Cour d'appel de Paris, 9 mai 2018, n° 17/05620

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 9 mai 2018, n° 17/05620
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/05620

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n°17/05620

Extrait des minutes du Secrétariat Greffe de la Cour d’appel de Paris

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 Chambre 7

Arrêt n° 180 (11 pages)

Prononcé publiquement le mercredi 9 mai 2018, par le Pôle 2 – Chambre 7 des appels correctionnels,

Sur appel d’un jugement du tribunal de grande instance de Paris – 17ème chambre – du 3 mai

2017 (P16204000172).

PARTIES EN CAUSE :

Prévenu

A B, X, Y Né le […] à POISSY, YVELINES (78) Fils de A AF et de C D

De nationalité française

Ayant élu domicile chez Me E F demeurant […]

Intimé, COPIE CONFORME Comparant, assisté de Maître PICHON Frédéric-Michel, avocat au barreau de délivrée le : 23.05.18 PARIS, vestiaire E 1397

à Me PiCHON – E 1397

MINISTÈRE PUBLIC Appelant principal COPIE CONFORME délivrée le : 25.05.18

Parties civiles à Me BOYER. G193

ASSOCIATION LIGUE CONTRE LE RACISME ET

L’ANTISEMITISME

Ayant élu domicile chez Me G H demeurant […], Représentée par Maître BOYER Caroline, avocat au barreau de PARIS, RACISME ET L’ANTISEMITISME vestiaire G0190 le 14 mai 2018

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Ats



ASSOCIATION LIGUE FRANCAISE DES DROITS DE L’HOMME

ET DU CITOYEN

Ayant élu domicile chez Me I J demeurant […]

de la LIGUE FRANCAISE Appelante, Représentée par Maître I J, avocat au barreau de PARIS, vestiaire DES DROITS DE L’HOMME ET E1899

DU CITOYEN le 14 mai 2018.

Composition de la cour lors des débats et du délibéré :

G PIC CONFORME président : AB-AC AD, présidente de chambre délivrée le : 25.05.18 B DILLANGE, président de chambre assesseurs :

Sophie-Hélène CHATEAU, conseillère ane I-E1899

Greffier

U V W AA aux débats et au prononcé,

Ministère public représenté aux débats et au prononcé de l’arrêt par Nathalie SAVI, avocat général

LA PROCÉDURE:

La saisine du tribunal et la prévention

B A a été poursuivi devant le tribunal par voie de citation directe à la requête du procureur de la République en date du 24 janvier 2017 sous la prévention :

1-d’avoir à Paris, le 18 juillet 2016, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, par la mise en ligne sur le site internet de Riposte laïque d’un article intitulé « Pour éviter le génocide des Français, il faut expulser les musulmans » comportant les propos suivants :

« Si rien n’est fait aujourd’hui pour mettre fin à l’invasion musulmane de nos pays occidentaux, les musulmans feront en France, et plus largement en Europe, dans 20 ou 30 ans, ce qu’ils font en ce moment en Syrie et en Irak: ils décapiteront par milliers les Européens et réduiront par milliers les Européennes en esclavage L’Etat Islamique a clairement annoncé que son but est de réaliser un génocide en Occident et d’exterminer les 500 millions d’Européens. Mais ce but est celui de tous les musulmans pratiquants, puisque le coran dit aux musulmans d’exterminer tous les non-musulmans.

(…)

Pour éviter ce génocide annoncé, il n’y a qu’une solution : l’islam doit être éradiqué de notre pays, et tous les musulmans expulsés '> « Ces attentats, qui se multiplient dans tous les pays occidentaux, prouvent, une fois de plus, que nous ne sommes nulle part en sécurité, tant qu’il y a des musulmans à proximité de nous. N’importe quand, n’importe où, un musulman peut se ruer sur nous

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et tenter de nous décapiter, ou nous tirer dessus à l’arme automatique, ou faire exploser la bombe qu’il porte sur lui. »

< Depuis des années, nous dénonçons le danger mortel que les musulmans font peser sur tous les Français. Depuis des années, nous dénonçons les dirigeants de la France, qui laissent une immigration musulmane massive submerger notre pays et qui refusent de lutter contre la barbarie musulmane.

