, la somme de 4.992.290 € représentant le bénéfice global qu’elle a réalisé à travers la vente des casques contrefaisants Ked et B’Twin entre le 1er novembre 2007 et le 8 septembre 2012.

— la condamner, en outre, à lui payer la somme de 751.299 € au titre de la perte de chance de réaliser une marge bénéficiaire à travers les casques Ked sur la période du 2 avril 2007 ou à tout le moins et à titre subsidiaire, la somme de 333 910,6 euros sur la base d’une redevance indemnitaire au taux de 20%.

— la condamner in solidum avec la société Knauer à lui payer en réparation de son préjudice la somme de 1.754.483 € représentant le bénéfice global réalisé par la société Knauer à travers la vente des casques contrefaisants Ked entre le 1er novembre 2007 et le 8 septembre 2012.

— la condamner in solidum avec la société Knauer à lui payer la somme de 363.833 € au titre de la perte de chance de réaliser une marge bénéficiaire à travers les casques Ked sur la période du 2 avrim 2007 au 30 octobre 2007 ou à tout le moins et à titre subsidiaire, la somme de 161 703,6 € sur la base d’une redevance indemnitaire au taux de 20%.

— condamner la société Decathlon à lui payer la somme de 1.324.500 € au titre de l’astreinte ordonnée par le tribunal.

— condamner la société Decathlon et Knauer à lui payer la somme de 150 000€ au titre de son préjudice moral ;

et y ajoutant

— les condamner in solidum à lui payer une somme de 100 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique en date du 20 avril 2017, la société Décathlon France demande à la Cour de :

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 juin 2016

— constater que la société Time Sport International n’exploitait pas son brevet au moment des faits soumis à son indemnisation ;

— pour la période 1 er avril au 31 octobre 2007, dire que le manque à gagner de la société Time Sport International ne peut être évalué que par l’application d’une redevance indemnitaire dont le montant sera fixé à 32.341 euros ;

— pour la période du 1 er novembre 2007 au 8 septembre 2012, dire que le préjudice de la société Time Sport International ne peut être évalué que par l’application d’une redevance indemnitaire dont le montant devra se situer entre 250.000 euros et 466.000 euros au maximum ;

dans l’hypothèse où la Cour déciderait de prendre en considération les bénéfices réalisés par la société Décathlon France pour la période du 1 er novembre 2007 au 8 septembre 2012, prendre en considération le fait que Décathlon France a réalisé une marge nette située entre 1.226.000 et 1.282.000 euros ;

en tout état de cause

— débouter la société Time Sport de ses demandes infondées au titre d’une commercialisation des stocks et au titre de son préjudice moral ;

— débouter la société Time Sport de ses demandes de condamnation in solidum des sociétés Décathlon France et D-H-G Knauer au titre des préjudices concernant

uniquement la société D-H-G Knauer ;

— débouter la société Time Sport de l’intégralité de ses autres demandes, y compris sa demande de condamnation de la société Décathlon France au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

— condamner Time Sport aux entiers dépens, qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique en date du 23 mars 2017, la société Knauer demande à la Cour de :

— la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident et provoqué à l’égard de la société Décathlon France

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 10 juin 2016

et statuant à nouveau,

— dire qu’à défaut d’exploitation de son brevet par la société Time Sport Internationall SAS celle-ci ne peut faire valoir qu’un préjudice calculé sur la base d’une redevance indemnitaire

— dire que le montant de cette redevance indemnitaire ne saurait excéder la somme de 300.000€

— débouter la société Time Sport International SAS de l’ensemble de ses

demandes, fins et prétentions

à titre subsidiaire,

— dire que le montant du préjudice subi par la société Time Sport International SAS et calculé sur le manque à gagner ne saurait excéder la somme de 197.701,96 €

— condamner la société Time Sport International SAS au paiement d’une somme de 20.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur le calcul de la réparation

La société Time Sport International distingue deux périodes pour chiffrer son préjudice, l’une antérieure la loi du 29 octobre 2007 et courant du 2 avril au 29 octobre 2007 au cours de laquelle ont été fabriqués et vendus des casques 'Ked', l’autre courant du 1er novembre 2007 au 7 septembre 2012 au cours de laquelle ont été vendus des casques Ked et B’Twin, faisant valoir qu’aux termes des dispositions légales nouvelles doivent être pris en compte, pour cette seconde période, les bénéfices réalisés par le contrefacteur pour chiffrer le préjudice de la victime des actes de contrefaçon.