Depuis des années, nous exigeons l’expulsion des musulmans hors de notre pays, afin de protéger la vie des citoyens français '>

« Il faut protéger les Français contre les musulmans »

«Ainsi, les non-musulmans ne sont nulle part en sécurité, tant qu’il y a des musulmans, tueurs potentiels, aux alentours. Il y a urgence à protéger les citoyens français (…) Il y a urgence à empêcher l’extermination des Français Il y a urgence à expulser les musulmans hors de France »

« Un musulman extrémiste veut vous assassiner.

Un musulman modéré veut qu’un musulman extrémiste vous assassine. »

« Le coran prônant l’assassinat et la décapitation des non-musulmans, les millions de musulmans, qui envahissent nos pays occidentaux avec la complicité criminelle de nos dirigeants, sont de véritables bombes à retardement, prêtes à exploser n’importe quand et n’importe où, et à massacrer des hommes, des femmes et des enfants français à tout moment et en tout lieu.

En ce moment même, dans toutes les villes de France, des musulmans rêvent de bondir sur nous pour nous massacrer. De plus en plus d’entre eux passeront bientôt à l’acte, encouragés par la scandaleuse trahison de Hollande, de Valls et de Cazeneuve, qui préfèrent favoriser la construction de mosquées et rompre le jeûne du ramadan avec des imams plutôt que de nous protéger contre les assassins musulmans. »

« Il n’y a qu’une solution : expulser tous les musulmans '>

«Tant qu’il y aura des musulmans en France, tout Français, toute Française, pourra être poignardé, étranglé, abattu, écrasé, égorgé, décapité, éventré, […], lapidé, pendu, fusillé, massacré, assassiné, n’importe quand, n’importe où. »

« Nous ne serons pas en sécurité tant que des musulmans demeureront en France. Les crimes nazis ne cessèrent qu’après l’expulsion des nazis hors de France. Les crimes musulmans ne cesseront qu’après l’expulsion des musulmans hors de

France. »

provoqué publiquement à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur appartenance ou non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée,

faits prévus et réprimés par les articles 23 alinéa I et 24 alinéa 7 de la loi du 29 juillet 1881.

2-d’avoir à Paris, le 19 juillet 2016, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, par la mise en ligne sur le site internet de Riposte laïque d’un article intitulé « Attentat à la hache dans un train allemand : musulmans dehors » comportant les propos suivants :

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«Nous ne pouvons pas tolérer de voir nos pays se remplir de ces bêtes sauvages qui, n’importe où et n’importe quand, se jettent sur nous pour nous assassiner, avec des couteaux, des haches, des armes à feu, des bombes ou des poids lourds. Nous n’acceptons pas d’être, les uns après les autres, écrasés, poignardés, abattus, égorgés, éventrés, fusillés, décapités, déchiquetés, pendus, étranglés, lapidés, massacrés, par les musulmans qui ont envahi nos pays avec la complicité de nos dirigeants scélérats. (…) Il faut expulser l’islam et les musulmans.

Comme nous le disions dans notre article précédent, il n’y a qu’une solution pour éviter la guerre civile et le génocide des Français : il faut expulser l’islam et les musulmans hors de notre pays Sinon, nous n’aurons bientôt plus de pays… ni de vie »

provoqué publiquement à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur appartenance ou non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, faits prévus et réprimés par les articles 23 alinéa 1 et 24 alinéa 7 de la loi du 29 juillet

1881.

3- de ne pas avoir à Paris, entre le 18 juillet 2016 et le 21 novembre 2016, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant président de l’association Riposte laïque, dont le site internet est accessible à l’adresse http://www.ripostelaique.com, respecté les prescriptions de l’article 6-III-1 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, en ne mettant pas à disposition du public dans un standard ouvert les données d’identification du directeur de la publication du site internet www.ripostelaique.com,

faits prévus et réprimés par l’article 6-III-1 et 6-VI-2 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique.

Le jugement

Le tribunal de grande instance de PARIS, par jugement contradictoire en date du 3 mai

2017:

Sur l’action publique

- a rejeté l’exception d’incompétence territoriale soulevée en défense;

- a rejeté l’exception de nullité soulevée en défense ;

- a renvoyé B A des fins de la poursuite;

Sur l’action civile

- a reçu la constitution de partie civile des associations LIGUE CONTRE LE RACISME ET L’ANTISEMITISME (LICRA) et LIGUE FRANÇAISE DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN (LDH), ainsi que de quatre autres associations ;

-les a déboutées de l’ensemble de leurs demandes.

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Les appels

Appel a été interjeté par :

- le procureur de la République, le 15 mai 2017 contre B A, étant précisé que l’appel porte sur l’ensemble des dispositions pénales

- le conseil de LA LIGUE FRANCAISE DES DROITS DE L’HOMME ET DU

CITOYEN, le 16 mai 2017, étant précisé que l’appel est dirigé contre B A

- le conseil de l’ASSOCIATION LA LIGUE CONTRE LE RACISME ET

L’ANTISEMITISME, le 16 mai 2017 contre B A.

Les arrêts interruptifs de prescription

Par arrêts interruptifs de prescription en date du 12 octobre 2017, du 22 novembre

2017 et du 24 janvier 2018, l’affaire était fixée pour plaider à l’audience du 21 mars

2018.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

À l’audience publique du 21 mars 2018, le président a constaté l’identité du prévenu.

Le président a informé le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

Maître PICHON Frédéric-Michel, avocat du prévenu a déposé des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et le greffier, jointes au dossier.

Maître I J et Maître BOYER Caroline, avocats des parties civiles, ont déposé des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et le greffier, jointes au dossier.

Ont été entendus :

Sur les exceptions

Maître PICHON, avocat du prévenu, en ses conclusions et plaidoirie sur l’incompétence territoriale et les nullités,

Me BOYER, avocat de la partie civile LA LIGUE CONTRE LE RACISME ET L’ANTISEMITISME, en ses conclusions et plaidoirie, sur l’incompétence territoriale,

Me I, avocat de la partie civile LA LIGUE FRANCAISE DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN, en ses conclusions et plaidoirie, sur les nullités,

L’avocat général en ses réquisitions sur les exceptions,

Maître PICHON, avocat du prévenu, ayant eu la parole en dernier ;

Après en avoir délibéré, la cour a décidé de joindre les incidents au fond sur le fondement de l’article 459 de code de procédure pénale ;

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Sur le fond

AB-AC AD a été entendue en son rapport,

Le prévenu B A en ses interrogatoire et moyens de défense,

Me BOYER, avocat de la partie civile LA LIGUE CONTRE LE RACISME ET L’ANTISEMITISME, en ses conclusions et plaidoirie,

Me I, avocat de la partie civile LA LIGUE FRANCAISE DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN, en ses conclusions et plaidoirie,

Le ministère public en ses réquisitions, tendant à la condamnation du prévenu à une amende de 5.000 €,

Maître PICHON, avocat du prévenu, en ses conclusions et plaidoirie sollicitant la confirmation du jugement,

Le prévenu B A a eu la parole en dernier.

Puis la cour a mis l’affaire en délibéré et le président a déclaré que l’arrêt serait rendu à l’audience publique du 9 mai 2018.

A cette date, en application des articles 485, 486 et 512 du code de procédure pénale, en présence du ministère public et du greffier, AB-AC AD, président ayant assisté aux débats et au délibéré, a donné lecture de l’arrêt.

DÉCISION:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

EN LA FORME

Le prévenu a comparu avec l’assistance de son avocat, tandis que les parties civiles étaient représentées par leurs conseils.

L’arrêt sera contradictoire à leur égard.

Les appels ont été interjetés dans les formes et délais de la loi ; ils seront donc déclarés recevables.

Sur l’exception d’incompétence territoriale

Le conseil de B A soutient que le site internet ripostelaique.com étant domicilié en Suisse, l’acte de publication a été commis à partir du territoire suisse et que les juridictions françaises sont territorialement incompétentes au visa de l’article 113-2 alinéas 1 à 5 du code pénal.

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Comme les parties civiles et le ministère public le font valoir, le jugement sera cependant confirmé en ce qu’il a rejeté cette exception, dès lors que les propos poursuivis publiés sur internet sont non seulement accessibles sur le territoire français, mais qu’il s’y ajoute un critère de rattachement certain avec la France puisque les textes, rédigés en français, comportent de nombreuses références directes à la France et aux Français et sont bien destinés aux internautes se connectant depuis le territoire français.