La société Decathlon France soutient que cette évolution législative n’a pas introduit des dommages intérêts punitifs et confiscatoires et qu’en l’espèce la société Time Sport International n’exploitant pas son brevet depuis 2000, elle ne peut réclamer la restitution à son profit des bénéfices réalisés .

La période sujette à réparation ayant couru du 1er avril 2007 au 7 septembre 2012, il y a lieu de distinguer les règles applicables avant et après la loi du 29 octobre 2007 qui a introduit dans le Code de la propriété intellectuelle l’article L615-7 relatif à la détermination des dommages et intérêts en matière de contrefaçon.

Avant cette loi le principe de la réparation reposait sur l’article 1382 du Code civil et son calcul sur l’article 1149 au terme duquel étaient pris en considération, d’une part, la perte subie, d’autre part, le gain manqué.

Depuis la loi du 29 octobre 2007, l’article L615-7 du Code de la propriété intellectuelle dispose que 'Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte.

Toutefois la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts, une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte'.

Les intimées font valoir que, quelle que soit la période envisagée, dans la mesure où la société Time Sport International n’exploitait pas son brevet, le gain manqué correspond à la perte de la redevance qu’elle aurait pu espérer, si elle avait donné l’autorisation d’exploiter son brevet, ce même raisonnement devant aussi s’appliquer lorsque le titulaire du brevet n’aurait pas eu la capacité de commercialiser l’intégralité de la masse contrefaisante.

La société Time Sport International demande à être indemnisée sur la base du 1er alinéa de l’article L615-7 et réclame l’intégralité des bénéfices réalisés par les intimées du fait de la vente des casques jugés contrefaisants et soutient que les bénéfices des contrefacteurs s’apprécient à partir de la marge brute qu’ils ont réalisée.

L’article L615-7 du code de la propriété intellectuelle n’introduit pas de mesures punitives ayant pour résultat la confiscation des bénéfices au profit de la victime mais introduit des éléments à prendre en considération par le juge pour l’évaluation du préjudice ou la possibilité pour la victime d’opter pour une évaluation forfaitaire au moins égale à la redevance qu’elle aurait pu obtenir par l’exploitation de son brevet ; en conséquence la cour examinera successivement les deux périodes pour chiffrer le préjudice de la société Time Sport International.

Sur la période du 2 avril au 31 octobre 2007

La société Time Sport International demande réparation au titre de la perte de chance de réaliser une marge bénéficiaire à travers les casques Ked et à titre subsidiaire demande que le taux de la redevance de 8 % accordée par les premiers juges soit majorée et ce au titre d’un manque à gagner distinct à l’égard de la société Decathlon et de la société Knauer.

La société Decathlon conclut à une réparation par une seule redevance indemnitaire et à la minoration de celle allouée par les premiers juges. préconisant un taux de redevance ramené à 4% et s’appuie, d’une part, sur le montant des redevances versées par les sociétés Shine et Bell, d’autre part sur une analyse réalisée par le cabinet Francis Lefebvre.

La société Time Sport International prétend avoir eu le projet de reprendre la fabrication de casques , en avoir été empêchée par les actes de contrefaçon dont elle a fait à nouveau l’objet, et avoir dès lors subi un manque à gagner.

Si, par lettre du 22 juin 2005 la société Time Sport International a écrit à la société Shine pour lui indiquer son projet de reprendre la fabrication des casques à deux conditions ' si le plan de redressement était accepté par le tribunal de comerce d’Angers et sous réserve que l’indemnité récupérée du procès avec Bell soit au moins celle estimée par cette dernière', si elle a pris à bail de nouveaux locaux en juillet 2007 dont une partie pouvait être utilisée pour cette fabrication et si elle a conclu un accord transactionnel avec la société Bell portant sur plus de 6 millions d’euros, l’expert constatant qu’elle a de ce fait pu dégager un solde d’exploitation positif de 1 926 Keuros sur l’exercice 2006/2007, elle ne démontre pas pour autant qu’elle était en mesure de réaliser cet objectif au cours de la période du 2 avril au 31 octobre 2007, ayant réalisé un prévisionnel d’investissements à cette fin seulement en 2008 et n’ayant préalablement engagé aucun investissement en matériel et en hommes pour mettre en oeuvre une fabrication.

Concernant le montant de la redevance qu’elle aurait pu obtenir, il convient de relever que le rapport du cabinet Francis Lefebvre produit par la sociétét Decathlon France a retenu un taux compris entre 1 et 4% ; toutefois, il se fonde sur quatre contrats dont aucun ne porte sur le territoire français et qui sont des contrats de marque et non de brevets de sorte qu’il ne saurait être retenu par la cour comme un élément de comparaison pertinent.

Quant au contrat avec la société Shine, il convient de relever qu’il a été conclu à l’occasion d’un contrat d’apport dix ans avant les faits incriminés et qu’au demeurant il a fixé le prix de l’apport à hauteur de 3 francs par produit et non à hauteur d’un pourcentage.

Quant à celui conclu avec les sociétés Bell, il s’inscrit dans la cadre d’une transaction mettant fin à un litige et portant sur un montant global de plus de 6 millions d’euros, la redevance fixée s’inscrivant comme une modalité de paiement du solde de l’indemnité transactionnelle.

En conséquence aucun de ces éléments n’est pertinent pour fixer le montant de la redevance entre 1 et 4%.

Toutefois le produit en cause concerne le domaine des loisirs et en partie les enfants ; si le loisirs du vélo a connu un développement important, les produits y afférents dont les casques se trouvent soumis à une forte concurrence ; en conséquence de l’ensemble de ces éléments la cour fixe à 6% le montant de la redevance, tenant compte de la majoration par rapport à un taux qui aurait été librement négocié entre les parties.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a a retenu un taux 8%.

L’expert a constaté que la société Knauer avait vendu les casques incriminés à la société Decathlon SA qui les a revendus à sa filiale, la société Decathlon France, et que cette dernière n’avait jamais été un client direct de la société Knauer ; en conséquence il importe peu que les casques soient les mêmes dès lors qu’ils ont donné lieu à des actes de fabrication , puis de vente et enfin de revente, le fabricant n’ayant pas de lien direct avec le distributeur de sorte que chacun doit être tenu à réparation au titre des actes de contrefaçon qui lui sont imputables.

La société Time Sport International est fondée à demander réparation par une redevance indemnitaire à chacune des deux sociétés présentes dans la cause ; en conséquence le jugement qui a statué par l’octroi d’une seule redevance indemnitaire sera infirmé sur ce point.

L’expert a relevé que la société Knauer avait réalisé un chiffre d’affaires de 1 039 523 € pour l’année 2007 lequel ramené à la période considérée peut être estimé à

808 518 € ; la redevance indemnitaire à sa charge sera en conséquence fixée à la somme de 42 451,02 €.

Il a retenu pour la société Decathlon un chiffre d’affaires de 2 146 568 € lequel ramené à la période considérée peut être estimé à 1 669 553€ ; la redevance indemnitaire à la charge de la société Decathlon France sera fixée à la somme de 100 173,18€.

Sur la période postérieure au 31 octobre 2007

Pour cette seconde période, Il y a lieu de faire application des dispositions l’article L615-7 du Code de la propriété intellectuelle qui impose au juge de prendre en considération les conséquences économiques négatives dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte.