Sur la violation du secret de l’enquête et de l’instruction

Au visa des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 11 du code de procédure pénale, 226-13 et 226-14 du code pénal, l’avocat du prévenu sollicite l’annulation des pièces du dossier issues d’une procédure d’instruction parallèle et obtenues sans autorisation préalable du juge d’instruction.

A cet égard, le tribunal correctionnel avait distingué deux cas. Quant aux pièces paginées de 22 à 54, issues d’une procédure diligentée sur commission rogatoire du 23 mars 2015, pour lesquelles l’autorisation du juge d’instruction compétent avait été sollicitée et obtenue, la nullité de ces pièces n’est plus invoquée devant la cour.

Elle le demeure pour les pièces paginées 61 à 72, issues de la procédure diligentée dans le cadre de la commission rogatoire délivrée le 18 décembre 2015 par Mme Z, juge d’instruction, qui ont été annexées au présent dossier sans que l’accord de cette dernière n’ait été recueilli.

Les premiers juges ont retenu à ce titre que « la violation du secret de l’instruction ne saurait engendrer une quelconque nullité de procédure, la seule voie de réparation, pour la personne s’en disant victime, étant celle prévue à l’article 9-1 du code de procédure civile » (en réalité code civil).

Il y a lieu de considérer que le manquement invoqué en défense n’est pas extérieur à la présente procédure -puisque les documents litigieux y sont joints-, mais qu’il n’en est résulté aucune atteinte prouvée aux intérêts du prévenu. En effet, les recherches en question ont été effectuées sur un ordinateur portable saisi au domicile de B A et ont donné lieu à un rapport daté du 16 avril 2016, relevant un grand nombre de liens montrant un accès à la console d’administration du site litigieux entre le 27 août 2015 et le 3 avril 2016, soit antérieurement aux faits visés à la présente prévention.

L’exception de nullité sera donc rejetée.

AU FOND

Les faits

Le ministère public ordonnait une enquête à la suite du signalement effectué le 22 juillet 2016 par la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme (DILCRA), relatif à deux articles publiés les 18 et 19 juillet 2016 sur le site internet www.ripostelaique.com, signés « Maxime Lépante » et intitulés :

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< Pour éviter le génocide des Français, il faut expulser les musulmans !» « Attentat à la hache dans un train allemand : musulmans dehors !»

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Les services de police constataient le 19 août 2016 que ces articles étaient toujours en ligne et que les informations fournies par le site étaient les suivantes : depuis le 12 octobre 2012, le site est placé sous la responsabilité de l’association Riposte laïque Suisse,

- le responsable du site est désigné comme étant K L,

- le seul lien de contact mentionné est ripostelaique@orange.fr.

Au courriel envoyé par les enquêteurs à cette adresse, «< T L » répondait seulement, < purement par courtoisie », que la date de la publication et le nom de l’auteur de l’article étaient corrects.

L’adresse IP de < T L » faisait l’objet d’investigations, dont il ressortait que son titulaire était l’association Riposte laïque Suisse située à Lucerne, que les prélèvements pour l’abonnement étaient effectués sur un compte suisse et que le contact était M N, qui répondait aux enquêteurs ne pas être concernée par le dossier, n’étant plus présidente de Riposte laïque Suisse depuis le 11 juin 2014.

Il ressortait par ailleurs des pièces résultant d’une autre procédure versées à l’enquête avec l’autorisation du juge d’instruction, que :

-le 20 octobre 2012 l’assemblée générale de Riposte laïque avait décidé de transférer la publication du journal électronique à l’association Riposte laïque Suisse;

- B A avait été désigné président de Riposte laïque le 9 novembre 2012 et reconduit dans ses fonctions le 7 décembre 2013; il était le titulaire du compte Paypal dont les coordonnées figuraient sur le site www.ripostelaique.com à la date du 8 septembre 2015;

- l’adresse de contact ripostelaique@orange.fr renvoyait à lui, selon l’opérateur Orange, cette adresse étant une adresse secondaire et l’adresse principale étant pcassen@orange.fr, les prélèvements étant opérés sur un compte ouvert à son nom à la CRCAM de Paris et d’Ile de France, dans une agence de Triel sur Seine, commune où il résidait.