En l’espèce comme il a été vu précédemment la société Time Sport International avait manifesté son intention de reprendre la fabrication de casques ; elle avait même investi dans un bail commercial de sorte qu’elle disposait de locaux adaptés à cette fin outre son savoir-faire antérieur.

Pour autant et quand bien même elle avait bénéficié d’un apport financier du fait de la transaction réalisée avec la société Bell qui s’était traduit par une indemnité conséquente dont elle avait souligné la nécessité pour mettre en oeuvre son projet, force est de constater qu’ il existait alors une offre importante de casques de vélo dont la plupart comprenait un réglage occipital via un système de molette ou de serrage distinct du dispositif breveté par elle, d’autres étant munis de son système puisque à compter du 1er juin 2007 elle avait consenti aux sociétés Bell Sports et Eaton- Bell une licence moyennant le paiement d’une redevance annuelle forfaitaire de 50 000€ payable de 2007 à 2014, sans limite de quantités ; or la société Time Sport International avait incriminé la société Bell commre contrefacteur et comme étant alors à l’origine de la cessation de son activité de fabrication ; ces circonstances dont le rétablissement de la société Bell comme licencié, ont créé une situation de concurrence de nature à expliquer un abandon de son projet de fabrication par la société Time Sport International.

Si cette dernière a produit auprès de l’expert un document intitulé 'stratégie d’affaires dans le domaine du casque de vélo’ du 26 octobre 2007 et des échanges de courriels pour justifier de ses démarches de recherche en vue de la distribution de ses casques, elle a reconnu auprès de celui-ci que son projet reposait sur le référencement de toute sa gamme par la société Decathlon sans pour autant justifier de la moindre démarche tant auprès de la société Decathlon SA que de la société Decathlon France en vue d’obtenir celui-ci.

La société Decathlon France fait valoir que le projet de la société Time Sport International était irréaliste et qu’en tout état de cause son référencement restait totalement hypothétique ce qui n’est pas contestable.

L’expert a mentionné qu’en avril 2008 la société Time Sport International avait procédé à un chiffrage des investissements qui seraient nécessaires et construit un prévisionnel sur trois ans dont il n’a pas mis en cause la faisabilité sauf à constater, d’une part, que la société Time Sport International n’avait mis en oeuvre aucun investissement ni en matériel, ni en personnel , d’autre part qu’elle avait dû faire face à des difficultés financières à compter de l’exercice clos le 30 juin 2008, ayant enregistré une perte de 3,3 millions d’euros ; la société Time Sport International a en effet engagé en 2008 une procédure de conciliation devant le tribunal de commerce de Vienne , puis en 2009 une procédure de restructuration avec licenciement économique, procédures au terme desquelles il était prévu un échéancier pour les dettes à court terme et l’obtention de nouveaux concours financiers ; au regard de ces difficultés, la société Time Sport International ne rapporte pas la preuve qu’elle aurait été en mesure de financer les investissements nécessaires à son projet, ni même qu’elle ait alors tenté de poursuivre sa réalisation pour les résoudre.

En conséquence la société Time Sport International ne démontre pas l’existence d’un projet abouti de relance de son activité antérieure qui aurait été interrompu par des actes de contrefaçon imputables notamment aux sociétés Knauer et Decathlon France .

Il n’empêche qu’aux termes de l’article L615-7 doivent être pris en compte les bénéfices réalisés par les contrefacteurs pour évaluer les dommages et intérêts à lui allouer.

La société Decathlon fait valoir que la contrefaçon n’ayant porté que sur un 'dispositif de fixation occipitale réglable d’un casque de cycliste et plus particulièrement d’un adepte du vélo tout terrain ', le préjudice doit être apprécié non pas sur le prix de vente du casque mais sur la plus value ainsi apportée .

Il convient de relever que, si le système breveté n’est pas détachable des casques sur lesquels il est intégré et qu’il s’agit dès lors d’un tout fabriqué par la société Knauer et commercialisé par la société Decathlon, en revanche la société Time Sport International qui n’est pas fabriquant, ne peut revendiquer à son profit ce tout commercial  ; en conséquence il y aura lieu en tout état de cause de pondérer le montant des bénéfices réalisés par la société Decathlon France.

L’expert a retenu un taux de marge brute réalisée par la société Decathlon France de :

1 477 326 € pour les casque B’Twin

3 514 964 € pour les casques Ked

soit un total de 4 992 290 € ;

La société Decathlon France expose que les bénéfices à prendre en compte sont ceux correspondant à la marge nette, tout en admettant qu’elle ne tient pas de comptabilité analytique magasin par magasin, lui permettant de chiffrer précisément les charges variables à retenir ; il ne saurait néanmoins être contesté que la société Decathlon France a des charges variables notamment de fonctionnement ;

Les actes de contrefaçon ayant été réalisés par la société Decathlon France dans le cadre de son activité il y a lieu de prendre en considération le seul profit qu’elle en a tiré lequel correspond à sa marge nette.

La société Decathlon propose deux méthodes de prise en compte des charges.

Elle produit un calcul effectué par le cabinet d’audit et d’expertise financière Grant Thornton à partir de ses comptes annuels certifiés qui a pris en compte les charges liées au processus de vente en magasins, des coûts administratifs et une redevance de franchise versée à la société Decathlon SA à raison de quotes- parts selon des clés de répartition ; elle aboutit ainsi à une marge nette globale de 1 282 000€.

Selon une deuxième méthode basée sur des inducteurs de coûts, elle aboutit à une marge nette de 1 226 000 €.

La société Time Sport International ne formule aucune critique sur ces méthodes conduisant à évaluer la marge nette de la société Decathlon France et qui prennent en compte des charges propres à une entreprise de distribution.

Ces montants doivent être pondérés du fait que la contrefaçon porte sur un élément seulement des casques.

Par ailleurs, il convient de relever que la société Time Sport International à défaut d’exploitation de son brevet aurait pu percevoir une redevance pour exploitation de son brevet qui, calculée sur la base d’un chiffre d’affaires de 11 639 925au taux de 6% retenu pour la période antérieure, s’élève dès lors pour cette seconde période à la somme de 698 395,50€.

Au regard de la prise en compte de l’ensemble de ces éléments la cour fixera à la somme de 700 000€ le préjudice de la société Time Sport International.

La société Time Sport International formule une demande de 1 754 483€ à l’encontre de la société Knauer au titre du bénéfice réalisé par celle-ci au cours de cette seconde période.

La société Knauer prétend qu’en tant que grossiste elle réalise une marge brute très faible soit 4% qui est compensée par l’importance des quantités vendues.

L’expert a constaté que la société Knauer avait refusé de communiquer les quantités de casques Ked réellement vendus et le chiffre d’affaire correspondant ; il a relevé que celle-ci avait vendu au minimum 630 790 casques Ked à la société Decathlon SA et a déterminé un prix d’achat unitaire moyen au vu des bons de commande du casque Ked passée par la société Decathlon SA.

L’expert a réalisé une estimation sur la base d’un taux de marge brute identique à celui de la société Decathlon France soit un montant de 1 754 453€ ; toutefois, quand bien même les casques commercialisés sont les mêmes, les sociétés Knauer et Decathlon France n’ont pas la même activité, l’un étant grossiste fabricant et l’autre détaillant et au demeurant n’ont pas engagé de lien sur l’opération commerciale relative à ces casques ; la société Time Sport International ne saurait réclamer ce montant dès lors que celui-ci ne correspond pas au bénéfice de la société Knauer.

En conséquence, il y a lieu de calculer le préjudice de la société Time Sport International au regard de la redevance qu’elle aurait pu percevoir , soit sur le chiffre d’affaires réalisé au cours de cette période c’est à dire 477 015€ ( 2 146 568 – 1 669553€) en appliquant le taux de 6% et de le fixer à 28 620,90€.