Les recherches effectuées afin d’identifier la personne répondant au pseudonyme de « Maxime Lépante » ne donnaient aucun résultat.

SUR CE

Sur l’action publique

Les parties civiles comme le ministère public demandent à la cour de retenir B A dans les liens de la prévention en ce qu’il aurait dirigé de fait le site www.ripostelaique.com sur lequel les propos incriminés ont été publiés, en se fondant notamment sur les éléments tirés de l’adresse de contact du site, de l’utilisation du compte Paypal et du nombre de ses connexions.

Sur le fond des propos, ils font observer que la virulence de ceux-ci ne laisse aucun doute sur la caractérisation de l’infraction, l’avocat général soulignant qu’ils contiennent une exhortation explicite à la discrimination envers les musulmans.

B A conteste en particulier être le directeur de publication du site www.ripostclaiquc.com.

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Le jugement rappelle que devant le tribunal correctionnel, il s’expliquait, tout d’abord, sur l’articulation des responsabilités respectives entre les associations Riposte laïque et Riposte laïque Suisse, soulignant que seule cette dernière s’occupait désormais du site internet, lui-même ayant choisi de se consacrer à la publication d’ouvrages et aux conférences. Il indiquait, par ailleurs, ne pas être le seul à disposer des codes d’accès au site, ceux-ci étant attribués à au moins une dizaine de contributeurs. Il refusait de

s’exprimer sur le fond des propos poursuivis, mais déclarait néanmoins qu’à son sens les articles de «Maxime Lépante » manquaient de nuances et qu’il ne les aurait sans doute pas publiés, même s’il n’avait pas d’hostilité de principe à l’expulsion des musulmans voulant imposer la charia en France. Enfin, il s’indignait des poursuites engagées à son encontre.

Devant la cour, B A a maintenu ses explications, précisant notamment qu’il n’était à présent que secrétaire de l’association Riposte laïque France, qu’il lui arrivait d’écrire des textes, qu’il faisait partie de la trentaine de personnes disposant des codes d’accès au site, qu’il travaillait sur le site, mais n’en avait pas la responsabilité. Lorsque le compte Paypal suisse avait été bloqué, il avait donné son accord pour que le sien continue à être utilisé ; il expliquait, d’une part, les changements fréquents de président de Riposte laïque Suisse par la tradition suisse méfiante d’un pouvoir permanent et, d’autre part, l’accumulation de plaintes en France depuis la reprise du site par les Suisses par la tradition plus permissive de ce pays. Il confirmait que personnellement, il aurait sollicité l’auteur des textes pour ne pas les publier en ces termes, tout en pensant que l’islam est incompatible avec les valeurs de la République. L’avocat de la défense a notamment précisé que l’incident de paiement sur le compte Paypal suisse remontait à 2014 et que Riposte laïque France utilise un compte Paypal pour son activité éditoriale.

Sur le rôle du prévenu, les premiers juges ont considéré que même si plusieurs indices, « notamment, le fait que l’adresse de contact indiquée sur le site soit une adresse secondaire de B A, que les changements de présidence de l’association Riposte laïque Suisse se succèdent à un rythme effréné ou que ses présidents successifs soient, fréquemment, domiciliés dans des Etats où la mise en oeuvre de procédures de coopération judiciaire est à la fois lourde et souvent vouée à l’échec peut légitimement jeter un doute sur l’effectivité des fonctions de directeur de publication des présidents de Riposte laïque Suisse, il n’en demeure pas moins qu’en l’état actuel des investigations, il n’est pas démontré que B A soit, de fait, sinon de droit, le directeur de publication du site www.ripostelaique.com et, partant, puisse être considéré comme auteur, au sens de la loi du 29 juillet 1881, des propos incriminés. »

Pour prononcer sa relaxe, ils ont à juste titre retenu les différents éléments versés au dossier par le prévenu révélant que :

- l’assemblée générale extraordinaire de Riposte laïque du 20 octobre 2012, dont le procès-verbal, signé par le président et la trésorière, est produit en défense, a bien constaté le transfert de la publication du journal électronique de Riposte laïque à l’association Riposte laïque Suisse, Riposte laïque France se consacrant alors « à la défense et la promotion de la laïcité au moyen de la publication de livres et en organisant des réunions d’information ou des conférences » ;

- les statuts de Riposte laïque Suisse, en date du 5 septembre 2012, prévoient en leur article 3 que « cette association a pour objectif d’informer dans le but de défendre et de promouvoir la laïcité y compris par la publication du journal en ligne Riposte Laïque »;

- le président de Riposte laïque Suisse lors de la publication des propos litigieux était K T L nommé le 3 juillet 2016 et remplacé à ce poste le 16 février 2017 par P Q;

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les présidents successifs de Riposte laïque Suisse ont attesté avoir exercé les responsabilités de directeur de publication du site www.ripostelaique.com ;

- plusieurs personnes ont précisé dans des attestations disposer des codes et mots de passe permettant de publier leurs textes, les mettre à jour, les illustrer ou les corriger; dans un jugement rendu le 6 avril 2016 par la 17ème chambre du tribunal de grande instance de Paris, il a été relevé qu’ AE AF-AG, alors président de Riposte laïque Suisse, avait confirmé à deux reprises aux enquêteurs être, à ce titre, le directeur de publication du site concerné; il a été condamné en cette qualité pour des propos publiés sur ce site le 19 octobre 2014, ce jugement ayant été confirmé par arrêt de la cour d’appel de Paris du 14 septembre 2017.

Certes, les parties civiles invoquent également des jugements rendus le 5 octobre 2017 par la même 17ème chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris qui a déclaré B A coupable pour d’autres articles publiés sur le même site; il sera toutefois constaté que ces décisions ont été prises alors que le prévenu n’avait pas comparu à l’audience, que le tribunal correctionnel a rejeté la demande de réouverture des débats présentée en défense et qu’il n’a pas examiné les pièces produites par le conseil de B A, un de ces jugements ayant été frappé d’appel et une opposition ayant été formée contre un autre.

Ainsi, de l’ensemble des éléments du dossier et des débats, il résulte principalement que : le journal électronique en question a été fondé en 2007 à l’initiative de B 1

A et R S, décédée en 2013;

- le prévenu a exercé un certain temps la fonction de directeur de publication du site ripostelaique.com, qui diffusait ce journal, et il a été condamné à ce titre le 5 juin 2014 pour des propos publiés en octobre et décembre 2010, seule mention figurant à son casier judiciaire ; pour la période visée à la présente prévention, à savoir du 18 juillet 2016 au 21 novembre 2016, il n’est nullement établi, avec la certitude nécessaire au prononcé d’une condamnation pénale, que B A serait encore le directeur de publication ou le responsable, en droit ou en fait, de ce site, ni qu’il serait le dirigeant de droit ou de fait de l’association suisse, qui édite le site situé à l’étranger;

- aux dates fixées par la poursuite, la participation personnelle de B A à la gestion du site ripostelaique.com n’est pas davantage démontrée, en l’état, pas plus qu’une quelconque participation à la mise en ligne ou à la rédaction des propos incriminés.

En conséquence, le prévenu doit être renvoyé des fins de la poursuite.

Sur l’action civile

La LICRA sollicite l’infirmation du jugement et la condamnation du prévenu au paiement des sommes de 2.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi, de 1.500 € (première instance) et 1.500 € (en cause d’appel) sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale, ainsi qu’aux dépens.

La LDH demande les sommes de 10.000 € à titre de dommages-intérêts et de 4.000 € en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

Il y a également lieu de confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a déclaré recevables ces deux associations appelantes en leur constitution de partie civile et en ce qu’il les a déboutées de l’ensemble de leurs demandes compte tenu de la relaxe intervenue.

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PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare recevables les appels formés par le ministère public et les deux parties civiles,

Confirme le jugement du tribunal correctionnel de Paris (17ème chambre) en date du 3 mai 2017 en toutes ses dispositions.

Le présent arrêt est signé par AB-AC AD, président, et par U V W AA, greffier.

DE APOUR COPIE CERTIFIÉE CONFORME LE PRÉSIDENT LE GREFFIER

Le Greffier en ChefDIL

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