Sur la demande de condamnation in solidum des sociétés Knauer et Decathlon France

La société Time Sport International s’appuie sur le jugement rendu le 7 septembre 2012 et l’arrêt de la Cour de céans du 16 décembre 2014 qui ont condamné les sociétés Knauer et Decathlon France à lui payer in solidum des dommages et intérêts provisionnels.

Ces décisions ont été rendues alors qu’aucun élément de nature à permettre d’évaluer le préjudice de la société Time Sport International n’avait été produit ce qui a conduit le tribunal, confirmé sur ce point par la cour, à ordonner une expertise et à fixer une provision sans distinguer les chefs de préjudice ;

Par ailleurs la société Time Sport International invoque la garantie due par la société Knauer au profit de la société Decathlon France pour justifier de sa demande ; or cette garantie résulte d’un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 22 mai 2015 auquel la société Time Sport International n’était pas partie et ne saurait avoir d’incidence sur l’imputabilité de l’indemnisation.

Les sociétés Knauer et Decathlon France n’ont pas eu de relation commerciale directe entre elles et la société Time Sport International ne saurait demander une condamnation in solidum de la société Decathlon France sur le fondement de griefs formulés à l’encontre de la société Knauer.

Sur le préjudice moral

La société Time Sport International formule une demande au titre d’un préjudice moral qu’elle fonde sur le caractère novateur de son invention, sur la ruine de ses espoirs de commercialisation et sur une atteinte à son image .

Pour autant comme il a été dit, les actes de contrefaçon n’ont pas constitué un obstacle à son expansion industrielle et à son positionnement en matière de fabrication de casques de vélo .

Son préjudice est constitué d’une atteinte à la valeur économique du titre qu’elle avait acquis sans qu’elle rapporte la preuve d’un préjudice moral.

En conséquence il y a lieu d’infirmer le jugement et de la débouter de sa demande de réparation d’un préjudice moral.

Sur la liquidation de l’astreinte

La société Time Sport International demande à la cour de condamner la société Decathlon à lui payer la somme de 1 324 500€ Au titre de l’astreinte prononcée par le tribunal .

Le jugement rendu le 7 septembre 2012, avait notamment ordonné la destruction sous astreinte des casques présents au sein de la société Decathlon précisant qu’il ordonnait l’exécution provisoire sauf en ce qui concerne les mesures de destruction et de publication.

Cette mesure a été confirmé par l’arrêt de la cour d’appel du 16 décembre 2014 qui a rejeté la demande de liquidation de l’astreinte .

La société Decathlon France démontre que le stock de casques contrefaisants est entreposé dans les locaux de la société Fandi Emballages ; si elle a bénéficié d’un avoir de sa société mère pour ce stock , cette opération s’analyse comme une annulation de la vente des casques devenus impropres à la commercialisation et non comme un acte de commercialisation

Au demeurant la liquidation de l’astreinte relève de la compétence du juge de l’exécution et la demande de la société Time Sport International est dès lors irrecevable.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile

La société Time Sport International ayant dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif .

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré.

CONSTATE que la société Time Sport International n’exploitait pas son brevet.

CONDAMNE la société Decathlon France à payer à la société Time Sport International les sommes de :

—  100 173,18 € au titre de la période du 1er avril au 31 octobre 2007

—  700 000 € au titre de la période du 1er novembre 2007 au 8 septembre 2012.

CONDAMNE la société D-H-G Knauer à payer à la société Time Sport International les sommes de :

—  42 451,02 € au titre de la période du 1er avril au 31 octobre 2007

—  28 620,90 € au titre de la période du 1er novembre 2007 au 8 septembre 2012.

CONDAMNE les sociétés D-H-G Knauer et Decathlon France in solidum à payer à la société Time Sport International la somme de 10 000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

REJETTE toute toute demande.

CONDAMNE les sociétés D-H-G Knauer et Decathlon France in solidum aux dépens.

La Greffière La Présidente

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 2, 22 septembre 2017, n° 16/14377